16 mai 2023
Cour d’appel de Lyon
RG n°
21/05636
N° RG 21/05636 – N° Portalis DBVX-V-B7F-NXJZ
Décision du
Tribunal de Commerce de Saint-Etienne
Au fond
du 07 Mai 2021
RG : 2020j00081
2112700003/1
S.A.R.L. FLASH S AUTO
C/
S.A.S. LOCAM
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 16 Mai 2023
APPELANTE :
Société FLASH’S AUTO
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Anthony SUC, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
ayant pour avocat plaidant Me Hervé ITTA, avocat au barreau de PARIS, toque : G0655
INTIMEE :
Société LOCAM – LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
* * * * * *
Date de clôture de l’instruction : 07 Avril 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 Février 2023
Date de mise à disposition : 16 Mai 2023
Audience présidée par Stéphanie LEMOINE, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré :
– Olivier GOURSAUD, président
– Stéphanie LEMOINE, conseiller
– Bénédicte LECHARNY, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :
La société Flash S Auto, représentée par son gérant, M. [F], a signé, le 21 mars 2017, un contrat de location pour le financement, par la société Locam, d’un matériel de téléphonie. Le matériel a été mis à disposition par la société Agence premium.
Le contrat a été conclu moyennant un loyer trimestriel de 774€ HT payable pendant une période irrévocable de 21 trimestres.
La société Flash S Auto a payé les échéances jusqu’au 30 mars 2019.
Par exploit d’huissier de justice du 30 janvier 2020, la société Locam a fait assigner la société Flash S Auto en paiement.
Par jugement du 7 mai 2021, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a :
– débouté la société Flash S Auto de ses demandes fondées sur les dispositions du code de la consommation,
– débouté la société Flash S Auto de toutes ses demandes,
– condamné la société Flash S Auto à verser à la société Locam la somme principale de 13 942,93 €, outre intérêts au taux légal à compter du 15 novembre 2019,
– débouté la société Locam de sa demande de restitution du matériel loué,
– condamné la société Flash S Auto à verser à la société Locam la somme de 250 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que les dépens, dont frais de greffe taxés et liquidés à 74,32€, sont à la charge de la société Flash S Auto,
– dit qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire du jugement,
– débouté la société Locam du surplus de ses demandes.
Par déclaration du 2 juillet 2021, la société Flash S Auto a interjeté appel.
Au terme de ses dernières conclusions, notifiées le 24 septembre 2021, la société Flash S Auto demande à la cour de :
– réformer le jugement du tribunal de commerce de Saint-Etienne du 7 mai 2021 en ce que les premiers juges ont :
– retenu la compétence du tribunal de commerce de Saint-Etienne,
– débouté la société Flash S Auto de ses demandes fondées sur les dispositions du code de la consommation,
– débouté la société Flash S Auto de toutes ses demandes,
– condamné la société Flash S Auto à verser à la société Locam la somme principale de 13 942,93€, outre intérêts au taux légal à compter du 15 novembre 2019,
– condamné la société Flash S Auto à verser à la société Locam la somme de 250€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que les dépens, dont frais de greffe taxés et liquidés à 74,32€, sont à la charge de la société Flash S Auto,
– dit qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire du jugement,
in limine litis,
– juger que le tribunal de commerce de Saint-Etienne est incompétent territorialement pour juger de cette affaire,
– juger que seul est compétent le tribunal de commerce de Pontoise et le désigner comme juridiction ayant à juger de cette affaire,
subsidiairement et s’il n’était pas fait droit à cette demande et sur fond,
– juger abusive et réputer non écrites les conditions imposées par le contrat à l’article 3 notamment,
– juger disproportionnées les demandes formulées par la société Locam et formulées dans le cadre d’un déséquilibre significatif,
– juger les conditions de résiliation plus rigoureuses pour la société Flash S Auto que pour la société Locam,
– juger que la résiliation du contrat a pris effet au 30 mai 2020, toutes les échéances ayant été payées à cette date,
– débouter la société Locam de toutes ses demandes comme irrecevables et mal fondées et notamment concernant ses demandes tirées d’une clause pénale,
– ordonner la restitution de la somme de 15 156,99€ et en conséquence, condamner la société Locam au paiement de cette somme,
très subsidiairement et dans l’hypothèse selon laquelle la mise en demeure du 15 novembre 2019 serait la seule à prendre en compte,
– juger que le contrat du 5 avril 2019 a pris fin le 23 novembre 2019 et 8 jours après la mise en demeure du 15 novembre 2019 visant la clause résolutoire du bail,
– juger que seule la somme de 2 402,76 € était due à la société Locam,
– ordonner la restitution de la somme de 15 156,99 € et, en conséquence, condamner la société Locam au paiement de cette somme,
– ordonner la compensation entre les sommes dues,
en toute hypothèse,
– juger qu’elle a rendu le matériel objet de la procédure le 24 juin 2020,
– condamner la société Locam au paiement de la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive sur le fondement de l’article 1231-1 du code civil,
– condamner la société Locam au paiement de la somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du code civil,
– condamner la société Locam au paiement de la somme de 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 17 décembre 2021, la société Locam demande à la cour de :
– juger irrecevable l’exception d’incompétence de la société Flash S Auto, à tout le moins, la juger mal fondée,
– juger non fondé l’appel de la société Flash S Auto,
– la débouter de toutes ses demandes,
– confirmer le jugement entrepris,
– condamner la société Flash S Auto à lui régler une nouvelle indemnité de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– la condamner en tous les dépens d’instance et d’appel.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 7 avril 2022.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
1. Sur l’exception d’incompétence
La société Flash S Auto, soulève l’incompétence territoriale du tribunal de commerce de Saint-Etienne au profit du tribunal de commerce de Pontoise. Elle fait valoir :
– que le caractère noirâtre de la clause attributive de compétence ne permet pas de considérer qu’elle est suffisamment apparente,
– que la clause attributive de compétence est inapplicable quand le code de la consommation est applicable à l’espèce.
La société Locam soutient que l’exception d’incompétence n’a pas été soulevée devant le tribunal de commerce de Saint-Etienne, de sorte que la société Flash S Auto est irrecevable à le faire pour la première fois en cause d’appel.
Réponse de la cour
Il résulte de l’article 74 du code de procédure civile que la société Flash S Auto représentée en première instance, qui aurait pu invoquer, à ce stade de la procédure, l’incompétence de la juridiction saisie et qui ne l’a pas valablement fait, est irrecevable à soulever une telle exception pour la première fois en cause d’appel.
2. Sur les clauses abusives
La société Flash S Auto soutient que les dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives sont applicables au cas d’espèce, dès lors que :
– n’ayant aucune compétence en matière de téléphonie ou de contrat conclu en cette matière, elle a la qualité de non-professionnel,
– le standard téléphonique n’a jamais fait partie des éléments indispensables à l’exercice de son activité,
– le contrat n’ayant pas été conclu dans un établissement de l’agence Premium ou de la société Locam, il doit être considéré comme ayant été conclu » hors établissement »,
– elle apporte la preuve de ce qu’elle n’avait pas plus de cinq salariés au moment de la conclusion du contrat.
Elle en déduit que les articles 2, 3 et 7 du contrat, qui créent un déséquilibre significatif au profit de la société Locam, doivent être réputées non écrites. Elle fait valoir que:
– aux termes de l’article 3, la convention ne peut être résiliée que par la société Locam de sorte qu’elle a dû attendre l’initiative du bailleur pour voir son contrat résilié alors même qu’elle avait conclu un autre contrat avec la société Velliacom le 3 juin 2019,
– aux termes de l’article 2 du contrat, la livraison et la mise en place du matériel par le bailleur se fait aux risques et périls du locataire,
– aux termes de l’article 7 du contrat, aucun recours n’est possible contre le bailleur en cas de vice du matériel.
La société Locam soutient que la société Flash S Auto ayant pris à bail, en sa qualité de commerçante, un équipement téléphonique dans le cadre et pour les besoins de son activité commerciale, elle n’est pas fondée à revendiquer la qualité de non-professionnel, de sorte que les dispositions du code de la consommation ne lui sont pas applicables.
Elle ajoute que la clause mettant à la charge du locataire une indemnité contractuelle de résiliation d’un montant équivalent à celui des loyers à échoir à la date de la résiliation ne participe pas d’un déséquilibre significatif dès lors que le matériel a été déjà été payé au fournisseur.
Réponse de la cour
Il résulte de l’article L 212-3 du code de la consommation, que la législation sur les clauses abusives régie par les dispositions de l’article L. 212-1 du même code sont applicables aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels, dès lors que l’objet de ces contrats n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.
Afin de démontrer qu’elle n’avait pas plus de 5 salariés à la date de conclusion du contrat, la société Flash S Auto produit un document émanant de M. [V], désigné comme étant le président de la société Clyper expertises et conseils, qui atteste que durant l’année 2017, ‘5 personnes en CDI (nonobstant les stagiaires ou remplacements estivaux)’ étaient présentes dans l’entreprise.
Ce document apparaît insuffisant, en l’absence de toute explication sur le rôle exercé par la société Clyper au sein de l’entreprise et de la possibilité de produire des documents officiels, tels que le registre du personnel, la déclaration unifiée de cotisations sociales ou le livre journal des salaires.
Par ailleurs, ce document est imprécis, puisqu’il se borne à affirmer que 5 personnes sont employées en CDI, alors que la loi ne précise pas que seuls ces salariés doivent être comptabilisés et ambigüe, puisqu’il laisse entendre que d’autres personnes – intérimaires ou en CDD- étaient également salariées à cette période.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de retenir, par confirmation du jugement, que la société Flash S Auto ne rapporte pas la preuve qu’à la date de conclusion du contrat, elle n’employait pas plus de 5 personnes.
En conséquence, la législation sur les clauses abusives n’est pas applicable.
3. Sur les demandes de dommages-intérêts
La société Flash S auto sollicite la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts, sur le fondement des articles L. 442-1 et suivants du code de commerce et 1171 du code civil. Elle fait valoir :
– que la prestation de mauvaise qualité a permis une ponction de 928,80 € par trimestre à partir du 5 avril 2017, ce qui constitue un avantage manifestement disproportionné au sens des articles L442-1 et suivants du code de commerce, de même qu’un déséquilibre significatif au sens de ces mêmes articles et de l’article 1171 du code civil,
– que le contrat doit être résilié 8 jours après la mise en demeure, de sorte que l’interprétation de la société Locam, qui se prévaut de la clause résolutoire pour réclamer la totalité des loyers jusqu’au 30 juin 2022 est abusive.
La société Locam soutient que la clause mettant à la charge du locataire une indemnité contractuelle de résiliation d’un montant équivalent à celui des loyers à échoir à la date de la résiliation ne participe pas d’un déséquilibre significatif dès lors que le matériel a été déjà été payé au fournisseur.
Réponse de la cour
En premier lieu, la société Flash S auto, qui affirme que la prestation de téléphonie litigieuse était de mauvaise qualité, ne produit aucune preuve à l’appui de ses allégations, de sorte qu’il ne peut en être déduit que la société Locam en a retiré un avantage disproportionné.
En second lieu, selon l’article 12 des conditions générales du contrat de location, relatif à la résiliation contractuelle, en cas de résiliation par le loueur pour défaut de respect du contrat, ‘(…) outre la restitution du matériel, le locataire devra verser au loueur une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation majorée d’une clause pénale de 10%, ainsi qu’une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu’à la fin du contrat telle que prévue à l’origine, majorée d’une clause pénale de 10% (…)’.
La société Locam justifiant avoir résilié le contrat par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 15 novembre 2019, c’est à bon droit qu’elle sollicite le règlement des loyers impayés, outre l’indemnité de résiliation, qui correspond à la somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu’à la fin du contrat telle que prévue à l’origine et la clause pénale de 10%, sans que ne puisse lui être reproché une interprétation abusive des stipulations contractuelles précitées dont elle réclame la stricte application.
Par ailleurs, ainsi que l’ont retenu les premiers juges, la société Flash S auto ne démontre pas qu’il existe une disproportion manifeste entre le quantum de l’indemnité réclamée par la société Locam et son préjudice, au regard, notamment, du montant des loyers déjà encaissés.
Le jugement ayant rejeté la demande de dommages-intérêts à ce titre est donc confirmé.
4. Sur les sommes restant dues à la société Locam
La société Flash S auto soutient qu’elle ne reste devoir que la somme de 2 402,76 euros si l’on retient que le contrat a été résilié suite à la mise en demeure de payer du 15 novembre 2019.
Réponse de la cour
Ainsi que l’ont pertinemment retenu les premiers juges, le contrat objet du litige porte le numéro 133 0446, de sorte que seule la mise en demeure du 15 novembre 2019, qui porte ce numéro doit être prise en compte, à l’exclusion de celle du mois d’août, qui mentionne un autre numéro.
Par ailleurs, ainsi qu’il a été précédemment rappelé, en application de l’article 12 du contrat, c’est à bon droit que les premiers juges ont retenu qu’en suite de la résiliation du contrat, la société Flash S auto reste devoir la somme de 13 942,93 euros, correspondant aux loyers impayés à la date de résiliation, à l’indemnité de résiliation et la clause pénale de 10%.
En conséquence, le jugement est également confirmé de ce chef.
5. Sur les autres demandes
Le jugement étant confirmé, il convient de débouter la société Flash S auto de sa demande de dommages-intérêts formée sur le fondement de l’article 1240 du code civil.
Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.
L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société Locam en appel. La société Flash S auto est condamnée à lui payer à ce titre la somme de 1.000 €.
Les dépens d’appel sont à la charge de la société Flash S auto qui succombe en sa tentative de remise en cause du jugement.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
y ajoutant,
Déclare irrecevable l’exception d’incompétence;
Déboute la société Flash S auto de sa demande de dommages-intérêts;
Condamne la société Flash S auto à payer à la société Locam, la somme de 1.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes.
Condamne la société Flash S auto aux dépens de la procédure d’appel, et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.
La greffière, Le Président,