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15 mai 2023
Cour d’appel d’Agen
RG n°
22/00951
ARRÊT DU
15 Mai 2023
VS / NC
——————–
N° RG 22/00951
N° Portalis DBVO-V-B7G -DBYW
——————–
[F] [N] épouse [V]
C/
CRCAM DE [Localité 11] ET D’ILE-DE-FRANCE
——————-
EXPÉDITIONS le
aux avocats
ARRÊT n° 220-23
COUR D’APPEL D’AGEN
Chambre Civile
LA COUR D’APPEL D’AGEN, 1ère chambre dans l’affaire,
ENTRE :
Madame [F] [N] épouse [V]
née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 12] (CONGO)
de nationalité française
domiciliée : [Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Marie-Hélène THIZY, membre de la SELARL AD-LEX, avocate postulante au barreau d’AGEN
et Me Karine PERRET, avocate associée de la SELAS PERRET et Associés, avocate plaidante au barreau de BERGERAC
APPELANTE d’un jugement du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de CAHORS en date du 14 novembre 2022,
RG 2022/A47
D’une part,
ET :
LA CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D’ILE-DE-FRANCE pris en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège RCS PARIS 775 665 615
[Adresse 2]
[Localité 7]
représentée par Me Lynda TABART, membre de la SCP DIVONA LEX, avocate postulante au barreau du LOT
et Me Myriam HATEM LEFEBVRE, avocate plaidante au barreau de PARIS
INTIMÉE
D’autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
l’affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 20 février 2023, sans opposition des parties, devant la cour composée de :
Présidente : Valérie SCHMIDT, Conseiller, qui a fait un rapport oral à l’audience
Assesseur : Hervé LECLAINCHE, Magistrat honoraire
qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée outre eux-mêmes de :
Pascale FOUQUET, Conseiller
en application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, et après qu’il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés,
Greffière : Nathalie CAILHETON
ARRÊT : prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
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EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 16 novembre 2004, la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a consenti à M. [Y] [V] et Mme [F] [N] épouse [V] (les époux [V] en suivant) un prêt d’un montant de 110 000 euros au taux d’intérêt de 4,10 % pour une durée de 120 mois.
Par jugement du 05 juin 2015, le tribunal de grande instance de Cahors a condamné les époux [V] à payer à la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France la somme de 28 285,33 euros avec intérêts au taux contractuel de 4,10 % à compter du 09 septembre 2013.
Par exploit du 25 juin 2012, la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a fait délivrer aux époux [V] un commandement de saisie immobilière portant sur l’immeuble situé à [Localité 10] cadastré section D n°[Cadastre 5] et [Cadastre 6], publié au service de la publicité foncière.
Par exploit du 24 juillet 2012, la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a fait assigner les époux [V] devant le juge de l’exécution aux fins de vente forcée de leur immeuble.
Par arrêt du 11 septembre 2013, la cour d’appel d’Agen a :
– dit irrecevables en cause d’appel les moyens de fait ou de droit tendant à contester les
poursuites postérieurement à l’audience d’orientation,
– dit que toutes les contestations de l’emprunteur sont soumises au délai de prescription
de droit commun de 05 ans,
– infirmé le jugement déféré en ce qu’il a débouté les époux [V] de leur demande en déchéance du droit aux intérêts contractuels et fixé la créance à la somme de 182 838,41 € avec intérêts aux taux de 6,90 %,
statuant à nouveau :
– dit que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France n’a pas présenté aux époux [V] d’offre de prêt valable,
– dit que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France est déchue en conséquence du droit aux intérêts,
– dit que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France devra présenter au plus tard lors de la prochaine audience devant le juge de l’exécution un décompte conforme aux prescriptions de l’article L.311-33 ancien du code de la consommation,
– débouté les époux [V] de leur demande en annulation de l’hypothèque conventionnelle, de la procédure en saisie immobilière, du fichage des incidents caractérisés de paiement,
– précisé que la créance de la Banque CIC du Sud-Ouest est fixée pour mémoire à la somme de 21 582,22 euros sous réserve de sommes versées depuis,
– confirmé le surplus du jugement.
Par exploit du 25 juin 2013, les époux [V] ont fait assigner la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France devant le tribunal de grande instance de Paris pour manquement à leur devoir de conseil, d’information, de mise en garde et de coopération.
Par arrêt du 19 février 2015, la Cour de Cassation a rejeté les pourvois des époux [V] et de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France.
Par jugement du 17 septembre 2015, le tribunal de grande instance de Paris a débouté les époux [V] de toutes leurs prétentions fondées sur des manquements de la banque aux obligations de conseil, d’information, de mise en garde, de coopération et d’exécution du contrat de bonne foi.
Par arrêt du 05 mai 2017, la cour d’appel de Paris a confirmé le dit jugement.
Par décision du 30 juin 2017, la commission de surendettement du Lot a déclaré recevable
la demande des époux [V].
Par jugement du 14 novembre 2017, le tribunal d’instance de Cahors a déclaré les époux [V] recevables en leur demande tendant à bénéficier des mesures de traitement de leur situation de surendettement.
Par jugement du 22 septembre 2017, le juge de l’exécution de Cahors a déclaré les époux [V] irrecevables en leur demande de sursis à la vente et en leur demande d’autorisation de vente amiable et ordonné la vente forcée de l’immeuble sur la mise à prix de 350 000 euros.
Par arrêt du 25 avril 2018, la cour d’appel d’Agen a déclaré irrecevable l’appel formé par les époux [V], le jugement ayant ordonné la vente forcée n’étant pas susceptible d’appel.
Par arrêt du 16 mars 2020, la cour d’appel d’Agen a :
– infirmé le jugement déféré,
statuant à nouveau :
– dit que la demande de report de l’audience d’adjudication est une demande incidente,
– constaté que les conclusions de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France ne sont pas signées,
– dit en conséquence que le juge de l’exécution statuant en matière de saisie immobilière n’est saisi d’aucune demande,
– constaté dès lors la caducité du commandement de payer valant saisie,
– dit n’y avoir lieu à indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, – condamné la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France aux entiers dépens, comprenant les frais de saisie et autorisé Me Thizy à recouvrer les siens conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Par arrêt du 04 novembre 2021, la Cour de Cassation a partiellement cassé l’arrêt précité.
Par arrêt du 31 mars 2022, la cour d’appel de Bordeaux a :
– déclaré irrecevable la demande des époux [V] tendant à voir déclarer la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France irrecevable en sa demande de report de la vente forcée,
– confirmé le jugement du 15 mars 2019 pour le surplus,
– renvoyé la cause et les parties devant le juge de l’exécution de Cahors pour que soit reprise la procédure d’adjudication,
– condamné les époux [V] à payer à la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France une somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné les époux [V] aux dépens.
Les époux [V] ont régularisé un pourvoi le 24 mai 2022 devant la Cour de Cassation.
Par exploit du 20 avril 2022, la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a fait procéder à la saisie attribution des sommes détenues par Mme [N] épouse [V] dans les comptes du CIC Sud Ouest de [Localité 8], pour paiement de la somme de 168 125,15 euros.
Par exploit du 17 mai 2022, la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a fait procéder à la saisie attribution des sommes détenues par M. [V] dans les comptes du Crédit Mutuel de [Localité 9], pour paiement de la somme de 168 469,84 euros.
Par exploit du 17 mai 2022, la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a fait procéder à la saisie attribution des sommes détenues par M. [V] dans les comptes du Crédit Mutuel de [Localité 9] pour paiement de la somme de 7 098,79 euros.
Par exploit du 09 juin 2022, la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a procédé à la saisie attribution des sommes détenues par Mme [N] épouse [V] dans les comptes du CIC Sud Ouest de [Localité 8], pour paiement de la somme de 7 048,93 euros.
Par exploit du 09 juin 2022, la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a fait procéder à la saisie attribution des sommes détenues par Mme [N] épouse [V] dans les comptes du CIC Sud Ouest de [Localité 8], pour paiement de la somme de 168 330,93 euros.
Par jugement du 14 novembre 2022, le juge de l’exécution de Cahors a :
– rejeté la demande de sursis à statuer,
– déclaré la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France recevable en sa demande de saisie des rémunérations à l’égard de Mme [F] [N] épouse [V],
– ordonné la saisie des rémunérations à l’égard de Mme [F] [N] épouse [V] pour un principal de 163 079,53 euros et les intérêts échus à hauteur de 7 941,34 euros,
– rejeté la demande de dommages et intérêts de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France,
– condamné solidairement les époux [V] à payer à la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné Mme [F] [N] épouse [V] aux dépens.
– rejeté le surplus des demandes.
Mme [F] [N] épouse [V] a interjeté appel le 30 novembre 2022 de cette décision en visant dans sa déclaration d’appel l’intégralité des chefs de jugement à l’exception de ceux ayant rejeté la demande de dommages et intérêts de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France et le surplus des demandes.
L’avis de fixation de l’affaire à bref délai est du 07 décembre 2022.
Par dernières conclusions du 14 février 2023, Mme [F] [N] épouse [V] demande à la cour de :
– déclarer recevable l’appel formé par Mme [F] [N] épouse [V],
y faisant droit :
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 10 000 euros pour résistance abusive,
– réformer le jugement déféré des chefs critiqués,
statuant à nouveau :
– déclarer que l’issue du pourvoi aura nécessairement des répercussions sur la recevabilité
de la demande de saisie des rémunérations sollicité par la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France sur les pensions de retraites de Mme [F] [N] épouse [V] compte tenu de la caducité encourue qui aura des conséquences sur la prescription de l’action de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France au titre de l’acte notarié du 08 juillet 2008,
en conséquence :
– ordonner le sursis à statuer sur la demande de saisie des rémunérations de Mme [F] [N] épouse [V] dans l’attente de l’issue du pourvoi en cassation formé par les époux [V] à l’encontre de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Bordeaux le 31 mars 2022,
à titre subsidiaire, pour le cas où la cour débouterait Mme [F] [N] épouse [V] de sa demande de sursis à statuer :
– déclarer que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France ne justifie pas avoir prononcé la déchéance du terme après l’expiration du plan conventionnel de redressement,
en conséquence :
– débouter la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France de sa demande de saisie des rémunérations de Mme [F] [N] épouse [V] qui est irrecevable,
à titre infiniment subsidiaire :
– déclarer prescrite la créance de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France en vertu du jugement rendu le 05 juin 2015 faute d’avoir procédé à l’exécution forcée dans les deux ans du jugement,
– déclarer prescrite l’action de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France tendant au recouvrement des intérêts de retard dus en vertu du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Cahors du 05 juin 2015,
– déclarer que la saisie des rémunérations de Mme [F] [N] épouse [V] est abusive et excède ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l’obligation,
en conséquence :
– débouter la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France de sa demande de saisie des rémunérations de Mme [F] [N] épouse [V] en vertu du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Cahors le 05 juin 2015,
subsidiairement, pour le cas où la cour déclarerait non prescrite l’action de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France :
– déclarer que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France ne justifie pas du montant de sa créance en principal et intérêts,
– déclarer que les époux [V] ont procédé au règlement de la créance de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France au titre du jugement rendu le 05 juin 2015 dans le cadre du plan de redressement,
– déclarer que la saisie des rémunérations de Mme [F] [N] épouse [V] en vertu du jugement rendu le 05 juin 2015 est abusive,
en conséquence :
– débouter la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France de sa demande de saisie des rémunérations de Mme [F] [N] épouse [V] en vertu du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Cahors le 05 juin 2015,
– déclarer que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France ne justifie pas de l’offre préalable de crédit signée par les époux [V],
– déclarer que l’acte notarié signé le 08 juillet 2008 ne comporte pas l’offre préalable de prêt signée par les époux [V] ni les éléments permettant d’évaluer et de déterminer la créance de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France,
– déclarer que l’acte notarié signé le 08 juillet 2008 ne constate pas l’existence d’une créance certaine, liquide et exigible et ne constitue pas un titre exécutoire,
– déclarer que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France ne pouvait procéder à la saisie des rémunérations de Mme [F] [N] épouse [V] à hauteur de la somme de 168 125,15 euros,
– déclarer que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a manqué à son devoir de contracter de bonne foi et a fait souscrire aux époux [V] un prêt qui n’était pas adapté à leurs capacités financières et dont ils n’ont pas été en mesure d’en comprendre la portée,
– déclarer que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a vicié le comportement des époux [V] qui étaient au moment de la signature de l’acte notarié en situation de vulnérabilité,
– déclarer que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a commis une faute dans l’octroi du crédit qui était dès son départ voué à l’échec, ce que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France n’ignorait pas, créant ainsi un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties,
– déclarer que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France n’a accordé aux époux [V] aucun délai de réflexion et a procédé au déblocage des fonds avant même la signature de l’acte notarié,
– déclarer que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France n’a proposé aucune assurance aux époux [V] ni éclairer ces derniers sur la gravité des conséquences d’un défaut d’assurance,
– déclarer que l’acte notarié signé le 08 juillet 2008 n’est que partiellement exécutoire à concurrence de la somme de 160.00 euros,
– déclarer que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France ne dispose pas d’un titre exécutoire pour le surplus de sa créance au titre du prêt d’un montant de 160 000 euros,
– déclarer que la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France n’a pas assigné les époux [V] dans les deux ans de l’exigibilité de sa créance au titre du prêt d’un montant de 160 000 euros,
– déclarer qu’au jour de la demande de saisie des rémunérations, l’action de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France était prescrite,
– déclarer que la saisie des rémunérations de Mme [F] [N] épouse [V] est abusive,
en conséquence :
– prononcer la nullité de l’acte notarié signé le 08 juillet 2008,
– débouter la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France de sa demande de saisie des rémunérations de M. [V] en vertu de l’acte notarié du 08 juillet 2008,
à titre encore plus subsidiaire, pour le cas où la cour confirmerait en toutes ses dispositions le jugement déféré :
– déclarer que M. [V] n’étant pas partie à l’instance, seule Mme [F] [N] épouse [V] est tenue au paiement de la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
en tout état de cause :
– débouter la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France à payer à Mme [F] [N] épouse [V] la somme de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– la condamner aux entiers dépens, de première instance et d’appel, dont distraction pour
ceux d’appel au profit de Me Thizy, avocat aux offres de droit.
A l’appui de ses prétentions, Mme [F] [N] épouse [V] fait valoir que :
– si l’issue du pourvoi n’aura pas d’incidence sur la créance de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France au titre du jugement du 05 juin 2015, il aura des répercussions sur la recevabilité de l’action de la banque en vertu de l’acte notarié du 08 juillet 2008 et donc sur la prescription de la créance de cet établissement et ainsi sur la saisie des rémunérations engagée,
– la cour d’appel de Bordeaux a violé les dispositions de l’article R. 311-5 du code des procédures civiles d’exécution en considérant que l’audience du 15 février 2019 était une audience d’orientation et non une audience d’adjudication,
– en cas de prononcé d’une caducité du commandement valant saisie, par la cour d’appel de renvoi, il ne sera justifié d’aucun acte interruptif de prescription dans le délai de deux ans suivant l’acte notarié du 08 juillet 2008,
– tous les actes de procédure subséquents seront anéantis de sorte que l’assignation délivrée le 24 juillet 2012 aux époux [V] n’aura plus aucun effet interruptif de prescription,
– les décisions dont se prévaut la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France ont été rendues dans le cadre de la procédure de saisie immobilière et n’ont aucun effet interruptif de prescription si le commandement valant saisie est déclaré caduc,
– si la caducité du commandement valant saisie est prononcée, la procédure de surendettement intervenue postérieurement n’aura aucun effet interruptif de prescription et ne vaudra pas reconnaissance de dette,
– la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France ne justifie pas avoir saisi le juge pour demander qu’il soit mis fin au plan de redressement, ni avoir adressé aux époux [V] une mise en demeure prononçant la déchéance du terme avant de procéder à la saisie des rémunérations,
– le fait pour un débiteur particulier de ne pas respecter le plan de surendettement ne permet pas la reprise immédiate des mesures d’exécution,
– la créance de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France est prescrite au titre du jugement rendu le 05 juin 2015, aucun acte d’exécution n’ayant été entrepris dans le délai de deux ans suivant le jugement intervenu,
– le paiement partiel intervenu après l’expiration du délai de prescription ne vaut pas une reconnaissance de dette interrompant la prescription,
– elle a, avec son époux, honoré le paiement des 24 mensualités restantes dues, soit la
somme de 26 854,32 euros qui couvre largement le montant du capital restant dû,
– l’action en recouvrement d’intérêts dus en vertu d’un jugement et exigibles postérieurement à celui-ci s’analyse en une action du professionnel pour les biens et services qu’il fournit aux consommateurs,
– la prescription des intérêts est une prescription biennale de sorte que seul le principal
est dû,
– la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France ne s’est fondée que sur l’acte notarié du 08 juillet 2008 pour engager la saisie rémunération litigieuse et ne peut en substituer aucun autre, lequel ne comporte pas tous les éléments permettant d’évaluer la créance du prêteur,
– les motifs visés dans le prêt résultant de l’acte notarié du 08 juillet 2008 renvoient à des besoins de trésorerie ce qui est inexact et aucune offre de prêt n’est annexée à l’acte authentique, la banque s’affranchissant de toutes règles légales,
– le prêt réalisé par la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a eu pour effet de porter à un niveau insoutenable l’endettement des époux tout en garantissant la créance par hypothèque immobilière,
– la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a commis une faute dans la proposition de crédit, à son seul profit, de nature à vicier le consentement des époux [V] de sorte que l’acte notarié du 08 juillet 2008 est nul,
– le déblocage des fonds du prêt est intervenu antérieurement à la signature de l’acte notarié et donc avant leur acceptation,
– la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France a engagé sa responsabilité contractuelle en ne leur proposant pas de souscrire une assurance,
– l’acte notarié du 08 juillet 2008 prévoit qu’il n’est exécutoire qu’à concurrence de la somme de 160.00 euros,
– la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France ne justifie ni avoir assigné les époux [V] avant le 08 juillet 2012, ni obtenu un titre de condamnation, de sorte que sa créance est prescrite,
– la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France multiplie les mesures d’exécution forcée et la saisie des rémunérations engagée est manifestement abusive,
– le fait de contester une saisie des rémunérations ne constitue pas une résistance abusive.
Par uniques conclusions du 25 janvier 2023, la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France forme appel incident et sollicite de la cour de :
– recevoir la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France en ses demandes, fins et conclusions et l’en déclarer bien fondée,
– déclarer Mme [F] [N] épouse [V] mal fondé en son appel,
en conséquence :
– confirmer le jugement déféré des chefs critiqués,
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive à l’exécution des décisions de justice,
statuant de nouveau :
– condamner Mme [F] [N] épouse [V] à payer à la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
– condamner Mme [F] [N] épouse [V] à payer à la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [F] [N] épouse [V] aux entiers dépens de 1ère instance et d’appel dont distraction au profit de Me Tabart, avocat aux offres de droit.
A l’appui de ses prétentions, la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France fait valoir que :
– la validité des mesures d’exécution entreprises par voies de saisie-attribution n’est nullement conditionnée par l’issue du pourvoi concernant la procédure de saisie immobilière,
– de nombreuses décisions de nature à interrompre la prescription, sont intervenues et notamment la procédure de surendettement qui a suspendu toutes exécution aux fins de recouvrement des créances jusqu’au 31 juillet 2020,
– les époux [V] ont bénéficié d’un plan conventionnel de surendettement dont ils ne peuvent se prévaloir de l’effet suspensif s’agissant d’un plan échu,
– il appartenait aux époux [V] de saisir de nouveau la commission dans un délai de
trois mois à compter de la suspension d’exigibilité des créances ce qu’ils n’ont pas fait,
– Mme [F] [N] épouse [V] ne peut qu’être déboutée de sa demande tendant à voir juger irrecevables les mesures d’exécution pour défaut de déchéance du terme du plan de surendettement,
– les époux [V] n’ont pas respecté le plan, dans le délai de deux ans qui leur était imparti et n’ont pas procédé à la vente amiable de leur bien immobilier,
– les époux [V] ont multiplié les recours et instance dans le seul but de ne pas vendre leur bien immobilier cherchant par tous moyens à paralyser la procédure de saisie en cours,
– sa créance en principal au titre des condamnations prononcées par le jugement du 05 juin 2015, n’a pas la nature d’une créance à exécution successive,
– la prescription a été suspendue jusqu’au 31 juillet 2020, date à laquelle le délai de prescription quinquennale a recommencé à courir et aucune prescription n’était acquise à la date des mesures d’exécution,
– les règlements mensuels versés dans le cadre de l’exécution du plan pendant 24 règlements de 1.118,93 euros n’ont pas permis d’apurer l’intégralité de la créance,
– le décompte de créance est détaillé et n’est pas contestable,
– la validité de l’acte de prêt et les prétendus vices l’affectant ont d’ores et déjà été tranchés par décisions de justice revêtues de l’autorité de la chose jugée qui fixent la créance du créancier poursuivant,
– la régularisation d’un plan conventionnel pour régler le passif constitue une reconnaissance de dette de sorte que le caractère certain liquide et exigible de la créance de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France est incontestable,
– les époux [V] n’ont jusqu’à présent jamais invoqué la prescription de la créance du poursuivant,
– au regard de l’ancienneté des créances détenues par la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France, les mesures d’exécution mises en ‘uvre sont justifiées et régulières,
– les saisies-attribution se sont révélées infructueuses de sorte qu’il n’y a d’abus de voie d’exécution,
– la résistance à exécuter leurs obligations contractuelles et les décisions de justice caractérise un abus de la part des débiteurs justifiant l’allocation de dommages et intérêts,
– les époux [V] se sont dispensés de régler les condamnations prononcées à leur encontre et continuent de multiplier les voies de recours et contestations au préjudice direct de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France.
La cour pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties fait expressément référence à la décision entreprise et aux dernières conclusions régulièrement déposées en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’affaire a été fixée à plaider le 20 février 2023.
MOTIFS
Sur la demande de sursis à statuer
L’article 378 du code de procédure civile dispose que ‘ le sursis à statuer suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine.’
Il est constant que le caractère non suspensif du pourvoi en cassation n’interdit pas au juge de surseoir à statuer dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice lorsqu’il estime que la solution du pourvoi est de nature à avoir une incidence directe sur la solution du litige.
L’appréciation de l’opportunité de surseoir à statuer relève du pouvoir discrétionnaire des juges du fond.
En l’espèce, la Cour de Cassation a partiellement cassé l’arrêt de la cour d’appel d’Agen du 16 mars 2020 et a renvoyé la cause et les parties devant la cour d’appel de Bordeaux désignée comme cour d’appel de renvoi.
Or, l’arrêt rendu le 31 mars 2022 par cette cour fait lui même l’objet d’un pourvoi par les époux [V] aux motifs d’une violation des dispositions de l’article R311-5 du code des procédures civiles d’exécution.
Dans la décision contestée, le premier juge a estimé qu’ ‘à compter du 24 juillet 2012 (date de l’assignation délivrée aux époux ayant donné lieu à la décision du 05 avril 2013 du tribunal de grande instance de Cahors), il y a eu des actions en justice tous les ans ou deux ans permettant d’interrompre à chaque fois le délai de prescription.’
Toutefois, s’il est exact que l’issue du pourvoi ne conditionne pas le sort de la créance de la CRCAM de [Localité 11] et d’Ile de France fondée sur le titre issu du jugement du tribunal de grande instance de Cahors du 05 juin 2015, il en est différemment de la recevabilité de l’action de la banque initiée en vertu de l’acte notarié du 08 juillet 2008 et partant sur la prescription de sa créance de ce chef et sur l’engagement de la saisie des rémunérations litigieuse. Cette analyse est débattue en contemplation de l’arrêt rendu par la présente cour en date du 16 mars 2020 dont la cassation partielle n’affecte pas la disposition selon laquelle la demande de report de l’audience d’adjudication est une demande incidente, soumise aux prescriptions de l’article R.311-6 du codes des procédures civiles d’exécution.
Or, à supposer le prononcé de la caducité du commandement valant saisie, la question de l’existence d’un acte interruptif de prescription dans le délai de deux ans suivant l’acte notarié du 08 juillet 2008 se posera et avec elle, celle de l’anéantissement des actes subséquents.
Au regard des conséquences juridiques directes attachées à l’issue du pourvoi sur la solution du présent litige, il convient dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de surseoir à statuer dans cette attente.
Le sursis à statuer ne dessaisissant pas la cour d’appel mais suspendant seulement le cours de l’instance, la présente cour pourra statuer à l’expiration du sursis soit à la survenance de l’issue du pourvoi.
Sur les dépens et les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Au regard de la décision rendue, les dépens et les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile seront réservés.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition,
SURSOIT à statuer dans l’attente de l’issue du pourvoi en cassation formé par les époux [V] à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 31 mars 2022 ;
DIT que l’instance sera reprise à la survenance de cet événement ;
RÉSERVE les dépens et les frais irrépétibles.
Le présent arrêt a été signé par Valérie SCHMIDT, présidente, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, La Présidente,