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Diffamation constituée
Alain de Pouzilhac a obtenu gain de cause contre Jaques Seguela dans son procès en diffamation. Interviewé par trois journalistes sur la chaîne parlementaire (débat sur le thème “‘publicité et média”), Jaques Seguela avait tenu les propos suivants :
« Deuxièmement moi, je connais Alain de Pouzilhac, qui a été mon président, qui a failli nous mettre en faillite, Euro RSCG. Si aujourd’hui Vincent Bolloré n’était pas arrivé on serait vendu à M. Sorel. Bon parce que pendant un an, il m’a bourré le mou, avec les mêmes procédés, avec les mêmes équipes, et j’ai vu le combat qu’il a fait à Vincent Bolloré. C’est un miracle que Vincent Bolloré n ‘en ait pas eu marre. (…) Il (Bolloré) a sauvé la publicité française, parce que, pourquoi, parce qu ‘il y avait 4 à 500 millions de trou quand M. de Pouzilhac est parti et qu’aujourd’hui depuis que M. Bolloré s’occupe de la société, il y a 400 ou 500 millions dans les caisses. C’est ça la différence »(premier passage). Et quand il voit qu’il est acculé, il est prêt à tout. C’est ça la véritable histoire. Et y a pas de raison que ce soit la plus grande journaliste historiquement, femme, française, puisqu’elle a été la première à faire ce beau métier qui est de présenter les infos – qui soit traitée comme elle est traitée. C’est inadmissible»
Les propos en cause imputaient bien à Alain de Pouzilhac d’avoir “laissé 4 à 500 millions de trou ” à son départ de la direction du groupe HAVAS en 2005, et donc d’avoir gravement mis en danger l’équilibre financier de ce groupe au point d’avoir “failli [le] mettre en faillite’”. IL s’agissait là d’une imputation d’un fait suffisamment précis pour pouvoir faire sans difficulté l’objet d’un débat sur la preuve et qui portait atteinte à la considération professionnelle d’Alain de Pouzilhac.
Exception de bonne foi
L’auteur de propos diffamatoires peut s’exonérer de toute responsabilité en justifiant de sa bonne foi et notamment en établissant qu’il poursuivait, en rendant publics les propos incriminés, un but légitime exclusif de toute animosité personnelle, qu’il a conservé dans l’expression une suffisante prudence et qu’il s’est appuyé sur une enquête sérieuse.
Ces critères s’apprécient différemment selon le genre de l’écrit en cause et la qualité de la personne qui s’y exprime, une plus grande rigueur étant de mise s’agissant d’un professionnel de l’information, tel un journaliste, en raison notamment de sa qualité et du crédit qui s’y attache, tandis qu’une plus grande liberté de ton est accordée à celui qui n’est pas professionnel de l’information et est personnellement impliqué dans les faits qu’il évoque.
En l’espèce, les juges ont conclu à l’existence d’une animosité personnelle, le caractère légitime du but poursuivi a aussi été exclu, puisque le propos diffamant était sans lien avec le sujet abordé et n’avait pour seul objet que de nuire à Alain de Pouzilhac en portant atteinte à sa considération professionnelle (7 000 euros de dommages et intérêts).
Périmètre de la diffamation
L’article 29, alinéa 1er, de la loi sur la liberté de la presse définit la diffamation comme toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé». Le fait en cause doit être suffisamment précis pour pouvoir faire, sans difficulté, l’objet du débat sur la preuve de sa vérité. Le délit de diffamation est caractérisé même si l’imputation est formulée sous une forme déguisée, dubitative ou par voie d’insinuations et se distingue ainsi de l’expression d’appréciations subjectives et de l’injure (« toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait »).
Ni l’inexactitude des propos ni leur caractère désobligeant ne suffisent à caractériser la diffamation. L’appréciation de l’atteinte portée à l’honneur ou à la considération de la personne visée doit s’apprécier indépendamment du mobile de son auteur comme de la sensibilité de la personne visée ou de sa conception subjective de l’honneur et de la considération, mais au regard de considérations objectives d’où s’évincerait une réprobation générale, que le fait soit prohibé par la loi ou considéré comme d’évidence contraire à la morale commune.
Mots clés : Diffamation
Thème : Diffamation
A propos de cette jurisprudence : juridiction : Tribunal de grande instance de Paris | Date : 14 janvier 2013 | Pays : France