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N° J 17-84.900 F-D
N° 2710
SM12
27 NOVEMBRE 2018
REJET
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
– Mme Huguette X…,
– L’association Front National, parties civiles,
contre l’arrêt de la cour d’appel de PARIS, chambre 2-7, en date du 15 juin 2017, qui, dans la procédure suivie contre M. Laurent Y… ( dit Laurent Z…) du chef de diffamation publique envers un particulier, a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 16 octobre 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme G…, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de Mme le conseiller G…, les observations de la société civile professionnelle LE GRIEL, la société civile professionnelle GADIOU ET CHEVALLIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général A… ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen, de cassation, pris de la violation des articles 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, 23, 29, 32 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a confirmé en ses dispositions civiles le jugement du tribunal correctionnel de Paris du 20 octobre 2016 ayant renvoyé M. Laurent Y…, dit Laurent Z…, des fins de la poursuite du chef de diffamation publique envers un particulier, au bénéfice de la bonne foi, et débouté Mme Huguette X… de ses demandes indemnitaires ;
“aux motifs que Mme X… « reproche à l’auteur de l’article d’avoir donné une part excessive aux propos de M. Jean-Claude B… dans le livre précité, “Marine H… démasquée”, rappelant sans être contredite qu’elle a été l’assistante parlementaire de l’intéressée depuis 1992, date à laquelle Mme H… n’avait pas d’enfant » ; qu’« elle produit deux attestations de personnes établissant la réalité de son travail auprès de M. B…, ainsi que le témoignage de la nourrice des enfants de Mme H… ; que de ces pièces elle retient que, si elle ne conteste pas avoir gardé les enfants de son amie, il s’est agi d’un service amical et non d’une activité professionnelle », qu’« elle considère enfin que si, dans le cadre de poursuites en diffamation contre le livre de Mmes C… et D…, M. B… a été expressément relaxé au titre des propos la concernant, cette décision ne saurait justifier qu’elle soit à nouveau diffamée », que « de fait, M. Z… a mis en avant cette décision et notamment le fait, qu’elle a fondé sa motivation sur la bonne foi des auteures, tant sur les propos rapportés de M. B… que sur le rapprochement avec ceux de Marine H… dans son autobiographie, quant à l’aide apportée par Mme X… lors de la naissance de ses jumeaux » ; que « la cour n’est certes pas liée par ce précédent, mais les éléments de motivation rappelés ci-avant, n’en sont pas pour autant dénués de pertinence ; qu’« aussi, dans le contexte d’une polémique spécifique du sujet traité, la convergence des statuts professionnel et personnel de Mme X…, mérite au moins une interrogation, alors que Mme H… s’exprime dans le même temps de façon péremptoire sur les irrégularités supposées de ses adversaires politiques dans la gestion de leurs propres assistants personnels » ; que « dans ce contexte les propos d’Yves E… demeurent en la forme dans les limites de la liberté d’expression » ;
“1°) alors que si elle a relevé qu’elle n’était pas liée par la décision ayant relaxé M. B… du chef de diffamation, au bénéfice de la bonne foi, pour ses propos rapportés dans le livre « Mme H… démasquée » de Mmes D… et C… (jugement du tribunal correctionnel de Paris du 9 octobre 2012) mais que « les éléments de motivation rappelés ci-avant n’en sont pas pour autant dénués de pertinence », la cour d’appel n’a, en réalité, rappelé auparavant aucun élément de la motivation de cette décision et qu’elle n’a donc pas légalement justifié sa décision quant à la condition d’une enquête sérieuse ou d’une base factuelle suffisante nécessaire à l’admission de l’exception de bonne foi ;
“2°) alors qu’en relevant que « la convergence des statuts professionnel et personnel d’Huguette X… mérite au moins une interrogation », la cour d’appel s’est déterminée par un motif inopérant à caractériser la condition d’une enquête sérieuse ou d’une base factuelle suffisante, dès lors que l’auteur des propos incriminés ne s’interroge nullement sur cette « convergence de statuts » mais affirme, sans réserve ni précaution, que Mme H… a fait de la baby-sitter de ses enfants (Huguette X…) une assistante parlementaire « en toute impunité » et « en toute opacité » et que celle-ci a ainsi bénéficié d’un « emploi fictif » ;
“3°) alors qu’en relevant que « Mme H… s’exprime dans le même temps de façon péremptoire sur les irrégularités supposées de ses adversaires politiques dans la gestion de leurs propres assistants personnels », la cour s’est déterminée par un motif à la fois imprécis, en ce qu’elle ne précise pas l’origine de la constatation de fait à laquelle elle se livre, et inopérant, en ce que cette constatation n’est pas de nature à faire admettre la bonne foi de l’auteur des propos incriminés ;
“4°) alors que la cour d’appel s’est abstenue de rechercher si l’auteur des propos incriminés avait fait preuve de prudence et de mesure dans l’expression, élément constitutif indispensable de l’exception de bonne foi et que la cour devait d’autant plus se livrer à cette recherche que Mme X… avait invoqué, dans ses conclusions, le caractère péremptoire de l’imputation d’emploi fictif et l’absence de toute prudence dans l’expression, ne serait-ce que par l’emploi du conditionnel” ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 10 de la convention européenne des droits de l’homme, 23, 29, 32 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a confirmé en ses dispositions civiles le jugement du tribunal correctionnel de Paris du 20 octobre 2016 ayant renvoyé M. Y…, dit Laurent Z…, des fins de la poursuite du chef de diffamation publique envers un particulier, au bénéfice de la bonne foi, et débouté Mme X… de ses demandes indemnitaires ;
“aux motifs que « les observations qui précèdent trouvent tout autant à s’appliquer à celui-ci, par le seul rapprochement des nombreux articles de presse consacrés à l’affaire « I… » antérieurement à l’article litigieux et de la production de l’arrêt qui a mis fin à cette affaire en constatant la dette du Front National à l’égard de ce créancier. Les pressions et menaces dont ce dernier aurait été, selon lui, victime étant largement décrites dans les articles précités » ;
“1°) alors que ni une décision de justice « constatant la dette du Front National à l’égard de ce créancier, M. Fernand I… » ni la simple allégation formulée par M. I… d’avoir subi des menaces et pressions de la part du Front National pour qu’il ne réclame pas le remboursement de la totalité des prêts qu’il lui avait consentis ne sauraient donner une base factuelle à l’imputation diffamatoire selon laquelle le Front National aurait commis une « escroquerie sans nom » à l’encontre de M. I… ;
“2°) alors que tous les articles de presse produits par M. I… et visés par la cour d’appel font état de la demande en justice de celui-ci en remboursement de certains des prêts consentis au Front National et destinés à financer le matériel de campagne électorale acheté par ce parti à une société d’imprimerie appartenant à M. I… , ou de l’arrêt de la cour d’appel condamnant le Front National à payer à M. I… une certaine somme au titre du remboursement de ces prêts, que quelques-uns de ces articles, se référant tous au livre de Mmes Caroline D… et J…C…
« Marine H… démasquée », font état de ce qu’un expert requis par M. I… et l’avocat de celui-ci avaient évoqué une « tentative d’extorsion de fonds » ou de ce que M. I… avait prétendu avoir subi des menaces et des pressions et que, dès lors, ces articles de presse ne permettent pas de donner une base factuelle suffisante à l’imputation diffamatoire selon laquelle le Front National aurait commis une « escroquerie sans nom » à l’encontre de M. I… ;
“3°) alors que la cour d’appel s’est abstenue de rechercher si l’auteur des propos incriminés avait fait preuve de prudence et de mesure dans l’expression, élément constitutif indispensable de l’exception de bonne foi, et que la cour devait d’autant plus se livrer à cette recherche que l’association Front National avait invoqué, dans ses conclusions, le caractère péremptoire et appuyé de l’imputation d’escroquerie (« escroquerie sans nom ») et l’absence de toute mesure et de toute prudence dans l’expression” ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du jugement qu’il confirme et des pièces de la procédure que, le 28 février 2014, le site internet Nouvelobs.com a publié un article intitulé « Affaire F… : Marine H… est culottée de donner des leçons de morale » et signé par M. E…, en qualité de « Ex-MoDem, prof, auteur »; que, par acte du 27 mai 2014, Mme X… et l’association Front National ont fait citer devant le tribunal correctionnel, M. Y…, dit Laurent Z…, en sa qualité de directeur de la publication de ce site, pour diffamation publique envers un particulier, en raison de trois passages, les deux premiers étant incriminés par Mme X…, le troisième par l’association Front national et contenant les propos suivants : « Il faudra tout de même que Mme H… explique un jour comment elle a pu, en toute impunité, faire de la baby-sitter de ses enfants au Montretout de Saint-Cloud, une assistante parlementaire en toute opacité » ; « Mais ces emplois fictifs ne sont rien quand on sait que les H… sont allés encore plus loin en matière d’opacité » ; «Que dire encore de l’affaire I… , l’imprimeur du FN, victime d’une escroquerie sans nom et qui valut au parti d’être condamné à lui rembourser en novembre 2013 plus de 6 000 000 d’euros ? » ; que le tribunal a renvoyé le prévenu des fins de la poursuite au bénéfice de la bonne foi et débouté Mme X… et l’association Front National de leurs demandes ; que les parties civiles ont relevé appel ;
Attendu que, pour confirmer le jugement, en ses seules dispositions civiles, après avoir retenu que les propos incriminés constituent une atteinte à l’honneur et à la considération des parties civiles, l’arrêt, pour admettre l’intimé au bénéfice de la bonne foi, énonce, par motifs adoptés, que l’article consacré aux pratiques reprochées à certaines personnalités du Front National ainsi qu’à cette association, a été publié en réponse aux déclarations de Mme H… la veille, sur des faits reprochés à M. F… quand il était secrétaire général de L’UMP ; que les juges en déduisent que les propos s’inscrivent dans le contexte d’une polémique et d’un sujet d’intérêt général, s’agissant de l’emploi de deniers publics par les partis politiques et leurs responsables; qu’au regard des propos visant Mme X…, assistante parlementaire de M. B… de 1992 à 2010, l’arrêt relève les propos de ce dernier rapporté dans l’ouvrage de Mmes D… et C…, indiquant que Mme X… passait son temps à garder les enfants de Marine H… ; que, par ailleurs, ils retiennent, par référence au même ouvrage, que la presse s’est fait l’écho du contentieux entre M. I… et le Front National auquel il avait consenti un prêt, et des menaces qu’il aurait reçues, qualifiées par son avocat de “tentative d’extorsion de fonds” et ajoutent qu’un arrêt définitif a condamné l’association au paiement de la somme de 6 300 000 euros en remboursement des prêts ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, et dès lors que, d’une part, les juges du second degré, statuant sur le seul appel des parties civiles, doivent, à partir et dans les limites des faits objet de la poursuite, apprécier les circonstances propres à caractériser la bonne foi de la partie poursuivie, qui se distingue de la preuve de la vérité des faits, d’autre part, les propos litigieux s’inscrivaient dans un débat d’intérêt général visant une personnalité politique, se présentaient comme une forme de réplique aux propos tenus la veille par Mme H… et reposaient sur une base factuelle suffisante, à partir de déclarations de protagonistes reprises dans un ouvrage consacré aux parties civiles et d’articles de presse antérieurs, de sorte qu’ exprimés dans ce contexte et assis sur cette base factuelle, ils autorisaient une certaine dose d’exagération sans excéder les limites admissibles de la liberté d’expression, la cour d’appel a justifié sa décision ;
D’où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2500 euros la somme globale que Mme X… et l’association Front National devront payer à M. Y… au titre de l’article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-sept novembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen, de cassation, pris de la violation des articles 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, 23, 29, 32 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a confirmé en ses dispositions civiles le jugement du tribunal correctionnel de Paris du 20 octobre 2016 ayant renvoyé M. Laurent Y…, dit Laurent Z…, des fins de la poursuite du chef de diffamation publique envers un particulier, au bénéfice de la bonne foi, et débouté Mme Huguette X… de ses demandes indemnitaires ;
“aux motifs que Mme X… « reproche à l’auteur de l’article d’avoir donné une part excessive aux propos de M. Jean-Claude B… dans le livre précité, “Marine H… démasquée”, rappelant sans être contredite qu’elle a été l’assistante parlementaire de l’intéressée depuis 1992, date à laquelle Mme H… n’avait pas d’enfant » ; qu’« elle produit deux attestations de personnes établissant la réalité de son travail auprès de M. B…, ainsi que le témoignage de la nourrice des enfants de Mme H… ; que de ces pièces elle retient que, si elle ne conteste pas avoir gardé les enfants de son amie, il s’est agi d’un service amical et non d’une activité professionnelle », qu’« elle considère enfin que si, dans le cadre de poursuites en diffamation contre le livre de Mmes C… et D…, M. B… a été expressément relaxé au titre des propos la concernant, cette décision ne saurait justifier qu’elle soit à nouveau diffamée », que « de fait, M. Z… a mis en avant cette décision et notamment le fait, qu’elle a fondé sa motivation sur la bonne foi des auteures, tant sur les propos rapportés de M. B… que sur le rapprochement avec ceux de Marine H… dans son autobiographie, quant à l’aide apportée par Mme X… lors de la naissance de ses jumeaux » ; que « la cour n’est certes pas liée par ce précédent, mais les éléments de motivation rappelés ci-avant, n’en sont pas pour autant dénués de pertinence ; qu’« aussi, dans le contexte d’une polémique spécifique du sujet traité, la convergence des statuts professionnel et personnel de Mme X…, mérite au moins une interrogation, alors que Mme H… s’exprime dans le même temps de façon péremptoire sur les irrégularités supposées de ses adversaires politiques dans la gestion de leurs propres assistants personnels » ; que « dans ce contexte les propos d’Yves E… demeurent en la forme dans les limites de la liberté d’expression » ;
“1°) alors que si elle a relevé qu’elle n’était pas liée par la décision ayant relaxé M. B… du chef de diffamation, au bénéfice de la bonne foi, pour ses propos rapportés dans le livre « Mme H… démasquée » de Mmes D… et C… (jugement du tribunal correctionnel de Paris du 9 octobre 2012) mais que « les éléments de motivation rappelés ci-avant n’en sont pas pour autant dénués de pertinence », la cour d’appel n’a, en réalité, rappelé auparavant aucun élément de la motivation de cette décision et qu’elle n’a donc pas légalement justifié sa décision quant à la condition d’une enquête sérieuse ou d’une base factuelle suffisante nécessaire à l’admission de l’exception de bonne foi ;
“2°) alors qu’en relevant que « la convergence des statuts professionnel et personnel d’Huguette X… mérite au moins une interrogation », la cour d’appel s’est déterminée par un motif inopérant à caractériser la condition d’une enquête sérieuse ou d’une base factuelle suffisante, dès lors que l’auteur des propos incriminés ne s’interroge nullement sur cette « convergence de statuts » mais affirme, sans réserve ni précaution, que Mme H… a fait de la baby-sitter de ses enfants (Huguette X…) une assistante parlementaire « en toute impunité » et « en toute opacité » et que celle-ci a ainsi bénéficié d’un « emploi fictif » ;
“3°) alors qu’en relevant que « Mme H… s’exprime dans le même temps de façon péremptoire sur les irrégularités supposées de ses adversaires politiques dans la gestion de leurs propres assistants personnels », la cour s’est déterminée par un motif à la fois imprécis, en ce qu’elle ne précise pas l’origine de la constatation de fait à laquelle elle se livre, et inopérant, en ce que cette constatation n’est pas de nature à faire admettre la bonne foi de l’auteur des propos incriminés ;
“4°) alors que la cour d’appel s’est abstenue de rechercher si l’auteur des propos incriminés avait fait preuve de prudence et de mesure dans l’expression, élément constitutif indispensable de l’exception de bonne foi et que la cour devait d’autant plus se livrer à cette recherche que Mme X… avait invoqué, dans ses conclusions, le caractère péremptoire de l’imputation d’emploi fictif et l’absence de toute prudence dans l’expression, ne serait-ce que par l’emploi du conditionnel” ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 10 de la convention européenne des droits de l’homme, 23, 29, 32 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a confirmé en ses dispositions civiles le jugement du tribunal correctionnel de Paris du 20 octobre 2016 ayant renvoyé M. Y…, dit Laurent Z…, des fins de la poursuite du chef de diffamation publique envers un particulier, au bénéfice de la bonne foi, et débouté Mme X… de ses demandes indemnitaires ;
“aux motifs que « les observations qui précèdent trouvent tout autant à s’appliquer à celui-ci, par le seul rapprochement des nombreux articles de presse consacrés à l’affaire « I… » antérieurement à l’article litigieux et de la production de l’arrêt qui a mis fin à cette affaire en constatant la dette du Front National à l’égard de ce créancier. Les pressions et menaces dont ce dernier aurait été, selon lui, victime étant largement décrites dans les articles précités » ;
“1°) alors que ni une décision de justice « constatant la dette du Front National à l’égard de ce créancier, M. Fernand I… » ni la simple allégation formulée par M. I… d’avoir subi des menaces et pressions de la part du Front National pour qu’il ne réclame pas le remboursement de la totalité des prêts qu’il lui avait consentis ne sauraient donner une base factuelle à l’imputation diffamatoire selon laquelle le Front National aurait commis une « escroquerie sans nom » à l’encontre de M. I… ;
“2°) alors que tous les articles de presse produits par M. I… et visés par la cour d’appel font état de la demande en justice de celui-ci en remboursement de certains des prêts consentis au Front National et destinés à financer le matériel de campagne électorale acheté par ce parti à une société d’imprimerie appartenant à M. I… , ou de l’arrêt de la cour d’appel condamnant le Front National à payer à M. I… une certaine somme au titre du remboursement de ces prêts, que quelques-uns de ces articles, se référant tous au livre de Mmes Caroline D… et J…C…
« Marine H… démasquée », font état de ce qu’un expert requis par M. I… et l’avocat de celui-ci avaient évoqué une « tentative d’extorsion de fonds » ou de ce que M. I… avait prétendu avoir subi des menaces et des pressions et que, dès lors, ces articles de presse ne permettent pas de donner une base factuelle suffisante à l’imputation diffamatoire selon laquelle le Front National aurait commis une « escroquerie sans nom » à l’encontre de M. I… ;
“3°) alors que la cour d’appel s’est abstenue de rechercher si l’auteur des propos incriminés avait fait preuve de prudence et de mesure dans l’expression, élément constitutif indispensable de l’exception de bonne foi, et que la cour devait d’autant plus se livrer à cette recherche que l’association Front National avait invoqué, dans ses conclusions, le caractère péremptoire et appuyé de l’imputation d’escroquerie (« escroquerie sans nom ») et l’absence de toute mesure et de toute prudence dans l’expression” ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du jugement qu’il confirme et des pièces de la procédure que, le 28 février 2014, le site internet Nouvelobs.com a publié un article intitulé « Affaire F… : Marine H… est culottée de donner des leçons de morale » et signé par M. E…, en qualité de « Ex-MoDem, prof, auteur »; que, par acte du 27 mai 2014, Mme X… et l’association Front National ont fait citer devant le tribunal correctionnel, M. Y…, dit Laurent Z…, en sa qualité de directeur de la publication de ce site, pour diffamation publique envers un particulier, en raison de trois passages, les deux premiers étant incriminés par Mme X…, le troisième par l’association Front national et contenant les propos suivants : « Il faudra tout de même que Mme H… explique un jour comment elle a pu, en toute impunité, faire de la baby-sitter de ses enfants au Montretout de Saint-Cloud, une assistante parlementaire en toute opacité » ; « Mais ces emplois fictifs ne sont rien quand on sait que les H… sont allés encore plus loin en matière d’opacité » ; «Que dire encore de l’affaire I… , l’imprimeur du FN, victime d’une escroquerie sans nom et qui valut au parti d’être condamné à lui rembourser en novembre 2013 plus de 6 000 000 d’euros ? » ; que le tribunal a renvoyé le prévenu des fins de la poursuite au bénéfice de la bonne foi et débouté Mme X… et l’association Front National de leurs demandes ; que les parties civiles ont relevé appel ;
Attendu que, pour confirmer le jugement, en ses seules dispositions civiles, après avoir retenu que les propos incriminés constituent une atteinte à l’honneur et à la considération des parties civiles, l’arrêt, pour admettre l’intimé au bénéfice de la bonne foi, énonce, par motifs adoptés, que l’article consacré aux pratiques reprochées à certaines personnalités du Front National ainsi qu’à cette association, a été publié en réponse aux déclarations de Mme H… la veille, sur des faits reprochés à M. F… quand il était secrétaire général de L’UMP ; que les juges en déduisent que les propos s’inscrivent dans le contexte d’une polémique et d’un sujet d’intérêt général, s’agissant de l’emploi de deniers publics par les partis politiques et leurs responsables; qu’au regard des propos visant Mme X…, assistante parlementaire de M. B… de 1992 à 2010, l’arrêt relève les propos de ce dernier rapporté dans l’ouvrage de Mmes D… et C…, indiquant que Mme X… passait son temps à garder les enfants de Marine H… ; que, par ailleurs, ils retiennent, par référence au même ouvrage, que la presse s’est fait l’écho du contentieux entre M. I… et le Front National auquel il avait consenti un prêt, et des menaces qu’il aurait reçues, qualifiées par son avocat de “tentative d’extorsion de fonds” et ajoutent qu’un arrêt définitif a condamné l’association au paiement de la somme de 6 300 000 euros en remboursement des prêts ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, et dès lors que, d’une part, les juges du second degré, statuant sur le seul appel des parties civiles, doivent, à partir et dans les limites des faits objet de la poursuite, apprécier les circonstances propres à caractériser la bonne foi de la partie poursuivie, qui se distingue de la preuve de la vérité des faits, d’autre part, les propos litigieux s’inscrivaient dans un débat d’intérêt général visant une personnalité politique, se présentaient comme une forme de réplique aux propos tenus la veille par Mme H… et reposaient sur une base factuelle suffisante, à partir de déclarations de protagonistes reprises dans un ouvrage consacré aux parties civiles et d’articles de presse antérieurs, de sorte qu’ exprimés dans ce contexte et assis sur cette base factuelle, ils autorisaient une certaine dose d’exagération sans excéder les limites admissibles de la liberté d’expression, la cour d’appel a justifié sa décision ;