Déséquilibre significatif : 14 mars 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 20/02719
Déséquilibre significatif : 14 mars 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 20/02719
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14 mars 2023
Cour d’appel de Toulouse
RG n°
20/02719

14/03/2023

ARRÊT N°

N° RG 20/02719

N° Portalis DBVI-V-B7E-NYCR

SL/RC

Décision déférée du 25 Septembre 2020

Tribunal judiciaire de TOULOUSE

18/04073

MME [L]

S.A. AXA FRANCE IARD

C/

[K] [J]

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU QUATORZE MARS DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

S.A. AXA FRANCE IARD

Entreprise régie par le Code des Assurances, inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de NANTERRE sous le numéro 722 057 460, représentée par ses dirigeants légaux demeurant en leur qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Olivier THEVENOT de la SELARL THEVENOT MAYS BOSSON, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉE

Madame [K] [J]

372 route de Carbonne

[Localité 2]

Représentée par Me Benoît ALENGRIN, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 28 Novembre 2022 en audience publique, devant la Cour composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre.

Exposé des faits et de la procédure :

Le 11 juillet 2012, la commune de [Localité 6] ([Localité 6]) a fait l’objet d’une constatation par arrêté, publié le 17 juillet 2012, de l’état de catastrophe naturelle pour une période comprise entre le 1er avril 2011 et le 30 juin 2011, eu égard à des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols.

Le 4 janvier 2013, Mme [K] [J], propriétaire d’une maison d’habitation située lieu-dit [Localité 5], [Adresse 3], assurée suivant contrat du 25 octobre 2007 après de la Sa Axa France Iard au titre d’une police multirisques habitation incluant une assurance catastrophe naturelle, notamment pour cause de sécheresse, a effectué une déclaration de sinistre auprès de la Sa Axa France Iard, après avoir constaté l’apparition de fissures affectant son bien.

La Sa Axa France Iard a alors mandaté le cabinet Eurexo afin de déterminer l’origine des désordres, ce dernier ayant rendu son rapport le 27 octobre 2014.

Le 2 octobre 2015, la Sa Axa France Iard a transmis à Mme [K] [J] un accord de règlement au titre du sinistre, lui proposant le règlement immédiat d’une somme de 18 184,09 euros, devant être suivi d’un règlement de 42 105,75 euros après travaux et sur justificatifs.

Aucun accord n’a pu conséquemment être trouvé s’agissant du montant de l’indemnité réparatrice des dommages subis par Mme [J].

C’est dans ces conditions que Mme [K] [J] a assigné la Sa Axa France Iard devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Toulouse (31), par acte d’huissier du 27 septembre 2017, aux fins de voir désigner un expert judiciaire.

Le 18 janvier 2018, le juge des référés a ordonné la désignation de M. [I] [H] en qualité d’expert judiciaire afin de dresser l’état des désordres dont la maison est atteinte en conséquence de la sécheresse reconnue comme catastrophe naturelle et de donner des éléments d’évaluation des travaux de reprise nécessaires.

L’expert judiciaire a déposé son rapport le 25 juillet 2018.

Le 18 septembre 2018, la Sa Axa France Iard a adressé à Mme [J] une nouvelle proposition d’indemnisation pour un montant total de 71 442,18 euros.

Par acte d’huissier du 6 décembre 2018, Mme [K] [J] a assigné la Sa Axa France Iard devant le tribunal de grande instance de Toulouse, afin notamment de la voir condamnée à lui verser une indemnité totale de 110 452,40 euros TTC.

Par jugement contradictoire du 25 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

– rejeté les demandes de la Sa Axa France Iard visant à voir s’appliquer un coefficient de vétusté à l’indemnisation versée à Mme [K] [J] ainsi qu’à permettre à la Sa Axa France Iard de verser à Mme [K] [J] une partie des indemnités de manière différée sur présentation des factures justifiant la réalisation des travaux de reprise,

– constaté que la Sa Axa France Iard s’est acquittée auprès de Mme [K] [J] d’un paiement d’un montant de 30 866,70 euros le 4 janvier 2019,

– condamné en conséquence la Sa Axa France Iard à verser une indemnité totale toutes taxes comprises de 79 585,70 euros à Mme [K] [J] correspondant aux coûts des travaux de reprise de l’événement sécheresse constaté par arrêté, publié le 17 juillet 2012, chiffrés par l’expertise judiciaire à un montant total toutes taxes comprises de 110 452,40 euros, déduction faite du paiement intervenu le 4 janvier 2019,

– rejeté la demande de Mme [K] [J] visant à voir cette condamnation assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2012,

– rappelé que les intérêts au taux légal sur cette condamnation courent à compter du prononcé du jugement,

– condamné la Sa Axa France Iard à verser une indemnité de 8 000 euros à Mme [K] [J] en réparation de son préjudice résultant de la faute de gestion du sinistre de la Sa Axa France Iard,

– condamné la Sa Axa France Iard à verser une indemnité de 3 000 euros à Mme [K] [J] en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la Sa Axa France Iard aux entiers dépens, en ce compris ceux afférents à la procédure de référé et à l’expertise judiciaire,

– ordonné l’exécution provisoire.

Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré que la société Axa France Iard démontrait s’être acquittée de son obligation de remise des conditions générales, mais qu’elle ne démontrait pas que la copie des conditions générales produites par elle correspondait à la référence 150101D figurant aux conditions particulières ; que dès lors, elle ne démontrait pas qu’elle était contractuellement fondée à appliquer le coefficient de vétusté dont elle se prévalait, ni à verser une partie de l’indemnisation de manière différée sur présentation des factures justifiant la réalisation des travaux.

Il a estimé que les intérêts moratoires ne couraient qu’à compter du jour où le créancier apportait la preuve qu’il se refusait à octroyer à son débiteur tout délai supplémentaire pour s’acquitter de son obligation, ce qui ne saurait résulter du seul écoulement du délai prévu à l’article L 125-2 alinéa 3 du code des assurances.

Il a retenu que la position de la Sa Axa France Iard, avant qu’elle ne soit attraite à la procédure de référé initiée par Mme [J], était constitutive d’un comportement fautif, en ce qu’elle consistait à envisager la seule reprise en sous-oeuvre des fondations de la maison par micro-pieux, à l’exclusion de l’extension réalisée en 1988, sans justifier sa position par une analyse technique la confortant, alors même que les conclusions de l’étude géotechnique, menée par un cabinet spécialisé mandaté par l’assureur, préconisaient la reprise de l’intégralité des fondations et dallages de la maison ; que ce faisant, la Sa Axa France Iard avait manqué à son obligation de loyauté à l’égard de son assurée ; que ceci avait causé à cette dernière un préjudice de jouissance qui justifiait l’octroi de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1147 du code civil.

Par déclaration du 9 octobre 2020, la Sa Axa France Iard a relevé appel du jugement en toutes ses dispositions.

Prétentions des parties :

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 15 avril 2021, la Sa Axa France Iard, appelante, demande à la cour de :

– infirmer le jugement en ce qu’il :

* a rejeté ses demandes visant à voir s’appliquer un coefficient de vétusté à l’indemnisation versée à Mme [J],

* l’a condamnée à verser une indemnité de 8 000 euros à Mme [J] en réparation de son préjudice résultant de la faute de gestion du sinistre de la Sa Axa France Iard ;

* l’a condamnée à verser une indemnité de 3 000 euros à Mme [J] en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens,

Y ajoutant,

– débouter Mme [J] de l’ensemble de ses demandes,

– constater que la Sa Axa France Iard a réglé le 4 janvier 2019 à Mme [J] la somme de 30.866,70 euros au titre de l’indemnité immédiate,

– lui donner acte de son offre de régler à Mme [J] la somme de 73.780,58 euros au titre de l’indemnité différée sur présentation des factures de travaux,

– « dire et juger » que cette offre est satisfactoire au regard des conclusions du rapport de M. [H],

– condamner Mme [J] au paiement de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 15 mars 2021, Mme [K] [J], intimée, demande à la cour, au visa des articles 1103, 1193, 1231 et suivants du code civil, L. 125-2 du code des assurances, et L.132-1 et L.133-2 du code de la consommation, de :

– constater que la société Axa France Iard ne rapporte pas la preuve de l’acceptation des clauses qu’elle invoque, prétendument contenues dans des conditions générales non signées,

– constater l’ambiguïté des conditions générales produites et rejeter en conséquence la demande de la société Axa France Iard au titre de la vétusté et de l’indemnité différée,

– « dire et juger » que les clauses relatives à la vétusté et au versement différé de l’indemnité seraient en toute hypothèse abusives,

– confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

– débouter la Sa Axa France Iard de l’intégralité de ses demandes,

– condamner la Sa Axa France Iard à lui verser la somme de 110 452,40 euros TTC correspondant aux coûts des travaux de reprise du sinistre de sécheresse constaté par arrêté du 17 juillet 2012,

– constater que la Sa Axa France Iard a commis une faute dans la gestion du sinistre,

– la condamner en conséquence à lui verser la somme de 8 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

– la condamner à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner aux entiers dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expertise judiciaire et les dépens de référé.

La clôture de l’affaire est intervenue le 14 novembre 2022 et l’affaire a été examinée à l’audience du 28 novembre 2022.

Motifs de la décision :

La maison a été construite en 1970-1971. Elle a fait l’objet d’une extension en 1988 par construction d’un étage sur le garage accolé.

Le principe de la garantie de la Sa Axa France Iard pour l’ensemble des désordres n°1 à 6 page 18 du rapport d’expertise judiciaire, dont l’expert judiciaire a retenu que la sécheresse était l’élément déclencheur et déterminant, n’est pas discuté.

L’étendue de la réparation reste en litige.

Sur l’application d’un coefficient de vétusté et l’indemnité différée :

L’expert judiciaire a retenu la nécessité d’une reprise généralisée des fondations de la maison et du garage en sous-oeuvre, une reprise en sous-oeuvre du dallage de la maison (hors garage) outre les travaux d’embellissements associés.

Les travaux de reprise ont été chiffrés par l’expert judiciaire à 110.452,40 euros TTC en incluant les mesures conservatoires d’urgence.

La Sa Axa France Iard a réglé le 4 janvier 2019 à Mme [J] la somme de 30.866,70 euros. Le jugement sera confirmé sur ce point qui n’est pas contesté par les parties.

Sur l’application des conditions générales produites :

Il est mentionné que les conditions particulières signées le 25 octobre 2007 entre Mme [J] et la société Axa assurances Iard, complétant les conditions générales 150101D, constituent le contrat d’assurance habitation.

Les conditions générales sont produites en original par la Sa Axa France Iard. Il s’agit d’un livret relié. En 4ème de couverture dos figure un numéro : Réf 150101 D 08 2006.

Ainsi, il s’agit bien des conditions générales applicables en l’espèce.

Certes, les conditions générales ne sont pas signées. Cependant, les conditions particulières précisent : ‘Vous avez reçu un exemplaire des conditions générales habitation précitées et assistances aux personnes modèle 190200, et avez pris connaissance des textes figurant au verso du présent document’. Suit la signature.

La Sa Axa France Iard démontre par la production des conditions particulières, signées par Mme [J], énonçant que la signataire reconnaît avoir reçu un exemplaire des conditions générales, s’être acquittée de son obligation de remise des conditions générales à son assurée.

Sur la vétusté :

En page 40, les conditions générales prévoient :

‘L’indemnisation des bâtiment

En cas de reconstruction ou de réparation des bâtiments :

L’indemnisation est effectuée au coût de leur reconstruction en valeur à neuf au jour du sinistre : toutefois, nous ne prenons en charge la vétusté calculée à dire d’expert que dans la limite de 25% de la valeur de reconstruction à neuf du bâtiment sinistré.’

En page 47, la vétusté est définie comme le pourcentage de dépréciation résultant de l’usage ou de l’ancienneté du bien.

En page 41 il est prévu :

‘L’évaluation est faite de gré à gré.

En cas de complexité technique dans l’appréciation des dommages, nous pouvons missionner un expert à nos frais.

En cas de divergence avec nous sur le montant total de l’indemnité, vous avez la possibilité de faire appel à un expert de votre choix.

Dans ce cas la prise en charge de ses frais et honoraires s’effectue au titre des frais consécutifs dans leur limite prévue au contrat et sans pouvoir excéder 5% de l’indemnité versée.’

Ainsi, la vétusté est calculée à dire d’expert, avec la possibilité pour l’assuré de contester cette évaluation en faisant appel à son propre expert aux frais de l’assureur.

La clause prévoyant la prise en charge de la vétusté calculée à dire d’expert uniquement dans la limite de 25% de la valeur de reconstruction à neuf du bâtiment sinistré n’est pas une clause abusive au sens de l’article L 132-1 du code de la consommation dans sa version en vigueur du 25 août 2001 au 1er janvier 2009. Elle n’a pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Elle s’explique par le principe indemnitaire, selon lequel l’assurance relative aux biens est un contrat d’indemnité ; l’indemnité due par l’assureur à l’assuré ne peut pas dépasser le montant de la chose assurée au moment du sinistre. Certes, il ne s’oppose pas à la renonciation à appliquer un abattement pour vétusté, mais dans ce cas, pour un immeuble, le versement de la fraction d’indemnité qui excède la valeur d’usage du bien est soumis à la reconstruction effective de l’immeuble.

Le tableau intitulé ‘limites de garanties et de franchises’ en page 44 indique : ‘catastrophes naturelles – bâtiments – valeur de reconstruction à neuf (y compris frais de démolition et de déblaiement).’ Il ne concerne pas le montant de l’indemnisation, mais les limites de garanties et franchises. On ne peut donc pas en déduire que la vétusté ne doit pas être prise en compte.

Sur l’indemnité différée :

Une clause des conditions générales prévoit en page 42 : ‘Lorsque vous êtes indemnisé sur la base de la valeur à neuf au niveau de l’immobilier, votre indemnité vous sera versée au fur et à mesure de la reconstruction ou de la réparation, sur présentation de pièces justifiant des travaux et de leur montant’.

Ceci n’est pas une clause abusive au sens de l’article L 132-1 du code de la consommation dans sa version en vigueur du 25 août 2001 au 1er janvier 2009. Elle n’a pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur. Là encore, elle s’explique par le principe indemnitaire, selon lequel l’assurance relative aux biens est un contrat d’indemnité ; l’indemnité due par l’assureur à l’assuré ne peut pas dépasser le montant de la chose assurée au moment du sinistre, de sorte qu’en indemnisation valeur à neuf d’un bien immobilier, le versement de la fraction d’indemnité qui excède la valeur d’usage du bien est subordonné à la reconstruction effective de l’immeuble sinistré.

Le jugement dont appel sera infirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de la Sa Axa France Iard visant à voir s’appliquer un coefficient de vétusté à l’indemnisation versée à Mme [K] [J] ainsi qu’à permettre à la Sa Axa France Iard de verser à Mme [K] [J] une partie des indemnités de manière différée sur présentation des factures justifiant la réalisation des travaux de reprise.

Selon l’état des pertes annexé au courrier du 29 octobre 2018 de la Sa Axa France Iard, la valeur de reconstruction à neuf du bâtiment sinistré est de :

– 63.085 euros TTC (confortement) sur justificatifs ;

– 47.367,40 euros TTC (travaux consécutifs).

En l’espèce, la vétusté appliquée par la Sa Axa France Iard sur les travaux consécutifs représente 14.980,70 euros TTC. Les travaux consécutifs vétusté déduite représentent 32.386,70 euros. En effet, des taux de vétusté de 20% pour le séjour, 25% pour les revêtements de sol souples, 20% pour les parquets, 30% pour le parquet flottant, 25% pour le carrelage extérieur, 50% pour les façades, 25% pour les travaux intérieurs et 50% pour la salle de bains ont été appliqués. La vétusté est prise en charge à hauteur de 25% uniquement de la valeur de reconstruction à neuf, soit sur les divers postes, une vétusté récupérable de 10.695,58 euros TTC.

En outre, la franchise est de 1.520 euros.

Au titre de l’indemnité immédiate a été versée la somme de 32.386,70 – 1.520 = 30.866,70 euros TTC.

L’indemnité différée est de 63.085 euros TTC (confortement) et 10.695,58 euros TTC (travaux consécutifs), soit 73.780,58 euros TTC.

Infirmant le jugement dont appel, la société Axa France Iard sera condamnée à payer à Mme [J] la somme de 73.780,58 euros TTC euros, sur présentation des factures justifiant la réalisation des travaux, déduction faite du paiement intervenu le 4 janvier 2019.

Nonobstant le caractère général de l’appel interjeté, aucune des parties à l’instance d’appel ne formule une quelconque critique à l’encontre des dispositions du jugement entrepris ayant débouté Mme [J] de sa demande visant à se voir octroyer des intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2012 sur l’indemnité d’assurance versée et rappelé que les intérêts au taux légal sur la condamnation à verser l’indemnité d’assurance courent à compter du prononcé du jugement, de sorte que ces dispositions ne peuvent qu’être confirmées sans examen au fond en application de l’article 954 du code de procédure civile.

Sur le manque de loyauté de l’assureur dans le règlement du sinistre :

En application de l’article 1147 ancien du code civil dans sa version applicable au litige, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Mme [J] soutient que la Sa Axa France Iard a commis une faute dans la gestion du sinistre en maintenant et réitérant une proposition de reprise partielle, et en refusant de verser la moindre indemnité ou provision tant que Mme [J] n’acceptait pas de façon définitive l’indemnisation partielle proposée.

En l’espèce, la Sa Axa France Iard a confié une mission de diagnostic géotechnique à la société Eurexo afin de déterminer l’origine des désordres. La première réunion est intervenue le 19 avril 2013, à l’issue de laquelle il a été décidé de faire réaliser une étude de sol par le Bet Alios Pyrénées.

Le 27 octobre 2014, la société Eurexo a rendu un rapport, complété par une note technique. S’agissant de la cause des désordres, il concluait :

‘ Les désordres observés sur la construction de Mme [J], récents comparativement à l’âge de la construction et évolutifs, sont liés pour les fondations et le dallage à des tassements différentiels consécutifs au retrait des argiles sous-jacentes au sol d’assises des fondations et ce en période de sécheresse climatique.

Ils sont aggravés par :

– la végétation (via l’activité racinaire) qui contribue à augmenter l’intensité et la profondeur de la dessiccation ;

– une absence de treillis au niveau de la dalle(manque de rigidité à vérifier auprès d’un BET structure).’

Le 3 juillet 2015, un devis d’un montant de 31.841,70 euros TTC a été émis par la société Soltechnic, concernant la reprise en sous-oeuvre des fondations de la maison par micropieux, reprise en sous-oeuvre dont l’extension réalisée en 1988 a été exclue, ainsi qu’il résulte d’un croquis annexé au devis.

Ainsi, la proposition d’indemnisation comprenait :

– la reprise en sous-oeuvre de la maison, sauf l’extension qui est dissociée par deux joints de pré-fissuration ;

– des travaux d’embellissement consécutifs excluant la salle de bains et le carrelage du salon TV.

Le rapport de la société Eurexo a été communiqué à Mme [J] qui en a accusé réception le 9 novembre 2015. Elle dit que la note technique complémentaire lui a été communiquée d’abord de façon partielle (‘2 ou 3 pages sur 14. Manque la proposition de réparation’ comme initialement noté par l’expert en p. 8 de son pré-rapport). La version de 3 pages qu’elle produit en pièce 4 inclut l’analyse de la cause des désordres. Dès lors que la sécheresse est visée comme la cause de l’ensemble des désordres, peu importait que la proposition de réparation ne figure pas. Cette note technique a été communiquée dans son entier à l’expert judiciaire le 2 mai 2018.

Par courrier du 19 juillet 2016, M. [N] [P] expert amiable intervenu à la demande de Mme [J] a indiqué : ‘Concernant le devis Soltechnic nous pensons que l’accord de confortement de l’ouvrage pourrait être accepté par l’assuré dans un premier temps et uniquement aux fins de tenter de stabiliser l’ouvrage.’ Il a contesté l’absence de réfection des sols impactés par le sinistre concernant la salle de bains côté Ouest et le salon TV à l’étage.

L’expert judiciaire a estimé que les désordres 5 (une fissure avec rejet vertical du carrelage du salon, partant du mu pignon – entre salle à manger et salon TV) et 6 (des fissures – en général très fines, sauf une, qui présente en plus un rejet vertical -du carrelage du salon TV, parallèles aux poutrelles du plancher) ne sont pas dus à une flexion (par fluage) des poutrelles : celle-ci entraînerait une fissuration (par compression) perpendiculaire à l’axe des poutrelles. Il indique : ‘Attribuer cette fissuration à des phénomènes thermiques pourrait être cohérent avec les directions de ces fissures (perpendiculaires à la plus grande longueur) mais ce serait négliger la date d’apparition de ces fissures (23 ans après la construction sur le garage) et négliger le fait que la disposition s’apparente à celle d’un plancher sur vide sanitaire et que les phénomènes thermique sont très atténués. Ce serait négliger aussi que de 1971 à 1988 les sollicitations thermiques de ce plancher ont été considérablement plus élevées que celles subies depuis 1988. En conséquence, en prenant en compte la date d’apparition des désordres et par élimination des causes possibles, ces désordres 5 et 6 proviennent très vraisemblablement de déformations de la structure ‘garage’ liées à la sécheresse.’

Il a estimé que la solution de reprise partielle par micro-pieux proposée par la société Axa France Iard n’était pas satisfaisante malgré la réalisation de joints de pré-fissuration des murs.

Selon lui, si on peut imaginer qu’il y ait une absence de continuité des fondations entre le pignon Sud (hors garage) et la façade Est, il n’est aucunement raisonnable de considérer qu’il y a une absence de continuité de fondation entre le pignon Sud (hors garage) et la façade Ouest. Par ailleurs, la toiture de l’extension s’appuie sur le mur pignon Sud de la maison, prévu repris par micro-pieux. Le plancher du salon (au-dessus du garage) s’appuie (et il est peut-être même ancré) dans ce même mur pignon de la maison.

Dans son dire du 23 avril 2018, l’expert de la société Axa France Iard a demandé que soient réalisés des sondages sur le support du carrelage du salon TV, ainsi que des reconnaissances de fondation au droit des charnières entre les deux structures de la maison et sur la partie garage elle-même, et un sondage à la tarière accompagné d’un sondage pénétrométrique côté Sud-Ouest du garage.

Un dire du 4 juillet 2018 à la suite du pré-rapport reprend les mêmes demandes.

L’expert judiciaire a répondu qu’il ne voyait pas d’intérêt à réaliser des sondages du carrelage du salon-extension dans la mesure où Axa a fait chiffrer les travaux de réfection de ce carrelage dans le cadre de dommages consécutifs à la sécheresse (devis Soletbat des 9 septembre et 19 décembre 2016 qui chiffrent la reprise de ce carrelage). Il ne voyait pas non plus d’intérêt à faire réaliser un sondage à la tarière accompagné d’un sondage pénétrométrique dans la mesure où lors de l’expertise amiable, un sondage pénétrométrique a été réalisé à proximité du garage (PD2) et se révèle homogène avec le sondage pénétrométrique (PD1) réalisé en face de l’entrée de la maison. Quant aux reconnaissances de fondation à la charnière des deux structures de la maison, il n’en voyait pas non plus l’intérêt au regard de la note complémentaire du 27 octobre 2014 (attribuant les désordres à des tassements différentiels consécutifs au retrait des argiles sous-jacentes au sol d’assises des fondations et ce en période de sécheresse climatique) et de ce qu’il a expliqué quant à la cause des désordres.

Les dires des 23 avril 2018 et 4 juillet 2018, et par conséquent la contestation des conclusions expertales, ne constituent pas une faute. La Sa Axa France Iard ne faisait qu’exprimer à l’occasion de la procédure d’expertise judiciaire une appréciation technique étayée, divergente de celle de l’expert.

Le fait que la société Eurexo ait rendu un rapport disant que les désordres étaient liés à la sécheresse n’empêchait pas la société Axa France Iard de pouvoir discuter la cause des désordres, et par conséquent la nécessité d’une reprise intégrale en sous-oeuvre, l’expert judiciaire n’étant pas lui-même totalement affirmatif sur la cause des désordres : ‘En conséquence, en prenant en compte la date d’apparition des désordres et par élimination des causes possibles, ces désordres 5 et 6 proviennent très vraisemblablement de déformations de la structure ‘garage’ liées à la sécheresse.’ Quant au mode de réparation, il pouvait également se discuter compte tenu de la présence de joints de pré-fissuration des murs, même si au final l’expert judiciaire conclut qu’il n’est aucunement raisonnable de considérer qu’il y a une absence de continuité de fondation entre le pignon Sud (hors garage) et la façade Ouest et que par ailleurs, la toiture de l’extension s’appuie sur le mur pignon Sud de la maison, prévu repris par micro-pieux. Le plancher du salon (au-dessus du garage) s’appuie (et il est peut-être même ancré) dans ce même mur pignon de la maison.

Par ailleurs, il ne résulte pas des termes du courrier du 18 septembre 2018 adressé par le conseil de la Sa Axa France Iard à Mme [J] que le paiement de l’indemnité proposée était subordonné à l’acceptation définitive par Mme [J] de cette offre d’indemnisation.

En conséquence, la faute de la société Axa France Iard dans la gestion du sinistre n’est pas démontrée.

Le jugement dont appel sera infirmé en ce qu’il a condamné la Sa Axa France Iard à payer à Mme [J] des dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant d’une faute de gestion du sinistre de la Sa Axa France Iard.

Mme [J] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts formée contre la Sa Axa France Iard au titre de sa responsabilité contractuelle.

La Sa Axa France Iard, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance, en ce compris ceux afférents à la procédure de référé, notamment les frais d’expertise judiciaire, ainsi que décidé par le premier juge, et aux dépens d’appel.

Le jugement dont appel sera confirmé sur l’article 700 du code de procédure civile.

En application de l’équité, les parties seront déboutées de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens.

Par ces motifs,

La Cour,

Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 25 septembre 2020, sauf en ce qu’il a :

– constaté que la Sa Axa France Iard s’est acquittée auprès de Mme [K] [J] d’un paiement d’un montant de 30.866,70 euros le 4 janvier 2019 ;

– débouté Mme [J] de sa demande visant à se voir octroyer des intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2012 sur l’indemnité d’assurance versée et rappelé que les intérêts au taux légal sur la condamnation à verser l’indemnité d’assurance courent à compter du prononcé du jugement ;

– condamné la Sa Axa France Iard aux dépens, en ce compris ceux afférents à la procédure de référé, notamment les frais d’expertise judiciaire, et à verser à Mme [J] une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés, et y ajoutant,

Condamne la société Axa France Iard à payer à Mme [J] la somme de 73.780,58 euros TTC euros, sur présentation des factures justifiant la réalisation des travaux, déduction faite du paiement intervenu le 4 janvier 2019 ;

Déboute Mme [J] de sa demande de dommages et intérêts formée contre la Sa Axa France Iard au titre de sa responsabilité contractuelle ;

Condamne la Sa Axa France Iard aux dépens d’appel ;

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX

 


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