Détox : un terme proche du dénigrement ?

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Détox : un terme proche du dénigrement ?

Campagne publicitaire contre l’abus de sucre

C’est une campagne publicitaire d’une filiale du groupe Publicis qui a levé ce lièvre juridique : la campagne publicitaire « Détox Sucre » est-elle un dénigrement du sucre ? On aurait pu le penser en raison de l’association des termes « sucre » et « détox » qui aurait pu jeter le discrédit sur le sucre, le terme « détox » se rapportant à l’action de désintoxiquer ou « détoxifier » le corps d’une substance toxique. Les juges en ont décidé autrement, le dénigrement a été exclu.

Conditions du dénigrement

En vertu des dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

En l’occurrence, était incriminée une  campagne publicitaire pour des pots de crème au chocolat porteur des pastilles indiquant une baisse progressive (5, 10, 20, 30, 40 et 50%) de leur teneur en sucre et portant la mention « Diminuez votre consommation de sucre pot après pot » puis « découvrez un programme de détox de sucre ».

Le terme détox, non péjoratif

Le terme « détox » est en lui-même un néologisme, la langue française, qui doit servir de référence puisqu’il comporte un accent, ne connaissant que les mots de même radical « détoxiquer» qui consiste à supprimer les effets nocifs ou toxiques d’une substance et « détoxication » qui se définit comme l’élimination des toxines par un organisme.

Ce terme, appliqué à des produits alimentaires est usuellement compris par le consommateur moyen comme renvoyant à un régime alimentaire équilibré et moins calorique contrecarrant pour un temps les excès des « fêtes » ou de la « vie moderne ». Pris dans le sens qui lui est usuellement attribué dans le domaine alimentaire, le terme « détox » n’est pas en lui-même péjoratif en ce qu’il évoque une modération à l’endroit de produits ou d’habitudes dont les excès peuvent être nocifs.

Une question de santé publique

Par ailleurs, il est constant que les pouvoirs publics français, dans des campagnes d’ampleur et l’OMS (recommandation du 4 mars 2015), encouragent une diminution de la consommation de sucre en raison d’un impératif de santé publique. Un excès de consommation de sucre n’est pas souhaitable, le seul fait d’inviter à la modération n’est pas dégradant pour le produit sucre. Il a été jugé que dans la campagne en cause, le sucre n’est ni discrédité ni déprécié en tant que tel mais critiqué à travers l’abus dans sa consommation.

Liberté d’expression en matière publicitaire

La liberté d’expression, garantie par l’article 10 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, ainsi que l’a jugé la CEDH (Casado Coca c. Espagne, 24 février 1994) est reconnue  à toute personne, sans distinction d’après la nature, lucrative ou non, du but recherché, l’article 10 englobant l’expression artistique (arrêt Müller et autres c. Suisse, 24 mai 1988) mais aussi les informations à caractère commercial (arrêt Markt intern Verlag GinbH et Klaus Beermann) et même la musique légère et les messages publicitaires diffusés par câble (arrêt Groppera Radio AG et autres c. Suisse, 28 mars 1990).

Ainsi, si la liberté d’expression peut se heurter à des limites plus strictes quand elle sert un intérêt privé que quand elle est exercée exclusivement dans l’intérêt commun, l’importance accordée par les autorités françaises, l’OMS et les médias fait de la surconsommation de sucre un débat d’intérêt général dès lors qu’il n’y a pas d’abus. Or, consacrée à la surconsommation de sucre et non à son élimination en des termes modérés et neutres et s’appuyant sur des données objectives mettant en évidence les dangers, d’un abus de consommation de sucre, la communication globale développée par la filiale de la société Publicis était bien couverte par la liberté d’expression.

Limites de la liberté de communication publicitaire

La liberté d’expression ne peut être restreinte que par la loi du 29 juillet 1881 et par les autres textes spéciaux tels les articles 9 et 9-1 du code civil et non dans le cadre de la responsabilité délictuelle de droit commun.

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