Déséquilibre significatif : 10 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/16908
Déséquilibre significatif : 10 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/16908
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10 mai 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
20/16908

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRET DU 10 MAI 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/16908 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCWCL

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Octobre 2020 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Meaux – RG n° 18/03030

APPELANTE

[Localité 9]

Prise en la personne de son Maire en exercice

[Adresse 10]

[Localité 9]

représentée par Me Ines GRISON, avocat au barreau de PARIS, toque B597

INTIMES

Monsieur [E] [W]

[Adresse 2]

[Localité 3]

né le 24 décembre 1982 à [Localité 6] (93)

Madame [U] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 3]

née le 26 Septembre 1988 à [Localité 7] (93)

Madame [Y] [L] épouse [Z]

[Adresse 4]

[Localité 9]

née le 31 Décembre 1966 à [Localité 8] (93)

représentés par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Assistés de Me Richard ARBIB, avocat au barreau de Créteil

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 30 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant M.Douglas BERTHE, Conseiller.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Nathalie RECOULES, Présidente de chambre

M.Douglas BERTHE, Conseiller

Mme Marie GIROUSSE, Conseillère

Qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : M.Damien GOVINDARETTY

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Nathalie RECOULES, Présidente de chambre, et par Mme Laurène BLANCO, greffier, présente lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte du 05 août 2011, la commune de [Localité 9] a consenti à la société aux Petits Parisiens, représenté par M. [B] [Z], un bail pour des locaux commerciaux situés [Adresse 1].

Ce bail a été conclu sous condition suspensive de l’engagement de caution solidaire, sans bénéfice de discussion ni de division, pour le paiement des loyers et charges notamment, de Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W], lesquels ont chacun régularisé leur engagement par acte du 5 août 2011.

Compte tenu des impayés de loyers et charges de la société aux Petits Parisiens et suite à l’ouverture d’une procédure de liquidation simplifiée à l’encontre de cette dernière le 18 décembre 2017, la trésorerie de [Localité 5], en sa qualité de caisse du bailleur, a mis en demeure, le 25 janvier 2018, Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W], en leur qualité de cautions solidaires de payer la somme de 16.064,69 euros correspondant à l’arriéré locatif.

Malgré l’envoi par Mme [Z], le 1er mars 2018, d’un courrier aux termes duquel elle soulignait le caractère « nul et non avenu » des engagements de caution, faute pour ceux-ci de comporter les mentions obligatoires nécessaires, la trésorerie de [Localité 5] a notifié à chacune des cautions, par courrier du 27 avril 2018, une opposition à tiers détenteur.

La Commune de [Localité 9] n’ayant pas répondu à la mise en demeure du conseil des cautions, d’avoir à cesser toutes poursuites, Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] ont, par acte d’huissier du 27 juin 2018, fait assigner la Commune de [Localité 9] aux fins de voir déclarés nuls les engagements de caution avec toutes conséquences en résultant. Les consorts [H] saisissaient par acte distinct du 27 juin 2018 le juge de l’exécution du tribunal en contestation de la mesure.

Par jugement du 22 octobre 2002, le tribunal judiciaire de Meaux a :

– déclaré Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] recevables en leurs demandes ;

– déclaré nuls et de nuls effet les engagements de caution souscrits par Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] le 05 août 2011 ;

– rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

– condamné la Commune de [Localité 9], représentée par son maire en exercice, aux entiers dépens ;

– condamné la Commune de [Localité 9], représentée par son maire en exercice, à payer à Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W], chacun, la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– ordonné l’exécution provisoire.

Par déclaration du 23 novembre 2020, la commune de [Localité 9] a interjeté appel partiel du jugement.

MOYENS ET PRÉTENTIONS

Vu les dernières conclusions déposées le 15 septembre 2021, par lesquelles la commune de [Localité 9], appelante, demande à la Cour de :

– infirmer le jugement RG n°18/03030 rendu par le tribunal judiciaire de Meaux le 22 octobre 2020 en ce qu’il a :

– déclaré Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] recevables en leurs demandes ;

– déclaré nuls et de nuls effets les engagements de caution souscrits par Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] le 5 août 2011 ;

– rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires, à savoir :

la demande principale de la mairie de Moussy-le-Neuf de constater l’acquisition de la prescription quinquennale à l’encontre des actes de caution du 5 août 2011 et par voie de conséquence déclarer les consorts [Z] forclos à saisir le tribunal judiciaire de Meaux ;

les demandes subsidiaires de la Mairie de [Localité 9] de :

déclarer les engagements de caution solidaire signés le 5 août 2011 par Mesdames [Y] [L] épouse [Z], [U] [Z] et Monsieur [E] [W] valables et opposables ;

débouter Mesdames [Y] [L] épouse [Z], [U] [Z] et Monsieur [E] [W] de toutes leurs fins et demandes ;

‘débouter Mesdames [Y] [L] épouse [Z], [U] [Z] et Monsieur [E] [W] de leur demande de remboursement des sommes prélevées ;

‘condamner Mesdames [Y] [L] épouse [Z], [U] [Z] et Monsieur [E] [W] à verser la commune de [Localité 9], la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la Commune de [Localité 9], représentée par son maire en exercice, aux entiers dépens ;

– condamné la commune de [Localité 9], représentée par son maire en exercice, à payer à Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W], chacun, la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– ordonné l’exécution provisoire.

Statuant à nouveau,

À titre principal,

– déclarer l’action en nullité intentée par les consorts [Z] et [W] prescrite ;

En conséquence,

– déclarer les engagements de caution solidaires souscrits le 5 août 2011 par Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] valables et opposables ;

– débouter Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] de toutes leurs fins et demandes ;

À titre subsidiaire,

– déclarer que le code de la consommation n’est pas applicable aux collectivités territoriales ;

– déclarer que la mairie de [Localité 9] n’a pas la qualité de créancier professionnel ;

En conséquence,

– déclarer les engagements de cautions solidaires souscrits le 5 août 2011 par Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] valables et opposables ;

– débouter Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] de toutes leurs fins et demandes ;

À titre très subsidiaire,

– déclarer que le formalisme imposé par l’article L.341-3 devenu L.331-2 code de la consommation n’est pas applicable en l’absence de déséquilibre significatif entre les parties ;

– déclarer qu’il n’existe pas de déséquilibre significatif dans les rapports entre la mairie de [Localité 9] et Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] ;

En conséquence,

– déclarer les engagements de cautions solidaires souscrits le 5 août 2011 par Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] valables et opposables ;

– débouter Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] de toutes leurs fins et demandes ;

À titre infiniment subsidiaire,

– déclarer que les consorts [Z] et [W] ont manqué à leur devoir de bonne foi et de loyauté en n’informant pas la mairie de [Localité 9] que les engagements de caution solidaires souscrits le 5 août 2011 étaient entachés de nullité ;

En conséquence,

– déclarer que le manquement au devoir de bonne foi et de loyauté des consorts [Z] et [W] est constitutive d’une faute qui fait subir à la mairie de [Localité 9] un préjudice pécuniaire ;

– condamner les consorts [Z] et [W] au paiement de la somme de 16.064,69 euros à titre de dommages-intérêts ;

En tout état de cause,

– condamner Mesdames [Y] [L] épouse [Z], [U] [Z] et Monsieur [E] [W] à verser à la Mairie de [Localité 9] la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner Mesdames [Y] [L] épouse [Z], [U] [Z] et Monsieur [E] [W] aux dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de Maître Inès Grison, Avocat, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions déposées le 10 mai 2021, par lesquelles [E] [W], Mme [U] [Z] et Mme [Y] [Z], appelants, demandent à la Cour de :

– déclarer Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W] recevables et bien fondés en leur prétention ;

En conséquence,

– rejeter l’appel adverse ;

– confirmer la décision rendue le 22 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de Meaux ;

– condamner la commune de [Localité 9], représentée par son maire en exercice, à verser à Mme [Y] [L] épouse [Z], Mme [U] [Z] et M. [E] [W], la somme de 1.000 euros chacun, au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties. Cependant, pour une meilleure compréhension du présent arrêt, leur position sera succinctement résumée.

Sur la prescription de l’action en nullité,

L’appelante expose que l’exception de nullité perpétuelle constitue un moyen de défense au fond soulevé par le défendeur à l’action afin de faire obstacle à une demande en justice d’exécution d’une obligation ; que l’action en nullité de l’engagement de caution intentée par les consorts [Z] et [W] fait l’objet d’une forclusion en ce qu’elle ne constitue pas un moyen de défense opposé à une demande d’exécution forcée de l’engagement de caution par la mairie de [Localité 9], ni même un moyen de défense pour faire obstacle à la saisie administrative à tiers détenteur.

Les intimés exposent que l’action n’est pas prescrite ; qu’en toute hypothèse, l’exception de nullité est perpétuelle dès lors que l’appelante a fait exécuter les engagements de caution des concluants.

Motifs de l’arrêt :

Sur la prescription de l’action des consorts [Z] et [W] :

Selon l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Il résulte de l’article 2224 du code civi1 que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. Il résulte par ailleurs de l’article 1304 du code civi1, dans sa rédaction applicable à l’espèce, que dans tous les cas où l’action en nullité d’une convention n’est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans, le point de départ du délai de prescription se situant à la date de souscription de l’engagement.

En l’espèce, les cautionnements ont été consentis le 5 août 2011 et la prescription de l’action en contestation de la validité de ces actes a été acquise le le 5 août 2016. Les consorts [Z] et [W] ont donc, par acte d’huissier du 27 juin 2018, fait assigner la Commune de [Localité 9] aux fins de voir déclarés nuls les engagements de caution alors que leur action se trouvait prescrite. En outre, si l’exception de nullité est perpétuelle, en revanche le droit d’agir par voie d’action en nullité de la caution ne l’est pas. En effet, l’exception de nullite’ perpétuelle constitue un moyen de défense au fond opposé à une action principale en exe’cution force’e d’une obligation litigieuse mais le demandeur qui agit au principal en annulation de cautionnement ne peut se prévaloir d’une quelconque exception de nullité faute d’avoir la qualité de défendeur.

En revanche, il n’est pas contesté que les consorts [H] ont saisi par acte distinct du 27 juin 2018 le juge de l’exécution du tribunal de Meaux en contestation des avis à tiers détenteurs les concernant alors qu’il incombe, aux termes de l’article L213-6 code de l’organisation judiciaire, au juge de l’exécution de connaître de manière exclusive des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, la question de l’invocation de l’exception de nullité, opposable à un créancier s’étant constitué son propre titre en dehors de toute demande judiciaire préalable, étant alors susceptible de se poser devant cette dernière juridiction.

La fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la commune de [Localité 9] sera donc accueillie et le jugement entrepris sera par conséquent entièrement infirmé. Il s’en infère que la cour n’a donc pas à se prononcer sur la validité des cautionnements.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Le jugement de première instance sera infirmé en toutes ses dispositions, notamment celles relatives aux dépens et frais irrépétibles.

Les consorts [H] qui succombent devront supporter les dépens de la première instance et de l’appel en application de l’article 696 du code de procédure civile. Il conviendra également d’autoriser Maître Inès Grison, Avocat, à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont il a été fait l’avance sans avoir reçu provision en application de l’article 699 du code de procédure civile. Il apparaît en revanche équitable de laisser à chaque partie la charge de leurs frais irrépétibles de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement du 22 octobre 2020 du tribunal judiciaire de Meaux,

Statuant à nouveau,

DÉCLARE l’action de madame [Y] [L] épouse [Z], de madame [U] [Z] et de monsieur [E] [W] prescrite,

Y ajoutant,

LAISSE aux parties la charge de leurs frais irrépétibles de première instance et d’appel,

Condamne in solidum madame [Y] [L] épouse [Z], madame [U] [Z] et monsieur [E] [W] aux entiers dépens de la première instance et de l’appel avec distraction au profit de maître Inès Grison, Avocat, en application de l’article 699 du code de procédure civile,

REJETTE les autres demandes.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

 


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