Déséquilibre significatif : 28 septembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/06857
Déséquilibre significatif : 28 septembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/06857
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28 septembre 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
20/06857

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 10

ARRÊT DU 28 SEPTEMBRE 2023

(n° , 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/06857 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBZZO

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mai 2020 – Tribunal judiciaire de PARIS

RG n° 17/11571

APPELANTE

FUNDACION MUSEO DE LA MODA Institution privée de droit chilien, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 6]

[Localité 10] (CHILI)

Représentée par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

Assistée à l’audience de Me Alexandra NERI du PARTNERSHIPS HERBERT SMITH FREEHILLS PARIS LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : J025

INTIMÉS

Monsieur [T] [C]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Assisté à l’audience de Me Philippe GAULTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P362

S.A.S. CORNETTE DE SAINT CYR – MAISON DE VENTES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Emmanuelle FARTHOUAT – FALEK, avocat au barreau de PARIS, toque : G097

Assistée à l’audience de Me Anne LAKITS, avocat au barreau de PARIS, toque : C0765

S.A.R.L. CABINET D’EXPERTISE DOMINIQUE CHOMBERT, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Assistée à l’audience de Me Quilina VIZZAVONA MOULONGUET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0553

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été plaidée le 29 Juin 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Florence PAPIN, Présidente

Mme Valérie MORLET, Conseillère

M. Laurent NAJEM, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Florence PAPIN, Présidente dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Florence PAPIN, Présidente et par Catherine SILVAN, greffier, présent lors de la mise à disposition.

***

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

La Fundacion Museo de la Moda (ci-après la Fundacion), institution privée de droit chilien à l’origine du musée dénommé « [8] » situé à [Localité 10] a été déclarée adjudicataire au téléphone pour le prix de 10 304 euros (frais inclus), d’une robe [V] vendue à la requête de Monsieur [T] [C] dans le cadre d’une vente aux enchères « haute couture & vintage » organisée à [Localité 9] le 8 juillet 2014 à l’hôtel des ventes Drouot Richelieu par la société Cornette de Saint-Cyr.

Cette robe confectionnée par [R] [V] durant l’été 1916, avait été décrite et représentée au catalogue de la vente sous le numéro de lot 130 par le cabinet d’expertise [T] Chombert (ci-après le cabinet Chombert) et sa photographie figurait sur le site internet de la société Cornette de Saint Cyr.

Au cours de l’automne 2014, la Fundacion a signalé à la société Cornette de Saint Cyr que la robe vendue avait été substantiellement restaurée et altérée et a sollicité l’annulation de la vente.

En l’absence de règlement amiable du litige, la Fundacion a fait assigner la société Cornette de Saint Cyr et le cabinet Chombert devant le tribunal de grande instance de Paris par acte d’huissier délivré le 28 juillet 2017.

Elle a ensuite appelé dans la cause Monsieur [C] par assignation en intervention forcée du 21 septembre 2017.

Les instances ont été jointes le 16 novembre 2017.

Par un jugement en date du 14 mai 2020, le tribunal judiciaire de Paris a :

– débouté la Fundacion Museo de la Moda de l’ensemble de ses demandes ;

– dit n’y avoir lieu de statuer sur les demandes de garantie formées par les parties défenderesses ;

– condamné la Fundacion Museo de la Moda à payer à Monsieur [T] [C], à la société Cornette de Saint Cyr et au cabinet Chombert, la somme de 3000 euros, chacun, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la Fundacion Museo de la Moda aux dépens et fait application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit des avocats qui en ont fait la demande et qui en remplissent les conditions ;

– rejeté les demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration en date du 4 juin 2020, la Fundacion a interjeté appel.

Par ses conclusions, notifiées par voie électronique (RPVA) le 5 mai 2023, la Fundacion Museo de la Moda demande à la cour d’appel de Paris de :

Vu les articles 1110 et 1240 du code civil, vu l’article L. 321-17 du code de commerce, vu l’article 2 du décret n°81-255 du 3 mars 1981, vu l’article 1.5.5 de l’arrêté du 21 février 2012, vu l’article 41 alinéa 4 de la loi du 29 juillet 1881, vu l’article 226-10 du code pénal,

– dire l’appel recevable et bien fondé,

– infirmer le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Paris du 14 mai 2020 en ce qu’il a :

débouté la Fundacion de l’ensemble de ses demandes tendant à voir prononcer la nullité de la vente de la robe [V] intervenue à l’occasion de la vente volontaire « Haute couture & vintage » du 8 juillet 2014, ordonner à Monsieur [C] le remboursement de la somme de 8.000 euros correspondant au prix d’achat de la robe, ordonner à la société CSCMV de rembourser la somme de 2.304 euros correspondant aux frais d’adjudication et à la condamnation solidaire de la société CSCMV, du Cabinet Chombert au paiement de la somme d’un euro à titre de dommages et intérêts, ordonner aux frais exclusifs de Monsieur [C], de la société CSCMV et du Cabinet Chombert la publication de la décision, l’information du public, des restaurations et altérations ayant affecté la robe [V], objet du litige, en cas de remise en vente dans le cadre d’une vente volontaire, et la condamnation solidaire de Monsieur [C], de la société CSCMV et du Cabinet Chombert au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens,

condamné la Fundacion à payer à Monsieur [C], à la société CSCMV et au Cabinet Chombert la somme de 3.000 euros chacun sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens.

Statuant à nouveau :

– dire qu’en ne mentionnant pas les restaurations subies par la Robe [V] dans le catalogue de vente, la société Cornette de Saint Cyr Maison de Vente CSCMV et la société Cabinet Chombert ont engagé leur responsabilité professionnelle au regard des articles 2 du décret n°81-255 du 3 mars 1981 sur la répression des fraudes en matière de transactions d”uvres d’art et d’objets de collection et 1.5.5 de l’arrêté du 21 février 2012 portant approbation du recueil des obligations déontologiques des opérateurs de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques ;

– déclarer illicite et non écrite la clause exonératoire de responsabilité figurant dans les conditions de vente annexées au Catalogue, selon laquelle « L’absence de mention d’état au catalogue n’implique nullement que le lot soit en parfait état de conservation ou exempt de restauration, usures, craquelures, rentoilage ou autre imperfection. Les biens sont vendus dans l’état où ils se trouvent au moment de la vente », conformément à l’article L. 321-17 du Code de commerce et à l’article 1171 du Code civil ;

– condamner solidairement la société Cornette de Saint Cyr Maison de Vente CSCMV et la société Cabinet Chombert à verser à la Fundacion Museo de la Moda la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts, comme étant solidairement responsables de l’inexactitude des mentions figurant au catalogue de vente accompagnant la vente volontaire « Haute couture & vintage » du 8 juillet 2014 ;

– prononcer la nullité de la vente de la Robe [V] intervenue à l’occasion de la vente volontaire « Haute couture & vintage » du 8 juillet 2014 ;

– ordonner à Monsieur [T] [C] de procéder au remboursement de la somme de 8.000 euros à la Fundacion Museo de la Moda, correspondant au prix d’achat de la Robe [V] ;

– ordonner à la société Cornette de Saint Cyr Maison de Vente CSCMV de procéder au remboursement de la somme de 2.304 euros à la Fundacion Museo de la Moda, correspondant aux frais d’adjudication ;

– ordonner, aux frais exclusifs de Monsieur [T] [C], de la société Cornette de Saint Cyr Maison de Vente CSCMV et de la société Cabinet Chombert, la publication du dispositif de l’arrêt à intervenir dans la revue « La Gazette Drouot » dans la limite de 5.000 euros par insertion ;

– ordonner à la société Cornette de Saint Cyr Maison de Vente CSCMV et au Cabinet Chombert d’informer les adjudicataires des restaurations et altérations ayant affecté la Robe [V] en cas de remise en vente dans le cadre d’une vente volontaire, par mention au catalogue de vente ;

– condamner solidairement Monsieur [T] [C], la société Cornette de Saint Cyr Maison de Vente CSCMV et la société Cabinet Chombert à verser à la Fundacion Museo de la Moda la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamner Monsieur [T] [C], la société Cornette de Saint Cyr Maison de Vente CSCMV et la société Cabinet Chombert aux entiers dépens ;

– débouter Monsieur [T] [C], la société Cornette de Saint Cyr Maison de Vente CSCMV et la société Cabinet Chombert de l’intégralité de leurs demandes, fins et prétentions.

La Fundation au museo au della Moda fait valoir :

‘ qu’elle rapporte la preuve des altérations subies par la robe au moyen du rapport d’expertise de Madame [Z], membre de la fédération française des conservateurs restaurateurs, de l’avis de Madame [S], responsable du patrimoine de la maison [V] et des dessins d’archives datant de 1916 qu’elle lui a communiqués qui démontrent que les cocardes et la ceinture ont été déplacées,

‘ qu’il résulte des photographies prises lors d’une vente précédente en 2011 que la partie supérieure de la robe a été restaurée, des jaunissures sous les aisselles ayant disparu,

‘ que les conclusions du rapport de Madame [Z] doivent être prises en considération étant corroborées par d’autres éléments de preuve,

‘ que la force probante de l’avis de Madame [S] est incontestable, celle-ci ayant pu examiner physiquement la robe, que ne s’agissant pas d’une attestation, elle n’avait pas à comporter les mentions prescrites par l’article 202 du code de procédure civile,

‘ que les intimés ont judiciairement fait aveu des restaurations et altérations subies par la robe et que dès lors elle n’avait aucune raison de solliciter une expertise judiciaire, disproportionnée par rapport aux enjeux du litige,

– qu’en omettant de mentionner spontanément les altérations subies par la robe dans le catalogue, le cabinet Chombert et la société Cornette de Saint Cyr ont engagé leur responsabilité professionnelle,

– que l’article 2 du décret du 3 mars 1981 emporte une obligation absolue d’informer l’adjudicataire de façon exhaustive en lui signalant toute partie de l’objet qui ne serait pas d’époque et que la mise en vente sans réserve vaut garantie d’authenticité et d’absence de restauration,

-qu’il n’est pas démontré que les altérations sont mineures et n’affectent pas l’authenticité de la robe et que la seule absence de mention engage la responsabilité du cabinet Chombert et de la société Cornette de Saint Cyr,

– qu’il en a résulté pour elle un préjudice financier et moral, pour l’indemnisation duquel elle sollicite la somme de 20’000 € de dommages-intérêts,

‘ que la clause exonératoire de responsabilité figurant aux conditions générales de vente annexées au catalogue doit être déclarée illicite et réputée non écrite au regard des dispositions de l’article L. 321 ‘ 17 du code de commerce et en ce qu’elle crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties(article 1171 du code civil),

‘ que les intimés tentent de se décharger de leur obligation légale d’information en faisant peser sur elle un devoir de vigilance inexistant,

‘ que l’absence de mention des restaurations dans le catalogue a provoqué une erreur excusable de sa part quant aux qualités substantielles de la robe [V],

‘ que l’absence de restauration constitue nécessairement une qualité substantielle dans la mesure où la valeur d’un bien restauré est inférieure à celle d’un bien non restauré,

‘ que la Fundation est un musée et que son approche est culturelle et historique : seules des pièces authentiques et d’origine sont exposées au sein de ce musée ; en vertu de la garantie d’authenticité d’origine prévue par le décret du 3 mars 1981 et l’arrêté du 21 février 2012, elle était légitime à considérer que, si aucune restauration n’était mentionnée au catalogue, la robe [V] n’en avait pas subies,

‘ que les altérations apportées sont substantielles : le tulle jauni a été intégralement remplacé, la doublure du corsage restaurée, la ceinture et les cocardes déplacées, et l’ensemble recousu avec du fil neuf, altérations qui vont jusqu’à modifier les choix de la créatrice, et que ces modifications ne portent pas que sur les aisselles,

‘ que l’erreur provoquée par les mentions erronées du catalogue est toujours excusable,

– qu’au regard des conditions de vente à distance et de l’absence de toute mention relative à une restauration dans le catalogue, elle pouvait raisonnablement et légitimement se méprendre sur l’état de la robe,

‘ qu’elle sollicite par conséquent la nullité de la vente, et le remboursement par Monsieur [C] de son prix d’achat.

La Fundacion Museo de la Moda a conclu à nouveau le 19 juin 2023 à 21h 02.

Par ses conclusions n°3, notifiées par voie électronique (RPVA) le 19 juin 2023, Monsieur [C], intimé, demande à la cour d’appel de Paris de :

– déclarer la Fundacion Museo de la Moda mal fondée en ses demandes, fins et conclusions d’appel, en ce compris celles formées au titre des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile ;

– l’en débouter ;

– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

débouté la Fundacion Museo de la Moda de ses demandes en nullité de la vente de la robe [V] du 8 juillet 2014, en restitution du prix de vente, en publication du dispositif de la décision à intervenir aux frais de la société Cornette de Saint Cyr, du Cabinet Chombert et de Monsieur [T] [C], en paiement solidaire des mêmes à 5.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

condamné la Fundacion Museo de la Moda aux dépens de l’instance dont distraction au profit de Maître Philippe Gaultier par application de l’article 699 du code de procédure civile, et à payer à Monsieur [T] [C] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouter le Cabinet Chombert, professionnel spécialisé dans l’expertise de produits de haute couture, de sa demande de garantie pour toutes sommes qui seraient mises à sa charge formée à titre subsidiaire à l’encontre de Monsieur [C] ;

– condamner la Fundacion Museo de la Moda et subsidiairement le Cabinet Chombert aux dépens de l’instance d’appel dont distraction au profit de la SCP Grappotte Benetreau par application de l’article 699 du code de procédure civile, et à payer à Monsieur [T] [C] la somme de 7.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [C] fait valoir :

‘ que l’appelante ne rapporte aucune preuve de l’altération de la robe par le remplacement des matériaux d’origine et d’autre part que le prétendu « état d’origine » de la robe et l’absence de restauration auraient constitué pour elle une qualité essentielle relevant du champ contractuel de la vente,

‘ qu’elle se fonde exclusivement sur un rapport d’expertise établi à sa demande et à ses frais de manière non contradictoire qui est donc dépourvu de toute force probante,

‘ que rien ne permet d’affirmer que l’emplacement des cocardes ait été modifié par rapport à l’état initial,

‘ que le courriel de Madame [S] ne constitue pas une expertise d’autant que rien n’indique que sa rédactrice ait été consciente que son message serait produit en justice,

‘ que si tant est que l’appelante ait commis une erreur sur une qualité essentielle, elle serait, en raison de sa qualité de professionnel hautement spécialisé du domaine de la restauration et conservation des vêtements anciens, manifestement inexcusable,

‘ qu’il y a lieu de la débouter de toutes ses demandes ne pouvant être déclaré responsable des mentions figurant sur le catalogue de la société Cornette de Saint Cyr et aucune preuve n’étant rapportée du prétendu préjudice d’image et de réputation allégué.

Par ses conclusions n°3, notifiées par voie électronique (RPVA) le 9 juin 2023, la société Cornette de Saint Cyr, intimée, demande à la cour d’appel de Paris de :

– déclarer la Fundacion Museo de la Moda irrecevable et en tout cas mal fondée en son appel et en ses demandes ;

– l’en débouter ;

– confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

– Subsidiairement, condamner le Cabinet Chombert à garantir la société Cornette de Saint Cyr de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre en principal, intérêts et frais ;

– condamner la Fundacion Museo de la Moda à payer à la société Cornette de Saint Cyr la somme de 3 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Emmanuelle Farthouat-Falek, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La société Cornette de Saint Cyr fait valoir :

‘ que la robe litigieuse, sur laquelle figure la griffe utilisée, est bien un modèle de 1916 de [R] [V] et en aucun cas une copie ce qui n’est pas contesté,

‘ que les restaurations mineures alléguées (concernant la position de la ceinture et l’emplacement des cocardes), sur une robe de près de 100 ans, ne sont en aucun cas de nature à modifier substantiellement les caractéristiques du modèle, ni à remettre en cause son authenticité,

‘ que des restaurations sur les parties intérieures de la robe (la doublure et les coutures) ainsi qu’au niveau des aisselles sont usuelles pour pouvoir conserver une robe centenaire,

‘ que la preuve n’est pas rapportée par l’appelante que l’absence totale de restauration constituait pour elle une qualité substantielle,

‘ qu’elle sollicite la nullité de la vente en se fondant sur une expertise non contradictoire établie trois ans après la vente aux enchères,

‘ que pour être prise en considération, une erreur doit être excusable : l’erreur alléguée est en l’espèce inexcusable alors que l’emplacement de la ceinture et des cocardes ainsi que l’état du tulle au niveau des aisselles étaient visibles sur la photographie du catalogue de vente, et que l’appelante est un professionnel en mesure de se renseigner s’il s’agissait d’éléments déterminants de son consentement,

‘ qu’elle n’a commis aucune faute dès lors qu’elle a pris le soin de faire appel à un expert pour établir la fiche descriptive du lot (le cabinet d’expertise Chombert),

‘ que l’appelante prétend que sa responsabilité est engagée pour ne pas avoir signalé les restaurations,

‘ que les mesures purement conservatoires sur un modèle créé près d’un siècle avant la vente aux enchères n’avaient nullement à être annoncées dans le catalogue de la vente d’autant que les conditions de la vente prévoyaient que « l’absence de mention d’état au catalogue n’implique nullement que le lot soit en parfait état de conservation ou exempt de restauration’ ou autre imperfection. Les biens sont vendus dans l’état où ils se trouvent au moment de la vente »,

‘ que cette clause, parfaitement classique, a uniquement pour objet de rappeler que le catalogue n’a pas vocation à être exhaustif et que s’agissant d’une vente publique précédée d’une exposition publique,

où les biens sont exposés, il est nécessaire d’examiner le lot avant la vente et que les acquéreurs ont la possibilité de demander un « rapport de conditions » et ce gracieusement,

‘ qu’il ne s’agit pas d’une clause l’exonérant de sa responsabilité et qu’elle n’est donc pas contraire à l’article L321 ‘ 17 du code de commerce,

‘ qu’elle n’est pas illicite et ne crée pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et que l’article 1171 du code civil sur lequel l’appelante se fonde n’était pas applicable à l’époque des faits,

‘ qu’en outre l’appelante ne peut se prévaloir d’aucun préjudice notamment matériel car si la vente était annulée, elle serait replacée dans la situation où elle se trouvait si la vente n’avait pas eu lieu recevant le prix en contrepartie de la restitution de la robe.

Par ses conclusions n°2, notifiées par voie électronique (RPVA) le 19 juin 2023, le Cabinet d’expertise [T] Chombert, intimé, demande à la cour d’appel de Paris de :

Vu les articles 1110 alinéa 1 er et 1353 du code civil, vu les articles 9, 15 et 16 du code de procédure civile,

– déclarer la Fundacion Museo de la Moda irrecevable et en tout cas mal fondée en son appel, l’en débouter,

– confirmer le jugement du 14 mai 2020 en ce qu’il a débouté la Fundacion Museo de la Moda de l’ensemble de ses demandes, et en particulier le confirmer :

en ce qu’il a déclaré non opposables au Cabinet Chombert le prétendu « rapport d’expertise » de Mme [Z] du 10 juin 2017 qui ne sont en réalité que des constatations, comme non contradictoire, et n’émanant pas d’un expert, non plus que les constatations de Mme [S] du 19 juin 2019 comme n’étant pas davantage contradictoires.

en ce qu’il a jugé en conséquence que la Fundacion n’apporte aucune preuve légale :

* De l’atteinte à l’authenticité de la Robe [V] du fait des restaurations intervenues,

* Du caractère substantiel et déterminant de son intention d’achat de l’absence de

restaurations sur la Robe [V],

* De son intention d’exposer la Robe dans son état initial, et de ce fait du préjudice d’image prétendument subi du fait de n’avoir pu effectivement exposer la Robe dans son état initial,

– en conséquence, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la Fundacion de toutes ses demandes à l’encontre du Cabinet Chombert,

Subsidiairement,

– juger que la Fundacion ne rapporte pas la preuve que les informations prétendument incomplètes du Cabinet Chombert dans le catalogue de vente accompagnant la vente volontaire du 8 juillet 2014 aient été de nature à vicier son consentement à l’acquisition de la Robe [V] objet du litige,

– juger que la Fundacion ne rapporte pas la preuve que les modifications intervenues soient de nature à remettre en cause l’authenticité de ladite Robe [V],

– juger que la Fundacion a manqué à son obligation de diligence en sa qualité de professionnel de l’achat et de l’exposition de vêtements anciens, et a fait preuve d’une légèreté inexcusable en ne se procurant pas un rapport de condition et/ou en ne se rendant pas à l’exposition publique préalable à la vente du 8 juillet 2014, afin de constater l’état de la Robe litigieuse et sa conformité à ses propres critères d’achat, et en ne réalisant pas ses propres recherches sur l’antériorité de la Robe préalablement à la vente,

– juger que la Fundacion ne rapporte pas la preuve de l’existence, ni de l’étendue du préjudice prétendument subi,

– juger irrecevables les demandes de publications et d’informations de la Fundacion, comme étant infondées,

– en conséquence, déclarer de plus fort la Fundacion irrecevable et en tout cas mal fondée en sa demande de condamnation du Cabinet Chombert à quelle que somme que ce soit à titre de dommages et intérêts, l’en débouter,

– juger la société CSCMV irrecevable et mal fondée en sa demande de garantie à l’encontre du Cabinet Chombert, l’en débouter,

– condamner M. [C] à garantir le Cabinet Chombert de toute somme pouvant être mise à sa charge,

– condamner la Fundacion à payer la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts au Cabinet Chombert pour procédure abusive, atteinte à sa réputation professionnelle et préjudice moral, par application de l’article 1353 du code civil,

– condamner la Fundacion à la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Recamier, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Le cabinet d’expertise Chombert fait valoir :

‘ que la Fundation n’a pas jugé opportun de solliciter un rapport de conditions de la robe, objet du litige, comme il était expressément indiqué la possibilité, page 2 du catalogue de la vente et qu’elle a donc manqué à son devoir de diligence,

‘ que l’on peut s’étonner que la fondation n’ait pas effectué de recherches avant de se porter acquéreur de la robe compte tenu de l’importance qu’elle indique avoir attachée à cette acquisition et à l’absence de restauration,

– qu’elle ne rapporte pas la preuve que cette qualité substantielle de non restauration ait été déterminante de son intention d’achat,

‘ que la robe a été minutieusement décrite dans le catalogue et a fait l’objet d’une photographie, qu’il lui aurait été aisé de comparer cette description et cette photo avec des photos antérieures et avec les illustrations de la société [V] de 1916 si la conservation de la robe dans son état initial était déterminante de son intention d’achat, que son erreur est ainsi inexcusable,

‘ que le non-respect du contradictoire ne permet pas de lui rendre opposable le rapport d’expertise de Madame [Z] ou l’e-mail de Madame [S],

‘ que les réparations sous les aisselles des robes sont fréquentes et n’altèrent pas la structure, la forme, la lecture et l’intégrité de la robe selon l’attestation de Monsieur [X], ancien directeur du palais Galliera, musée de la mode de la [11], et que la robe peut donc figurer en toute légitimité au sein d’une collection patrimoniale historique,

-que la preuve n’est pas rapportée des préjudices allégués.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 21 juin 2023.

La société Cornette de Saint Cyr demande à la cour, par conclusions en date du 26 juin 2023, de :

Vu les articles 15 et suivants du code de procédure civile, vu la tardivité des conclusions de l’appelante et des pièces et l’impossibilité d’y répondre en temps utile,

-Rejeter des débats les conclusions signifiées le 19 juin 2023 à 21h02 par la Fundacion ainsi que les pièces communiquées le 20 juin 2023 à 14h28 ;

Vu l’article 910-4 du code de procédure civile,

-Déclarer irrecevable la demande l’expertise,

-Condamner la Fundacion à lui payer la somme de 1 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que l’appelante a attendu 2 ans et demi et la veille de la clôture à une heure tardive pour demander une expertise plaçant volontairement les intimés dans l’impossibilité d’y répondre en temps utile et que ce comportement déloyal ne pourra qu’être sanctionné par le rejet des écritures et des pièces de l’appelante.

Par conclusions notifiées le 27 juin 2023, la Fundacion demande au conseiller de la mise en état ou à défaut à la cour de :

Vu les articles 15, 16, 135, 784 et 802 du Code de procédure civile,

À titre principal :

‘ Dire la société Cornette de Saint Cyr mal fondée en ses demandes de rejet des conclusions et pièces communiquées par la Fundacion les 19 et 20 juin 2023 et l’en débouter ;

À titre subsidiaire :

‘ Prononcer la révocation de l’ordonnance de clôture du 21 juin 2023

‘ En conséquence, ordonner la réouverture des débats ;

En tout état de cause :

‘ Déclarer la société Cornette de Saint Cyr irrecevable ou à tout le moins mal fondée en sa demande tendant à voir déclarer la Fundacion irrecevable en sa prétendue « demande d’expertise » ;

‘ Condamner la société Cornette de Saint Cyr à verser la somme de 1.500 euros à la Fundacion, en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que ses conclusions se limitent à apporter une brève réponse aux intimés sans prétention ni moyen nouveaux et que les pièces communiquées étaient pour 5 d’entre elles de la jurisprudence.

MOTIFS

Sur la demande de la société Cornette de Saint Cyr visant à écarter des débats les conclusions en date du 19 juin 2023 de la Fundacion et sur la demande subsidiaire de la Fundacion de révocation de l’ordonnance de clôture :

Aux termes de l’article 15 du code de procédure civile, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense.

La Fundacion a interjeté appel le 4 juin 2020.

Le 28 septembre 2022, les parties ont reçu un calendrier de procédure fixant les dates de clôture et de plaidoiries respectivement au 10 mai et 29 juin 2023.

Les parties ont de nouveau échangé des conclusions au début du mois de mai 2023 et la clôture fixée initialement au 10 mai 2023 a été reportée au 21 juin 2023 à 10 h afin de permettre à toutes les parties de prendre connaissance des dernières conclusions échangées et éventuellement d’y répondre.

L’appelante ne demande pas que les conclusions de Monsieur [C] et du cabinet d’expertise Chombert notifiées le 19 juin 2023 en cours de journée soient écartées des débats.

L’appelante, qui avait déjà conclu le 5 mai 2023, a signifié de nouvelles conclusions le 19 juin 2023 à 21 heures 02 comportant notamment une demande nouvelle d’expertise.

Elle a par ailleurs communiqué six nouvelles pièces le 20 juin 2023 à 14h28.

Par la tardiveté de ses nouvelles conclusions comportant une demande nouvelle et la communication de six pièces, l’appelante a mis les intimés dans l’incapacité d’en prendre connaissance et de lui répondre avant l’ordonnance de clôture prise conformément à ce qui avait été annoncé le 21 juin 2023 après un ultime report.

Dès lors, il y a lieu d’écarter des débats les conclusions de l’appelante signifiées le 19 juin 2023 à 21 heures en violation du principe du contradictoire ainsi que les pièces communiquées par elle le 20 juin 2023.

Il n’y a pas lieu de révoquer l’ordonnance de clôture en l’absence de cause grave au sens de l’article 803 du code de procédure civile. La demande subsidiaire de la Fundation est donc rejetée.

Sur la preuve des altérations subies par la robe :

Lorsqu’une partie à laquelle un rapport d’expertise est opposé n’a pas été appelée ou représentée au cours des opérations d’expertise, le juge ne peut refuser d’examiner ce rapport, dès lors que celui-ci a été régulièrement versé aux débats et soumis à la discussion contradictoire des parties. Il lui appartient alors de rechercher s’il est corroboré par d’autres éléments de preuve.

Le rapport d’expertise unilatéral en date du 10 juin 2017 de Madame [Z], conservateur-restaurateur, est versé aux débats par la Fundation.

Décrivant la robe, elle relève qu’une griffe a été cousue sur la ceinture de la taille intérieure au niveau du milieu du dos, comportant la signature en écriture noire « [R] [V], [Localité 9] » et la date du modèle « été 1916 », brodée avec un fil bleu.

Elle a comparé la robe avec des photographies de 2011 qui auraient été prises à l’occasion d’une vente aux enchères en date du 2 novembre organisée par la maison Augusta Auction à New York et des dessins de 1916 issus des archives de la maison [V] à [Localité 9].

Elle relève que les coutures du corsage ont été faites avec une machine à coudre récente et que la ceinture et les cocardes ne sont pas placées au même endroit que sur les photographies de 2011 ni sur le dessin de 1916.

Elle en conclut qu’entre la vente de 2011 et celle de 2014, la robe a été entièrement démontée et que toute sa partie supérieure (corsage, doublure du corsage et manches) a été refaite avec des matériaux neufs (tulle de soie bleu et mousseline de soie blanche, fil de coton bleu vif et fil de coton gris-cuivré rose). Elle rajoute que les décors anciens ont été recousus sur ces matériaux neufs à leur emplacement d’origine et que la ceinture a été retournée afin de placer le n’ud au milieu sur le devant et que les cocardes n’ont pas été recousues à l’identique. Selon elle, le but de ce travail aurait été de faire disparaître le tulle de soie jauni et probablement déchiré au niveau des aisselles et de le remplacer par un tulle de soie quasiment identique au tulle original mais en parfait état.

Il y a lieu d’observer à la lecture du rapport une contradiction, le descriptif du corsage, page 5, mentionnant un tissu ‘en très bon état de conservation’ ( ce qui ne signifie pas qu’il ne soit pas d’époque) et la conclusion, page 14, un tulle de soie bleu, neuf.

Madame [S], responsable des archives de la maison [V], dans un e-mail en date du 19 juin 2019 ne reprend qu’une partie des constatations de Madame [Z] en ce qu’elle note uniquement que la doublure (et non la totalité) du corsage en mousseline de soie blanche ‘semble parfaitement neuve’ et que le fil bleu, présent sur la plupart des coutures du corsage, n’est pas forcément dans le goût de [R] [V] ainsi que le fait que la ceinture soit fixée et non plus réversible et donc amovible et que le gallon utilisé à l’intérieur des poignets ‘semble synthétique’.

Elle précise dans ce message qu’elle « ne peut pas réaliser d’expertise » et contrairement à une attestation, ne mentionne pas qu’il est établi en vue de sa production en justice et qu’elle a connaissance des sanctions pénales en cas de fausse déclaration.

De plus, les modifications évoquées, en termes hypothétiques, le mot ‘semble’ étant utilisé à deux reprises, restent mineures. Ce message ne corrobore par conséquent pas le rapport non contradictoire de Madame [Z] qui évoque, dans sa conclusion, que toute la partie supérieure du corsage aurait été refaite avec un tulle neuf.

Il résulte uniquement de l’examen visuel des dessins d’archives que les cocardes, dont il n’est pas contesté qu’elles soient d’origine, ont été légèrement déplacées, détail mineur.

Le fait que sur le dessin, le n’ud soit à l’arrière et non sur le devant, alors qu’il est décrit comme à l’origine amovible par Madame [S], ne caractérise aucune altération.

De plus il ne s’agit que d’un dessin et la preuve n’est pas rapportée que des modifications de ces accessoires n’avaient pas déjà été réalisées par la maison [V] lors de sa vente à la première cliente au regard de ses goûts, demandes et de sa morphologie.

Les photos de la robe, sur fond marron, produites en pièce 11, seraient celles d’une vente aux enchères qui aurait eu lieu à New York en novembre 2011. La pièce mentionne que leur source serait le site internet de la société de vente Augusta sans que la cour puisse avoir une certitude à ce sujet, en l’absence de certification par un huissier de justice. Leur authenticité est donc incertaine.

En outre, leur examen par la cour ne fait pas apparaître que le tissu du corsage soit jauni sous les aisselles contrairement aux affirmations de Madame [Z].

En tout état de cause, il résulte du courrier de Monsieur [X] en date du 25 avril 2019 qui a été directeur du palais Galliera, musée de la mode de la Ville de [Localité 9] de 2011 à 2018 et conservateur du musée de la mode de [Localité 7] de 1995 à 2000, que les interventions sur les aisselles des robes sont fréquentes en raison des tissus fragilisés surtout pour les modèles situés entre la fin du XIXe siècle et les années 1950 et que ces réparations, « strictement localisées à ce niveau », n’altèrent, à son sens, ni la structure, ni la forme ni la lecture ni l’intégrité de la robe.

Il résulte de ces éléments que le rapport non contradictoire de Madame [Z], effectué à la seule demande de l’appelante, n’est pas corroboré par d’autres éléments concernant le fait que la robe ait subi des altérations significatives affectant son authenticité.

Sur la demande en annulation de la vente :

Selon l’article 1110 alinéa 1 ancien du code civil applicable en l’espèce au regard de la date de la vente aux enchères le 8 juillet 2014 ‘l’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet.’

Monsieur [C], vendeur de la robe, conteste que la robe comporterait du tulle neuf, et ainsi ne fait pas l’aveu des altérations comme allégué par l’appelante.

L’authenticité d’une oeuvre est une qualité substantielle. La question des restaurations renvoie au débat sur l’authenticité : selon l’ampleur des restaurations, il pourra ou non être considéré que la chose a conservé son authenticité.

Comme vu au paragraphe ci-dessus, il n’est pas démontré que des restaurations significatives modifiant les caractéristiques du modèle et remettant en cause son authenticité aient été effectuées, sur une robe de près de 100 ans, qui de par son âge et son usage nécessitait nécessairement certaines mesures de conservation comme la reprise de coutures par le remplacement de certains fils, le changement d’un gallon à l’intérieur des poignets ou un changement de la doublure du corsage.

Dès lors il n’est pas rapporté la preuve qu’une erreur aurait altéré, dans l’esprit de l’appelante, la substance de l’objet au sens de l’article 1110 alinéa 1 ancien du code civil.

La cour n’a pas à se prononcer sur le caractère excusable ou non de l’erreur alors qu’il est jugé qu’aucune erreur sur la substance n’est établie par l’appelante.

La décision déférée, qui a débouté l’appelante de sa demande en annulation de la vente, est en conséquence confirmée.

Sur la responsabilité de la société Cornette de Saint Cyr :

Il résulte de l’article 2 des dispositions du décret n°81-255 du 3 mars 1981 sur la répression des fraudes en matière de transaction d’oeuvres d’art et d’objets de collection que « la dénomination d’une oeuvre ou d’un objet lorsqu’elle est uniquement immédiatement suivie de la référence à une période historique, à un siècle ou à une époque, garantit l’acheteur que cet objet a été effectivement produit au cours de la période de référence.

Lorsqu’une ou plusieurs parties de l”uvre ou objet sont de fabrication postérieure, l’acquéreur doit en être informé ».

Les alinéas 2 et 3 de l’article 1.5.5 de l’arrêté du 21 février 2012 portant approbation du recueil des obligations déontologiques des opérateurs de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, qui renvoie au décret précité, précise que :

« La description de l’objet [dans le catalogue] est sincère, exacte, précise et non équivoque au regard des connaissances que l’on peut en avoir au moment de la vente. La description de la nature de cet objet et de son état reflète les doutes qui peuvent exister sur certaines de ses qualités.

La description indique l’existence de réparations ainsi que de restaurations, manques et ajouts significatifs dont le bien peut avoir fait l’objet et qu’il a pu constater ».

L’arrêté précise que seuls les restaurations, manques et ajouts significatifs doivent être mentionnés.

Comme vu ci-dessus, la robe ayant fait l’objet tout au plus de restaurations mineures (changement de la doublure, du fil des coutures et du gallon de l’intérieur des poignets, fixation, réversible, de la ceinture et déplacement des cocardes) non significatives, l’absence de leur mention au catalogue de vente de la société Cornette de Saint Cyr n’est pas fautif.

De plus la Fundacion demande la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices matériels et moraux subis.

Cependant elle ne rapporte pas la preuve qu’elle a subi un préjudice d’image et de réputation en ne pouvant exposer la robe litigieuse au sein de sa collection permanente ni à l’occasion de la célébration des 125 ans de la maison [V] comme allégué, ni que la robe ait subi une dépréciation alors que les restaurations effectuées sont mineures.

La décision déférée qui l’a déboutée de ses demandes à l’encontre de la société Cornette de Saint Cyr et du cabinet d’expertise [T] Chombert est donc confirmée sans qu’il y ait lieu de statuer sur le caractère licite ou non de la clause figurant au catalogue des ventes de la société de ventes volontaires au regard notamment des dispositions de l’article L321-17 du code de commerce.

Le sens de la décision conduit à débouter également la Fundacion de sa demande au titre de la publication du dispositif de l’arrêt dans la revue ‘la gazette Drouot’.

Les demandes en garantie des intimés sont sans objet. La décision déférée est également confirmée de ce chef.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

La décision déférée est confirmée en ce qui concerne les dépens et l’article 700 du code de procédure civile.

Il y a lieu de condamner la Fundacion Museo de la Moda à verser à la société Cornette de Saint Cyr, à Monsieur [C] et au Cabinet Chombert une indemnité de 3.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de l’appel qui seront recouvrés par les conseils des parties adverses conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Écarte des débats les conclusions de la Fundacion Museo de la Moda signifiées le 19 juin 2023 à 21 heures 02 en violation du principe du contradictoire ainsi que les pièces communiquées par elle le 20 juin 2023,

Déboute la Fundacion Museo de la Moda de sa demande de révocation de l’ordonnance de clôture,

Confirme la décision entreprise,

Y ajoutant,

Condamne la Fundacion Museo de la Moda à verser à la société Cornette de Saint Cyr, à Monsieur [C] et au Cabinet Chombert une indemnité de 3.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Condamne la Fundacion Museo de la Moda aux dépens de l’appel qui seront recouvrés par les conseils des parties adverses conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

 


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