15 mai 2023
Cour d’appel de Bordeaux
RG n°
20/04423
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 15 MAI 2023
N° RG 20/04423 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LZAI
[Y] [R]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/020794 du 03/12/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BORDEAUX)
c/
S.A.S.U. MAGI
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 10 novembre 2020 par le Tribunal Judiciaire de BERGERAC ( RG : 20/00562) suivant déclaration d’appel du 16 novembre 2020
APPELANT :
[Y] [R]
né le 24 mars 1987 à [Localité 2]
de nationalité Française
demeurant [Adresse 1]
représenté par Maître Olivier COULEAU de la SELARL GUIGNARD & COULEAU, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
S.A.S.U. MAGI, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 3]
non représentée, assignée selon dépôt de l’acte à l’étude d’huissier
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 mars 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Emmanuel BREARD, conseiller, chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Roland POTEE, président,
Bérengère VALLEE, conseiller,
Emmanuel BREARD, conseiller,
Greffier lors des débats : Véronique SAIGE
ARRÊT :
– par défaut
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
Le 7 mai 2020, M. [Y] [R] a conclu avec la SASU Magi un contrat de location d’un véhicule Renault Laguna pour une durée de 10 mois, moyennant le paiement d’un loyer de 250 euros par mois et d’une caution d’un montant de 700 euros.
Le véhicule Renault Laguna loué par M. [R] est rapidement tombé en panne et a été récupéré par la société Magi.
Par acte du 2 juillet 2020, M. [R] a assigné la société Magi devant le tribunal judiciaire de Bergerac aux fins de voir constater la résolution du contrat de location du 7 mai 2020, de voir réputée non écrite la clause du contrat de location relative à la reconnaissance de l’état satisfaisant du véhicule et de la voir condamner au paiement de diverses sommes.
Par jugement du 10 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Bergerac a :
– débouté M. [R] de l’ensemble de ses demandes présentées à l’encontre de la société Magi,
– condamné M. [R] aux entiers dépens.
M. [R] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 16 novembre 2020.
Par conclusions déposées le 15 janvier 2021, M. [R] demande à la cour de :
– déclarer M. [R] recevable et bien fondé en son appel,
Y faisant droit,
– infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Bergerac du 10 novembre 2020,
Statuant à nouveau :
– constater le défaut de délivrance imputable à la société Magi,
– réputer non écrites les clauses suivantes du contrat de location conclu le 7 mai 2020 entre la société Magi et M. [R] :
* ‘le client reconnaît louer le véhicule et ses accessoires dans un état satisfaisant aux conditions imposées par le code de la route.
En signant le présent contrat, le client agrée le véhicule dans l’état dans lequel il se trouve, tel que mentionné au recto des présentes, et s’oblige à le restituer dans le même état de marche et dans le même état esthétique’.
En conséquence,
– prononcer la résolution du contrat de location conclu le 7 mai 2020 entre la société Magi et M. [R],
– condamner la société Magi à verser à M. [R] la somme totale de 7 700 euros détaillée comme suite :
* 700 euros correspondant au montant de la caution,
* 5 000 euros correspondant au préjudice,
* 2 000 euros correspondant à la résistance abusive,
– condamner la société Magi à verser à M. [R] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Magi aux dépens de l’instance.
La société Magi n’a pas constitué avocat. Elle a été assignée par remise de l’acte à l’étude.
L’affaire a été fixée à l’audience du 6 mars 2023.
L’instruction a été clôturée par ordonnance du 20 février 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I Sur les demandes de M. [R].
L’article L.212-1 du code de la consommation dispose ‘Dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Sans préjudice des règles d’interprétation prévues aux articles 1188, 1189, 1191 et 1192 du code civil, le caractère abusif d’une clause s’apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat. Il s’apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque les deux contrats sont juridiquement liés dans leur conclusion ou leur exécution.
L’appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.
Un décret en Conseil d’Etat, pris après avis de la commission des clauses abusives, détermine des types de clauses qui, eu égard à la gravité des atteintes qu’elles portent à l’équilibre du contrat, doivent être regardées, de manière irréfragable, comme abusives au sens du premier alinéa.
Un décret pris dans les mêmes conditions, détermine une liste de clauses présumées abusives ; en cas de litige concernant un contrat comportant une telle clause, le professionnel doit apporter la preuve du caractère non abusif de la clause litigieuse.
Ces dispositions sont applicables quels que soient la forme ou le support du contrat. Il en est ainsi notamment des bons de commande, factures, bons de garantie, bordereaux ou bons de livraison, billets ou tickets, contenant des stipulations négociées librement ou non ou des références à des conditions générales préétablies’.
L’article R.212-1 du même code précise ‘Dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions des premier et quatrième alinéas de l’article L.212-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de :
1° Constater l’adhésion du consommateur à des clauses qui ne figurent pas dans l’écrit qu’il accepte ou qui sont reprises dans un autre document auquel il n’est pas fait expressément référence lors de la conclusion du contrat et dont il n’a pas eu connaissance avant sa conclusion ;
2° Restreindre l’obligation pour le professionnel de respecter les engagements pris par ses préposés ou ses mandataires ;
3° Réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les clauses du contrat relatives à sa durée, aux caractéristiques ou au prix du bien à livrer ou du service à rendre ;
4° Accorder au seul professionnel le droit de déterminer si la chose livrée ou les services fournis sont conformes ou non aux stipulations du contrat ou lui conférer le droit exclusif d’interpréter une quelconque clause du contrat ;
5° Contraindre le consommateur à exécuter ses obligations alors que, réciproquement, le professionnel n’exécuterait pas ses obligations de délivrance ou de garantie d’un bien ou son obligation de fourniture d’un service ;
6° Supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obligations ;
7° Interdire au consommateur le droit de demander la résolution ou la résiliation du contrat en cas d’inexécution par le professionnel de ses obligations de délivrance ou de garantie d’un bien ou de son obligation de fourniture d’un service ;
8° Reconnaître au professionnel le droit de résilier discrétionnairement le contrat, sans reconnaître le même droit au consommateur ;
9° Permettre au professionnel de retenir les sommes versées au titre de prestations non réalisées par lui, lorsque celui-ci résilie lui-même discrétionnairement le contrat ;
10° Soumettre, dans les contrats à durée indéterminée, la résiliation à un délai de préavis plus long pour le consommateur que pour le professionnel ;
11° Subordonner, dans les contrats à durée indéterminée, la résiliation par le consommateur au versement d’une indemnité au profit du professionnel ;
12° Imposer au consommateur la charge de la preuve, qui, en application du droit applicable, devrait incomber normalement à l’autre partie au contrat’.
L’appelant affirme qu’il n’avait aucun moyen de vérifier l’état du véhicule objet du litige avant la prise de possession, alors que le contrat présume que le véhicule est conforme, sans état préalable contradictoire de l’engin, ce qui induit que la responsabilité des désordres lui incombe.
Il en déduit que la clause en cause le prive de tout recours, seule la société adverse déterminant si la voiture mise à sa disposition est conforme aux stipulations contractuelles, donc de tout droit à réparation de son préjudice en cas de délivrance non conforme et de recours en résolution du contrat de location.
Il dit encore que la même clause induit un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, faute de contrepartie en sa faveur et ne pouvant constater que les désordres apparents et non les défauts mécaniques.
Il estime que les dispositions de l’article 1217 du code civil doivent pouvoir s’appliquer, que la société Magi n’a pas exécuté son obligation de délivrance d’un véhicule conforme et en bon état de fonctionnement à son égard et qu’il peut donc solliciter la résiliation du contrat.
En application de l’article 1721 du même code, il considère subir un préjudice suite à l’inexécution du contrat de location, ne pouvant se déplacer, notamment pour travailler, outre le fait qu’il existe de la part de l’intimée une résistance abusive, faute de l’avoir remboursé ou d’avoir récupéré le véhicule avant de l’avoir vendu.
***
La cour constate que le contrat conclu entre les parties au litige stipule que ‘Le client reconnaît louer le véhicule et ses accessoires dans un état satisfaisant aux conditions imposées par le code la route. En signant le présent contrat, le client agrée le véhicule dans l’état dans lequel il se trouve tel que mentionné au recto des présentes et s’oblige à le restituer dans le même état de marche et dans le même état esthétique. Toute réserve sur l’état du véhicule doit être formulée par le client dans l’espace dédié à cet effet au recto du présent contrat au moment de la prise en charge du véhicule’.
Il apparaît tout d’abord à la lecture de ce document que le contrat souscrit entre les parties comporte un risque à la charge de M. [R] en ce qu’il lui revient d’examiner le véhicule lors de sa prise en charge, aucune disposition ne lui interdisant de recourir à un sachant.
Mieux, il est allégué par cette partie non seulement une clause abusive, mais également une difficulté mécanique. Néanmoins, outre qu’il a été attiré son attention sur l’examen nécessaire du véhicule, ce qui permet de rétablir l’équilibre entre les parties sur ce point, il n’est pas davantage établi de panne de l’automobile louée par une pièce versée aux débats.
Aussi, il n’est pas établi un déséquilibre contractuel au détriment de l’appelant, ni les faits nécessaires à une résiliation du contrat objet du litige.
Il s’ensuit que l’ensemble des demandes fait par cette partie sera rejeté, y compris celles en dommages et intérêts, faute d’établir la moindre faute de la part de la société intimée.
Le jugement attaqué sera donc confirmé.
II Sur les demandes annexes.
Selon l’article 696 du code de procédure civile la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
Dans le cas présent, M. [R] succombant en ses demandes, il sera condamné aux entiers dépens de la présente instance.
Selon l’article 700 du code de procédure civile le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée.
En l’espèce, l’équité ne commande pas de faire droit à la demande de l’appelant fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement rendu le 10 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Bergerac ;
Y ajoutant,
Rejette la demande faite au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [R] aux entiers dépens de la présente instance.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,