Diffamation : décision du 12 avril 2016 Cour d’appel de Paris RG n° 15/05178

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Diffamation : décision du 12 avril 2016 Cour d’appel de Paris RG n° 15/05178
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Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 – Chambre 1

ARRET DU 12 AVRIL 2016

(n° 186 , 3 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 15/05178

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Février 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 14/01625

APPELANT

Monsieur [J] [C]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Né le [Date naissance 1] 1979 à [Localité 3]

Représenté par Me Paul YON, avocat au barreau de PARIS, toque : C0347

INTIMES

L’AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par Me Alexandre DE JORNA, avocat au barreau de PARIS, toque : C0744

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 02 Février 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Jacques BICHARD, Président de chambre

Madame Marie-Sophie RICHARD, Conseillère

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Elodie PEREIRA

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par M. Jacques BICHARD, président et par Mme Lydie SUEUR, greffier lors du prononcé.

M. [J] [C] a été interpellé le 30 novembre 2013 alors qu’il participait à une manifestation sur la voie publique.

La banderole qu’il brandissait et sur laquelle il était inscrit ‘ Hollande-démission.fr ‘ a été saisie puis détruite sur ordre du Parquet.

C’est dans ces circonstances qu’il a, sur le fondement de l’article L. 141-1 du code de l’organisation judiciaire, engagé une action afin de voir retenir la responsabilité de l’Etat et d’obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 4 104,36 euros au titre du remboursement de la banderole, outre celle de 10 000 euros à titre de dommages intérêts, devant le tribunal de grande instance de Paris dont il a déféré à la cour le jugement rendu le 18 février 2015 qui l’a débouté de ses demandes et l’a condamné aux dépens.

Vu les dernières conclusions communiquées par la voie électronique le :

> 4 janvier 2014 par M. [J] [C] qui demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris et de condamner l’agent judiciaire de l’Etat à lui payer la somme de 4 104,36 euros en réparation de son préjudice matériel, celle de 10 000 euros au titre du préjudice moral, outre une indemnité de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

> 17 juillet 2015 par l’agent judiciaire de l’Etat qui demande à la cour de confirmer le jugement déféré et de condamner l’appelant aux entiers dépens.

Vu l’avis en date du 10 décembre 2015 dont il n’est pas contesté qu’il a été communiqué aux parties, aux termes duquel le Ministère Public conclut à la confirmation du jugement entrepris.

SUR QUOI, LA COUR

M. [J] [C] soutient que la destruction de la banderole litigieuse constitue une faute lourde au sens de l’article L. 141-1 du code de l’organisation judiciaire dés lors que ce bien, à l’instar de son sac à dos qui lui a été également confisqué, ne constitue pas un objet qualifié de dangereux au sens de l’article 41-1 du code de procédure pénale, alors au surplus qu’il a été relaxé du chef d’organisation d’une manifestation sur la voie publique n’ayant pas fait l’objet d’une déclaration préalable, que la banderole ne portait aucun terme offensant ou diffamatoire pour le président de la République, ajoutant que dans sa décision n° 2014-390 Q.P.C du 11 avril 2014, le Conseil Constitutionnel a abrogé l’article 41-1 du code de procédure pénale.

Le Conseil Constitutionnel aux termes de sa décision n° 2014-390 Q.P.C du 11 avril 2014 a déclaré inconstitutionnel le quatrième alinéa de l’article 41-4 du code de procédure pénale en décidant cependant que ‘ la déclaration d’inconstitutionnalité prend effet à compter de la date d’application de la présente décision (…..) qu’elle n’ouvre droit à aucune demande en réparation du fait de la destruction de biens opérée antérieurement à cette date (…..)’.

L’abrogation de ce texte a ainsi pris effet à compter du 13 avril 2014, soit postérieurement aux faits litigieux.

Ce texte qui, ainsi, était alors en vigueur disposait :

‘ Le procureur de la République peut ordonner la destruction des biens meubles saisis, dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité, lorsqu’il s’agit d’objets qualifiés par la loi de dangereux ou nuisibles, ou dont la détention est illicite ‘.

En prenant le 1er décembre 2013 la décision d’ordonner la destruction de la banderole litigieuse, alors même que par un jugement du même jour le tribunal correctionnel de Paris a relaxé M. [J] [C] des fins de la poursuite d’organisation de manifestation sans déclaration ou interdite, le procureur de la République, a commis une erreur d’appréciation dans la mesure où cet objet ne présentait aucun caractère dangereux ou nuisible et que sa détention n’était pas illicite puisque le délit d’offense au président de la République avait été abrogé par la loi du 5 août 2013, donc antérieurement aux faits reprochés à l’appelant.

Il demeure cependant que ce manquement ne caractérise pas la faute lourde telle que prévue par l’article L. 141-1 du code de l’organisation et définie par la jurisprudence, à savoir l’erreur tellement grossière qu’un magistrat normalement soucieux de ses devoirs n’y eût pas été entraîné.

Par ailleurs l’inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ne peut être appréciée que dans la mesure où les voies de recours n’ont pas permis de réparer le mauvais fonctionnement allégué .

Or il vient d’être constaté que la déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 41-4 du code de procédure pénale par le Conseil Constitutionnel n’a pris effet qu’à compter du 13 avril 2014, de sorte que M. [J] [C] n’a été privé d’aucun recours contre la décision prise par le procureur de la République tendant à la destruction de la banderole.

Tout autant il n’a pas, en application de l’article 40-3 du code de procédure pénale, saisi le procureur général à la suite de la décision de classement sans suite prise le 18 mars 2014 par le parquet sur le dépôt de sa plainte pour destruction volontaire, ni au demeurant, déposé à cette fin, de plainte avec constitution de partie civile devant un juge d’instruction.

En conséquence le jugement entrepris sera confirmé .

Dans ces conditions l’équité ne commande pas d’accueillir la demande qu’il présente sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré.

Déboute M. [J] [C] de sa demande présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. [J] [C] aux dépens dont distraction dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile au bénéfice de Me Alexandre DE JORNA, avocat.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

 


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