Contexte de l’affairePar actes de commissaire de justice en date du 7 décembre 2022, la banque Neuflize OBC a engagé des mesures d’exécution à l’encontre de M. [L] [T], en se basant sur un acte de prêt notarié du 3 mars 2011 et un jugement du 18 mars 2022. Ces mesures comprenaient un nantissement judiciaire provisoire de parts sociales de la SARL Rosal productions, ainsi que des saisies de droits d’associés et de créances entre les mains de la SARL Rosal productions et de la SARL Emet. Contestations de M. [T]En réponse, M. [T] a assigné la banque et Mme [F] [C] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris pour contester ces saisies. Le 24 mai 2023, le juge a ordonné le retrait de l’affaire après une demande écrite des parties. Cependant, à la demande de Mme [C], l’affaire a été rétablie et une audience a été convoquée pour le 18 septembre 2024. Désistement de M. [T]Lors de l’audience du 9 octobre 2024, M. [T] a demandé à la juridiction de constater son désistement d’instance et d’action concernant les mesures d’exécution, de déclarer ce désistement parfait, et de se déclarer incompétent pour statuer sur d’autres demandes. Il a également demandé des dommages-intérêts pour procédure abusive à l’encontre de Mme [C]. Position de la banqueLa société ABN Amro bank N.V., ayant succédé à la banque Neuflize OBC, a demandé à être déclarée recevable dans son intervention volontaire et a accepté le désistement de M. [T]. Elle a également demandé que les demandes reconventionnelles de Mme [C] soient déclarées irrecevables, tout en contestant la validité de ses demandes. Arguments de Mme [C]Mme [C] a soutenu qu’elle avait un intérêt à agir en tant que co-emprunteur et a formulé des demandes reconventionnelles avant le retrait du rôle. Elle a contesté le désistement de M. [T], arguant qu’il n’était pas parfait et qu’elle avait des demandes légitimes à faire valoir. Décision du juge de l’exécutionLe juge a déclaré le désistement de M. [T] parfait, notant que les mesures d’exécution ne concernaient que lui et que Mme [C] n’avait pas d’intérêt légitime à s’opposer à ce désistement. Les demandes de Mme [C] ont été jugées irrecevables, car elles ne portaient pas sur des mesures d’exécution à son encontre. Demande de dommages-intérêtsLa demande de M. [T] pour obtenir des dommages-intérêts à l’encontre de Mme [C] a été rejetée, le juge n’ayant pas trouvé de preuve d’une intention nuisible de sa part. Conclusion de la décisionLe juge a statué que M. [T] devait supporter les dépens et a rejeté les demandes des parties sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. La décision a été rendue exécutoire de droit à titre provisoire. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE PARIS
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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
N° RG 24/81076
N° Portalis 352J-W-B7I-C5IKL
N° MINUTE :
CE aux avocats
CCC aux parties en LRAR
Le :
PÔLE DE L’EXÉCUTION
JUGEMENT rendu le 30 octobre 2024
DEMANDEUR
Monsieur [L] [B] [T]
né le [Date naissance 3] 1961 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Localité 6]
représenté par Me Charles SIMON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #E1497
DÉFENDERESSES
La société Banque NEUFLIZE OBC
RCS PARIS 552 003 261
[Adresse 5]
[Localité 6]
ABN AMRO BANK N.V. – INTERVENANTE VOLONTAIRE SUCCURSALE EN FRANCE
agissant sous le nom commercial “BANQUE NEUFLIZE OBC”
RCS PARIS 850 479 718
venant aux droits de la société anonyme NEUFLIZE OBC
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentées par Me Claire BOUSCATEL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #R0146
Madame [F] [C]
[Adresse 7]
[Localité 4]
représentée par Me Frédéric PELTIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0099
JUGE : Mme Bénédicte DJIKPA, 1ère vice-présidente adjointe, juge de l’Exécution par délégation du Président du Tribunal judiciaire de PARIS.
GREFFIER : Madame Amel OUKINA, greffière principale,
DÉBATS : à l’audience du 09 Octobre 2024 tenue publiquement,
JUGEMENT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoire, susceptible d’appel
Par actes de commissaire de justice du 7 décembre 2022, dénoncés le 12 décembre 2022 à M. [L] [T], agissant en vertu d’un acte de prêt notarié du 3 mars 2011 et d’un jugement du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Tarascon du 18 mars 2022, la banque Neuflize OBC a fait pratiquer à l’encontre de M. [L] [T] :
– un nantissement judiciaire provisoire de parts sociales de la SARL Rosal productions,
– une saisie de droits d’associés ou de valeurs mobilières entre les mains de la SARL Rosal productions,
– une saisie-attribution de créances entre les mains de la SARL Emet,
– une saisie de droits d’associés ou de valeurs mobilières entre les mains de la SARL Emet.
Par actes des 11 et 25 janvier 2023, M. [T] a fait assigner la banque Neuflize OBC et Mme [F] [C] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris en contestation de ces saisies.
Par ordonnance du 24 mai 2023, le juge de l’exécution a ordonné le retrait du rôle, après avoir constaté qu’il avait fait l’objet d’une demande écrite et motivée des parties les 22 et 24 mai 2023.
A la demande de Mme [C], l’affaire a été rétablie et les parties ont été convoquées à l’audience du 18 septembre 2024.
Après un renvoi à leur demande, l’affaire a été plaidée à l’audience du 9 octobre 2024, lors de laquelle elles étaient représentées par leurs conseils.
M. [T] demande à la juridiction de céans :
– de lui donner acte de son désistement d’instance et d’action concernant la contestation des mesures d’exécution forcée que Neuflize OBC a pratiquées contre lui,
– de déclarer ce désistement parfait,
– de se déclarer incompétent pour statuer sur toute autre demande, hors procédure abusive et au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner Mme [C] à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
– de condamner Mme [C] aux dépens postérieurs à la réinscription au rôle et à lui payer la somme de 2 400 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Il fait valoir qu’il a contesté les mesures d’exécution pratiquées à son encontre par la banque Neuflize OBC et a attrait en la cause Mme [C] en sa qualité de partie au prêt notarié fondant les poursuites, sans toutefois former de demande à son encontre. Il ajoute avoir conclu une transaction avec la banque, aux termes de laquelle il s’est engagé à payer certaines sommes et à se désister de ses contestations, la banque s’engageant à donner mainlevée des mesures contestées, ce qu’elle a fait le 23 mai 2023. Il précise avoir consenti à solliciter le retrait du rôle pour permettre la poursuite des discussions entre Mme [C] et la banque. Il soutient que le juge de l’exécution n’a plus de pouvoir pour statuer sur les demandes autres que celles formées pour procédure abusive et au titre de l’article 700 du code de procédure civile, dès lors qu’il n’y a plus de mesure d’exécution ou de contestation en cours. Il ajoute que Mme [C], tierce aux mesures d’exécution contestées, ne démontre aucun intérêt légitime pour s’opposer au désistement.
La société ABN Amro bank N.V., venant aux droit de la société Banque Neuflize OBC, à la suite d’une fusion ayant pris effet le 5 juin 2023, demande à la juridiction de céans :
A titre principal,
– de la déclarer recevable en son intervention volontaire,
– de lui donner acte de son acceptation du désistement de M. [T],
– de déclarer le désistement parfait et les demandes reconventionnelles de Mme [C] irrecevables,
A titre subsidiaire,
– de se dessaisir au profit de la cour d’appel d’Aix-en-Provence concernant les demandes formulées par Mme [C] tendant à la prescription et l’extinction de la créance de la société ABN Amro bank NV,
– de déclarer irrecevable Mme [C] en sa demande de remboursement de la somme de 462 857,65 euros compte tenu de l’autorité de la chose jugée de l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 23 février 2023,
– de débouter Mme [C] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
Au fond et à titre infiniment subsidiaire,
– de fixer le montant de la créance de la banque Neuflize OBC à l’égard de Mme [C] à la somme de 855 000 euros, outre l’indemnité d’exigibilité de 7% et les intérêts depuis le 31 mars 2021 au taux Euribor 1 mois +1% majoré de 3%, outre les dépens afférents aux mesures d’exécution forcée, dont il convient de déduire les sommes saisies sur son compte bancaire au mois d’octobre 2021, soit 538 211,09 arrêtée au 5 juin 2024, outre les intérêts,
– de débouter Mme [C] de l’intégralité de ses demandes,
En tout état de cause,
– de condamner toute partie succombante à payer à la société ABN Amro bank N.V la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle rappelle notamment que M. [T] n’avait formé aucune demande contre Mme [C] au jour de son désistement et que les mesures contestées ne portaient pas sur des biens appartenant à cette dernière. Elle soutient que les demandes reconventionnelles de Mme [C], portées devant une juridiction incompétente et relatives à des mesures déjà contestées devant le juge de l’exécution de Tarascon, sont irrecevables et ne constituent donc pas un motif légitime justifiant le refus de désistement d’instance.
Mme [C] demande au juge de l’exécution :
A titre liminaire,
– de juger qu’elle a un intérêt à agir au titre du régime de la communauté légale et en tant que co-emprunteur avec M. [T] pour formuler des demandes reconventionnelles dans le cadre des contestations réalisées le 7 décembre 2022,
– de constater qu’elle a formulé des demandes reconventionnelles avant le retrait du rôle,
– d’ordonner la réinscription au rôle,
– de constater l’absence d’acceptation du désistement,
– en conséquence, de juger que le désistement n’est pas parfait et ne produit aucun effet,
A titre principal,
– de constater que l’objet du prêt du 3 mars 2011 a disparu du fait de la dissolution de la société intervenue suite à la vente du chalet et au remboursement du prêt familial, que la banque n’a pas exigé le remboursement du prêt, que la créance de la banque est prescrite faute pour la banque d’avoir exigé son remboursement dans le délai de deux ans et de rejeter la validité du titre exécutoire,
– en conséquence, d’ordonner la mainlevée des mesures réalisées le 7 décembre 2022 portant sur les parts de M. [T] dans les sociétés Rosal et Emet,
A titre subsidiaire,
– de juger que la créance de 1 233 550,37 euros revendiquée par la banque Neuflize OBC au titre du prêt du 3 mars 2011 a été éteinte du fait de la transaction conclue entre la banque et M. [T] le 11 avril 2023,
– en conséquence, de constater que la demande reconventionnelle de Mme [C] d’être déchargée de cette dette au titre de sa qualité de co-emprunteur est acceptée par la banque,
A titre infiniment subsidiaire,
– de juger qu’à défaut d’avoir réglé l’intégralité de la somme de 1 233 550,37 euros, M. [T] reste solidairement tenu avec Mme [C] de la créance de la banque Neuflize OBC quels que soient les termes de la transaction du 11 avril 2023
En tout état de cause,
– de débouter M. [T] et la banque Neuflize OBC de leurs demandes,
– de condamner M. [T] à payer à Mme [C] la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient avoir un intérêt légitime à s’opposer au désistement, dès lors qu’elle a formé une demande reconventionnelle tendant à voir juger qu’elle n’était plus redevable d’aucune somme envers la banque Neuflize OBC, contrairement à la position soutenue par M. [T] et par la banque. Elle ajoute être d’autant plus légitime que le désistement est fondé sur un protocole transactionnel conclu entre M. [T] et la banque Neuflize OBC auquel elle n’est pas partie mais qui la concerne puisque la banque a accepté la divisibilité et la désolidarisation de sa créance. Elle soutient encore que la créance de la banque est prescrite et, en toute hypothèse, qu’elle est éteinte par la transaction susvisée.
Il est fait référence, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs conclusions écrites visées à l’audience du 10 novembre 2023.
La décision a été mise en délibéré au 30 octobre 2024.
Sur le désistement
Aux termes de l’article 394 du code de procédure civile, le demandeur peut, en toute matière, se désister de sa demande en vue de mettre fin à l’instance.
L’article 395 du même code dispose que le désistement n’est parfait que par l’acceptation du défendeur et que, toutefois, l’acceptation n’est pas nécessaire si le défendeur n’a présenté aucune défense au fond ou fin de non-recevoir au moment où le demandeur se désiste.
Enfin, l’article 396 précise que le juge déclare le désistement parfait si la non-acceptation du défendeur ne se fonde sur aucun motif légitime.
Dans la présente instance, M. [T] se désiste de son instance et de son action, désistement accepté par la banque, mais non par Mme [C].
Pour s’opposer à ce désistement Mme [C] soutient qu’elle a formé des demandes reconventionnelles, dès avant le retrait du rôle de l’affaire, aux fins de voir statuer sur la créance de la banque à son égard.
Toutefois, il convient de constater que, d’une part, les mesures d’exécution forcée du 7 décembre 2022 faisant l’objet de la contestation dont a été saisie la juridiction de céans par M. [T], n’ont été pratiquées qu’à l’encontre de ce dernier et sur ses biens, Mme [C] étant tierce à ces mesures, et, d’autre part, la mainlevée de l’ensemble de ces mesures est intervenue le 23 mai 2024.
Mme [C] n’a dès lors aucun intérêt légitime à s’opposer au désistement d’une action relative à des mesures qui ne la concernaient pas et qui, en toute hypothèse, ont été levées.
Il sera rappelé, en outre, qu’il résulte des dispositions de l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire que le juge de l’exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit.
La juridiction de céans n’étant saisie d’aucune mesure d’exécution forcée poursuivie à l’encontre de Mme [C], il n’entre pas dans ses pouvoirs de statuer sur l’existence et le montant de la créance que pourrait détenir à son encontre la banque Neuflize OBC, aux droits de laquelle vient la société ABN Amro bank N.V.
Aussi, les demandes de Mme [C] tendant à voir juger que la créance de la banque est éteinte, notamment par l’effet de la prescription, qu’elle en serait déchargée ou que M. [T] en serait solidairement débiteur, sont irrecevables en l’absence de toute mesure d’exécution forcée pratiquée au préjudice de Mme [C] et qui serait contestée devant la juridiction de céans.
Ces demandes, irrecevables, ne sauraient donc constituer un motif légitime pour s’opposer au désistement de M. [T].
Dans ces conditions, il y a lieu déclarer le désistement de M. [T] parfait.
Sur la demande de dommages-intérêts
Aux termes de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
M. [T], qui sollicite la condamnation de Mme [C] à des dommages-intérêts sur ce fondement, échoue à démontrer que Mme [C] aurait agi dans l’intention de lui nuire ou qu’elle aurait fait preuve d’une légèreté blâmable dans l’appréciation de ses droits, constitutive d’un abus.
Sa demande sera donc rejetée.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
L’issue du litige commande de laisser les dépens à la charge de M. [T], qui se désiste.
L’équité ne commande pas de le condamner sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Le juge de l’exécution, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe,
Déclare recevable l’intervention volontaire de la société ABN Amro bank N.V., venant aux droit de la société Banque Neuflize OBC,
Déclare irrecevables les demandes de Mme [F] [C],
Constate le désistement de M. [L] [T] de son instance et de son action,
Rejette la demande de dommages-intérêts formée par M. [L] [T],
Condamne M. [L] [T] aux dépens,
Rejette les demandes formées par les parties sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Rappelle que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
Le greffier Le juge de l’exécution