Diffamation : décision du 12 octobre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 18/24353

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Diffamation : décision du 12 octobre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 18/24353
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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 5

ARRET DU 12 OCTOBRE 2022

(n° /2022, 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/24353 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6X5M

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Septembre 2018 -Tribunal de Commerce de CRETEIL RG n° 2017F00523

APPELANTS

Monsieur [S] [T] [G]

[Adresse 2]

[Localité 5]

né le 05 Février 1968 à [Localité 6] (99)

Représenté par Me Evariste ENAMA, avocat au barreau de PARIS, toque : E1681

SARL EPGSO BAT

[Adresse 2]

[Localité 5]

N° SIRET : 512 084 641

Représentée par Me Evariste ENAMA, avocat au barreau de PARIS, toque : E1681

INTIME

Monsieur [F] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 4]

né le 28 Avril 1963 à [Localité 7]

Assistée et représenté par Me Jacques-Alexandre BOUBOUTOU, avocat au barreau de PARIS, toque : R251

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 06 Septembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Marie-Ange SENTUCQ, Présidente de chambre

Madame Elise THEVENIN-SCOTT, Conseillère

Mme Alexandra PELIER-TETREAU, Vice-Présidente placée faisant fonction de Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Marie-Ange SENTUCQ dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffière lors des débats : Mme Suzanne HAKOUN

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Ange SENTUCQ, Présidente de chambre et par Suzanne HAKOUN, Greffière, présent lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur [S] [T] [G] est appelant aux côtés de la SARL EPGSO BAT d’un jugement rendu le 4 septembre 2018 par le Tribunal de Grande Instance de CRETEIL qui a, dans le litige l’opposant à Monsieur [F] [Y] :

Dit Monsieur [Y] mal fondé et l’a débouté de l’ensemble de ses demandes de condamantion formée à l’encontre de Monsieur [S] [T] [G] in solidum avec la société EPGSO BAT ;

Débouté Monsieur [F] [Y] de sa demande de constater la nullité du contrat conclu avec la société EPGSO BAT selon devis du 25 octobre 2010 et de sa demande condamnation de la société EPGSO BAT au titre des préjudices allégués de ce chef ;

Prononcé la résiliation aux torts partagés entre les parties du contrat conclu entre monsieur [F] [Y] et et la société EPGSO BAT selon devis du 25 octobre 2010 à la date d’effet du 19 mai 2017 ;

Débouté Monsieur [F] [Y] de ses demandes :

– de dommages et intérêts au titre du retard d’exécution des travaux réalisés par l’entreprise EPGSO BAT

– du préjudice moral allégué

– au titre de l’absence de souscription d’une assurance en garantie décennale

de dommages et intérêts au titre du caractère diffamatoire allégué des défenderesses (sic)

Condamné la société EPGSO BAT à payer à Monsieur [F] [Y] la somme de 16 500 euros en réparation du préjudice lié aux malfaçons et non-façons dont la société EPGSO BAT s’est rendue responsable et débouté Monsieru [F] [Y] du surplus de sa demande de ce chef ;

Dit mal fondées les défenderesses en leur demande reconventionnelle et les en a déboutées ;

Ordonné la capitalisation des intérêts dus pour au moins une année entière ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Ordonné l’exécution provisoire ;

Fait masse des dépens et dit qu’ils seront supportés par moitié par Monsieur [F] [Y] et par la société EPGSO BAT.

Il sera brièvement rappelé qu’un devis a été proposé le 25 octobre 2010 par la société EPGSO BAT à Monsieur [F] [Y] accepté le 26 octobre 2010 portant sur les postes :

– maçonnerie : création et pose d’un escalier sur trois niveaux, création d’un muret de balcon au premier niveau, dépose de toutes les plaques de BA 13 et pose de nouvelles plaques de BA 13 sur 3 niveaux, avec pose d’une aération pour les pièces humides, création de placards dans les chambres, réagréage des sols, sur deux niveaux, étanchéité des murs sous-sol intérieur,

– menuiserie : dépose des baies et fenêtres, repose de baies en aluminium avec volets roulants et fenêtres en PVC, pose de porte de garage, porte d’entrée et réaménagement des portes intérieures fournies par le client

– électricité : dépose de l’installation existante et installation complète aux normes

pose d’une chaudière à condensation, installation sanitaire et branchement EDF GDF, eau potable, évacuation eaux usées

– finition intérieure : préparation des murs, repose des plaques, peintures et plafonds carrelage et parquets, sortie des excédents et mise en décharge.

Des acomptes ont été réglés entre le 20/11/2010 et le 10/01/2011 à hauteur de la somme globale de 31 899,71 euros.

Par courrier du 26 avril 2011 Monsieur [Y] interpellait l’entreprise EPGSO BAT sur les travaux restant à réaliser soulignant avoir réglé des acomptes pour un montant très supérieur aux situations de travaux, mettant en exergue des malfaçons affectant la fixation des rails métalliques, les escaliers extérieurs et sollicitant la justification d’une police décennale couvrant l’ensemble des travaux.

Monsieur [Y] a fait établir un constat d’huissier le 19 octobre 2011 mettant en évidence que le ravalement de l’immeuble présente des auréoles et un défaut de jointoiement des pierres, le sous-sol est sans doublage, l’escalier est mal balancé et repose sur une paroi en carreaux de plâtres, les coffres des volets roulants ne sont pas fermés, le sol est à l’état brut de ciment non réagréé, la traverse du bâti de la porte d’entrée n’est pas dans le même plan vertical que le doublage, au premier étage le sol n’est pas plan, les coffres de volets roulants ne sont pas terminés, au niveau des chambres le sol présente des moisissures et des infiltrations, la filerie électrique est en attente, il n’existe aucune ventilation et aucun placard, le pavillon est dépourvu de toute installation de chauffage et sanitaire, aucune réservation n’est faite dans la cuisine , diverses découpes de plaques de BA 13 révèlent une réutilisation de matériaux paraissant être de récupération, la porte du garage n’est pas posée.

Monsieur [Y] a sollicité en référé la désignation d’un expert qui a été ordonnée le 14 février 2012.

L’expert, Monsieur [B] a déposé son rapport le 28 mai 2014.

C’est dans ces circonstances que Monsieur [Y] a fait assigner par acte du 19 mai 2017 la société EPGSO BAT et son gérant, Monsieur [S] [T] [G], devant le tribunal de commerce de CRETEIL, aux fins de voir juger la nullité du contrat conclu le 26 octobre 2010 et du devis ou, subsidiairement sa résiliation, et qu’il soit statué sur la réparation des divers préjudices en résultant en ce compris la responsabilité personnelle du gérant, in solidum avec l’entreprise EPGSO BAT, lequel a statué ainsi qu’il a été rappelé plus haut.

Monsieur [S] [T] [G] et la SARL EPGSO BAT ont signifié des conclusions d’appelants le 18 février 2019 aux fins d’infirmation partielle du jugement.

Ils demandent à la cour de :

Constater que le contrat d’exécution de travaux signé le 25 octobre 2010 entre la SARL EPGSO BAT et Monsieur [Y] est parfaitement valable ;

Prononcer la résiliation de ce contrat aux torts exclusifs de Monsieur [Y] qui a refusé de fournir à la SARL EPGSO BAT le matériel nécessaire à la poursuite du chantier ;

Condamner à titre reconventionnel Monsieur [Y] à régler à la SARL EPGSO BAT la somme de 18 999,04 euros à titre de règlement du solde de l’ensemble des devis commandés ;

Condamner Monsieur [Y] à verser à la SARL EPGSO BAT et à Monsieur [G] [T] respectivement la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile

Débouter Monsieur [Y] de l’ensemble de ses demandes ;

Le condamner aux dépens ;

Monsieur [F] [Y] a signifié des conclusions le 17 mai 2019 par lesquelles il demande à la cour :

Aux visas des articles,L 232-1 du Code de la Construction et de l’Habitation, 1229 du Code civil 1231-1 du Code civil, L 223-22 du Code de commerce, 515, 517 et 700 du Code de procédure civile

Dire irrecevable les conclusions d’appel déposées dans l’intérêt de la société EPGSO BAT et de Monsieur [G]

Rejeter l’ensemble des prétentions des appelants ;

Sur appel incident,

Infirmer partiellement le jugement en tant que :

– il prononce le rejet de la demande de constat de nullité de contrat entre la société EPGSO BAT et Monsieur [Y]

– il prononce la résiliation du contrat aux torts partagés et non aux torts exclusifs de la société EPGSO BAT

– il rejette la demande de condamnation formulée à titre principal in solidum des appelants de verser à Monsieur [Y] la somme de 78 602,70 euros au titre des préjudices résultant de la nullité du contrat

– il rejette la demande de condamnation in solidum des appelants à verser une somme de 26 000 euros au titre des retards d’exécution

– il rejette la demande de condamnation in solidum des appelants à verser une somme de 10 000 euros au titre du préjudice moral

– il rejette la demande de condamnation formulée à titre principal in solidum des appelants de verser à Monsieur [Y] la somme de 22 920,54 euros en réparation du préjudice de perte de chance lié à la non souscription par Monsieur [G] d’une assurance de garantie décennale couvrant les travaux prévus et/ou effectués

– il rejette la demande de condamnation in solidum des appelants à verser à Monsieur [Y] une somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile

En tout état de cause,

Confirmer partiellement le jugement en tant qu’il a dit y avoir lieu d’accorder la capitalisation des intérêts dus au moins pour une année entière ;

Condamner in solidum Monsieur [G] et la SARL EPGSO BAT aux entiers dépens lesquels comprendront notamment le coût du procès-verbal de constat d’huissier du 19 octobre 2011, les frais d’expertise et le timbre fiscal pour la constitution d’intimé ;

Condamner in solidum Monsieur [G] et la SARL EPGSO BAT à verser à Monsieur [Y] la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure Civile ;

Dire que les intérêts à valoir sur toutes les sommes auxquelles seront condamnés les appelants seront capitalisés pour produire eux-mêmes des intérêts dès lors qu’ils seront dus pour au moins une annéee entière ;

«  Ordonner l’exécution provisoire de l’arrêt d’appel à intervenir sans condition de garantie que ce soit » (sic)

L’ordonnance de clôture était prononcée le 7 juin 2022 et l’affaire a été fixée à l’audience du 6 septembre 2022 puis mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 12 octobre 2022.

SUR QUOI,

LA COUR,

1- Sur la recevabilité des conclusions d’appelants

Monsieur [Y] excipe des dispositions des articles 960 et 961du Code de procédure civile pour que soit constaté par la cour que M. [G] et la Société EPGSO BAT n’ayant pas indiqué dans leurs conclusions respectivement leur domicile et leur siège social actuels, mais l’ancien siège qui n’est plus d’actualité, les conclusions sont irrecevables comme ayant été établies en méconnaissance de l’article 961 précité.

Il souligne que M. [G] a indiqué être domicilié au [Adresse 2] or, selon Monsieur [Y] il ressort du jugement d’adjudication du 9 février 2017 que le bien qui appartenait à M. [G] au [Adresse 2] a fait l’objet d’une procédure de saisie immobilière au terme de laquelle la Banque Populaire Lorraine Champagne a été déclarée adjudicataire par le Juge de l’exécution (pièce n°24) de sorte qu’à compter du jour de l’adjudication devenue effective, l’ancien propriétaire est devenu au regard de la loi, un occupant sans droit ni titre, le jugement d’adjudication constituant un titre d’expulsion à l’égard du saisi.

Il souligne également qu’il ressort dudit jugement que M. [G] avait donné à bail un local à cette adresse à la Société EPGSO BAT déclaré inopposable à l’acquéreur en raison

des « liens qui unissent cette société et M. [T] [G] qui en est le gérant ».

Il en déduit que d’une part M. [G] n’a plus domicile au [Adresse 2] et que d’autre part la Société EPGSO BAT n’a plus de siège social à cette même adresse.

Réponse de la cour :

Selon les dispositions de l’article 960 du Code de procédure civile : « La constitution d’avocat par l’intimé ou par toute personne qui devient partie en cours d’instance est dénoncée aux autres parties par notification entre avocats. 

Cet acte indique : 

a) Si la partie est une personne physique, ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ; 

b) S’il s’agit d’une personne morale, sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement.

Selon les dispositions de l’article 961 du même code : «Les conclusions des parties sont signées par leur avocat et notifiées dans la forme des notifications entre avocats. Elles ne sont pas recevables tant que les indications mentionnées à l’alinéa 2 de l’article précédent n’ont pas été fournies. Cette fin de non-recevoir peut être régularisée jusqu’au jour du prononcé de la clôture ou, en l’absence de mise en état, jusqu’à l’ouverture des débats (…) »

En l’espèce, les conclusions des appelants font expressément mention pour Monsieur [S] [T] [G], pris en sa qualité de gérant de la SARL EPGSO BAT, d’une adresse correspondant au siège social de l’entreprise [Adresse 2].

Or, si le jugement d’adjudication de l’immeuble abritant le siège social de l’entreprise EPGSO-BAT au [Adresse 2], que l’intimé invoque en pièce 24 n’est pas produit, cette même pièce étant l’extrait Kbis de la société à jour au 27 janvier 2019 dont il résulte que le gérant a pour domicile personnel l’adresse de l’établissement [Adresse 2], il résulte du jugement prononcé le 20 juillet 2020 par le Tribunal Judiciaire de Paris (pièce non côtée versée dans le dossier procédure des appelants ) dans un litige opposant Monsieur [S] [T] [G] et son épouse en qualités de bailleurs à leur locataire, Madame [N] [E], que leur adresse déclarée récemment n’est plus au siège social de la société mais au [Adresse 3].

Les appelants qui disposaient d’un délai expirant au jour du prononcé de la clôture pour régulariser leurs conclusions en faisant figurer leur nouvelle adresse n’ont pas staisfait à l’obligation impartie par l’article 960 du Code de Procédure civile qui est sanctionnée par l’irrecevabilité de leurs conclusions d’appel, moyen soulevé à bon droit par l’intimé.

Les conclusions d’appelants de Monsieur [S] [T] [G] et de la SARL EPGSO BAT signifiées le 18 février 2019 seront donc déclarées irrecevables.

2- Sur la nullité de contrat entre la société EPGSO BAT et Monsieur [Y]

Le tribunal a retenu que Monsieur [Y] a confié la réalisation de son pavillon à plusieurs entreprises, que selon l’expert l’intimé a entrepris lui-même certains travaux et qu’ainsi le contrat ne peut être qualifié de contrat de construction de maison individuelle.

Monsieur [Y] soutient qu’il n’a aucune compétence en matière de construction et a seulement effectué le doublage extérieur des fenêtres, que certains travaux de mise hors d’eau et hors d’air relevant du gros ‘uvre ou du clos ont été confiés à la société EPGSO BAT et que c’est à tort que le tribunal a écarté l’application de l’article L 232-1 du Code de la Construction et de l’Habitation ainsi que les mentions de délais et de pénalités de retard en cas de livraison. Il souligne que la société EPGSO BAT savait pertinemment qu’elle prenait la suite d’un précédent chantier étant précisé que la société ADIPICO a son établissement dans la même rue que la société appelante.

Réponse de la cour :

Le contrat de construction d’une maison individuelle sans fourniture du plan est défini par les dispositions de l’article L 232-1 à L 232-2 du code de la construction et de l’habitation comme ayant au moins pour objet l’exécution des travaux de gros-oeuvre, de mise hors d’eau et hors d’air d’un immeuble à usage d’habitation ou d’un immeuble à usage professionnel et d’habitation, ne comportant pas plus de deux logements destinés au même maître de l’ouvrage.

Le devis proposé par la SARL EPGSO et accepté par Monsieur [Y] ne comporte pas de maîtrise d’oeuvre d’exécution ni de travaux de gros-oeuvre en infra et superstructure puisque ceux-ci ont été confiés à une entreprise tiers, la société ADIPICO, que Monsieur [Y] a par ailleurs assignée dans le cadre d’une autre procédure qui a donné lieu à l’ouverture d’une autre expertise dont le rapport déposé par Monsieur [M] est produit aux débats. Le poste couverture n’est pas non plus mentionné au devis et le poste maçonnerie est strictement limité à la construction d’un escalier et au muret d’un balcon.

L’expert judiciaire Monsieur [B], missionné pour décrire les désordres relevant du marché de la société EPGSO BAT, souligne en page 13 de son rapport que c’est la société ADIPICO qui a exécuté les travaux de gros ‘uvre à savoir les fondations, les murs extérieurs et les murs de refends, les escaliers, les dalles intérieures et les dalles extérieures. L’expert précise également qu’après l’acquisition du terrain en 2009, Monsieur [Y] a réalisé les travaux de doublage extérieur et a envisagé de poser les fenêtres mais que se rendant compte qu’il n’était pas en mesure de réaliser ces travaux par lui-même, il a contacté en 2010 la société EPGSO BAT et conclu avec elle le marché de travaux comprenant notamment le remplacement d’une fenêtre et la pose des autres fenêtres.

Par conséquent le marché passé avec la société EPGSO, entreprise intervenue ensuite des travaux de gros ‘uvre réalisés par une société tiers, indépendamment de la circonstance, sans emport sur la qualification du marché, que la société EPGSO ait su ou pas qu’elle intervenait ensuite de la société chargée du gros-oeuvre, n’est pas assimilable à un contrat de construction de maison individuelle sans fourniture du plan.

La nullité du marché ne peut donc être invoquée par Monsieur [Y] du chef du non respect des dispositions de l’article L 232-1 du code de la construction et de l’habitation et le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur [Y] de ce chef.

3- Sur les retards d’exécution

Le tribunal a retenu l’absence de délai prévu au devis du 25 octobre 2010.

Réponse de la cour :

Monsieur [Y] excipe des dispositions de l’article L 232-1 précité qui imposent à peine de nullité la mention des délais d’exécution et des pénalités de retard cependant il a été jugé que le marché conclu ne ressortit pas du dispositif relatif à la construction d’une maison individuelle sans fourniture de plan d’où il suit que Monsieur [Y] qui n’invoque aucun autre fondement quand par ailleurs aucun délai n’est prévu au devis ne saurait prospérer en sa demande de dommages et intérêts du chef des retards d’exécution.

De ce chef également le jugement sera confirmé.

4-Sur la résiliation du contrat entre la société EPGSO BAT et Monsieur [Y]

Le tribunal a imputé comme une faute à Monsieur [Y] le fait de ne pas avoir eu recours à un maître d’oeuvre et a mis à sa charge pour partie la responsabilité des conditions d’exécution difficiles du marché pour la société EPGSO BAT soulignant toutefois que la société appelante ne démontre pas que la non fourniture des matériaux par Monsieur [Y] ait participé à cette faute.

Monsieur [Y] soutient qu’il n’a aucune responsabilité dans les difficultés du chantier et qu’aucune faute ne peut être mise à sa charge dans le cadre de la résiliation qui doit être prononcée aux torts exclusifs des appelants.

Réponse de la cour :

Selon les dispositions de l’article 1184 du code civil dans sa version antérieure à l’Ordonnance du 10 février 2016, applicable au litige : « Dans les contrats synallagmatiques, la condition résolutoire est toujours sous-entendue pour le cas où l’une des parties ne satisfait pas à l’exécution de son obligation. »

Monsieur [Y] n’est pas un professionnel de la construction, ce point ne fait pas litige et il ne peut lui être imputé comme une faute de n’avoir pas eu recours à un maître d’oeuvre quand il appartient à ce même professionnel en l’occurrence la société EPGSO, de faire la preuve qu’il a satisfait à son obligation de conseil pour la mise en ‘uvre des travaux objets de son marché lesquels, s’agissant de la création et pose d’un escalier sur trois niveaux et de la construction d’un muret de balcon au premier niveau, justifiaient la préconisation d’un maître d’oeuvre pour la conception de ces ouvrages.

Par conséquent aucune faute ne peut être imputée à Monsieur [Y] lequel par ailleurs ne remet pas en cause l’analyse des désordres et des responsabilités faite par le tribunal au résultat des constatations de l’expert judiciaire qui a par ailleurs expressément relevé l’abandon du chantier imputable à l’entreprise EPGSO au mois de mai 2011.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a prononcé la résiliation du contrat aux torts partagés des parties.

Sur infirmation, le contrat sera résolu aux torts exclusifs de la société EPGSO.

5- Sur la perte de chance liée à la non souscription par Monsieur [G] d’une assurance de garantie décennale couvrant les travaux prévus et/ou effectués.

Le tribunal a dit que dès lors que les travaux confiés par Monsieur [Y] à la société EPGSO BAT n’ont pas été réceptionnés, aucune assurance de responsabilité civile décennale ne pouvait être mobilisée de sorte que Monsieur [Y] ne peut justifier d’aucun dommage de ce chef.

Monsieur [Y] demande la condamnation in solidum des appelants à lui verser la somme de 22 920,54 euros à ce titre au motif que l’attestation d’assurance produite pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2011 ne couvre pas la création d’un muret, la pose d’un escalier, la pose et la dépose de fenêtres et de portes, la pose de carrelage et de parquet ce qui lui a fait perdre une chance de garantie.

Réponse de la cour :

Le préjudice résultant de la perte de chance implique en l’espèce la disparition, par l’effet de l’absence de souscription d’une garantie légale obligatoire couvrant les activités visées au devis, d’une éventualité favorable caractérisée par la mise en ‘uvre par l’assureur de la garantie souscrite au profit du maître de l’ouvrage, victime de désordres ressortissant de ladite garantie encore que par définition la réalisation d’une chance ne soit jamais certaine.

L’attestation d’assurance valable pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011 fait référence au contrat multirique professionnel 94278611 K 001, délivré par les Assurances Banque Populaires Iard qui certifie que la société EPGSO BAT « est garantie pour les conséquences de la responsabilité civile encourue tous dommages confondus, avant livraison de biens et/ou réception de travaux » selon les montants définis au tableau.

Elle précise que cette société, lorsqu’elle exécute des travaux de construction dans le cadre des activités suivantes :

« 3400 peintre en bâtiment

3231 revêtement plastique ou textile à l’exclusion de revêtement en plastique coulés

3313 plombier travaux d’étanchéité occasionnels limités à 150 m2

3940 Electricien du bâtiment « 

est garantie lorsque sa responsabilité découlant des articles 1792 et 1792-2 du code civil est engagée.

Elle précise que : « Ces garanties sont accordées lorsque le marché du client (hors taxe) ne dépasse pas 600 000 euros pour la réalisation des ouvrages de fondation ou d’ossature ou 200 000 euros pour tous autres travaux de fondation. »

Ce contrat vise donc expressément la garantie avant livraison et/ou réception des travaux et le tribunal ne pouvait sans en dénaturer la portée, en déduire l’absence de perte d’une éventualité favorable de couverture au regard du fait que les désordres sont survenus avant réception alors que ce risque est précisément couvert par la police multirisque professionnelle et que l’expert relève en page 15 de son rapport la dangerosité potentielle de l’accès principal liée à l’absence de fondation de l’escalier et les multiples entrées d’eau au travers des dormants des portes-fenêtres du 1er étage rendant l’ouvrage impropre à sa destination.

Par conséquent en ne respectant pas son obligation d’assurance pour les activités de maçonnerie et de menuiserie visées dans son marché, la société EPGSO a fait perdre à Monsieur [Y] une éventualité favorable de bénéficier d’une couverture d’assurance décennale qui aurait pu permettre à Monsieur [Y] de bénéficier d’une prise en charge directe de la réparation des désordres.

Le constructeur agissant en tant que personne morale, qui ne souscrit pas une assurance de garantie décennale, commet une faute détachable de ses fonctions à l’égard du maître d’ouvrage.

Monsieur [S] [T] [G], en sa qualité de gérant de la société EPGSO personnellement tenu en cette qualité de veiller à la souscription de cette assurance obligatoire pour les activités visées au marché qu’il propose, sera donc condamné à régler à Monsieur [Y], une somme de 10 000 euros au regard des préjudices retenus par le tribunal non remis en cause par Monsieur [Y].

De ce chef le jugement sera infirmé.

6- Sur le préjudice moral

Le tribunal a estimé que la responsabilité de Monsieur [Y] était engagée quant aux conditions de passation des contrats pour la construction de son pavillon et la mise en ‘uvre des travaux afférents et a rejeté en conséquence sa demande au titre du préjudice moral.

Monsieur [Y] demande la condamnation in solidum des appelants à verser une somme de 10 000 euros au titre du préjudice moral.

Réponse de la cour :

Le préjudice moral subi par Monsieur [Y] est avéré au regard de l’abandon du chantier et de l’inhabitabilité de la maison constatée par l’expert plus de 4 années après le démarrage du chantier s’agissant de la résidence principale de l’intimé.

De ce chef le jugement sera infirmé et la société EPGSO BAT condamnée au paiement d’une somme de 10 000 euros de ce chef.

6- La capitalisation des intérêts

La capitalisation des intérêts est due dans les conditions de l’article 1154 ancien du code civil et de ce chef le jugement sera confirmé.

7- Sur les frais irrépétibles

La société EPGSO BAT et Monsieur [S] [T] [G], sur infirmation, seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d’appel ainsi qu’au règlement d’une somme de 10 000 euros à Monsieur [F] [Y] au titre des frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Déclare irrecevables les conclusions d’appelants signifiées le 18 février 2019 par la SARL EPGSO BAT et Monsieur [S] [T] [G] ;

Sur l’appel incident,

INFIRME le jugement du chef de la résiliation du contrat, de la perte de chance liée à la souscription d’une police d’assurance décennale, du préjudice moral, des frais irrépétibles et des dépens ;

Statuant à nouveau de ces chefs,

PRONONCE la résolution du contrat conclu le 25 octobre 2010 aux torts exclusifs de la société EPGSO BAT ;

CONDAMNE Monsieur [S] [T] [G] à régler à Monsieur [F] [Y] une somme de 10 000 euros en réparation de la perte de chance liée à la souscription d’une police décennale adaptée aux activités visées dans le marché ;

CONDAMNE la société EPGSO BAT à régler à Monsieur [F] [Y] une somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

CONDAMNE la société EPGSO BAT et Monsieur [S] [T] [G] in solidum aux dépens ainsi qu’au règlement d’une somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

CONFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions.

La greffière, La Présidente,

 


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