Diffamation : décision du 22 février 2024 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00917

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Diffamation : décision du 22 février 2024 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00917

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

Chambre sociale 4-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 22 FEVRIER 2024

N° RG 22/00917

N° Portalis DBV3-V-B7G-VCRZ

AFFAIRE :

[O] [B]

C/

ASSOCIATION ATHLETIC CLUB DE [Localité 3]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Février 2022 par le Conseil de Prud’hommes Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

N° Section : AD

N° RG : f21/00064

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SELEURL CABINET D’AVOCAT DU PARC MONCEAU

la AARPI LEGIPASS AVOCATS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT DEUX FEVRIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [O] [B]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Bernard BENAIEM de la SELEURL CABINET D’AVOCAT DU PARC MONCEAU, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS

APPELANT

****************

ASSOCIATION ATHLETIC CLUB DE [Localité 3]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Richard WETZEL de l’AARPI LEGIPASS AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2215, substitué par Me Kate GONZALEZ, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 10 Janvier 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Mme Nouha ISSA,

EXPOSE DU LITIGE

M. [O] [B] a été embauché selon contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 1er septembre 1981, par l’association Athlétic Club de [Localité 3] (ci-après l’association ACBB), gestionnaire d’un club omnisports.

M. [B] a occupé en dernier lieu un poste de professeur à hauteur de 120 heures par mois au sein de la section judo, pour une rémunération mensuelle de 2 971,17 euros brut.

Par lettre du 5 juillet 2017, l’association ACBB a convoqué M. [B] à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Par lettre du 31 juillet 2017, l’association ACBB a notifié à M. [B] son licenciement pour cause réelle et sérieuse à caractère disciplinaire.

Au moment de la rupture du contrat de travail, l’association ACBB employait habituellement au moins onze salariés.

Le 17 mai 2018, M. [B] a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt pour contester le bien-fondé de son licenciement et demander la condamnation de l’association ACBB à lui payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que des dommages-intérêts pour préjudice moral.

Après radiation de l’affaire du rôle des affaires en cours, M. [B] a obtenu la réinscription de l’affaire et a demandé, par conclusions du 8 janvier 2021, la condamnation de l’association ACBB à lui payer en sus diverses sommes au titre de l’exécution du contrat de travail.

Par jugement du 8 février 2022, le conseil de prud’hommes a :

– déclaré irrecevables les nouvelles demandes de M. [B] formulées par conclusions en date du 8 janvier 2021 ;

– débouté M. [B] du surplus de ses demandes ;

– débouté l’association ACBB de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– mis les dépens la charge de M. [B].

Le 18 mars 2022, M. [B] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 20 juin 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé des moyens, M. [B] demande à la cour d’infirmer le jugement attaqué et statuant à nouveau de :

– déclarer recevable l’ensemble de ses demandes ;

– dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

– condamner l’association ACBB à lui payer les sommes suivantes :

* 27’383,34 euros à titre de rappel de salaire résultant d’une requalification du contrat à temps partiel en un contrat à temps plein et d’une reclassification au groupe 7 de la convention collective ;

* 23’256 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires ;

* 1383,07 euros au titre de la prime d’ancienneté ;

* 14’927,94 euros au titre ‘du préjudice Pôle emploi’ ;

* 68’040 euros au titre de ‘son préjudice retraite’ ;

* 19’991,52 euros au titre de l’article L. 8223-1 du code du travail ;

* 66’638,40 euros d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 500’000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et caractère vexatoire de la rupture ;

* 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 14 octobre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé des moyens, l’association ACBB demande à la cour de :

– confirmer le jugement attaqué sur l’irrecevabilité et le débouté des demandes de M. [B];

– à titre subsidiaire, réduire les demandes de M. [B] à de plus justes proportions ;

– en tout état de cause, condamner M. [B] à lui payer une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Une ordonnance de clôture de l’instruction a été rendue le 12 décembre 2023.

SUR CE :

Sur la recevabilité des demandes additionnelle formées devant le conseil de prud’hommes le 8 janvier 2021 :

Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article 70 du code de procédure civile : « Les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant’ ;

Qu’en l’espèce, il ressort des pièces versées que M. [B] a, dans la requête introductive d’instance, contesté le bien-fondé de son licenciement et demandé la condamnation de l’association ACBB à lui payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages-intérêts pour les circonstances vexatoires entourant le licenciement ; que ces demandes visaient donc à contester la rupture de son contrat de travail ;

Que les demandes additionnelles formées dans ses conclusions de première instance du 8 janvier 2021 ont porté sur un rappel de salaire résultant d’une requalification du contrat à temps partiel en un contrat à temps plein et d’une reclassification à un niveau supérieur, sur un rappel subséquent de prime d’ancienneté, sur des dommages-intérêts également subséquents pour préjudice de retraite et en matière d’indemnités de chômage, sur un rappel de salaire pour heures supplémentaires et une indemnité subséquente pour travail dissimulé ;

Que ces demandes additionnelles relatives à l’exécution du contrat du travail ne se rattachaient donc pas par un lien suffisant aux demandes originaires qui portaient sur la rupture du contrat, étant précisé que M. [B] ne démontre en rien que le litige sur une reclassification à un niveau supérieur est le ‘point de départ initial ayant entraîné la rupture du contrat de travail’, contrairement à ce qu’il prétend ;

Que dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il déclare irrecevables les demandes additionnelles mentionnées ci-dessus ;

Sur le bien-fondé du licenciement et l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Considérant que la lettre de licenciement pour cause réelle et sérieuse à caractère disciplinaire notifiée à M. [B], qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée : ‘ Depuis plusieurs mois, notre association ACBB a enduré votre comportement systématique d’opposition ainsi que vos remarques désobligeantes et provocatrices tant à notre égard, qu’à l’égard de nos représentants et de nos membres.

Le 17 mai 2017, alors qu’était organisée une réunion de la section judo concernant le fonctionnement du haut-niveau pour la saison prochaine, à laquelle vous deviez assister en votre qualité d’entraîneur, vous avez accusé un retard de 30 minutes sans prendre la peine d’en prévenir les membres présents.

Face à votre retard inexpliqué, et alors même que cette réunion avait été convenue dans l’intérêt du haut-niveau dont vous êtes l’un des deux entraîneurs, le Président de la section a, après avoir attendu 20 minutes, quitté la réunion, M. [I] [W] ‘ le second entraîneur du haut-niveau ‘ s’opposant à ce que la réunion démarre sans vous, au regard de l’importance des décisions à prendre.

Dès votre arrivée, vous avez alors cru devoir qualifier l’absence du Président de section « d’inadmissible » devant deux salariés et les membres du bureau présents, alors que vous étiez vous-même en retard de 30 minutes.

Après que M. [I] [W] vous ait rappelé que « 21 heures, ce n’est pas 21h30 », vous avez poursuivi en donnant des explications mensongères.

Vous avez en effet indiqué qu’il y avait une remise de ceinture noire pour un jeune (que vous n’avez pas en charge puisqu’appartenant au groupe des cadets), que vous aviez pris le temps de discuter avec lui et qu’il y avait un pot organisé par les parents.

Cela vous aurait empêché, selon vous, de quitter le cours de judo à 21 heures alors que M. [H] [F], professeur de judo, co-animateur de ce cours était en charge du salut final.

Messieurs [I] [W] et [E] [D], également co-animateurs de ce cours,

comme vous, sont d’ailleurs arrivés à l’heure.

En refusant de quitter le cours 10 mn avant son échéance, contrairement à vos collègues,

vous avez manifesté votre désintérêt pour la réunion.

Vous avez ensuite prétendu, par courriel adressé à l’omnisports le 3 juin 2017, n’avoir reçu

aucune notification écrite ou orale de la convocation pour la réunion, ce qui est totalement

inexact puisque cette information vous a été transmise oralement puis confirmée par

courriel.

En outre, votre arrivée, bien que tardive, démontre également que vous étiez parfaitement

informé de la conduite de la réunion.

Ce comportement marque ainsi une nouvelle fois votre opposition sur le fonctionnement de

l’association ACBB et du bureau de la section « judo et disciplines associées », des actions qu’ils

mènent et votre refus de l’autorité de votre hiérarchie, en marquant de façon ostentatoire

votre manque de respect à son égard malgré les très nombreux rappels qui vous ont été faits

depuis de nombreux mois.

Vous avez également réaffirmé, dans votre mail du 3 juin, que les bénévoles avaient organisé un petit pot à l’issue du cours alors qu’il n’en était rien.

Pire encore, vous êtes allé répandre cette information mensongère auprès de madame [J] [N], responsable évènementiel des bénévoles, lors d’une conversation téléphonique.

Lors de cette réunion, dont l’ordre du jour concernait les arbitrages à effectuer sur la saison

prochaine, vous avez commencé à dresser un bilan sur les forces et faiblesses du haut-

niveau, puis, contestant le budget affecté au haut-niveau, vous avez :

– indiqué au Trésorier de la section, M. [S] [P], que les chiffres relatifs à la

masse salariale qu’il avançait étaient faux puisque vous en aviez trouvé d’autres en faisant des calculs sur internet ;

– proposé qu’une partie des salaires des athlètes et entraîneurs soient convertis en paiement de notes de frais fictives pour procéder à des économies ;

– soutenu qu’il convenait de procéder à des recrutements d’athlètes, alors que vous savez pertinemment et de longue date que la section n’en a pas les moyens, allant même jusqu’à proposer de recruter M. [L] [V].

De manière bien plus grave, vous avez prétendu, au terme de votre courriel du 3 juin 2017, que M. [K] [Y], référent du haut-niveau avait introduit la réunion en annonçant : « Il faut baisser la masse salariale des athlètes de 40.000 €, qui voulez-vous virer ‘ » ce qui est totalement faux et diffamatoire.

Face à votre refus d’aborder les problématiques et à votre insistance à mettre en cause les dirigeants et à proposer des solutions d’ores et déjà écartées (recrutements) ou illégales (convertir une partie du salaire en frais), la réunion a pris fin sans que l’ordre du jour ait pu être traité.

Vous avez alors décidé, le 23 mai 2017, de vous rendre à l’omnisports et d’interpeller le Trésorier Général de l’omnisport, en contravention avec les règles de fonctionnement de l’association ACBB et contre l’avis du bureau de la section judo, afin de solliciter des moyens supplémentaires pour le seul groupe Haut Niveau de judo.

Vous avez critiqué ouvertement auprès de lui la politique du bureau de la section et de l’association ACBB, concernant le Haut Niveau du judo.

Vous êtes même allé jusqu’à soutenir que le bureau de la section avait décidé de rémunérer l’enseignante du Naginata, une des disciplines associées, alors qu’elle ne comptait que 5 adhérents et que le coût de sa rémunération devait être affecté au Haut Niveau.

Par la suite, vous avez affirmé au Président de l’association ACBB (dans votre courriel) qu’il s’agissait des propos rapportés par le Trésorier de la section lui-même.

Vos man’uvres et attitudes mensongères visant à créer la division et semer la zizanie au c’ur même de notre institution ne sont pas tolérables et nuisent au bon fonctionnement de notre association ACBB.

Vous proposez d’engager tous les efforts financiers pour le développement du Haut Niveau du judo aux dépens des autres disciplines de la section et, s’il le faut, en rémunérant le personnel par des remboursements de frais afin de réaliser des économies substantielles sur le paiement des charges salariales et patronales. Les économies réalisées seraient alors réaffectées à votre seule discipline pour recruter ainsi de nouveaux athlètes pour le judo. Cette attitude persistante et vos propositions illégales ne sont pas acceptables.

En dépit de nos remarques et rappels à l’ordre, vous persistez à critiquer le fonctionnement du bureau de la section et de l’omnisport tant auprès des bénévoles parents d’élèves que des athlètes et des salariés. Vous dénigrez la politique de l’association ACBB en la rendant responsable

de l’impossibilité de conduire vos seules aspirations.

L’Athlétic Club de [Localité 3], est le premier club omnisports de France comprenant plus de 12.300 adhérents répartis en 32 sections sportives, parmi lesquelles la section judo.

Nous sommes sub-délégataires d’une mission de service public et nous ne pouvons pas faire l’impasse sur des disciplines ou détruire les rêves de certains enfants afin d’assouvir votre propre idéologie et votre nostalgie.

Quoiqu’il en soit, il ne vous appartient pas de critiquer l’association ACBB dans ces conditions car, contrairement à ce que vous prétendez, il ne s’agit nullement de l’exercice de votre liberté d’expression. En dépit de nos alertes, vous n’avez pas souhaité modifier votre

comportement.

Le 8 juin 2017, vous avez appelé madame [J] [N], responsable évènementiel des bénévoles, pour lui faire part de la « probable mort du haut-niveau », de l’incertitude liée au renouvellement du contrat à durée déterminée de M. [C] [A] « alors qu’il a fait des résultats » et lui avez parlé d’une lettre recommandée que vous aviez reçue à la suite de votre arrivée en retard à la réunion du 17 mai dans le but de dénigrer l’association ACBB.

Vos critiques sur l’avenir du club, les dénigrements sur la politique du club démotivent les équipes, les bénévoles et les autres salariés. Outre les nombreux manquements à vos obligations contractuelles, cette attitude nuit également au bon fonctionnement de la section,

à son image et de son développement.

Vous avez ainsi fait l’objet de rappels à l’ordre, notamment par une mise en garde du 23 décembre 2015 en raison de votre refus réitéré d’exécuter les consignes de l’ACBB.

En effet, le 9 octobre 2015, vous critiquiez le travail d’une bénévole dans des termes

insupportables et préconisiez déjà d’assécher les autres disciplines au profit du Haut Niveau

du judo.

Le 11 décembre 2015, vous vous adressiez à la secrétaire de la section sur un ton

inacceptable.

Vos contestations se poursuivront le 24 décembre 2015 et le 13 janvier 2016 par des mails

dans lesquels vous mettez de nouveau en cause le fonctionnement du bureau de la section, critiquez les décisions de ses membres et refusez de les mettre en application.

Il vous est notamment rappelé, par courriel du même jour (13 janvier 2016) :

– que vous ne devez pas utiliser les moyens du club à titre personnel, pour entraîner votre

fils ou en subtilisant le badge réservé à un des professeurs accompagnant les cadets sur une

compétition pour, ici encore, coacher votre fils qui avait fait le déplacement avec un autre

club,

– que vous avez publié sur Facebook un article contre l’avis de la section ;

En l’absence de prise en compte de ces rappels, il vous est de nouveau rappelé, en mai 2016, que vous ne devez pas utiliser les installations du club pour y entraîner votre fils ; il vous est rappelé de ne pas traiter directement avec les fournisseurs de l’ACBB.

Le 29 janvier, vous demandez au bureau de la section de ne pas respecter les critères posés par la municipalité et l’omnisports pour récupérer plus de fonds au titre du contrat olympique.

Le 27 juin 2016, il vous est encore une fois rappelé que vous ne devez pas utiliser les installations du club à titre personnel pour y entraîner votre fils.

Par mail du 27 janvier 2017, vous receviez une note d’information rappelant les prescriptions posées par l’omnisports lors de la réunion du comité directeur du 26 janvier vous indiquant qu’il fallait renoncer aux recrutements, que le haut-niveau devait émerger de la formation et que le trésorier de la section devait remettre mensuellement un budget actualisé pour permettre la vérification, par l’omnisports, du budget prévisionnel annuel.

Vous refusez de suivre les dépenses pour le budget du Haut Niveau. Aussi, depuis le début de l’année, et malgré les demandes formulées par le Président de la section, et les rappels qui vous ont été adressés, vous avez refusé de rendre compte du budget en raison de votre hostilité sur la politique du bureau de la section et de l’omnisports. Le seul budget mis à jour a été communiqué en avril 2017, puis la veille de l’entretien préalable, soit le 18 juillet au soir, en y intégrant des dépenses non autorisées et/ou sans respect des règles édictées par l’omnisports et rappelées dans un mail du 2 février 2017, dont vous avez refusé d’accuser réception et qui vous a donc été envoyé par courrier recommandé, et au terme duquel il vous était expressément demandé de nous communiquer, après chaque événement (tournoi, stage, déplacement) et au plus tard chaque 25 du mois, votre budget du haut-niveau mis à jour intégrant les dernières dépenses effectuées.

Aussi, vous persistez dans votre comportement. Vous démotivez les athlètes en expliquant que l’ACBB ne donne aucun moyen et que l’omnisport bloque tout.

Vous donnez directement vos instructions au personnel de l’ACBB et aux bénévoles, ce qui ne relève pas de vos attributions et court-circuite le rôle du Président de Section. Surtout, les conditions de votre intervention engagent potentiellement la responsabilité de l’ACBB.

Vos publications sur Facebook critiquant ouvertement les choix de la fédération ne sont pas non plus tolérables et nuisent à notre relation avec les instances fédérales.

Aussi, en raison de votre manque de loyauté, de vos refus persistants d’appliquer les

consignes et les règles de fonctionnement de l’association ACBB, de votre insubordination

récurrente, nous sommes contraints de prononcer votre licenciement.(…)’ ;

Considérant que M. [B] soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse aux motifs que les faits reprochés soit ne sont pas établis, soit ne sont pas suffisamment sérieux, soit encore sont prescrits pour certains d’entre-eux ; qu’il réclame en conséquence l’allocation d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Que l’association ACBB soutient que les fautes reprochées à M. [B] sont établies, que le licenciement est ainsi fondé sur une cause réelle et sérieuse et qu’il convient de débouter M. [B] de sa demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant qu’en application de l’article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; que, si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n’appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d’instruction qu’il juge utile, il appartient néanmoins à l’employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué ; qu’aux termes de l’article L. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement des poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales ;

Qu’en l’espèce, s’agissant des griefs relatifs à la réunion du 17 mai 2017 de la section judo, il ressort des débats et des pièces versées, et notamment d’échanges de courriels entre l’appelant et sa hiérarchie, que le retard de 20 minutes de M. [B] à cette réunion est établi et que ce dernier n’en a pas justifié, apportant même des explications contradictoires ;

Qu’en revanche, les autres griefs relatifs à une contestation des budgets, à la tenue de propos diffamatoires ou relatifs à la mise en place de pratiques illégales de rémunération ne résultent que des seules déclarations de M. [Y], contenues dans son courriel adressé au président de l’association ACBB et dans son attestation versée aux débats ; que ces derniers faits, dont la réalité est contestée par M. [B], ne sont donc pas établis ;

Que s’agissant ensuite des grief relatifs à un entretien du 23 mai 2017 avec le ‘trésorier général de l’omnisports’ de l’association (M. [X]), cette dernière se borne à verser un courriel adressé par M. [M] (président de la section judo de l’association) à l’appelant le 24 mai 2017, portant à son encontre de telles accusations et auquel M. [X] s’est borné à ajouter par courriel du même jour ‘je valide la teneur de ce mail’ ; que ces simples courriels sont insuffisants à établir la réalité des faits reprochés au salarié, alors que ce dernier en conteste la réalité ;

Que s’agissant du grief tiré de la propagation d’information mensongères et d’un dénigrement de l’association ACBB auprès de Mme [N] lors d’une conversation téléphonique, ce fait ne résulte que des déclarations de cette dernière contenues dans un courriel du 11 juin 2017 et non corroborées par d’autres éléments ;

Que s’agissant de refus réitérés d’exécuter des consignes en 2015 et 2016, l’association ACBB se borne à verser aux débats des courriels de reproches adressés par la direction de l’association ACBB à M. [B], lesquels ne sont corroborés par aucun élément objectif ; qu’elle ne verse aucun élément sur des contestations de directives faites par M. [B] le 24 décembre 2015 et le 13 janvier 2016, les trois courrielss versés aux débats sur ce point (pièce numéro 19 à 21) n’étant pas relatifs à ces faits ;

Que s’agissant des griefs tirés des critiques du travail d’une bénévole dans ‘des termes insupportables’ en octobre 2015 ou le fait de s’adresser à une secrétaire sur ‘un ton inacceptable’ en décembre 2015 et d’utilisation des installations sportives sans autorisation pour l’entraînement de son fils, les griefs litigieux, qui sont les seuls de cette nature, sont largement antérieurs à la période de deux mois précédant l’engagement de la procédure de licenciement, intervenu le 5 juillet 2017, et sont donc prescrits ;

Que s’agissant des griefs tirés d’un refus de suivre les dépenses pour le budget du sport de haut niveau et de communiquer les budgets afférents, d’une ‘demande au bureau de la section de ne pas respecter les critères posés par la municipalité et l’omnisports pour récupérer plus de fonds au titre du contrat olympique’ en janvier 2016, du fait de donner directement des instructions au personnel de l’association ACBB et aux bénévoles en court-circuitant le président de section, d’une publication sur le site Internet ‘Facebook’ des critiques ouvertes des choix de la fédération sportive, l’association ACBB n’invoque pas ces faits dans ses conclusions ;

Qu’il résulte de ce qui précède que le manque de loyauté, le dénigrement de l’employeur, les refus persistants d’appliquer les consignes et les règles de fonctionnement de l’association ainsi que l’insubordination récurrente reprochés à M. [B] ne sont pas établis ;

Que le seul grief établi, tiré d’un retard injustifié de 20 minutes à une réunion, n’est quant à lui pas suffisamment sérieux pour justifier la mesure de licenciement prononcée, en l’absence de faits antérieurs similaires et de passé disciplinaire de l’intéressé ;

Qu’il s’ensuit que le licenciement de M. [B] est dépourvu de cause réelle et sérieuse contrairement ce qu’ont estimé les premiers juges ; que le jugement attaqué sera infirmé sur ce point ;

Qu’en conséquence, M. [B] est fondé à réclamer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dont le montant ne peut inférieur aux salaires des six derniers mois en application des dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail dans leur version applicable au moment de la rupture, soit une somme de 17 827,02 euros brut ; qu’eu égard à son âge (né en 1961), à son ancienneté de 35 années complètes, à sa rémunération, à l’absence d’élément sur sa situation postérieure au licenciement, il y a lieu d’allouer à M. [B] une somme de 25 000 euros à ce titre ; que le jugement attaqué sera infirmé sur ce point ;

Sur les dommages-intérêts pour ‘exécution déloyale du contrat de travail et caractère vexatoire du licenciement’ :

Considérant en l’espèce que M. [B] critique tout d’abord le défaut de cause réelle et sérieuse du licenciement, lequel est déjà indemnisé par l’indemnité pour licenciement sans cause et sérieuse mentionnée ci-dessus ;

Qu’il soutient ensuite que le licenciement a été prononcé à quelques jours de compétitions auxquelles il devait impérativement assister, ce qui constitue, selon lui, des circonstances vexatoires ; que toutefois, aucun élément ne vient établir une telle intention vexatoire de l’employeur ;

Que par ailleurs et en tout état de cause, M. [B] se borne à invoquer à ce titre un préjudice moral ‘nécessairement causé’, sans verser la moindre pièce venant établir l’existence d’un tel préjudice ;

Qu’il y a donc lieu de confirmer le débouté de cette demande indemnitaire ;

Sur l’application de l’article L. 1235-4 du code du travail :

Considérant qu’en application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d’ordonner d’office le remboursement par l’association ACBB aux organismes concernés, des indemnités de chômage qu’ils ont versées le cas échéant à M. [B] du jour de son licenciement au jour de l’arrêt et ce dans la limite de six mois d’indemnités ;

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu’eu égard à la solution du litige, il y a lieu d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il statue sur ces deux points ; que l’association ACBB sera condamnée à payer à M. [B] une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement attaqué, sauf en ce qu’il statue sur l’irrecevabilité de demandes formées par M. [O] [B] et les dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et caractère vexatoire du licenciement,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que le licenciement de M. [O] [B] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne l’association Athlétic Club de [Localité 3] à payer à M. [O] [B] les sommes suivantes :

– 25’000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel,

Ordonne d’office le remboursement par l’association Athlétic Club de [Localité 3], aux organismes concernés, des indemnités de chômage qu’ils ont versées le cas échéant à M. [O] [B] du jour de son licenciement au jour de l’arrêt et ce dans la limite de six mois d’indemnités,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne l’association Athlétic Club de [Localité 3] aux dépens de première instance et d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thierry CABALE, Président et par Monsieur Nabil LAKHTIB, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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