Développement d’une plateforme logicielle : gestion d’affaires et prise en charge des frais de développements

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Développement d’une plateforme logicielle : gestion d’affaires et prise en charge des frais de développements
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La gestion d’affaires (qui emporte remboursement des frais du mandataire) ne peut trouver à s’appliquer si le mandataire a délibéremment pris en charge les côuts de développement d’une plateforme logicielle sous réserve d’une contrepartie.

Selon les dispositions de l’article 1301 du code civil, ‘Celui qui, sans y être tenu, gère sciemment et utilement l’affaire d’autrui, à l’insu ou sans opposition du maître de cette affaire, est soumis, dans l’accomplissement des actes juridiques et matériels de sa gestion, à toutes les obligations d’un mandataire’.

L’article 1301-2 du même code dispose que ‘Celui dont l’affaire a été utilement gérée doit remplir les engagements contractés dans son intérêt par le gérant.

Il rembourse au gérant les dépenses faites dans son intérêt et l’indemnise des dommages qu’il a subis en raison de sa gestion.

Les sommes avancées par le gérant portent intérêt du jour du paiement’.

En l’espèce, il résulte des éléments du dossier que la société Clarime Conseils a, à la suite d’un courriel du 1er juillet 2020 de M. [M] [N] s’inquiétant notamment de la propre capacité financière de la société DataLiance à développer sa plateforme (pièce N°6 – DataLiance), accepté d’assumer cette charge sans en demander le remboursement : ‘Suite à notre conversation d’hier, je te confirme ma proposition de prendre en charge les coûts de développement Dataliance réalisés par Noveo’, avec la mention complémentaire suivante ‘Pouvons-nous intégrer cette somme dans le pacte d’associé ” (courriel du 2 juillet 2020 de M. [P] [U] à M. [M] [N] ; pièce 7 DataLiance). Demande à laquelle M. [N] ne donnera pas suite.

Cette proposition de prise en charge par la société Clarime Conseils des coûts Noveo a été mise en oeuvre.

La cour en a déduit que la société Clarime Conseils a accepté de supporter les coûts Noveo pour répondre à l’inquiétude manifestée par M. [M] [N], à propos de la capacité financière de la société DataLiance à poursuivre le développement de la plateforme DataLiance, dans la seule espérance d’une contrepartie, à son profit, qui aurait été matérialisée dans un pacte d’associés lequel n’est pas produit, à supposer qu’il ait existé.

La société Clarime Conseils ne peut, dans ces circonstances, soutenir qu’elle a agi comme gérant d’affaires dans l’intérêt du maître de l’affaire, la société DataLiance, alors qu’elle a agi dans son propre intérêt. L’absence de formalisation d’une contrepartie au sein d’un pacte d’actionnaires ne peut a posteriori conduire à requalifier en gestion d’affaires ce que le dossier invite à considérer comme un investissement de la société Clarime Conseils en vue du développement de la plateforme DataLiance.

Résumé de l’affaire : La société Tico Capital, présidée par M. [M] [N], détient la société Cometh, qui gère des risques et des projets pour le secteur bancaire et de l’assurance. Tico Capital est également l’unique actionnaire de la SAS DataLiance, créée en 2017 pour fournir des solutions de conformité aux normes RGPD. La SAS Clarime Conseils, fondée par M. [P] [U] en 2019, a établi un partenariat avec Cometh en 2019, formalisé par des échanges de courriels, prévoyant une prise de participation de M. [P] [U] dans DataLiance.

Des contrats de sous-traitance ont été signés entre Cometh et Clarime Conseils pour des prestations de management et de conseil. Clarime Conseils a piloté le développement de la plateforme DataLiance et a engagé la société Noveo pour des prestations informatiques. Des divergences sont apparues concernant le financement de ces prestations, entraînant la résiliation d’un contrat de sous-traitance et des réclamations de paiement de la part de Clarime Conseils pour des montants dus à Noveo et pour ses propres services.

Après une mise en demeure restée sans réponse, Clarime Conseils a assigné DataLiance devant le tribunal de commerce de Versailles, qui a débouté Clarime de ses demandes et l’a condamnée à payer des frais. Clarime a interjeté appel de ce jugement, demandant le remboursement des sommes dues et la condamnation de DataLiance à ses dépens. DataLiance, de son côté, demande la confirmation du jugement initial et le déboutement de Clarime. L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 février 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

19 septembre 2024
Cour d’appel de Versailles
RG n°
22/06104
COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 56C

Chambre commerciale 3-1

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 SEPTEMBRE 2024

N° RG 22/06104 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VOKG

AFFAIRE :

S.A.S. CLARIME CONSEILS

C/

S.A.S. DATALIANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Septembre 2022 par le Tribunal de Commerce de Versailles

N° Chambre : 1

N° RG : 2021F00789

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Katell FERCHAUX- LALLEMENT

Me Oriane DONTOT

TC VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.S. CLARIME CONSEILS

RCS Bobigny n° 845 397 546

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 629 et Me Sandrine JANIN – GADOUX & Me Isaline POUX de la SELARL IP ASSOCIES, Plaidant, avocats au barreau de Paris

APPELANTE

S.A.S. DATALIANCE

RCS Versailles n° 833 176 050

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 et Me Olivier POUPET, Plaidant

INTIMEE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 23 Avril 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller faisant fonction de président,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

Madame Véronique MULLER, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,

EXPOSÉ DES FAITS

La société Tico Capital, présidée et détenue par M. [M] [N], son unique associé, est une société holding.

Cette société préside la société Cometh dont elle est l’associée unique, laquelle intervient dans la gestion de risques, la conformité réglementaire, le ‘data management’ et la gestion de projets pour une clientèle issue majoritairement du milieu bancaire et de l’assurance.

La SAS DataLiance, créée le 7 décembre 2017, exerce une activité de conseil en organisation et développe une plateforme dite SAAS ( ‘Software as a Service’ – logiciel en tant que service) permettant à ses clients, par des solutions logicielles, de se conformer aux nouvelles normes RGPD. Elle est également présidée par la société Tico Capital, unique actionnaire de la société DataLiance.

La SAS Clarime Conseils a été créée le 18 janvier 2019 par M. [P] [U], son associé unique, qui la préside. Elle exerce une activité de conseils aux entreprises.

MM. [M] [N] et [P] [U], autrefois professionnellement proches, sont entrés de nouveau en relation dans le courant de l’année 2019 pour construire un partenariat, dont les bases ont été formalisées dans un échange de courriels du 16 août 2019. Il y était prévu une intervention de la société Clarime Conseils sous forme de missions (interne et externe) au sein de la société Cometh avec en perspective le développement de l’activité de la société DataLiance, ainsi qu’une prise de participation par M. [P] [U] à hauteur de 10% (valorisée à 40.000 €) au capital de cette dernière selon certaines modalités et conditions. Cette ouverture au capital s’est effectuée sous forme d’émission de bons de souscription d’actions réservés, le 30 janvier 2020, à M. [P] [U] et effectivement souscrits par ce dernier le 7 février 2020.

Quatre contrats de sous-traitance ont été ainsi conclus entre les sociétés Cometh (donneur d’ordre) et Clarime Conseils (sous-traitant), l’un portant la date du 4 septembre 2019 (prestations internes de management de transition), les trois autres portant les dates des 2 janvier et 1er mars 2020 (prestations externes pour des clients de la société Cometh).

La société Clarime Conseils est intervenue dès le mois de septembre 2019 pour piloter notamment la finalisation de la plateforme DataLiance en coordonnant les intervenants.

Par courriel du 1er juillet 2020, M. [M] [N], en qualité de directeur général de la société Cometh, a adressé un mail à tous les participants au projet de développement de la plateforme DataLiance, s’inquiétant de l’avancement du projet.

Par message électronique du 2 juillet 2020, M. [P] [U] a répondu, en qualité de ‘directeur de la société Cometh’ en proposant de prendre en charge les coûts de développement de la plateforme DataLiance effectués par la société Noveo, suggérant d’intégrer cette somme dans le pacte d’associés relatif à son entrée au capital de la société DataLiance.

En effet, à la suite d’une proposition commerciale acceptée par M. [P] [U], en qualité de ‘directeur DataLiance’, la société Noveo a fourni des prestations informatiques entre les mois de juillet et décembre 2020 dans le cadre du développement de la société DataLiance.

Une autre proposition commerciale de la société Noveo, portant la date du 14 octobre 2020, en vue de fournir des prestations informatiques toujours destinées à la société DataLiance pour les mois d’octobre (2.875 €), novembre (5.750 €) et décembre 2020 (6.612,50 €), a été acceptée par M. [P] [U] également en qualité de ‘directeur DataLiance’.

Le 18 janvier 2021, M. [P] [U] en qualité cette fois de ‘Directeur – Cometh Consulting’ a informé M. [M] [N] de ce que le montant des dépenses représentées par l’intervention de la société Noveo s’élevait à 67.000 €.

Par courriel du 2 avril 2021, M. [M] [N], agissant en qualité de ‘Directeur Général de la société Cometh Group’, a sollicité de M. [P] [U], en sa qualité de ‘Directeur – Cometh Consulting’, un certain nombre d’informations notamment financières pour ‘reprendre le suivi de Noveo’. Le même jour M. [P] [U] lui a répondu en lui fournissant un lien contenant notamment les factures Noveo et le suivi budgétaire.

Le 12 avril 2021, la société Clarime Conseils a résilié avec effet au 12 mai 2021, le premier contrat de sous-traitance.

Par courriel du 26 avril 2021, M. [P] [U], en sa qualité de ‘Directeur – Cometh Consulting’, a informé M. [M] [N], agissant en qualité de ‘Directeur Général de la société Cometh Group’, de ‘la nécessité de formaliser dans un avenant au pacte d’actionnaire (sic) la conversion qui découle des sommes investies dans Dataliance par Clarime (cf. Bordereau envoyé la semaine dernière – règlements des factures Noveo)’.

Par lettre du 25 mai 2021, la société Clarime Conseils a réclamé à la société Cometh le paiement de sa facture du même jour d’un montant de 73.663 € TTC, libellée au nom de la société DataLiance, correspondant à la somme de 7 factures émises par la société Noveo relatives à des prestations rendues entre le mois de juillet et le mois de décembre 2020 dans le cadre du développement de la plateforme DataLiance que la société Clarime Conseils a acquittées.

Par même lettre, elle a sollicité le paiement des ses propres prestations accomplies au profit de la société DataLiance pour un montant de 19.451 € HT.

En raison de divergences importantes, M. [P] [U] et la société Clarime Conseils ont cessé leur collaboration avec M. [M] [N] et la société DataLiance.

A la suite de cette rupture, par courrier du 29 septembre 2021, la société Clarime Conseils a mis, vainement, en demeure la société DataLiance de bien vouloir lui régler les sommes suivantes :

– 73.663 € correspondant au montant payé par la SAS Clarime Conseils à Noveo au bénéfice de la SAS DataLiance ;

– 19.451 € correspondant au travail effectué par la SAS Clarime Conseils en faveur de la SAS DataLiance.

Par acte en date du 12 octobre 2021, la société Clarime Conseils a fait donner assignation à la SAS DataLiance d’avoir à comparaître devant le tribunal de commerce de Versailles.

Par jugement du 7 septembre 2022, le tribunal de commerce de Versailles a :

– Débouté la SAS Clarime Conseils de toutes ses demandes ;

– Condamné la SAS Clarime Conseils à payer à la SAS DataLiance la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamné la SAS Clarime Conseils aux dépens.

Par déclaration du 5 octobre 2022, la société Clarime Conseils a interjeté appel de ce jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions du 14 novembre 2023, la société Clarime Conseils sollicite l’infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et la condamnation de la société DataLiance (i) au remboursement des factures Noveo qu’elle a payées à hauteur de la somme de 73.663 €, en principal, augmentée des intérêts calculés au taux légal à compter de la délivrance de la lettre de mise en demeure du 29 septembre 2021, (ii) au paiement de la somme de 19.451 € au titre du travail qu’elle a effectué au bénéfice de la société DataLiance, en principal, augmentée des intérêts calculés au taux légal à compter de la délivrance de la lettre de mise en demeure du 29 septembre 2021, le tout avec capitalisation selon les dispositions de l’article 1343-2 du code civil, à compter de la date de délivrance de l’assignation, soit le 12 octobre 2021.

Elle sollicite de la cour qu’elle déboute la société DataLiance de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

A titre subsidiaire, elle demande la condamnation de la société DataLiance au paiement de la somme de 12.570 € au titre du travail qu’elle a effectué en 2019 et 2021 au bénéfice de celle-ci, en principal, augmentée des intérêts calculés au taux légal à compter de la délivrance de la lettre de mise en demeure du 29 septembre 2021.

En tout état de cause, elle souhaite que la cour condamne la société DataLiance aux dépens de première instance et d’appel ainsi qu’à lui payer la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions du 8 novembre 2023, la société DataLiance demande à la cour de confirmer le jugement rendu le 7 septembre 2022 par le tribunal de commerce de Versailles en toutes ses dispositions et, en conséquence, de débouter la société Clarime Conseils de l’ensemble de ses demandes, de condamner la société Clarime Conseils aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction pour ceux la concernant au profit de Me Oriane Dontot, JRF & Associés, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ainsi qu’à lui payer une somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 février 2024.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit par l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la créance de la société Clarime Conseils

– Sur la somme de 73.663 € au titre du remboursement des factures Noveo

La société Clarime Conseils fait valoir, au visa des articles 1301 et 1301-2 du code civil, que la demande de remboursement des factures qu’elle a payées à la société Noveo au bénéfice de la société DataLiance est fondée sur la gestion d’affaires qu’elle a assurée pour le compte de cette dernière.

Elle soutient que la gestion d’affaire est caractérisée par la réunion cumulative de plusieurs conditions à savoir :

(i) Une gestion spontanée par le gérant des affaires du maître de l’affaire ;

(ii) L’intention du gérant d’agir pour le compte et dans l’intérêt du maître de l’affaire ;

(iii) Une gestion « à l’insu ou sans opposition du maître » ;

(iv) Un acte de gestion d’affaire utile et opportun.

En conséquence, elle sollicite la condamnation de la société DataLiance au paiement à son profit de l’ensemble des factures émises par la société Noveo, soit 73.663 € en principal, augmentée des intérêts calculés au taux légal à compter de la date de délivrance de la lettre de mise en demeure, outre l’anatocisme sur ces intérêts à compter de la date de l’assignation.

La société DataLiance sollicite la confirmation du jugement entrepris qui a débouté l’appelante de cette demande. Elle objecte que les relations entre les parties s’inscrivaient dans le cadre d’un projet de société matérialisé par un contrat de BSA (bon de souscription d’actions), que la demande d’indemnisation est née par pur opportunisme, suite à la rupture brutale des relations commerciales par la société Clarime Conseils, et qu’enfin les conditions d’application de la gestion d’affaires ne sont pas remplies

Selon les dispositions de l’article 1301 du code civil, ‘Celui qui, sans y être tenu, gère sciemment et utilement l’affaire d’autrui, à l’insu ou sans opposition du maître de cette affaire, est soumis, dans l’accomplissement des actes juridiques et matériels de sa gestion, à toutes les obligations d’un mandataire’.

L’article 1301-2 du même code dispose que ‘Celui dont l’affaire a été utilement gérée doit remplir les engagements contractés dans son intérêt par le gérant.

Il rembourse au gérant les dépenses faites dans son intérêt et l’indemnise des dommages qu’il a subis en raison de sa gestion.

Les sommes avancées par le gérant portent intérêt du jour du paiement’.

La société DataLiance ne conteste pas qu’elle a, seule, bénéficié des prestations fournies par la société Noveo dont elle ne remet en cause ni la réalité, ni la qualité. A cet égard, l’analyse critique menée en juillet 2021 par la société Hayaku, sollicitée en qualité d’expert par la société DataLiance, porte sur la conception générale de la plateforme DataLiance et non sur les prestations livrées par la société Noveo (pièce N°19 – DataLiance).

La société DataLiance ne conteste pas davantage que la société Clarime Conseils a acquitté les factures émises par la société Noveo pour un montant de 73.663 €.

Il résulte des éléments du dossier que la société Clarime Conseils a, à la suite d’un courriel du 1er juillet 2020 de M. [M] [N] s’inquiétant notamment de la propre capacité financière de la société DataLiance à développer sa plateforme (pièce N°6 – DataLiance), accepté d’assumer cette charge sans en demander le remboursement : ‘Suite à notre conversation d’hier, je te confirme ma proposition de prendre en charge les coûts de développement Dataliance réalisés par Noveo’, avec la mention complémentaire suivante ‘Pouvons-nous intégrer cette somme dans le pacte d’associé ” (courriel du 2 juillet 2020 de M. [P] [U] à M. [M] [N] ; pièce 7 DataLiance). Demande à laquelle M. [N] ne donnera pas suite.

Cette proposition de prise en charge par la société Clarime Conseils des coûts Noveo a été mise en oeuvre. En effet, les 7 factures Noveo dont la société Clarime Conseils réclame, originellement à la société Cometh et non à la société DataLiance, le remboursement à hauteur de 73.663 € (lettre du 25 mai 2021 de Clarime Conseils – pièce n° 16 DataLiance ; pièce 9 – Clarime Conseils) sont toutes postérieures au 2 juillet 2020 (28 juillet, 28 août, 28 septembre, 28 octobre, 28 décembre 2020 et 28 janvier 2021). Elles sont chacune libellées au nom de Clarime Conseils.

La cour en déduit que la société Clarime Conseils a accepté de supporter les coûts Noveo pour répondre à l’inquiétude manifestée par M. [M] [N], à propos de la capacité financière de la société DataLiance à poursuivre le développement de la plateforme DataLiance, dans la seule espérance d’une contrepartie, à son profit, qui aurait été matérialisée dans un pacte d’associés lequel n’est pas produit, à supposer qu’il ait existé.

Cette recherche de contrepartie – et non de remboursement – se poursuivra ultérieurement. Ainsi, par courriel du 26 avril 2021, M. [P] [U] a rappelé à M. [M] [N] ‘la nécessité de formaliser dans un avenant au pacte d’actionnaire la conversion qui découle des sommes investies dans DataLiance par Clarime…’. (souligné par la cour)

La société Clarime Conseils ne peut, dans ces circonstances, soutenir qu’elle a agi comme gérant d’affaires dans l’intérêt du maître de l’affaire, la société DataLiance, alors qu’elle a agi dans son propre intérêt. L’absence de formalisation d’une contrepartie au sein d’un pacte d’actionnaires ne peut a posteriori conduire à requalifier en gestion d’affaires ce que le dossier invite à considérer comme un investissement de la société Clarime Conseils en vue du développement de la plateforme DataLiance.

La cour ne fera pas droit à la demande de la société Clarime Conseils de la rembourser des dépenses qu’elle a exposées, prétendument en qualité de gérant d’affaire, en l’espèce les factures Noveo.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

– Sur la somme de 19.451 € au titre du travail effectué par la SAS Clarime Conseils au bénéfice de la société DataLiance

La société Clarime Conseils, au visa de l’article 1303 du code civil, fait valoir que celui qui bénéficie d’un enrichissement injustifié au profit d’autrui doit, à celui qui s’en trouve appauvri, une indemnité au moins égale à la moindre des deux valeurs de l’enrichissement ou de l’appauvrissement, que l’action fondée sur l’enrichissement injustifié ne peut être accueillie lorsque l’appauvri a agi de sa propre initiative et à ses risques et périls, les deux conditions étant cumulatives. Elle expose que lorsqu’un travail a été réalisé sans contrepartie, celui qui l’a effectué peut réclamer une indemnité à celui qui en a bénéficié, dès lors que l’absence de contrepartie est constatée, que tel est le cas en l’espèce puisque la société Clarime Conseils a, par l’intermédiaire de son dirigeant, activement travaillé au développement de la société DataLiance sans obtenir la moindre compensation de sorte qu’elle est bien fondée à obtenir la condamnation de cette dernière au paiement de la somme de 19.451 €, en principal, augmentée des intérêts calculés au taux légal à compter de la date de délivrance de la lettre de mise en demeure, en contrepartie du travail qu’elle a effectué.

A titre subsidiaire, elle fait valoir que si la cour devait considérer le travail qu’elle a effectué comme résultant de la signature du contrat de BSA, il conviendra de noter que les « jours opérationnels » à prendre en compte ne portent que sur la période entre le 3 septembre 2019 et le 31 décembre 2020, correspondant à la durée souhaitée par les parties pour le contrat de BSA, et non sur le travail qu’elle a effectué jusqu’en septembre 2019 et en 2021 au bénéfice de la société DataLiance. Elle rappelle qu’elle a travaillé 13,5 jours en 2021 de sorte qu’elle peut prétendre à une indemnisation à hauteur de 12.570 €.

La société DataLiance sollicite la confirmation du jugement entrepris qui a débouté la société Clarime Conseils de sa demande indemnitaire. Elle soutient que les conditions d’application de l’enrichissement sans cause ne sont pas réunies, aucun appauvrissement ne peut être allégué s’il est la conséquence de l’exécution d’une obligation, d’un contrat, ou d’un accord entre les parties, qu’en effet, M. [P] [U] a effectué un travail pour le compte de la société DataLiance, exclusivement en vertu d’engagements réciproques intégrés dans un contrat d’émission de BSA (10% du capital de la société DataLiance) du 30 janvier 2020 au profit de M. [P] [U] à condition que ce dernier justifie d’une activité journalière au bénéfice de la société DataLiance (109 jours ouvrés et sous réserve également de contribuer personnellement à la vente de 50 licences), qu’en outre, le travail n’a pas été accompli par la société Clarime Conseils mais par M. [P] [U] de sorte que ladite société n’est pas non plus fondée de ce chef en sa demande. Elle conteste la demande subsidiaire de la société Clarime Conseils soutenant que dans l’intention des parties, l’activité journalière débutant le 3 septembre 2019 a été prise en compte dans le cadre de l’accès au capital de la société DataLiance via les BSA.

Il appartient à la société Clarime Conseils de rapporter la preuve d’avoir fourni une prestation au profit de la société DataLiance dont elle n’aurait pas été remunérée.

Elle prétend avoir fourni 53 jours/homme au profit de cette dernière ainsi décomposés : 20,75 jours en 2019, 18,75 en 2020 et 13,5 en 2021).

Elle verse aux débats une feuille de présence (sa pièce 2) émise par la société Cometh mentionnant le nom de M. [P] [U]. Ce document précise que les 20,75 jours effectués en 2019 se répartissent entre les mois de septembre et décembre 2019. Cette pièce ne justifie pas des heures prétendument passées en 2020 et 2021.

L’analyse de ce document révèle qu’il s’agit d’heures consacrées par M. [P] [U] au développement de la plateforme DataLiance sans aucune mention de la société Clarime Conseils.

La cour a par ailleurs relevé que dans les échanges de couriels M. [P] [U] s’est présenté comme ‘Directeur – société Cometh Consulting’ et non comme agissant pour le compte de la société Clarime Conseils.

Par ailleurs, la cour observe que les contrats de sous-traitance mis en place entre les sociétés Clarime Conseils et Cometh sur la même période, prévoient la fourniture de prestations par la société Clarime Conseils avec mise à disposition de M. [P] [U], seul, et ce au profit soit de la société Cometh soit de sociétés tierces sans que la société Clarime Conseils soutienne ne pas avoir été payée à ce titre.

Il se déduit de ce qui précède que la société Clarime Conseils succombe à démontrer qu’elle dispose d’une créance de 19.451 € à l’encontre de la société DataLiance.

A titre subsidiaire, la société Clarime Conseils sollicite le paiement d’une somme de 12.570 € correspondant à 13,5 jours prétendument effectués en 2021 par ses soins au profit de la société DataLiance. Toutefois, elle n’en justifie pas.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société Clarime Conseils de sa demande de paiement principale de 19.451 € et subsidiaire de 12.570 €.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens ainsi qu’en celles relatives à l’indemnité de procédure.

La société Clarime Conseils sera condamnée aux dépens d’appel.

La société Clarime Conseils sera condamnée à une indemnité de 3.000 € en application des dispositions de l’aricle 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement du tribunal de commerce de Versailles du 7 septembre 2022,

y ajoutant,

Condamne la SAS Clarime Conseils aux dépens d’appel, avec distraction au profit de Me Dontot, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

Condamne la SAS Clarime Conseils à verser à la SAS DataLiance la somme de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Bérangère MEURANT, Conseiller faisant fonction de président, et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le conseiller,


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