Déséquilibre significatif : 1 août 2023 Cour d’appel de Dijon RG n° 22/00494
Déséquilibre significatif : 1 août 2023 Cour d’appel de Dijon RG n° 22/00494
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1 août 2023
Cour d’appel de Dijon
RG n°
22/00494

SARL [Adresse 4]

C/

AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D’APPEL DE DIJON

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 1er AOUT 2023

N° RG 22/00494 – N° Portalis DBVF-V-B7G-F52U

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : jugement du 04 avril 2022,

rendu par le tribunal judiciaire de Dijon – RG : 21/01297

APPELANTE :

SARL [Adresse 4], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité au siège :

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Me Christophe BALLORIN, membre de la SELARL BALLORIN-BAUDRY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 9

INTIMÉE :

AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, Société d’Assurance Mutuelle, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualités au siège :

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Fabrice CHARLEMAGNE, membre de la SCP BEZIZ-CLEON – CHARLEMAGNE-CREUSVAUX, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 17

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 mai 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de Chambre. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :

Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de Chambre,

Sophie DUMURGIER, Conseiller,

Sophie BAILLY, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Aurore VUILLEMOT,

DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 27 Juin 2023 pour être prorogée au 1er Août 2023,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de Chambre, et par Aurore VUILLEMOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SARL [Adresse 4] exploite à [Localité 5], un restaurant et 5 chambres d’hôtes.

Le 17 janvier 2014, elle a souscrit auprès d’AXA un contrat d’assurance multirisque professionnelle, garantissant notamment les conséquences financières de l’arrêt d’activité. Selon les conditions particulières du contrat, cette garantie a été étendue aux pertes d’exploitation consécutives à la fermeture provisoire totale ou partielle de l’établissement, lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : 1. La décision de fermeture a été prise par une autorité administrative compétente, et extérieure à l’assuré ; 2. La décision de fermeture est la conséquence d’une maladie contagieuse, d’un meurtre, d’un suicide, d’une épidémie ou d’une intoxication. Il est stipulé en caractères majuscules que sont exclues les pertes d’exploitation lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelle que soit sa nature et son activité, fait l’objet sur le même territoire départemental que celui de l’établissement assuré, d’une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique.

La société [Adresse 4] expose que suite à l’arrêté du 14 mars 2020 du ministre des solidarités et de la santé et au décret du 29 octobre 2020 pris par le Premier ministre, le fonds de commerce qu’elle exploite a été fermé du 14 mars au 2 juin 2020 puis du 29 octobre 2020 au 19 mai 2021.

Ayant vainement sollicité la mise en oeuvre de la garantie pertes d’exploitation, elle a fait assigner, par acte du 5 mars 2021, la SA AXA France Iard devant le tribunal judiciaire de Dijon, qui par jugement du 4 avril 2022, a :

– déclaré recevable l’intervention volontaire de la société AXA Assurances Iard Mutuelle,

– mis hors de cause la société AXA France Iard,

– débouté la SARL [Adresse 4] de toutes ses demandes,

– débouté la société AXA Assurances Iard Mutuelle de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SARL [Adresse 4] aux entiers dépens de l’intance.

La SARL [Adresse 4] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 15 avril 2022.

Aux termes du dispositif de ses conclusions n°2, notifiées le 6 avril 2023, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens développés au soutien de ses prétentions, la SARL [Adresse 4] demande à la cour, au visa des articles 1103, 1169, 1170 et 1171, 1188, 1190 et 1191, et 1231-1 du code civil, des articles L. 112-2, L. 112-4, L.113-1, L. 521-4 et L. 520-1 ancien du code des assurances et de l’article 565 du code de procédure civile, de :

– déclarer recevables l’ensemble de ses prétentions,

– infirmer le jugement dont appel en ce qu’il l’a déboutée de toutes ses demandes et l’a condamnée aux entiers dépens de l’instance,

En conséquence, statuant à nouveau,

– condamner la société AXA Assurances Iard Mutuelle à lui payer la somme de 118 500 euros à titre de provision sous astreinte provisoire de 1 000 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du ‘jugement’ à intervenir,

– se réserver expressément la faculté de liquider cette astreinte,

– vu l’article 145 du code de procédure civile, désigner tel expert qu’il plaira avec pour mission :

. d’évaluer le montant des dommages constitués par la perte de marge brute pendant la période d’indemnisation,

. évaluer le montant des frais supplémentaires d’exploitation pendant la période d’indemnisation,

. se faire communiquer tous documents et pièces qu’il estimera utiles à sa mission, . entendre tout sachant qu’il estimera utile,

. s’il l’estime nécessaire, se rendre sur place,

. mener de façon strictement contradictoire ses opérations d’expertise, en particulier en faisant connaître aux parties, oralement ou par écrit, l’état de ses avis et opinions à chaque étape de sa mission puis un document de synthèse en vue de recueillir les dernières observations des parties avant une date ultime qu’il fixera, avant le dépôt de son rapport,

. rappeler aux parties lors de l’envoi de ce document de synthèse qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà de cette date ultime,

– condamner la société AXA Assurance Iard Mutuelle aux entiers dépens de première instance et d’appel et à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes du dispositif de ses conclusions n°3, notifiées le 12 avril 2023, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens développés au soutien de ses prétentions, la société AXA Assurances Iard Mutuelle demande à la cour, au visa des articles 1103, 1170 et 1192 du code civil et L. 113-1 et L. 121-1 du code des assurances, de :

A titre principal,

– déclarer irrecevables, subsidiairement mal fondées, les demandes de la société [Adresse 4] tirées du défaut de formalisme de la clause d’exclusion et du manquement à l’obligation d’information et de conseil de l’assureur,

– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a débouté la société [Adresse 4] de toutes ses demandes,

A titre subsidiaire,

– juger que la preuve du montant des pertes d’exploitation correspondant à l’indemnité sollicitée n’est pas rapportée,

En conséquence,

– débouter la société [Adresse 4] de sa demande de condamnation formulée à son encontre,

– désigner tel expert qu’il plaira au ‘tribunal’, aux frais avancés par ‘la demanderesse’, avec pour mission de :

. se faire communiquer tous documents et pièces qu’il estimera utile à l’accomplissement de sa mission, notamment l’estimation effectuée par l’assurée et/ou son expert-comptable, accompagnée de ses bilans et comptes d’exploitation sur les trois dernières années,

. entendre les parties ainsi que tout sachant et évoquer, à l’issue de la première réunion avec les parties le calendrier possible de la suite de ses opérations,

. examiner les pertes d’exploitation garanties contractuellement par le contrat d’assurance, sur une période maximum de trois mois et en tenant compte de la franchise de 3 jours ouvrés applicable,

. donner son avis sur le montant des pertes d’exploitation consécutives à la baisse du chiffre d’affaires causée par l’interruption ou la réduction de l’activité, comprenant le calcul de la perte de marge brute et déterminer le montant des charges salariales et des économies réalisées,

. donner son avis sur le montant des aides/subventions d’Etat perçues par l’assurée,

. donner son avis sur les coefficients de tendance générale de l’évolution de l’activité et des facteurs externes et internes susceptibles d’être pris en compte pour le calcul de la réduction d’activité imputable à la mesure de fermeture en se fondant notamment sur les recettes encaissées dans les semaines ayant précédé le 15 mars et le 29 octobre 2020,

En tout état de cause,

– débouter la société [Adresse 4] de toutes demandes, fins ou conclusions contraires au dispositif de ses conclusions,

– la condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel et à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La clôture est intervenue le 13 avril 2023.

A l’audience du 9 mai 2023, la cour a relevé que dans le dispositif de ses conclusions, la société [Adresse 4] ne faisait pas mention d’une demande de condamnation de son assureur à des dommages-intérêts en raison de la violation de son devoir d’information et de conseil.

Par une note en délibéré du 11 mai 2023 qu’elle avait été autorisée à produire, la société [Adresse 4] a indiqué que sa demande indemnitaire était unique et qu’elle était fondée d’une part sur la mobilisation de la garantie perte d’exploitation et d’autre part sur un manquement de l’assureur à son devoir d’information et de conseil.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’exécution du contrat

En l’espèce, il est constant que les périodes au titre desquelles la société [Adresse 4] demande l’exécution du contrat la liant à Axa, sont des périodes durant lesquelles la fermeture de son fonds de commerce a été imposée par une décision émanant d’une autorité administrative compétente, extérieure à l’assurée, et motivée par la lutte conte la propagation du virus Covid – 19, transmettant une maladie contagieuse à l’origine d’une épidémie.

Les conditions d’application de la garantie ‘pertes d’exploitation’ souscrite sont donc réunies.

‘ Mais la société Axa oppose à la société [Adresse 4] la clause d’exclusion selon laquelle ne sont pas garanties les pertes d’exploitation lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelle que soit sa nature et son activité, fait l’objet sur le même territoire départemental que celui de l’établissement assuré, d’une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique.

Il est constant que la décision ayant conduit à la fermeture du restaurant de l’appelante a contraint à la fermeture de très nombreux autres fonds de commerce, notamment de restauration, dans le département de la Côte d’Or, si bien que, contrairement à ce que soutient l’appelante, cette clause d’exclusion a en l’espèce vocation à s’appliquer, sous réserve de sa validité contestée.

‘ La société [Adresse 4] invoque en premier lieu les dispositions de l’article L. 112-4 du code des assurances selon lesquelles Les clauses des polices édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents. Elle prétend que la clause d’exclusion litigieuse n’est pas mentionnée en caractères très apparents et n’est donc pas valable.

Ce faisant, l’appelante ne forme aucune prétention nouvelle. Elle ne fait que soulever un moyen, certes non soumis à l’appréciation des premiers juges, tendant à écarter l’application de la clause d’exclusion que lui oppose la société Axa, fin qu’elle poursuit depuis la saisine du tribunal judiciaire de Dijon le 5 mars 2021.

La société Axa n’est donc pas fondée à soulever l’irrecevabilité de cette ‘demande’ en se fondant sur les dispositions des articles 564 et 565 du code de procédure civile.

Il est exact que la clause d’exclusion litigieuse n’apparaît pas dans les conditions particulières du contrat, comme d’autres clauses d’exclusion de garantie mentionnées dans les conditions générales du contrat, en caractères minuscules gras dans un encadré de couleur.

Il n’en demeure pas moins que la clause d’exclusion litigieuse est rédigée en caractères très apparents puisque libellée en majuscules immédiatement à la suite de l’extension particulière de garantie ‘perte d’exploitation suite à fermeture administrative’ à laquelle elle se rapporte spécifiquement, étant précisé que :

– la loi n’impose aucune typographie ou mise en page particulière,

– le fait que les clauses d’exclusion ne soient pas écrites de la même manière selon qu’elles apparaissent dans les conditions générales ou dans les conditions particulières du contrat s’explique justement par leur insertion dans les unes ou les autres, étant relevé que les conditions générales ne sont globalement pas écrites de la même manière que les conditions particulières, ce qui permet aisément de les distinguer.

‘ La société [Adresse 4] invoque en deuxième lieu les dispositions des articles L. 113-1 du code des assurances et 1169 et 1170 du code civil et demande que la clause d’exclusion que la société Axa lui oppose soit réputée non-écrite car elle n’est ni formelle ni limitée, si bien qu’elle vide de sa substance l’obligation de l’assureur.

La société [Adresse 4] soutient que la clause d’exclusion ne peut être dissociée de la clause de garantie, dès lors que sa référence à une ’cause identique’ renvoie aux événements à l’origine de la décision de fermeture administrative, soit une maladie contagieuse, un meurtre, un suicide, une épidémie ou une intoxication.

Elle observe que dans le contrat, le terme ‘épidémie’ n’a pas été défini et est donc sujet à interprétation. Elle rappelle qu’au sens commun du terme, une épidémie touche un grand nombre de personnes dans une région donnée, et que si elle doit conduire à une décision de fermeture administrative, cette décision touchera nécessairement plusieurs établissements. Elle en déduit que la clause vide donc de son sens la garantie donnée pour la restreindre à un seul établissement et se montre en outre particulièrement imprécise et de portée illimitée en ce qu’elle concerne ‘tout autre établissement, quelle que soit sa nature et son activité, faisant l’objet d’une fermeture administrative pour une cause identique et sur un territoire étendu’.

Enfin elle relève que consciente de la difficulté, la société Axa lui a soumis le 28 octobre 2020, sous peine de résiliation du contrat, une proposition d’avenant à effet du 1er avril 2021, excluant de la garantie ‘pertes d’exploitation pour fermeture administrative’ les pandémies et tout risque impactant au même moment une autre entreprise du même département.

Pour sa part, la société Axa rappelle que le caractère formel d’une clause d’exclusion s’apprécie seulement par rapport aux termes et critères d’application qu’elle comprend et en aucun cas par rapport aux clauses définissant l’objet et les conditions de la garantie et que, ce qui est garanti est le risque de fermeture administrative et non le risque d’une épidémie, la nature, la localisation et l’étendue de l’épidémie important peu puisque le seul critère d’application de la clause d’exclusion réside dans le périmètre de la fermeture administrative.

Elle fait valoir que les termes employés dans la clause litigieuse sont parfaitement compréhensibles et ne permettent aucune incertitude sur l’absence de couverture d’une fermeture administrative dite ‘collective’ qui n’entre pas dans le périmètre des risques inhérents à l’activité développée par l’assuré.

Elle ajoute qu’il existe une réalité scientifique selon laquelle une épidémie peut n’affecter qu’un unique établissement et que le risque de fermeture ‘individuelle’ d’un établissement pour cause d’épidémie est une réalité juridique et qu’il ne peut donc pas être jugé que la clause d’exclusion priverait son obligation essentielle de substance, cette obligation correspondant à la couverture de risques inhérents à l’activité de l’assuré dans une fréquence et une proportion beaucoup plus larges que ceux d’une crise sanitaire nationale.

Elle précise que la clause d’exclusion ne crée aucun déséquilibre significatif au détriment de l’assuré, dès lors que la fréquence de réalisation du risque assuré, soit la fermeture administrative individuelle d’un restaurant notamment pour cause d’épidémie, est plus probable que celle du risque exclu, soit la fermeture collective d’établissements pour cause d’épidémie.

Il résulte de l’article L. 113-1 du code des assurances que les clauses d’exclusion de garantie qui privent l’assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières de la réalisation du risque doivent être formelles et limitées.

Il résulte des articles 1169 et 1170 du code civil que dans un contrat à titre onéreux, la contrepartie convenue au profit de celui qui s’engage ne doit pas être illusoire ou dérisoire et que toute clause qui prive de substance l’obligation d’un des cocontractants est réputée non écrite.

A titre liminaire, la cour observe que le caractère formel et limité de la clause litigieuse doit s’apprécier au seul regard des stipulations du contrat dans lequel elle figure, sans aucun égard pour les modifications envisagées voire effectivement apportées à ce contrat.

‘ Une clause d’exclusion n’est pas formelle lorsqu’elle ne se réfère pas à des critères précis et nécessite interprétation.

En l’espèce, il est exact que la clause d’exclusion de garantie renvoie nécessairement par la mention ’cause identique’ à la clause de garantie et à l’événement ayant conduit à la décision de fermeture administrative.

Toutefois, cet événement, en l’espèce une épidémie, est sans influence sur la mise en oeuvre de l’exclusion de garantie, laquelle ne dépend que de la circonstance suivante : un autre établissement que celui de l’assuré est, dans le même département fermé en exécution d’une décision administrative fondée sur le même événement que la décision s’imposant à l’établissement de l’assuré.

Ainsi l’absence de définition contractuelle du mot ‘épidémie’, voire son ambiguïté, est sans incidence sur la compréhension de la clause d’exclusion.

‘ Une clause d’exclusion n’est pas limitée lorsqu’elle vide la garantie de sa substance, en ce qu’après son application elle ne laisse subsister qu’une garantie dérisoire.

En l’espèce, la garantie couvre le risque de pertes d’exploitation consécutives, non pas à une épidémie, mais à une décision de fermeture administrative ordonnée à la suite de l’un des cinq événements suivants : une maladie contagieuse, un meurtre, un suicide, une épidémie, une intoxication. En conséquence, quand bien même la clause d’exclusion de garantie aurait, ainsi que le soutient la société [Adresse 4], pour effet de ne pas garantir les pertes d’exploitation consécutives à une décision de fermeture administrative ordonnée en raison d’une épidémie, au sens commun du terme ou telle celle du Covid-19, elle maintient dans le champ de la garantie les pertes d’exploitation consécutives à une décision de fermeture administrative motivée par l’un des quatre autres événements ou survenue dans d’autres circonstances que celles prévues par la cause d’exclusion : cf Civ 2ème 1er décembre 2022 n°21-15.392, 21-19.341, 21-19.342, 21-19.343 et 19 janvier 2023 n°21-21.516 et 21-23.189.

Il résulte de tout ce qui précède qu’il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société [Adresse 4] de sa demande tendant à ce que la société Axa la garantisse en exécution du contrat souscrit le 17 janvier 2014, des pertes d’exploitation subies du 14 mars au 2 juin 2020 puis du 29 octobre 2020 au 19 mai 2021.

Sur le manquement de l’assureur à son obligation d’information et de conseil

Compte tenu des explications fournies par l’appelante et des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, la cour considère qu’elle n’est saisie que d’une demande en paiement d’une provision de 118 500 euros à parfaire après expertise et que cette demande est présentée sur deux moyens de droit différents :

– l’exécution du contrat liant les parties, examiné ci-dessus

– le fait que l’assureur aurait engagé sa responsabilité et serait ainsi tenu à réparer le préjudice causé à l’assuré, qu’elle est tenue d’examiner.

Il en résulte que contrairement à ce que soutient l’intimée, l’appelante ne forme aucune prétention nouvelle au sens des articles 564 et 565 du code de procédure civile et qu’elle est recevable à fonder sa demande, pour la première fois en cause d’appel, sur le manquement de l’assureur à son obligation d’information et de conseil.

Dans sa version en vigueur au 17 janvier 2014, l’article L. 112-2 du code des assurances dispose que l’assureur doit obligatoirement fournir une fiche d’information sur le prix et les garanties avant la conclusion du contrat et que notamment, avant la conclusion du contrat, l’assureur remet à l’assuré un exemplaire du projet de contrat et de ses pièces annexes ou une notice d’information sur le contrat qui décrit précisément les garanties assorties des exclusions, ainsi que les obligations de l’assuré.

En l’espèce, la société [Adresse 4] n’allègue nullement que la société Axa n’aurait pas respecté les dispositions de l’article L. 112-2 du code des assurances.

Elle invoque les dispositions de l’article L. 520-1, II, 2° du code des assurances dans sa version en vigueur au 17 janvier 2014, jour de la conclusion du contrat, selon lesquelles avant la conclusion de tout contrat, l’intermédiaire de l’assureur doit préciser les exigences et les besoins du souscripteur éventuel ainsi que les raisons qui motivent le conseil fourni quant à un produit d’assurance déterminé, ces précisions, qui reposent en particulier sur les éléments d’information communiqués par le souscripteur éventuel, étant adaptées à la complexité du contrat d’assurance proposé.

Sur ce point, la société Axa fait valoir, sans aucune contestation de l’appelante que cette dernière avait souhaité une garantie contre les risques de pertes d’exploitation.

Or, il ressort des conditions générales du contrat proposé et souscrit que les conséquences financières de l’arrêt d’activité sont couvertes lorsque l’interruption ou la réduction temporaire de l’activité professionnelle résulte directement :

– soit d’un dommage matériel garanti par le contrat tels notamment un incendie, un dégât des eaux, un effondrement, des dommages électriques ….

– soit d’une impossibilité ou d’une difficulté d’accès aux locaux professionnels, notamment en cas d’interdiction par les autorités compétentes, consécutive à un des événements suivants survenus dans le voisinage : incendie, explosion et risques divers ; événement climatique ; catastrophe naturelle.

Il ressort par ailleurs des conditions particulières du contrat que la couverture des conséquences financières de l’arrêt d’activité a été étendue d’une part aux pertes d’exploitation suite à arrêté de péril et suite à fermeture administrative.

Ces éléments établissent que l’assureur, via son agent d’assurances, a parfaitement rempli les obligations mises à sa charge par les dispositions rappelées ci-dessus, tant en ce qui concerne la recherche des exigences et la définition des besoins de l’assurée que les conseils fournis sur les garanties susceptibles d’y répondre.

Il ressort de la page 24 des conclusions de l’appelante qu’elle reproche à la société Axa de ne pas avoir attiré son attention sur l’existence et le contenu de la clause d’exclusion et de ne pas avoir explicité le contenu et la portée de cette clause.

Toutefois, ainsi que cela a été jugé ci-dessus, en ce qu’elle était conforme aux dispositions des articles L. 112-4 et L. 113-1 du code des assurances, l’existence de cette clause ne pouvait pas échapper à l’assurée et son contenu ne nécessitait pas d’interprétation justifiant des explications particulières.

En toute hypothèse, la cour observe que l’appelante n’allègue pas qu’elle n’aurait pas souscrit l’extension de garantie ‘pertes d’exploitation suite à fermeture administrative’ si elle avait compris qu’elle ne serait pas couverte, dans le cas d’une crise sanitaire telle celle du Covid 19, cas constituant un risque tellement hypothétique, voire inconcevable, avant sa survenance, qu’elle ne peut pas raisonnablement soutenir l’avoir envisagé et faire grief à l’assureur de ne pas l’avoir envisagé.

En conséquence, il convient de débouter la société [Adresse 4] de sa demande d’indemnité provisionnelle et d’expertise, en ce qu’elle est fondée sur le manquement de la société Axa à son devoir d’information et de conseil.

Sur les frais de procès

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, les dépens de première instance et d’appel doivent être supportés par la société [Adresse 4].

Les conditions d’application de l’article 700 du code de procédure civile ne sont réunies qu’en faveur de la société Axa. Toutefois, dans les circonstances particulières de l’espèce, l’équité conduit la cour, à l’instar du premier juge, à laisser à la charge de la société Axa l’intégralité des frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés, tant en première instance qu’en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions critiquées,

Ajoutant,

Déboute la SARL [Adresse 4] de ses demandes fondées sur le manquement de la société Axa Assurances Iard Mutuelle à son obligation d’information et de conseil,

Condamne la SARL [Adresse 4] aux dépens d’appel,

Dit n’y avoir lieu à aucune application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

Le Greffier, Le Président,

 


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