Designer : 22 juin 2020 Cour d’appel de Paris RG n° 19/04001

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Designer : 22 juin 2020 Cour d’appel de Paris RG n° 19/04001
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 10

ARRÊT DU 22 JUIN 2020

(n° , 12 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/04001 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7LV4 (Absorbant le RG n° 19/05148)

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Janvier 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 15/15343

APPELANTS

Monsieur [O] [S]

Domicilié [Adresse 2]

[Localité 7]

né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 8]

Représenté par Me Florence BONA de l’AARPI BJF, avocat au barreau de PARIS, toque : D1099

Représenté par M. Jean-François BETREMA, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

SA HEDIOS PATRIMOINE

Ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Philippe MEYLAN de la SCP TUFFAL- NERSON DOUARRE et Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0505

SA MMA IARD venant aux droits de COVEA RISKS

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 5]

N° SIRET : 440 048 882

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

SOCIÉTÉ CIVILE MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de COVEA RISKS

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 5]

N° SIRET : 775 652 126

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentées par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Représentées par Me Dorothée LOURS, avocate au barreau de PARIS, toque : P133

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 09 Mars 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère

Monsieur Stanislas de CHERGÉ, Conseiller

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l’audience par Madame [Y] [J] dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par M. Edouard LOOS, Président et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

M. [O] [S] a confié à la société Hédios Patrimoine un mandat de recherche des offres d’opérations en « Girardin Solaire ».

Le dispositif fiscal, dit « Girardin Industriel », prévu par les articles 199 undecies B et 199 undecies D du code général des impôts, consistait en la souscription au capital de sociétés de portage réalisant des investissements dans le domaine de la production d’énergie renouvelable outre-mer, permettait aux investisseurs de réduire leur impôt sur le revenu.

M. [O] [S] a souscrit au produit « Girardin solaire Hélios 2010 », le 25 juin 2010 et a apporté 15 000 euros aux parts de sociétés en participation « Sun Hédios 100 et suivantes », dont la société anonyme Hédios Patrimoine était gérante.

Cet investissement, stipulé à fonds perdus, devait financer, en plus d’un crédit fournisseur, l’acquisition et l’installation de centrales photovoltaïques sur l’île de la Réunion,qui étaient louées aux sociétés Hédios rendement (100 et suivantes) durant au moins 5 ans, à la suite de quoi elles étaient cédées à un prix symbolique et la société de portage était dissoute. Le crédit fournisseur était réglé par compensation des loyers et de la valeur résiduelle de la cession.

M. [S] a bénéficié au titre des ses revenus 2010 d’une réduction d’impôt.

Par courrier du 23 mai 2013, l’administration fiscale lui a adressé une proposition de rectification concernant son investissement dans la société en participation Sun Hédios 102, au motif que l’avantage fiscal ne peut être revendiqué qu’à partir du moment où l’investissement peut faire l’objet d’une exploitation effective et par suite être productif de revenus

A ce titre, elle précisait que, s’agissant des centrales photovoltaïques, le fait générateur de la réduction d’impôt peut être considéré comme établi si les installations sont achevées et livrées en état de fonctionner à la société, au plus tard, le 31 décembre de l’année civile au titre de laquelle les investisseurs sollicitent le bénéfice de la réduction d’impôt et la mise en production des investissements ne dépend plus que de leur raccordement au réseau public d’EDF et que cette dernière condition peut être considérée comme satisfaite par le dépôt d’un dossier complet de demande de raccordement auprès d’EDF et la certification par le comité national pour la sécurité des usagers et de l’électricité (CONSUEL) de l’achèvement et de l’état de fonctionnement des installations, avant le 31 décembre de l’année civile. Elle indiquait que la société en participation Sun Hédios 102 n’avait déposé aucune demande de raccordement au réseau d’EDF et que la centrale photovoltaïque n’avait pas reçu l’attestation de conformité du CONSUEL.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 27 février 2015, M. [S] a mis en demeure la société Hedios Patrimoine de procéder au paiement de l’intégralité des conséquences dommageables de son défaut de conseil puis l’a attrait devant le tribunal de grande instance de Paris.

Le tribunal, par jugement du 10 Janvier 2019 a statué comme suit :

Déboute M. [O] [S] de l’ensemble de ses demandes ;

Déboute la société Hedios Patrimoine de sa demande formée à l’encontre des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles au titre de la garantie « Défense/Recours » ;

Condamne M. [O] [S] à payer à la société Hedios Patrimoine la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code deprocédure civile ;

Condamne la société Hedios Patrimoine à payer aux sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles la somme de 1 500 euros sur lefondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette le surplus des prétentions ;

Condamne M. [O] [S] aux dépens de l’instance principale ;

Condamne la société Hedios Patrimoine aux dépens de l’appel en garantie ;

Autorise la SCP TNDA à recouvrer directement contre M. [O] [S] les frais compris dans les dépens dont elle aurait fait l’avance sans en avoir reçu provision ;

Autorise la SCP RAFFIN à recouvrer directement contre la société Hedios Patrimoine les frais compris dans les dépens

M. [S] a interjeté appel du jugement.

Par conclusions signifiées le 08 octobre 2019, M. [O] [S] demande de :

Au visa du contrat de souscription du produit dénommé « Girardin Solaire Hedios 2010» , de la proposition de rectification, de l’avis d’imposition supplémentaire à l’impôt sur le revenu,

– Réformer la décision du TGI de Paris en date du 10 janvier 2019 en ce qu’elle a :

o Débouté Monsieur [O] [S] de ses demandes de dommages-intérêts et l’a condamné à payer 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

o Conclu à l’absence de responsabilité de la société Hedios Patrimoine au principal motif d’une évolution du régime fiscal applicable de l’article 199 undecies B du CGI et d’une confusion totale du régime fiscal applicable à une exploitant et à une contribuable financeur d’une centrale photovoltaïque alors même qu’elle a exactement apprécié que ni le bulletin de souscription ni la présentation qui est faite du produit ne mentionnent précisément le fait générateur de la réduction d’impôt et que le conseil en gestion de patrimoine doit informer clairement et complètement le souscripteur de la substance du produit qu’il propose ;

Et statuant de nouveau :

– Dire recevable et bien fondé l’appelant en ses demandes à l’encontre de la société Hedios Patrimoine

– Constater en conséquence le droit à indemnisation acquis en l’espèce au profit des demandeurs ;

– Condamner en conséquence la société Hedios Patrimoine au règlement en principal de :

– la somme de 30 163 euros , majorée des intérêts de retard à compter du 10 mars 2015 au profit des demandeurs; la somme de 5 000 euros à titre de réparation du préjudice moral ;

Subsidiairement :

– Constater la caducité du contrat de souscription dès lors que la centrale photovoltaïque n’a pas été livrée au 31 décembre 2010

– Condamner en conséquence la société Hedios Patrimoine à rembourser le montant de la souscription d’un montant de 15 000 euros

– Condamner en conséquence la société Hedios Patrimoine des conséquences financières dommageables liées au redressement fiscal pour un montant de 4 628 euros

– Débouter le Conseil en Gestion de Patrimoine, la société Hedios Patrimoine et les sociétés MMa Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

– Assortir le jugement à intervenir de l’exécution provisoire sans garantie;

– Assortir l’ensemble des condamnations des intérêts légaux sur la totalité des sommes ;

– Faire application de l’article 1343-2 du Code civil avec capitalisation des intérêts ;

– Condamner la société Hedios Patrimoine à payer aux demandeurs la somme de 3 500 euro au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– La condamner aux entiers dépens.

Par conclusions signifiées le 02 mars 2020 la société de COVEA RISKS, aux droits de laquelle viennent les sociétés MMa Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles demandent à la cour :

Vu les conditions du contrat d’assurance souscrit par la CNCGP auprès de COVEA RISKS, aux droits de laquelle viennent les sociétés MMa Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles ; l’activité de monteur du produit incriminé par les investisseurs, tenue par la société Hedios Patrimoine ; les articles L 112-6, L 121-1, L 124-1-1, et L 124-3 du Code des Assurances ; l’article 803 du code de procédure civile,

– Ordonner la révocation de l’ordonnance de clôture pour les raisons évoquées en préambule des présentes conclusions, reporter la clôture au jour des plaidoiries et admettre les présentes conclusions

– Constater que M. [S] ne formule aucune demande à l’encontre des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles

– Prononcer la mise hors de cause des sociétés MMa Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles

– Confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 10 janvier 2019

A titre principal

– dire et juger qu’aucune garantie n’est due au titre de l’activité de monteur du produit fiscal exercée par Hedios Patrimoine,

– rejeter par conséquent toute demande formée à l’encontre des sociétés MMa Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles ;

A titre très subsidiaire

– dire et juger que :

M. [S] ne rapporte pas la preuve d’une créance de responsabilité civile qu’il détiendrait à l’encontre de la société Hedios Patrimoine, ainsi, sans objet, la question d’une éventuelle garantie à ce titre,

– confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 10 janvier 2019

– rejeter par conséquent toute demande formée à l’encontre des sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles.

S’agissant de la demande de caducité présentée par M. [S]

– dire et juger que les conditions contractuelles de cette caducité ne sont pas réunies ;

que les conséquences de cette caducité ne peuvent être supportées par un assureur de responsabilité civile, en l’occurrence la Compagnie MMA IARD ;

– confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 10 janvier 2019

A titre infiniment subsidiaire,

– constater que le contrat souscrit par la CNCGP auprès de la compagnie Covea Risks, aux droits de laquelle viennent les sociétés MMa Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles prévoit un plafond de garantie de 4.000.000 d’euros au titre de la garantie Responsabilité Civile Professionnelle,

– constater que l’ensemble des réclamations liées à la souscription des produits de défiscalisation montés par la société Hedios Patrimoine constitue un sinistre sériel,

– designer tel séquestre qu’il plaira au Tribunal avec pour mission, n’excédant pas une période de 5 ans, de conserver les fonds résultant d’une éventuelle condamnation dans l’attente de décision définitive tranchant les différentes réclamations formées à l’encontre de la société Hedios Patrimoine concernant le même sinistre et pour, le cas échéant, procéder à une répartition au marc le franc des fonds séquestrés,

– dire et juger que la somme correspondant à une franchise par sinistre, soit 15 000 euros à la charge de la société Hedios Patrimoine, doit être déduite du montant de chaque condamnation prononcée individuellement au profit de chaque investisseur, dans le cas où le Tribunal devait d’une part retenir la responsabilité de la société Hedios Patrimoine, d’autre part la garantie des sociétés MMa Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles et enfin l’absence de globalisation dans le cas présent.

Sur la garantie défense recours :

A titre principal ;

– confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 10 janvier 2019

– dire et juger :

qu’aucune garantie n’est due au titre de l’activité de monteur du produit fiscal exercée par la société Hedios Patrimoine,

que dès lors que la société Hedios Patrimoine s’est fait assister par l’avocat de son choix, sans proposition à l’assureur, les frais et honoraires de celui-ci restent à sa charge,

que la société Hedios Patrimoine n’a commis aucune faute en refusant à la société Hedios Patrimoine le bénéfice de la garantie ‘défense/recours’ ,

que la société Hedios Patrimoine n’invoque aucun préjudice né, certain et actuel, en lien de causalité avec la faute reprochée aux sociétés MMa Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles.

– rejeter par conséquent toute demande de condamnation formée à l’encontre des sociétés MMa Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles par la société Hedios Patrimoine au tire de la garantie Défense Recours ;

A titre subsidiaire ;

– constater que le contrat souscrit par la CNCGP auprès de la compagnie Covea Risks, aux droits de laquelle viennent les sociétés MMa Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles prévoit un plafond de garantie de 200 000 euros au titre de la garantie Défense Recours,

– constater que l’ensemble des réclamations liées à la souscription des produits de défiscalisation montés par la société Hedios Patrimoine constitue un sinistre sériel, et faire application du plafond de garantie à hauteur de 200 000 euros pour l’ensemble des réclamations liées au produit GIRARDIN SOLAIRE HEDIOS 2010.

Reconventionnellement,

– condamner tout succombant, à payer aux sociétés MMa Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et tout succombant, aux entiers dépens de la présente instance.

Par conclusions signifiées le 3 mars 2020 la société Hédios demande à la cour d’appel de Paris ;

Sur la demande de révocation de l’ordonnance de clôture,

Vu l’article 803 du code de procédure civile

‘ Révoquer l’ordonnance de clôture en date du 17 février 2020, reporter la date de clôture à la date des plaidoiries, recevoir les présentes conclusions ;

Au fond, vu les articles 1134, 1147 du Code civil, l’article 564 du Code de procédure civile,

Confirmant partiellement le jugement attaqué en ce qu’il a débouté le demandeur de ses demandes,

‘ dire et juger :

que M. [S] a expressément déclaré connaître les caractéristiques du Girardin Industriel, lequel est par définition exposé à un risque de requalification fiscale ; qu’il a au surplus été dûment informé à travers les documents contractuels des caractéristiques des parts Sun Hedios souscrites et en particulier de l’existence de risques, notamment d’un risque de requalification fiscale inhérent au Girardin Industriel ; que la société Hedios Patrimoine a rempli son obligation de conseil et d’information à l’égard de M. [S] ;

que l’appelant n’est pas fondé à obtenir la caducité de son engagement de souscription de parts de SEP ; que les souscriptions ont bien été réalisées, les sociétés ayant été constituées ; que les investissements ont été réalisés et que ce seul fait écarte l’une des deux conditions de la caducité lesquelles sont cumulatives ; que le défaut de livraison des centrales au 31 décembre 2010 n’est pas établi par la référence à la définition fiscale retenue en 2017 et inconnue lors de la souscription ; que M. [S] , qui n’est pas un simple consommateur mais a déclaré connaître le Girardin Industriel, a par ailleurs souscrit en connaissance de l’existence d’un risque de défaut de livraison au 31 décembre 2010 qui est expressément mentionné et qu’il a accepté de prendre ; qu’il ne peut y avoir de doute pour le souscripteur sur les termes de la clause de caducité puisqu’il ne l’invoque que plusieurs années après avoir assigné, lque la clause n’a pas lieu d’être interprétée ; que l’interprétation proposée revient à dénaturer la caducité en une résolution ; qu’au demeurant Hedios Patrimoine ne peut restituer des sommes employées au nom des SEP ; que cet emploi des fonds, qui caractérise l’xécution du contrat écarte toute caducité

que M. [S], contrairement aux conseils de la société Hedios Patrimoine, et en dépit de l’assistance qui lui était fournie à ce titre, n’a pas engagé de recours administratif contre sa rectification fiscale ; qu’il a refusé de supporter la contestation fiscale intrinsèque au produit ; qu’en acquiesçant ainsi à la position de l’administration fiscale il est lui-même à l’origine de son préjudice ; que sa demande est ainsi sans lien avec les fautes alléguées de la société Hedios Patrimoine.

Subsidiairement, sur le préjudice :

‘ dire et juger que M. [S] ne peut être indemnisé qu’au titre d’une perte de chance ; qu’à ce titre la réparation de M. [S] ne saurait être intégrale, et ce d’autant moins qu’il a fait le choix de ne pas contester la réclamation de l’administration fiscale, contrairement au conseil qui lui a été donné, alors même que les chances de succès de ces recours n’étaient pas illusoires ; qu’il ne peut prétendre faire assumer à la société Hedios Patrimoine les conséquences de ce choix ;

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour devait la condamner au paiement de toute somme au souscripteur, et infirmant le jugement sur ce point :

‘ Condamner les sociétés MMA à garantir et tenir indemne la société Hedios Patrimoine de toutes condamnations éventuelles qui pourraient être mises à sa charge ;

En tout état de cause

‘ Débouter M. [S] de l’ensemble de ses demandes

‘ Constater le caractère abusif de son appel ;

‘ Condamner M [S] à verser 1 000 euros à la société Hedios Patrimoine pour procédure abusive outre la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile cette somme s’ajoutant à sa condamnation de première instance;

‘ Dire et juger que le refus de prise en charge par MMA des dossiers de mise en cause de la responsabilité civile de Hedios Patrimoine au titre des produits GSH, dont le dossier de M [S] est constitutif d’une faute contractuelle volontaire justifiant la réparation du préjudice en résultant pour Hedios Patrimoine, laquelle a dû faire l’avance de sommes importantes pénalisant ses comptes et sa trésorerie et en conséquence sa capacité à développer son activité ;

‘ Condamner en conséquence solidairement les sociétés MMA à indemniser la société HEDIOS à hauteur du montant des honoraires payés pour sa défense dans le cadre du contentieux engagé

par l’appelant, sur production des factures acquittées ;

Subsidiairement,surseoir à statuer sur le montant du préjudice dans l’attente de l’issue des litiges ; condamner les MMA à verser la somme de 15 000 euros à titre de provision

‘ Condamner les sociétés MMA à verser 6 000 euros à la société Hedios Patrimoine au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ Condamner les sociétés MMA aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP TNDA prise en la personne de Maître Meylan, avocat, aux offres de droit dans les termes de l’article 699 du CPC et au paiement d’une somme de 4 000 euros au titre de l’article 700

‘ condamner M. [S] aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP TNDA.

SUR CE,

Aux termes de l’article 783 du code de procédure civile, il peut être admis le dépôt de conclusions après l’ordonnance de clôture.

En l’espèce, compte tenu de l’ordonnance de jonction, intervenue à la suite des appels formés par l’appelant et la société Hedios, le dépôt des conclusions récapitulatives en date des 02 et 03 mars 2020, sans apport de nouveaux moyens, autorise la révocation de l’ordonnance de clôture prononcée le 17 février 2020. L’ordonnance de clôture est ainsi reportée au 09 mars 2020.

S’agissant de la demande de mise hors de cause des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, au motif que M. [S] ne formule aucune demande à leur encontre. Il apparaît que la société Hedios présente une demande dirigée contre lesdites sociétés, que dès lors la mise hors de cause des sociétés MMA ne sera pas prononcée.

Sur la responsabilité de la société Hedios Patrimoine au titre de ses obligations d’information et de conseil

M. [S] soutient en substance qu’en sa qualité de professionnelle, la société Hedios, conseil en gestion de patrimoine, devait informer le client que la réduction d’impôt visée à l’article 199undecies B du CGI suppose que l’investissement soit susceptible de produire un revenu au 31 décembre de l’année de l’investissement ; qu’à défaut, aucune réduction d’impôt n’est applicable ; qu’il convient de ne pas confondre le régime fiscal applicable à la société d’exploitation localisée en Outre-Mer de l’immobilisation financée et au contribuable, simple financeur de l’immobilisation.

Il critique la décision du tribunal de Paris qui aurait procédé à une totale confusion entre les conditions d’éligibilité et le fait générateur de la réduction d’impôt applicable à l’exploitant d’une centrale photovoltaïque et la date du fait générateur de la réduction d’impôt applicable à un souscripteur qui n’est pas exploitant de la centrale photovoltaïque ainsi financée et à une erreur de droit en retenant une évolution du régime fiscal applicable en matière d’application de la réduction d’impôt visée à l’article 199 undecies B du CGI, lequel n’a jamais varié depuis l’origine.

La société Hedios réplique qu’elle n’a commis aucun manquement à l’égard de M. [S] qui a, de sa propre initiative, décidé de souscrire au produit Girardin Hedios Solaire par l’intermédiaire de Hedios Patrimoine , qu’il a été averti qu’elle n’était pas tenue d’une obligation de résultat mais de moyen ; qu’elle justifie avoir rempli ses obligations d’information, que M. [S] a complété et signé électroniquement un mandat de recherche par lequel il déclarait connaître les caractéristiques de ce type d’investissement particulier et les divers risques qui y sont associés ; qu’il a été informé du mécanisme et du risque fiscal de reprise mais à la date de souscription et d’émission des attestations , elle ne connaissait pas et ne pouvait anticiper l’interprétation de l’administration fiscale.

Ceci étant exposé,

La société Hedios est intervenue, dans l’offre Sun Hedios, en qualité de conseil en gestion de patrimoine et monteur du produit Girardin solaire Hedios 2010.

Le conseiller en gestion de patrimoine est tenu d’un devoir d’information et de mise en garde. Il doit notamment avoir préalablement vérifié que l’investissement proposé permet l’obtention des résultats fiscaux escomptés.

Dans la brochure remise par la société Hedios Patrimoine, il est précisé que ‘ la centrale solaire doit impérativement être livrée avant la fin de l’année de votre défiscalisation’ et qu’ une mise en location doit être mise en place pour une durée de 5 ans minimum, auprès d’une société exploitante outre-mer. Il est ajouté : ‘Vous risquez un redressement fiscal (perte de votre réduction d’Impôt sur le Revenu) dans les 2 cas suivants :

1. Si la société d’exploitation, qui loue la centrale solaire, fait défaut avant la fin des 5 ans et si la centrale n’est pas relouée dans un délai raisonnable. Le défaut d’exploitation est cependant très limité sur ce secteur d’activité, grâce à la signature d’un contrat avec EDF garantissant sur 20 ans le rachat de l’électricité produite.

2. Si le monteur en défiscalisation n’effectue pas un contrôle rigoureux de la réalité industrielle des opérations sur place ou s’il ne respecte pas le formalisme imposé par l’administration fiscale.’

La présentation du produit mentionne clairement les risques encourus en cas de non livraison dans les délais impartis. Au terme de la description de l’opération l’investisseur n’ignorait pas que le bénéfice du dispositif proposé était soumis à des conditions fixées par la loi fiscale et que l’opération comportait des risques.

En droit, il ne peut être reproché au conseiller en gestion de patrimoine de ne pas avoir identifié une position fiscale inconnue au moment de la souscription.

M. [S] maintient devant la cour, que le risque de rectification au titre d’un défaut de raccordement au 31 décembre 2010 était connu lors de sa souscription du produit Girardin Solaire Hedios(GSH), par application de l’article 199 undecies B du CGI.

En espèce, lors de la souscription de M. [O] [S], intervenue le 25 juin 2010, les dipositions de l’article 199 undecies B du CGI prévoyaient, pour la période contrôlée, que : « La réduction d’impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l’année au cours de laquelle l’investissement est réalisé ». Les critères d’éligibilité devaient s’apprécier au cas présent au 31 décembre 2010.

L’article 95 Q de l’annexe II au CGI précisait, pour la période contrôlée, que : « La réduction d’impôt prévue au I de l’article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée au titre de l’année au cours de laquelle l’immobilisation est créée par l’entreprise ou lui est livrée ».

Il résulte de la combinaison de ces dispositions, que les dates du fait générateur de la réduction d’impôt applicable à l’exploitant d’une centrale photovoltaïque et applicable à un souscripteur sont distinctes.

Le caractère productif de l’investissement recouvre deux possibilités, celle du propriétaire qui exploite en direct, auquel cas les revenus sont constitués par la vente de l’électricité produite et celle de la location de l’équipement qui procure des loyers. Dans cette dernière hypothèse, le paiement de loyers caractérise le fait générateur. Selon ce schéma, l’obligation incombant à la société Hedios, consistait en la livraison de la centrale solaire avant la fin de l’année de la défiscalisation. Or la livraison a été réalisée, les demandes de raccordement ont été déposées par Hedios Patrimoine en 2010.

Par décret n° 2010-1510 du 09 décembre 2010, le gouvernement a imposé un moratoire de trois mois sur le rachat d’électricité d’origine photovoltaïque. Les investissements en énergie renouvelable dans les Dom Tom ont été suspendus. Puis, les investissements photovoltaïques ont été exclus du dispositif Girardin Industriel à compter de 2011.

En 2013, l’administration fiscale a considéré que l’investissement réalisé par M. [S] n’était pas éligible aux dispositions prévues par l’article 199 Undecies B du code général des impôts au motif que l’investissement n’avait pas été « réalisé » au 31 décembre 2010, en ce sens qu’ aucune demande de raccordement n’avait été effectuée à cette date. Elle a estimé que le fait générateur était le raccordement au réseau, y compris lorsque les équipements sont donnés en location à un exploitant et sont productif de revenus.

La question posée est de savoir si cette position de l’administration fiscale était connue lors de la souscription du produit Girardin Solaire Hedios(GSH), en application de l’article 199 undecies B du CGI.

Il ressort des développements précédents qu’au regard de la rédaction de l’article 199 Undecies B précité, la réduction d’impôt intervenait au titre de l’année au cours de laquelle l’immobilisation était créée ou livrée. Il n’est démontré par aucun document que la doctrine administrative retenait le critère d’un raccordement effectif avant 2011. En revanche, il est établi que la position adoptée par les opérateurs ressort de l’instruction fiscale 5 B-2-07 du 30.01.2007, qui fixait la date de réduction d’impôt à la date de livraison au sens de l’article 1604 du code civil.

Cette position était celle suivie par les fiscalistes et notamment par Me Scheinkmann, avocat, ancien inspecteur des impôts, établi dans les DOM, spécialiste de la défiscalisation en loi Girardin Industrielle.

Il en résulte que l’administration fiscale a, en 2013, introduit une condition supplémentaire aux conditions d’éligibilité, qui n’a été entérinée par le Conseil d’Etat qu’au mois d’avril 2017. Dès lors, c’est à bon droit que les premier juges ont retenu que l’information avait été donnée conformément au droit positif à la date de la souscription. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts à ce titre.

Sur la caducité du contrat

Selon l’appelant, la décision contestée procède à une erreur d’analyse de la clause de caducité dès lors qu’elle considère que la caducité a pris fin par la réalisation de l’apport alors même que la livraison de la centrale n’est pas intervenue ainsi qu’en atteste la proposition de rectification fiscale.

En réplique, la société Hedios Patrimoine soutient que les conditions de la caducité ne sont pas remplies ;que le défaut de livraison des centrales au 31 décembre 2010 n’est pas établi ; que les souscriptions ont été réalisées et les sociétés constituées ; que les investissements ont été réalisés et que ce seul fait écarte l’une des deux conditions cumulatives de la caducité.

Ceci étant exposé,

La convention liant les parties dispose que : l’engagement deviendra automatiquement caduc si, à cette date,( 31 décembre 2010) les conditions suivantes ne sont pas réalisées :

a. livraison de la centrale,

b. signature de la documentation contractuelle afférente à l’opération, notamment les statuts de la SEP, dans le forme, en substance, de la documentation en projet qui m’a été indiquée ci-dessus [‘]

Ces stipulations, prévues dans l’intérêt du souscripteur, implique que la livraison de la centrale soit réalisée et que les statuts de la SEP soient régularisés.

En l’espèce, il ressort de la proposition de rectification, adressée par l’administration fiscale, que l’investissement a été réalisé au sein de la société Sun Hedios 102 et que les statuts de la SEP ont été signés, que la société Sun Hedios a été enregistrée avant le 31 décembre 2010.

Il s’ensuit, ainsi que l’a jugé le tribunal, que l’appelant ne peut se prévaloir d’aucune caducité.

Sur la procédure abusive

La société Hedios Patrimoine ne démontre pas que l’action entreprise par l’appelant ait dégénéré en abus,sa demande de dommages et intérêts sera rejetée.

Il paraît équitable d’allouer à la société Hedios Patrimoine la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles qu’elle a dû exposer en cause d’appel.

Sur l’assurance des sociétés MMA Iard et Iard Assurances Mutuelles

La société Hedios Patrimoine critique le refus de prise en charge par MMA des dossiers de mise en cause de la responsabilité civile de Hedios Patrimoine au titre des produits GSH, dont le dossier de M [S]; elle soutient est constitutif d’une faute contractuelle volontaire justifiant la réparation du préjudice en résultant pour Hedios Patrimoine.

S’agissant de la garantie « Défense/recours », elle fait valoir que, contrairement à ce qu’a décidé le tribunal, la question qui se posait et se pose n’est pas celle d’une demande de désignation d’un avocat en exécution de la clause de défense/recours, mais du fondement du refus de prendre en charge sa défense.

Les sociétés MMA opposent une absence de garantie dès lors que le contrat souscrit ne garantit pas les interventions en qualité de monteur ; qu’en tout état decause, les conditions de mise en jeu de la garantie ne sont pas réunies.

Ceci étant exposé,

La demande au titre de la garantie ‘Défense/recours’ soulève deux questions, celle des conditions de prise en charge des dossiers de mise cause de la responsabilité civile de la société Hedios et celle de la mise en jeu de la garantie.

Il est acquis que la garantie au titre dela responsabilité civile a vocation à s’appliquer dans le cadre de l’activité de conseil en gestion de patrimoine ; il est établi que la société Hedios s’est acquittée des cotisations d’assurance afférentes aux activités Outre Mer à compter de 2010.

La société Hedios Patrimoine est intervenue à cette date, en qualité de conseil en gestion de patrimoine et de monteur du produit de défiscalisation ‘GSH’ 2010. En l’espèce, sa responsabilité était recherchée au titre d’un manquement à ses obligations de conseil et non au titre du montage du dossier et de la gestion des SEP.

Les sociétés MMA opposent une exclusion de garantie attachée à l’activité de ‘monteur’en se fondant sur la police d’assurance souscrite et sur les courriers échangés aux termes desquels elles refusaient clairement sa garantie. Il ressort des conditions visées par le contrat d’assurance, lors de la distribution du produit ‘GSH’ en 2010, que la liste des exclusions de garantie ne cite pas spécifiquement l’activité de ‘monteur’. La police afférente à la garantie responsabilité professionnelle ne renvoie pas aux termes définis sous ‘activités assurées’ et ne mentionne pas la défiscalisation dans les DOM TOM. En 2007, l’avenant prévoit que les opérations Girardin Industriel sont assurées sans opérer de distinction. Ce n’est qu’en 2015, que l’exclusion est clairement énoncée dans l’avenant de la police. Il est alors précisé que sont assurées les activités de commercialisation d’opérations de défiscalisation telles que le Girardin, et que : ‘les assurés ne sont pas monteurs-promoteurs de ces opérations. Les courriers échangés ne peuvent suppléer le silence contractuel.

Cependant, le préjudice indemnisable doit être en lien direct avec les manquements reprochés, or, il résulte des développements précédents que la société Hedios Patrimoine ne justifie d’ aucun préjudice en lien de causalité avec la faute reprochée aux sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles. Le rejet de la demande doit être confirmé.

La demande d’indemnisation des frais d’avocat renvoie aux conditions de la mise en jeu de la garantie.

La société Hedios dénonce le caractère abusif du refus en soulignant que dans deux dossiers les MMA ont été interrogées et ont accepté la désignation du conseil choisi.

Il ressort des conventions spéciales de la police d’assurance, qu’elles prévoient au paragraphe « Dispositions Communes ‘ Défense Civile » que : « En cas d’action mettant en cause une responsabilité assurée par le présent contrat et dans la limite de la garantie :

L’assureur qui a la direction du procès fait choix de l’avocat et prend à sa charge les frais et honoraires correspondants. Il en sera de même, et ce dans la limite du montant des frais et honoraires habituellement alloués à ses propres avocats, lorsque sur proposition de l’assuré ou de la chambre des indépendants du patrimoine, il aura accepté de mandater aux lieu et place de ses conseils habituels, l’avocat personnel de l’assuré.

En tout état de cause, l’assuré a la possibilité, s’il le désire, de se faire assister par un avocat de son choix. Dans cette hypothèse, les frais et honoraires de celui-ci restent à la charge de l’assuré.

En l’espèce, la société Hedios Patrimoine s’est fait assister par l’avocat de son choix, sans justifier d’une information de l’assureur, les conditions de la garantie ne sont donc pas réunies. Il en résulte que le refus opposé par l’assureur à ce titre est justifié. En conséquence, les demandes formées contre les sociétés MMA de ce chef seront rejetées.

Il paraît équitable de laisser à la charge des MMA les frais irrépétibles qu’elle a exposés en cause d’appel.

Le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

M. [S], partie perdante, au sens de l’article 696 du code de procédure civile, sera tenu de supporter la charge des entiers dépens.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

RÉVOQUE l’ordonnance de clôture du 17 février 2020,

PRONONCE la clôture le 09 mars 2020 ;

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

CONDAMNE M. [O] [S] verser à la société Hedios Patrimoine la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toutes les autres demandes ;

CONDAMNE M. [O] [S] aux entiers dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

C. BURBAN E. LOOS

 


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