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4 mai 2023
Cour d’appel de Bordeaux
RG n°
20/03803
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
————————–
ARRÊT DU : 04 MAI 2023
N° RG 20/03803 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LXJR
[D] [E]
c/
S.A.R.L. ADAM EXPLOITATION
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le : 04 mai 2023
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 07 septembre 2020 par le Tribunal judiciaire de BORDEAUX ( RG : 20/00116) suivant déclaration d’appel du 14 octobre 2020
APPELANTE :
[D] [E]
née le 28 Mai 1948 à [Localité 2]
de nationalité Française
demeurant [Adresse 1]
Représentée par Me Laura SCHWARTZ, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
S.A.R.L. ADAM EXPLOITATION Exerçant sous l’enseigne DEMECO MARTIN VALETTE AU GARDE MEUBLE BORDELAIS, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège[Adresse 3]
Représentée par Me Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistée par Me Fabrice RENAUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 mars 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Bérengère VALLEE, conseiller, chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Roland POTEE, président,
Bérengère VALLEE, conseiller,
Emmanuel BREARD, conseiller,
Greffier lors des débats : Séléna BONNET
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
Avec son époux, Mme [D] [E] a conclu un premier contrat de déménagement le 11 avril 2016 avec la société Alliance Aquitaine Aménagement Déménagement, contrat exécuté par la SARL Adam Exploitation.
Ils ont conclu par la suite un contrat de garde-meuble avec la société Alliance Aquitaine Aménagement Déménagement, contrat repris par la société Adam Exploitation qui a fusionné avec celle-ci.
Ils ont ensuite conclu à nouveau un contrat de déménagement avec la société Adam Exploitation, exerçant sous l’enseigne Demeco Déménagements Martin, en vue d’un déménagement qui sera effectué le 30 janvier 2019.
Par acte d’huissier du 8 janvier 2020, Mme [E] a assigné la société Adam Exploitation devant le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins notamment de voir juger que les clauses limitant l’indemnisation des préjudices sont abusives et inapplicables en l’espèce et voir prononcer la condamnation de la société Adam Exploitation au paiement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts au vu de la détérioration et la disparition de plusieurs de leurs biens.
Par jugement du 7 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :
– déclaré recevable l’action judiciaire de Mme [E] concernant sa demande d’indemnisation pour les pertes et avaries formulées dans son courrier recommandé du 9 février 2019,
– condamné la société Adam Exploitation à verser à Mme [E] la somme de 215 euros, avec intérêts de retard au taux légal à compter du jour du jugement,
– constaté l’accord de la société Adam Exploitation de s’acquitter de cette somme,
– débouté Mme [E] du surplus de ses demandes en paiement à l’encontre de la société Adam Exploitation,
– rejeté les demandes en paiement des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné Mme [E] aux entiers dépens,
– rappelé que la décision est exécutoire de droit par provision.
Mme [E] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 14 octobre 2020.
Par conclusions déposées le 1er septembre 2022, Mme [E] demande à la cour de :
– juger recevable et fondé l’appel interjeté par Mme [E],
Y faisant droit,
– infirmer la décision entreprise et, statuant à nouveau :
– juger que les clauses limitant l’indemnisation des préjudices à hauteur de 45 euros ou 46 euros par objet, présentes respectivement au sein du devis du 18 janvier 2019, des conditions générales de vente et la lettre de voiture du 18 janvier 2019 côté exemplaire Chargement, sont abusives et donc inapplicables en l’espèce,
– à titre subsidiaire : écarter le bénéfice de la clause limitative de responsabilité insérée dans le contrat,
– condamner la société Adam Exploitation à payer à Mme [E] les sommes suivantes :
* 4 319,16 euros à titre de dommages et intérêts au vu de la détérioration et disparition
de plusieurs de ses biens,
* 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral au vu de nombreux
biens détériorés et disparus,
* 500 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice financier et moral quant aux conditions de la conclusion du contrat de déménagement,
* 500 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice financier et moral quant à l’exécution du contrat et à l’assurance souscrite,
– juger que les sommes prescrites seront assorties des intérêts au taux légal à compter du jugement de première instance du 7 septembre 2020,
– condamner la société Adam Exploitation à payer à Mme [E] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance et d’appel,
– condamner la société Adam Exploitation aux entiers dépens de première instance et d’appel,
– préciser que les dépens d’appel pourront être recouvrés directement par Maître Laura Schwartz contre la société Adam Exploitation pour les dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
A l’appui de son appel, elle fait valoir en substance que lors de l’exécution du déménagement intervenu le 30 janvier 2019, elle a constaté la détérioration de certains biens qu’elle a signalée sur la lettre de voiture ; que par courriels des 4 et 8 février 2019, au fur et à mesure du déballage de ses affaires, elle a signalé de nouvelles détériorations ainsi que la disparition de certains objets; qu’elle a enfin adressé une lettre recommandée en date du 9 février 2019, soit dans le délai légal de 10 jours à compter de l’exécution de la prestation de déménagement ; que par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 mai 2019, la société Adam Exploitation lui a proposé la somme de 215 euros, outre la somme de 275 euros à titre commercial en indemnisation de ses préjudices, ce qu’elle a refusé au regard des préjudices réellement subis. Elle soutient que le déménageur est soumis à une obligation de résultat du chef des avaries et pertes subies par son client, sauf preuve de la force majeure, du cas fortuit ou de la faute de ce dernier en application de l’article 1231-1 du code civil ; qu’aucune faute de sa part n’a été démontrée permettant d’exonérer le déménageur de ses obligations contractuelles ; que la preuve des détériorations et pertes invoquées est suffisamment rapportée par ses courriers de plainte, les photographies produites et les attestations de Mme [U], présente lors du déménagement ; qu’il ne peut être exigé des clients de déballer l’intégralité du contenu du mobilier pour vérifier immédiatement son état ; que la loi a instauré un délai de 10 jours suite au déménagement pour permettre d’élever des contestations supplémentaires ; que le caractère incomplet des réserves à la livraison ne peut impliquer une présomption de livraison conforme.
Enfin, invoquant le caractère abusif des clauses contractuelles limitant l’indemnisation des préjudices subis à hauteur de 45 euros ou 46 euros par objet au regard des recommandations de la commission des clauses abusives, elle estime devoir être indemnisée à hauteur de la valeur de remplacement et/ou de réparation des biens détériorés et disparus, conformément aux dispositions relatives à la responsabilité contractuelle des articles 1231 et suivants du code civil en raison de la mauvaise exécution de ses obligations par la société Adam Exploitation.
Par conclusions déposées le 7 septembre 2022, la société Adam Exploitation demande à la cour de :
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Et en conséquence,
– limiter la demande de Mme [E] à la somme de 215 euros,
– subsidiairement, limiter la demande de Mme [E] à la somme de 311,50 euros,
– condamner Mme [E] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la même aux entiers dépens.
Elle expose que lors du déménagement du 30 janvier 2019, il a été constaté lors de l’inspection contradictoire du mobilier, des pertes et avaries concernant cinq meubles; que par courriels des 4 et 7 février 2019, Mme [E] a fait état de déteriorations supplémentaires et que par courrier du 9 février 2019, elle s’est plaint de nouveaux dommages ; que sa responsabilité ne peut être engagée que pour les cinq meubles ayant fait l’objet de réserves sur l’exemplaire livraison de la lettre de voiture ; que pour les 29 meubles supplémentaires, sa réclamation se heurte à la présomption de livraison conforme, étant précisé que l’envoi d’une lettre recommandée postérieurement à la livraison n’a qu’un effet procédural qui empêche la forclusion de l’action mais ne permet nullement de combattre la présomption de livraison conforme; que l’attention de Mme [E] a été attirée sur l’importance des réserves à la livraison ; que la requérante avait le devoir de procéder au contrôle de son mobilier dès la livraison et de façon aussi complète que nécessaire ; qu’il est étonnant que la plaignante se soit aperçue seulement après le départ des déménageurs des dommages concernant 29 meubles supplémentaires alors qu’il s’agit, pour certains, de meubles volumineux dont les dommages sont particulièrement apparents et, pour d’autres, de meubles fragiles ou de valeur dont l’état est généralement vérifié immédiatement par le client ; que les dommages supplémentaires peuvent parfaitement être le fait de Mme [E] après le départ des déménageurs ; que les photographies, prises non contradictoirement, sont dépourvues de toute efficacité, de même que l’attestation produite est dénuée de toute valeur probante. Elle ajoute qu’elle n’a jamais reconnu l’existence à la livraison des dommages supplémentaires allégués ; qu’il appartient à la requérante de justifier du quantum de ses demandes et que dans ce cas, il convient d’appliquer un coefficient de vétusté sur la valeur des biens endommagés ; que Mme [E] a déclaré ses meubles pour une valeur de 30.000 euros et il a été convenu que l’indemnité serait limitée à la somme de 45 euros par objet non listé sur une déclaration de valeur ; que la valeur déclarée constitue le plafond de l’indemnité due par le déménageur même s’il s’avère après coup que la valeur réelle du mobilier est supérieure ; que la stipulation d’une valeur déclarée ne doit pas être assimilée à une indemnité forfaitaire qui serait due automatiquement en cas de perte ou d’avartie ; que les recommandations de la commission des clauses abusives ne présentent aucun caractère normatif et ne s’imposent pas au juridictionx; qu’en l’espèce, Mme [E] pouvait parfaitement échapper à la limitation de l’indemnité en établissant une déclaration de valeur où elle aurait valorisé les meubles excédant cette valeur, de sorte que le caractère abusif de la clause litigieuse n’est pas établi.
L’affaire a été fixée à l’audience du 16 mars 2023.
L’instruction a été clôturée par ordonnance du 2 mars 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la responsabilité contractuelle de la société Adam Exploitation
Aux termes de l’article L. 133-1 du code de commerce, le voiturier est garant de la perte des objets à transporter. Il est également garant des avaries autres que celles qui proviennent du vice propre de la chose ou de la force majeure.
Selon l’article L. 133-3 alinéa 1er du même code, la réception des objets transportés éteint toute action contre le voiturier pour avarie ou perte partielle si dans les trois jours, non compris les jours fériés, qui suivent celui de cette réception, le destinataire n’a pas notifié au voiturier, par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée, sa protestation motivée.
L’article L. 224-63 du code de la consommation énonce que : ‘Par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l’article L. 133-3 du code de commerce, le délai de forclusion applicable aux contrats de transports de déménagement conclus entre un professionnel et un consommateur est fixé à dix jours calendaires révolus à compter de la réception des objets transportés. Les protestations motivées émises par lettre recommandée dans ce délai produisent leurs effets même en l’absence de réserves formulées à la livraison. Les réserves émises par le destinataire à la livraison et non contestées par le transporteur dispensent de la protestation motivée prévue au présent article.
Lorsque la procédure à suivre pour émettre des réserves n’a pas été communiquée au consommateur dans les conditions fixées par arrêté ministériel, le délai prévu au premier alinéa est porté à trois mois.’
Comme rappelé à juste titre par le premier juge, il s’évince de ces dispositions que seules les réserves émises lors de la livraison relèvent de la présomption de responsabilité du transporteur en ce qui concerne les dommages signalés. Au contraire, la livraison sans réserve entraîne une présomption de réception conforme, opposable au destinataire qui est censé avoir reçu les biens indemnes de toute avarie. A cet égard, l’envoi d’une lettre recommandée dans les 10 jours a pour seul effet d’éviter l’extinction de l’action contre le déménageur, mais ne dispense pas en revanche le réclamant de son obligation d’établir que les avaries alléguées sont imputables à celui-ci.
En l’espèce, la lettre de voiture n°27591 établie au moment de la livraison mentionne les réserves suivantes :
‘- manque tuyau aspirateur
– 2 gros abats jour écrasés
– écrin cuir argenterie détérioré (non emballé, trouvé dans le camion)
– coiffeuse cassée’.
En application de ce qui précède, la société Adam Exploitation est donc présumée responsable de ces dégâts, ce qu’elle ne conteste pas.
S’agissant en revanche des détériorations et pertes dénoncées seulement par courriels des 4 et 8 février 2019, ainsi que par courrier recommandé du 9 février, il appartient à Mme [E] de démontrer que celles-ci sont imputables à la prestation de déménagement.
A ce titre, l’appelante verse aux débats :
– deux photographies de deux gros abat-jours écrasés (pièce n°21)
– deux photographies d’assiettes de présentation couleur citrouille cassées en deux (pièce n°25)
– deux photographies d’assiettes brodées or ébréchées (pièce n°26)
– une photographie d’une coiffeuse de toilette avec un miroir manquant (pièce n°30)
– deux photographies de deux petites lampes rose et verte cassées (pièce n°32).
Si ces photographies ne sont pas datées, il sera observé que des cartons de déménagement figurent sur celles-ci, de sorte qu’elles ont sans nul doute été prises au moment de leur déballage, soit dans les jours suivant le déménagement.
Il est également produit une facture de remise en état – avec photographie – d’une vierge en cire dans un cadre en bois doré détérioré (pièce n°31).
Surtout, ces dégâts, dont la matérialité est avérée par les photographies ainsi produites, non seulement correspondent à la description détaillée des avaries faite par Mme [E] dans ses correspondances des 4, 8 et 9 février 2019 où elle évoque les objets cassés suivants : 2 assiettes de présentation en porcelaine couleur citrouille, 2 gros abats jour écrasés (en plus des 2 abats jour écrasés déjà dénoncés dans la lettre de voiture), 2 assiettes plates en porcelaine blanche bordée or, une coiffeuse dont le miroir rond est manquant, une vierge en cire dans un cadre en bois doré, 2 lampes (une rose et une verte) écrasées, mais sont en outre corroborés par le témoignage de Mme [U], présente sur les lieux lors du déballage des cartons, qui, contrairement à ce qu’affirme l’intimée, n’est pas dénuée de force probante.
Au regard de ces éléments précis et concordants, à savoir la description minutieuse des avaries par Mme [E] peu après le 30 janvier 2019, confirmée par les phographies précitées et l’attestation d’un témoin présent lors de l’ouverture des cartons, la cour considère qu’est suffisamment rapportée la preuve de l’existence des détériorations sus-décrites et celle du lien de causalité avec la prestation du déménageur, lequel devra donc en réparer les conséquences dommageables.
En revanche, s’agissant des autres dégâts dénoncés, la cour estime que la preuve de leur matérialité et/ou du lien de causalité avec l’opération de déménagement n’est pas suffisamment établie, dès lors que certains n’ont fait l’objet ni de photographies ni de constats dans les jours suivants le déménagement tandis que d’autres ne sont pas visés dans l’attestation de Mme [U].
Sur le montant de l’indemnisation
Sur la clause abusive
Aux termes de l’article L. 212-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
En application de l’article R.212-1, 6°, du code de la consommation, dans sa version en vigueur depuis le 1er juillet 2016, dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions des premier et quatrième alinéas de l’article L. 212-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations.
Dans sa recommandation du 24 mars 2016, la commission des clauses abusives, après avoir constaté que des contrats de déménagement prévoyaient des montants de réparation plafonnés d’un montant inférieur à la valeur déclarée ou, à défaut d’expression de celle-ci, à la valeur réelle du préjudice subi par le non-professionnel ou le consommateur, a déclaré ces clauses abusives.
En l’espèce, le devis du 18 janvier 2019 comportait une clause offrant une option au client qui était de souscrire une assurance complémentaire permettant l’indemnisation des objets perdus ou avariés en fonction de leur valeur déclarée, à l’unique condition que la déclaration de valeur soit dûment signée et retournée 48 heures avant le déménagement. En l’absence d’une telle déclaration, la valeur des biens était réputée être inférieure à 5000 euros avec un maximum de 45 euros par objet.
Le contrat conclu le 18 janvier 2019 prévoyait une valeur globale des biens de Mme [E] à hauteur de de 30.000 euros ainsi qu’ ‘une valeur d’indemnisation maximale par objet ou groupe d’objets non listés de 46 euros’.
Les conditions générales dudit contrat stipulaient en son article 4 qu’ ‘A défaut de déclaration de valeur dûment retournée, remplie et signée, la responsabilité de l’entreprise sera limitée à soit la valeur globale assurée, soit le minimum contractuel de 5.000 euros pour l’ensemble du mobilier et en tout état de cause, 45 euros par objet ou groupe d’objets’.
Ces clauses limitant l’indemnisation des préjudices à hauteur de 45 euros ou 46 euros par objet, en ce qu’elles réduisent le droit à réparation du consommateur ou du non-professionnel, seront en conséquence déclarées non-écrites comme étant abusives.
Sur les préjudices
Concernant les dommages listés ci-dessus devant donner lieu à indemnisation par la société Adam Exploitation, il est versé les justificatifs suivants :
– abat-jours écrasés : 235 euros selon facture du 19 octobre 2019
– écrin cuir argenterie détérioré : 140 euros selon devis
– coiffeuse cassée : 49 euros selon devis
– aspirateur incomplet : 199 euros selon facture du 19 février 2019
– deux assiettes de présentation brisées d’une valeur unitaire de 27,50 euros, soit 55 euros selon facture de mai 2018
– deux assiettes plates brodées or : 126 euros selon devis du 1er mars 2019
– fourniture et gravure d’un miroir pour la coiffeuse : 247,80 euros selon devis du 9 avril 2019
– réparation de la vierge en cire dans un cadre en bois détérioré : 499,20 euros selon facture de remise en état du 12 avril 2019
– deux petites lampes cassées : 98 euros selon facture du 9 février 2019
soit au total : 1.649 euros.
Compte tenu de la vétusté de certains mobiliers détériorés ou perdus qui a vocation à s’appliquer dès lors que l’indemnité ne doit pas excéder le préjudice subi par la victime, il sera alloué à Mme [E] la somme de 1.200 euros en réparation de son préjudice matériel, à laquelle sera ajoutée celle de 500 euros au titre du préjudice moral subi pour les tracas liés aux réparations.
Ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt conformément aux dispositions de l’article 1231-7 du code civil.
Si l’appelante fait en outre valoir qu’elle a subi un préjudice lié aux conditions de conclusion de contrat, il sera tout d’abord observé que s’il est exact que le devis établi le 18 janvier 2019 par la société Adam Exploitation ne comporte pas la signature de Mme [E], celle-ci ne justifie pour autant pas de l’existence d’un préjudice à cet égard, alors qu’il est constant qu’elle a accepté ce devis. En outre, contrairement à ce qu’elle allègue, il n’est nullement démontré qu’elle aurait été contrainte de verser un acompte de 500 euros le 22 janvier 2019 avant la signature dudit devis, alors qu’elle était parfaitement libre de ne pas procéder à ce règlement en n’acceptant pas le devis, le premier juge soulignant par ailleurs à juste titre que le fait pour la société Adam Exploitation d’exiger un acompte pour pouvoir réaliser sa prestation le 30 janvier ne saurait revêtir un caractère abusif, compte tenu des contraintes d’organisation et de planification que doit nécessairement rencontrer ce type d’entreprise pour respecter ses délais d’exécution de sa prestation de déménagement envers ses clients. La demande de dommages et intérêts à ce titre sera donc rejetée.
Enfin, Mme [E] sollicite la réparation du préjudice lié au fait que la société Adam Exploitation aurait souscrit pour son compte une assurance d’un montant de 90 euros alors que cette clause a été jugée abusive par la commission des clauses abusives. Elle ne justifie toutefois pas du préjudice moral et financier qu’elle invoque. Sa demande en ce sens sera par conséquent rejetée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. La société Adam Exploitation supportera la charge des entiers dépens.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. En l’espèce, la société Adam Exploitation sera condamnée à payer la somme de 1.800 euros à Mme [E].
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a déclaré recevable l’action judiciaire de Mme [E] concernant sa demande d’indemnisation pour les pertes et avaries formulées dans son courrier recommandé du 9 février 2019,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Déclare non écrites comme étant abusives les clauses limitant l’indemnisation des préjudices à hauteur de 45 euros ou 46 euros par objet, présentes au sein du devis du 18 janvier 2019, des conditions générales de vente et de la lettre de voiture du 18 janvier 2019,
Condamne la société Adam Exploitation à payer à Mme [E] :
– la somme de 1.200 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel,
– la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,
Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
Déboute Mme [E] de ses autres demandes,
Condamne la société Adam Exploitation aux dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’à payer à Mme [E] la somme de 1.800 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,