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13 juin 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/15426
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
POLE 5 – CHAMBRE 16
ARRET DU 13 JUIN 2023
(n° 58 /2023, 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/15426 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGK4Q
Décision déférée à la Cour : ordonnance d’exequatur du président du tribunal judiciaire de Paris redue 4 juillet 2022.
APPELANTE :
Monsieur [W] [C]
[Adresse 3]
représenté par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L0020
assisté de Me Anne-Christine BARRATIER, avocat plaidant du barreau de BASTIA
INTIMEE :
S.A.S. COM.PERFORMANCES
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
représentée par Me Jonathan SOUFFIR de l’AARPI EVY Avocats, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 avril 2023, en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant M. François MELIN, conseiller, faisant fonction de président lors des débats et Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère, chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. François MELIN, conseiller, faisant fonction de président Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère
Mme ALDEBERT, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE
ARRET :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère et par Najma EL FARISSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* *
*
La société Com.Performances est une entreprise de création et de référencement de sites internet.
La société Com.Performances, prétendant que M. [W] [C] a signé un bon de commande le 23 mars 2021 concernant la création d’un site internet pour un montant de 1.000 euros H.T soit 1.200 euros TTC (Pack création), l’hébergement, la maintenance et le référencement SEO (pack services) pour un montant de 120 euros H.T par mois soit 144 euros TTC par mois, a, par courrier recommandé avec avis de réception du 22 novembre 2021, mis en demeure M. [W] [C] de payer la facture B-00411 d’un montant de 8.112 euros TTC, correspondant au montant dû en principal jusqu’au terme de l’engagement de 48 mois.
En l’absence de règlement, la société Com.Performances a saisi la juridiction arbitrale compétente, conformément à l’application de l’article 14.3 de ses conditions générales de vente, afin d’obtenir le recouvrement des sommes dues au titre du contrat conclu avec M. [W] [C].
Par sentence arbitrale rendue le 1er juin 2022, Mme Almuth-Auquier, arbitre unique près l’Institut d’Arbitrage, a condamné M. [W] [C] au paiement de la somme de 8.112,00 euros, majorée des intérêts au taux de 2,28 % à compter du 22/11/2021, au titre d’une facture émise par la société Com.Performances le 22 novembre 2021, outre les sommes de 1.622,40 au titre d’une indemnité forfaitaire et des frais de recouvrement, et de 600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Cette décision a été revêtue de la formule exécutoire par ordonnance d’exequatur du président du tribunal judiciaire de Paris du 4 juillet 2022.
Par déclaration du 25 août 2022, M. [W] [C] a relevé appel de cette ordonnance d’exequatur et a engagé un recours en annulation à l’encontre de la sentence arbitrale.
Par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 13 mars 2023, M. [W] [C] demande à la cour de’:
– Infirmer et annuler la sentence arbitrale en date du 1er juin 2022 en toutes ses dispositions et l’ordonnance d’exequatur rendue le 4 juillet 2022′;
Statuant des chefs infirmés,
– Débouter la société Com.Performances de l’intégralité de ses demandes à l’encontre de M. [W] [C]’;
– Juger que M. [W] [C] n’a pas signé le bon de commande et les conditions générales dont se prévaut la société Com.Performances’;
– Condamner la société Com.Performances au paiement de la somme de 4500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens’;
A titre subsidiaire,
– Juger que le bon de commande de la société Com.Performances et les conditions générales comportent des clauses léonines et abusives qui entraînent sa nullité’;
– Juger nul et de nul effet le bon de commande dont se prévaut la société Com.Performances à l’égard de M. [W] [C].
Par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 22 février 2023, la société Com.Performances demande à la cour de’:
– Juger que la société Com.Performances et M. [C], en sa qualité d’entrepreneur individuel, étaient liés par un contrat de prestation de site internet valablement signé ;
– Juger que les conditions générales de vente de la société Com.Performances sont opposables à M. [W] [C] dès lors qu’il ressort du bon de commande qu’elles lui ont été remises au moment de la signature ;
– Juger que le contrat conclu entre la société Com.Performances et M. [W] [C] n’est pas entaché de nullité ;
En conséquence :
– Débouter M. [C] de l’intégralité de ses demandes ;
– Confirmer la sentence arbitrale en toutes ses dispositions ;
– Condamner M. [C] au paiement de la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
MOTIFS
Sur le moyen d’annulation tiré de l’incompétence du tribunal arbitral
Moyens des parties
Pour solliciter l’annulation de la sentence, M. [W] [C] soutient que le tribunal arbitral s’est déclaré à tort compétent alors qu’il n’a jamais signé et accepté les conditions générales de vente incluant la clause compromissoire. Il soutient que le bon de commande du 23 mars 2021 n’est pas signé de façon manuscrite et comporte une signature électronique non identifiable de sorte qu’en application de l’article 1366 du code civil, le bon de commande est dépourvu de force probante. Il ajoute que les conditions générales produites par la société Com.Performances ne comportent aucune trace de signature de sa part.
La société Com.Performances soutient que M. [W] [C] a signé, de façon électronique, le bon de commande permettant ainsi d’établir l’existence d’un lien contractuel. Elle considère, conformément à la jurisprudence, que dès lors que le bon de commande signé fait référence aux conditions générales de vente qui contiennent la clause compromissoire, elle est opposable à M. [W] [C].
Réponse de la cour
En vertu de l’article 1492,1° du code de procédure civile, le recours en annulation contre une sentence arbitrale est ouvert lorsque le tribunal arbitral s’est déclaré à tort compétent ou incompétent.
” Sur la validité de la signature électronique
L’article 1366 du code civil dispose que’: «’L’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité.’»
Il est constant que le bon de commande litigieux comporte la signature de M. [W] [C] apposée électroniquement selon un procédé certifié par la plateforme Contralia de Docapost le 23/03/2021 et que le fichier est déposé dans un coffre-fort avec un numéro de référence.
La société Com.Performances produit le fichier de preuve relatif à la signature électronique relatant les différentes actions effectuées et notamment l’envoi d’un mot de passe temporaire à usage unique au numéro de téléphone [XXXXXXXX01] par SMS correspondant à celui mentionné sur le bon de commande, dont M. [W] [C] ne conteste pas qu’il lui est attribué.
Il est donc attesté que M. [W] [C] a signé, de façon électronique, le bon de commande.
” Sur l’opposabilité des conditions générales de vente
L’article 1119 du code civil prévoit que «’Les conditions générales invoquées par une partie n’ont effet à l’égard de l’autre que si elles ont été portées à la connaissance de celle-ci et si elle les a acceptées.’»
Au bas de la page unique du bon de commande, figue la mention suivante’:
«’le client reconnaît avoir pris connaissance du coupon de rétractation présent dans les conditions générale de vente, lors de la signature du bon de commande lui permettant de disposer d’un délai de rétraction de 14 jours suivant la signature du bon de commande (article 9.2 des conditions générales de vente). Le client déclare avoir pris connaissance, reçu et approuvé les termes figurant sur les conditions particulières et générales du présent bon de commande. Il atteste que le bon de commande est en rapport direct avec son activité professionnelle et souscrit pour les besoins de cette dernière. Le signataire atteste être habilité à l’effet d’engager le client au titre du présent bon de commande, sachant qu’à défaut le signataire sera personnellement tenu des obligations afférentes.’»
Il se déduit de cette clause que M. [W] [C] a reconnu avoir reçu et approuvé les conditions générales liées à sa commande, de sorte que celles-ci lui sont opposables, nonobstant l’absence de signature sur le document intitulé «’les conditions générales de vente’».
Or, il résulte de l’article 14.3 des conditions générales de la société Com.Performances que «’tout litige relatif au présent contrat ou en relation avec celui-ci sera tranché par la saisine de l’Institut d’Arbitrage (www.euro-arbitration.org) pour désigner le tribunal arbitral qui tranchera le litige selon le règlement d’arbitrage SDR (Standart Dispute Rules).’»
C’est donc à juste titre que le tribunal arbitral a retenu sa compétence dès lors que la clause compromissoire figurait dans les conditions générales de vente de la société Com.Performances à l’article 14.3 que M. [W] [C] avait acceptées.
Le moyen d’annulation est rejeté.
Sur le moyen de réformation tiré de l’absence de lien contractuel
Moyens des parties
M. [W] [C] soutient qu’il n’a jamais signé de contrat avec la société Com.Performances, qu’il est débroussailleur en Haute-Corse et n’a jamais eu besoin d’un site internet, qu’il n’a jamais apporté aucun élément à la société Com.Performances pour la création du site dont elle se prévaut, et qu’il n’a jamais eu aucun retour à ce titre.
Il soutient avoir été victime d’un dol puisqu’il a été démarché et interpellé sur son lieu de travail par une personne qui a usurpé son consentement sans jamais l’informer qu’il s’agissait d’un contrat et encore moins d’un contrat privé de toute possibilité de rétraction pour une prestation dont il ignore tout.
Il fait en outre valoir qu’à supposer qu’il soit engagé par le bon de commande, les conditions générales auxquelles il se réfère contiennent des clauses abusives qui doivent être réputées non écrites. Il allègue ainsi que l’article 5-1 ne prévoit aucune possibilité de rétractation ce qui est contraire à l’article L221-18 du code de la consommation qui justifie l’annulation du contrat. Il soutient également que les clauses sont illisibles et que s’agissant d’un contrat d’adhésion la sanction par analogie avec le droit de la consommation doit être de réputer non écrite la clause.
Il ajoute que l’émission d’une facture ne suffit pas à faire présumer l’existence d’un lien contractuel.
La société Com.Performance soutient que M. [C] n’a pas agi comme consommateur mais comme entrepreneur individuel et qu’il ne peut en conséquence se prévaloir du code de la consommation.
Elle rappelle qu’il a signé le bon de commande, est donc engagé à ce titre et qu’il ne démontre pas que le contrat, qui est soumis à un droit de rétractation, contient des clauses léonines.
Réponse de la cour
La société Com.Performances ne conteste pas que la sentence arbitrale peut faire l’objet d’un appel mais sollicite sa confirmation.
En premier lieu, M. [W] [C] ne peut se prévaloir de la qualité de consommateur. En effet, il ressort de la clause figurant sur le bon de commande qu’il a signé qu’il a admis que la commande est en rapport direct avec son activité professionnelle. La société Com.Performances produit la situation de M. [W] [C] au répertoire Sirene, datée du 13 mars 2023 attestant qu’il exerce en qualité d’entrepreneur individuel sous la rubrique «’Autres activités de nettoyage’» depuis le 11 septembre 2018. Ainsi, M. [W] [C] n’a pas agi en qualité de consommateur.
En second lieu, la preuve du lien contractuel entre M. [W] [C] et la société Com.Performances ne résulte pas de l’émission par cette dernière d’une facture mais bien du bon de commande qu’il a signé, peu important que la société Com.Performances l’ait démarché.
En troisième lieu, M. [W] [C] se borne à alléguer des man’uvres dolosives commises par la société Com.Performances sans les démontrer.
En quatrième lieu, le bon de commande mentionne expressément que M. [W] [C] dispose d’un droit de rétractation, lequel est également prévu à l’article 10.2 des conditions générales «’Droit de rétractation ‘ Vente hors établissement’».
Enfin, si M. [W] [C] se prévaut de l’article 1171 du code civil qui dispose que dans un contrat d’adhésion la clause qui créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite, il ne vise aucune clause particulière du contrat. La seule écriture en «’petit caractère’» de la clause en bas de page du bon de commande ne peut être qualifié de clause abusive.
Ainsi, M. [W] [C] ne démontre pas l’absence de lien contractuel avec la société Com.Performances.
La sentence est confirmée.
M. [W] [C], succombant à l’instance, est condamné aux dépens et à verser à la société Com.Performances la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Rejette le moyen d’annulation de la sentence,
Confirme la sentence,
Condamne M. [W] [C] à verser à la société Com.Performances la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [W] [C] aux dépens.
La greffière, P/ le Président empêché,