Dépenses de publicité : l’URSSAF veille

Dépenses de publicité : l’URSSAF veille

conseil juridique IP World

Si d’un point de vue comptable et fiscal, les dépenses de publicité constituent, pour une société, des frais de gestion déductibles de son résultat comptable, il incombe à la société qui allègue que les dépenses engagées sont des dépenses de publicité, et non à l’URSSAF, de démontrer que la présence promotionnelle d’une société lui permettait de bénéficier d’une visibilité de nature à assurer sa promotion.

La publicité désigne l’ensemble des actions mises en oeuvre par une entreprise artisanale, commerciale ou industrielle pour se faire connaître et communiquer sur ses produits et/ou prestations afin d’en promouvoir la vente.

Toutefois, lors du contrôle de l’URSSAF, la société n’a produit que la photographie d’une balle de golf bleue siglée « [M][I] Les pieds sur la terre » dont elle soutient qu’elles ont été « distribuées gratuitement en magasins et sur l’évènement », pour « preuve de sa démarche publicitaire », à l’exception d’aucun élément relatif à la quantité de ces objets publicitaires produits ni le ou les lieux de leur distribution.

Par ailleurs, le seul fait de permettre à certains de ses salariés de bénéficier, en même temps que certains de ses clients, d’une loge privative sur le parcours du golf d’Evian ne constitue pas en lui-même une démarche publicitaire ni d’ailleurs de sponsoring, en l’absence de preuve de visibilité de la société sur le parcours de la compétition, en dehors de la présence de ses salariés dans cette loge et dans l’espace VIP Evian.

Les dépenses engagées ne peuvent donc être considérées comme des dépenses de publicité susceptibles d’être déduites de l’assiette des cotisations et contributions sociales.


C8



N° RG 22/00877



N° Portalis DBVM-V-B7G-LIIC



N° Minute :







































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :





la SCP GIRARD-MADOUX ET ASSOCIES





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D’APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE – PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 28 SEPTEMBRE 2023





Appel d’une décision (N° RG 19/00467)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire d’ANNECY

en date du 20 janvier 2022

suivant déclaration d’appel du 25 février 2022





APPELANTE :



SAS [I] [U], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]



représentée par Me Jean-François DALY de la SELARL JURISOPHIA SAVOIE, avocat au barreau d’ANNECY substitué par Me Angéline NICOLAS, avocat au barreau de CHAMBERY





INTIMEE :



L’URSSAF RHONE ALPES, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

6 rue du 19 Mars 1962

[Localité 2]



représentée par Me Marie GIRARD-MADOUX de la SCP GIRARD-MADOUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de CHAMBERY substituée par Me Gaëlle ACHAINTRE, avocat au barreau de CHAMBERY





COMPOSITION DE LA COUR :



LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,



Assistés lors des débats de Mme Chrystel ROHRER, Greffier, en présence de Mme Laëtitia CHAUVEAU, Juriste Assistant





DÉBATS :



A l’audience publique du 13 juin 2023,

Mme Isabelle DEFARGE, chargée du rapport, M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président et M. Pascal VERGUCHT, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs dépôts de conclusions.



Et l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l’arrêt a été rendu.





Le 24 septembre 2018, faisant suite à un contrôle de l’application des législations de sécurité sociale, d’assurance chômage et de garantie des salaires pour la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017, l’URSSAF Rhône-Alpes à notifié pour son établissement de [Localité 21] (74) à la SAS [I] [U], exerçant une activité de vente de matériel de jardinage à l’attention des professionnels comme des particuliers, une lettre d’observations des chefs suivants :

1. Avantage en nature véhicule : principe et évaluation – hors cas des constructeurs et concessionnaires : 501 €

2. Forfait social – Assiette – Cas général : 423 €

3. CSG-CRDS : participation, intéressement, plans d’épargne et actionnariat : 169 €

4. Réduction générale des cotisations : absences – proratisation : 1 681 €

5. Prise en charge par l’employeur de contraventions : 770 €

6. Avantages en nature : cadeaux en nature offerts par l’employeur: 2 362 €

7. Frais professionnels non justifiés : compte 625130 Voyages&déplacements [L] [I] : 12 763 €

8. Frais professionnels non conformes à leur objet : 4 353 €

9. Avantage en nature : séminaire : 4 491 €

10. Avantages en nature : cadeaux en nature offerts par l’employeur : 430 €

11. Avantages non soumis à cotisation : 16 821 €

portant redressement pour un montant total de 44 764 €.



Après réponse à ses observations, l’URSSAF Rhône-Alpes a émis le 11 décembre 2018 l’encontre de la SAS [I] [U] une mise en demeure d’avoir à payer la somme totale de 43 600 € soit 39 628 € de cotisations et 3 972 € de majorations de retard.



Le 18 février 2019 l’URSSAF Rhône-Alpes a accusé réception de la saisine de la commission de recours amiable par la SAS [I] [U].



Le 6 juin 2019 cette société a saisi le tribunal de grande instance d’Annecy d’un recours à l’encontre de la décision implicite de rejet de sa contestation portant sur les points 6, 7, 10 et 11 de la lettre d’observations et par jugement du 20 janvier 2022 le pôle social du tribunal judiciaire d’Annecy :

– a déclaré le recours recevable,

– a débouté la SAS [I] [U] de l’ensemble de ses demandes,

– l’a condamnée à régler à l’URSSAF Rhône-Alpes une indemnité de procédure de 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– l’a déboutée de sa demande de condamnation de l’URSSAF Rhône-Alpes à lui régler une indemnité de procédure en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– l’a condamnée aux entiers dépens de l’instance,

– a rejeté toute autre demande plus ample ou contraire,

– a ordonné l’exécution provisoire.




Moyens

Le 25 février 2022 la SAS [I] [U] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 28 janvier 2022 et au terme de ses conclusions déposées le 23 août 2022 soutenues oralement à l’audience elle demande à la cour :

– de réformer le jugement et la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable,

En conséquence,

– d’ordonner le dégrèvement des suppléments mis à sa charge en matiére de cotisations sociales pour un montant de 38 908 €,

– de lui allouer la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.



Au terme de ses conclusions déposées le 31 mars 2023 soutenues oralement à l’audience l’URSSAF Rhône-Alpes demande à la cour :

– de confirmer le jugement,

Y ajoutant

– de condamner la société [I] [U] à lui régler la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance.



En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile il est expressément référé aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

Motivation






SUR CE





* Point n°6 de la lettre d’observations : Avantages en nature : cadeaux en nature offerts par l’employeur : 2 362 €



La lettre d’observations énonce :

« L’examen des grands livres comptables a permis de relever dans les comptes ‘623400 : cadeaux’ et ‘648000 : autres charges de personnel’les écritures comptables suivantes :

– 23/12/2015 cadeaux de fin d’année des assistantes de la société [I] ([16]) d’une valeur de 975 €

– 04/11/2016 cadeau départ en retraite Mr [R] – salarié de la société (voyage [20]) d’une valeur de 1 000 €

– 31/12/2016 : cadeau fin d’année des assistantes (Cristal fashion) d’une valeur de 600 €

– 12/12/2017 cadeaux fin d’année des assistantes de la société ([16]) d’une valeur de 900 €.

L’effectif de la société est supérieur à 50 salariés. L’établissement dispose d’un comité d’entreprise. De ce fait, les tolérances administratives en matière de prestations en nature ou en espèces prévues pour les comités d’entreprise ne sont en aucun cas transposables à l’employeur.

Par conséquent la valeur de ces avantages financés par l’employeur doit être rétintégrée dans l’assiette des cotisations et contributions sociales en application de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale après remontée en brut

Année 2015 : 975 € net soit 1 250 € brut

Année 2016 : 1 600 € net soit 2 055 € brut

Année 2017 : 900 € net soit 1 157 € brut ».



La société ne conteste pas la réintégration dans l’assiette de ses cotisations et contributions le montant du cadeau fait à son salarié M. [P] [K].



Elle soutient avoir respecté les dispositions de la circulaire ACOSS du 3 décembre 1996 fixant la valeur maximale des cadeaux aux salariés, à savoir une valeur de 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale.



Elle soutient aussi que la circulaire ajoute au texte en créant une confusion entre les actions sociales librement décidées par le comité d’entreprise et celles décidées par l’employeur et qu’il n’existe aucune raison légale que l’une soit exclusive de l’autre, l’employeur demeurant selon elle parfaitement libre de gratifier ses collaborateurs indépendamment des choix faits en toute indépendance par le comité d’entreprise dont la preuve n’est pas rapportée par l’URSSAF qu’il ait, de son côté, décidé, d’octroyer un avantage similaire.





Selon l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale toutes les sommes versées en contrepartie ou à l’occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités, ainsi que tous autres avantages en argent ou en nature, doivent être soumis à cotisations.



La lettre-circulaire ACOSS n° 96-94 du 3 décembre 1996 dont se prévaut la SAS [I] [U] est relative à la présomption de non- assujettissement des bons d’achat et des cadeaux en nature servis par les comités d’entreprise (CE) ou les entreprises, en l’absence de comité d’entreprise, à l’occasion d’événements visés par la tolérance ministérielle du 17 avril 1985.



Elle n’a en conséquence pas vocation à s’appliquer ici dès lors que la SAS [I] [U] ne conteste pas employer plus de 50 salariés et être pourvue d’un comité d’entreprise (devenu comité social économique).



Le montant des avantages en nature attribués comme en l’espèce directement par l’employeur doit en conséquence être intégralement intégré dans l’assiette des cotisations et contributions sociales et ce chef de redressement d’un montant de 2 362 € sera confirmé comme le jugement sur ce point.











* Chef de redressement n°7 : Frais professionnels non justifiés : compte 625130 Voyages&déplacements [L] [I] : 12 763 €



La lettre d’observations énonce :

« L’examen de la comptabilité permet de constater l’enregistrement de sommes au compte 625130 « Voyages et déplacements [L] [I] ». Ces sommes sont issues des relevés de carte bleue de la société [I].

M.[L] [I], directeur général de la société détient la carte bleue de la société. Il a été demandé à la société de justifier toutes les sommes figurant dans ce compte et plus particulièrement toutes les écritures avec pour libellé ‘Relevé CB’

La société a photocopié les justificatifs et elle a été en mesure de ne justifier qu’une partie de ces sommes. Les sommes justifiées sont en grande partie des restaurants et/ou des dépenses de Mr [L] [I].(…)

Il ressort de l’analyse des pièces complémentaires que la société [I] n’a pas justifié les sommes saisies en comptabilité.

Les conditions d’exonération des remboursement de frais professionnels sont fixées par l’arrêté du 20 décembre 2002 modifié par l’arrêté du 25 juillet 2005, les frais doivent être engagés dans un contexte strictement professionnel, les frais doivent être justifiés et conformes à leur objet. De plus certains justificatifs n’ont pas été produits lors du contrôle. Ces frais ne peuvent pas, dès lors, être considérés comme des frais professionnels engagés conformément à leur objet.

Les frais engagés par M. [L] [I] n’ont pas le caractère de frais professionnels, il sont donc reconstitués et réintégrés dans l’assiette des cotisations et contributions sociales.

Il est rappelé à la société que la production de factures, notes de frais… permet de justifier comptablement des dépenses engagées. La société doit avoir également la capacité à justifier de :

– l’identité des invités

– les sociétés qu’ils représentent

– le motif

L’absence de justification des bénéficiaires de cette dépense et la non-production des pièces comptables constitue un obstacle à une vérification sérieuse de la comptabilité qui apparaît dès lors incomplète.



Base de reprise

Années 2015 : 17 639,43 € net soit 22 138 € brut

Année 2016 : 9 243,87 € net soit 11 649 € brut

Année 2017 : 4 200,07 € net soit 5 344 € brut

Le redressement n’est pas effectué en base plafonnée ni en base pôle emploi

Soit les régularisations suivantes

– pour les cotisations et contributions recouvrées par les URSSAF d’un montant de 12 763 € déterminé comme suit :

– pour 2015 : 7 210 €

– pour 2016 : 3 802 €

– pour 2017 : 1 751 € ».



La société ne conteste qu’une partie du rappel opéré pour un montant de 3 352,23 €, estimant caractériser la nature professionnelle des frais suivants :

– Billet d’avion de M. [Y] pour une formation Kubota à [Localité 14] le 20 janvier 2016 (135,66 €),

– Frais liés à la formation [5] pour 4 salariés les 10, 11 et 12 février 2016 (1 086,40€),

– Frais de repas, hôtel et carburant engagés par M. [Z] pour son activité (1 879,68 €).



Selon l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, doivent être soumis à cotisations toutes les sommes versées et les avantages accordés en contrepartie ou à l’occasion du travail, à l’exclusion des sommes représentatives de frais professionnels.



Selon l’article 1er de l’arrêté du 1er décembre 2002 les frais professionnels s’entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l’emploi que le salarié supporte au titre de l’accomplissement de ses missions.



Pour pouvoir déduire ces sommes de l’assiette de ses cotisations et contributions sociales, l’employeur doit apporter la preuve que le salarié est contraint d’engager ces frais supplémentaires et produire des justificatifs.



Le salarié doit être :

– en situation de déplacement professionnel,

– empêché de regagner sa résidence,

– contraint de prendre son repas au restaurant.



* Formation Kubota (déplacement de M. [Y] du 20 janvier 2016)



La société justifie la nature de la dépense par la production du duplicata de la facture délivrée par [4] le 20 janvier 2016 pour un montant de 135,66 € et du relevé de son compte bancaire à la [6] au 29 janvier 2016 où apparaît cette somme au débit.



Toutefois, elle ne justifie pas de la réalité de la formation objet du déplacement.



Ce chef de redressement doit donc être confirmé comme le jugement sur ce point.



* Formation STIHL



La société produit une convention de formation professionnelle continue conclue entre la SAS [5] à [Localité 12] et elle-même pour son représentant [B] [T] (stage T201 – Maîtrise technique des motorisations [5] du 10/02/ au 12/02/2016 à [Localité 19] d’un montant de 390 €) qui démontre la cause professionnelle de la dépense engagée à ce titre.



Bien qu’une seule convention de formation soit produite alors que la facture de l’hôtel [7] à [Localité 19] (77) d’un montant de 1 086,40 € comprenne la facturation de 4 chambres les 9, 10 et 11 février 2016, la commission de recours amiable a considéré que « le justificatif (convocation à la formation dispensée à [Localité 19]) était suffisant pour justifier les dépenses liées aux nuitées ».



Ce chef de redressement d’un montant de 1 086,40 € doit donc être annulé.



* Frais de déplacement engagés pour M. [Z]



La société communique l’extrait de son compte à la [6] au 29 juillet 2016 faisant apparaitre les paiements et des tickets justificatifs afférents à ces frais dont elle allègue qu’ils constituent des frais professionnels.



Mais, et alors que la plupart des dépenses de repas ont concerné entre 2 et 8 personnes, ces dépenses ne sont justifiées par aucun élément susceptible de démontrer leur cause et en conséquence leur motif professionnel.



Le redressement sera en conséquence confirmé sur ce point.



* Chef de redressement 10 – Avantages en nature : cadeaux en nature offerts par l’employeur : 430 €



La lettre d’observations énonce à cet égard :

« Lors du contrôle il a été constaté que l’employeur prend en charge des abonnements et ou des places pour

– les matchs de [Localité 8] Savoie Handball – places Gold pour un montant annuel de 4 775 € en 2015 soit 155 € unitaire pour 25 places et 180 € unitaire pour 5 places.

Ces places ont bénéficié à MM. [G] [J], [N] [C], [L] [I], [W] [Z], salariés de la société [I]. Des clients de la société ont bénéficié également de ses places pour assister à des matchs de hand-ball.

– le match de la coupe de France GF38/OM du 4 janvier 2015 : 4 places à 125 € pour un montant total de 500 €.

Ces places ont bénéficié à M. [G] [J], salarié de la société [I] et à 3 clients de la société.

– le match ETG/[Localité 15] du 9 mai 2015 : 2 places tribune ‘présidentielle’ pour un montant total de 220 €.

Ces places ont bénéficié à M. [W] [Z] salarié de la société [I] et à un client de la société.

Ces abonnements ou places représentent la prise en charge d’une dépense personnelle au bénéficie des salariés de la société [I].



Il convient donc de réintégrer dans l’assiette des cotisations le montant suivant après remontée en brut :

Année 2015 : 855 € net soit 1 097 € brut

soit la régularisation suivante : 430 € ».



Ce chef de redressement n’est plus contesté devant la cour et sera en conséquence confirmé.



* Chef de redressement 11 – Avantages non soumis à cotisation : 16 821 €



La lettre d’observations énonce à cet égard :

« L’analyse de la comptabilité permet de constater la prise en charge par la société de prestations d’hopitalités pour la manifestation ‘The Evian Championship’, tournoi majeur de golf.

Les sommes prises en charge par la société sont de 11 000€ pour 2015, 11 500€ pour 2016 et 2017.

Il est mis à la disposition de la société sur 4 jours une demi-loge privative meublée de 25 m2 ainsi qu’une terrasse le tout d’une capacité de 15 personnes. Un déjeuner ‘finger food’ servi dans la loge par un service de traiteur, l’open bar toute la journée au sein de la loge VIP, un cadeau pour chacun des invités, des accès aux zones VIP suivantes : le bar Evian avec open bar, l’Academy, un service de ‘courtesy car’ interne et 6 places de parking VIP/jour.

Il a été demandé à la société de justifier des conditions d’attribution et de fournir la liste des bénéficiaires en précisant le nom de la personne concernée et le nom de la société, ainsi que la liste d’émargement des intéressés.

L’individualisation des bénéficiaires a été obtenue après coup, aucune liste d’émargement n’a été établie.

Un tableau Excel a été produit pour les années 2015, 2016 et 2017. L’analyse de ces tableaux fait apparaître que la société [I] a juste indiqué le nom des société, il n’a pas (été précisé) l’identité et la qualité des bénéficiaires. Citons par exemple :

[Adresse 10]

[Adresse 9]

[Adresse 11]

[Adresse 17]

Flaine Golf

Excoffier

[A]…

La société a également indiqué l’identité de 3 de ses salariés – M. [D] [H], M. [W] [Z], M. [L] [I].

La production des factures a permis de justifier comptablement ces dépenses, mais la société a été dans l’incapacité de justifier de l’identité et du statut des personnes qui ont assisté au tournoi de golf d’Evian.

En l’espèce, l’absence de justification détaillée et précise des bénéficiaires de cette dépense constitue un obstacle à une vérification sérieuse de la comptabilité, qui apparaît dès lors incomplète.

Il est procédé à la réintégration de ce montant dans l’assiette des cotisations et contributions sociales, après remontée en brut.

Il conviendra à l’avenir de mettre en place des fichiers détaillant la participation au tournoi avec le nom, la qualité des bénéficiaires et le nom de la société qu’il représente ainsi que le SIRET de cette dernière, à l’appui d’une liste d’émargement.

Base de reprise

Année 2015 : 11 000 € net soit 13 836 € brut

Année 2016 : 11 500 € net soit 14 474 € brut

Année 2017 : 11 500 € net soit 14 474 € brut.

Le redressement n’est pas effectué en base plafonnée.

Soit les régularisations suivantes :

2015 : 5 434 €

2016 : 5 686 €

2017 : 5 701 € ».



La société indique qu’il s’agit à titre principal de dépenses de publicité, ou à défaut, de frais d’entreprise.









** Dépenses de publicité



La société soutient que d’un point de vue comptable et fiscal, les dépenses de publicité constituent, pour elle, des frais de gestion déductibles de son résultat comptable ; que ces frais, engagés dans l’intérêt de l’entreprise, lui permettent d’assurer sa communication auprès des clients et sont sans lien avec les dépenses de personnel ; qu’au cas présent, assurer sa visibilité sur le parcours de golf d’Evian à l’occasion de l’une des plus importantes compétitions mondiales de la saison répond à un triple objectif :

– consolider ses liens commerciaux avec le golf d’Evian et plus largement avec le complexe hôtelier au sein duquel son parcours est implanté, avec lequel elle expose réaliser un chiffre d’affaires de l’ordre de 150 000 € en moyenne par exercice ; qu’en conséquence la dépense engagée dans l’intérêt de l’entreprises est parfaitement proportionnée à son chiffre d’affaires total d’environ 22 millions d’euros.

– valoriser son image auprès de ses clients et prospects au travers de l’accueil qui leur est fait en loge. A cet égard, elle produit la liste des invités, dont elle soutient qu’il s’agit principalement des structures exploitant un golf dans sa zone de chalandise de la société.

– assurer sa promotion auprès du public présent sur le parcours, notamment en l’espèce par la distribution de ‘goodies’ sous forme de balles de golf siglées.

Elle précise que la démarche dans laquelle s’inscrit cette dépense n’est pas liée au fait qu’elle ait conclu avec le golf d’Evian un contrat de partenariat ou de sponsoring mais doit être appréciée au seul regard des objectifs poursuivis ; qu’à cet égard, l’URSSAF n’a jamais soutenu que les dépenses engagées seraient étrangères à son activité ou que sa présence sur le parcours du golf ne lui permettait pas de bénéficier d’une visibilité de nature à assurer sa promotion.



Elle fait observer superfétatoirement que le partenariat entre le golf d’Evian et elle a été établi de façon informelle, les avantages consentis au golf (mise à disposition de matériel) trouvant leur contrepartie dans une remise commerciale de 35 % sur le prix de la loge.





La publicité désigne l’ensemble des actions mises en ‘uvre par une entreprise artisanale, commerciale ou industrielle pour se faire connaître et communiquer sur ses produits et/ou prestations afin d’en promouvoir la vente.



Il incombe à la société qui allègue que les dépenses engagées sont des dépenses de publicité, et non à l’URSSAF, de démontrer que sa présence sur le parcours du golf d’Evian lui permettait de bénéficier d’une visibilité de nature à assurer sa promotion.



La société ne produit à cet effet que la photographie d’une balle de golf bleue siglée « [M][I] Les pieds sur la terre » dont elle soutient qu’elles ont été « distribuées gratuitement en magasins et sur l’évenement », pour « preuve de sa démarche publicitaire », à l’exception d’aucun élément relatif à la quantité de ces objets publicitaires produits ni le ou les lieux de leur distribution.



Le seul fait de permettre à certains de ses salariés de bénéficier, en même temps que certains de ses clients, d’une loge privative sur le parcours du golf d’Evian ne constitue pas en lui-même une démarche publicitaire ni d’ailleurs de sponsoring, en l’absence de preuve de visibilité de la SAS [I] [U] sur le parcours de la compétition, en dehors de la présence de ses salariés dans cette loge et dans l’espace VIP Evian.



Les dépenses engagées ne peuvent donc être considérées comme des dépenses de publicité susceptibles d’être déduites de l’assiette des cotisations et contributions sociales.



** Dépenses d’entreprise



La circulaire n° 2003/ 2007 du 7 janvier 2003 définit les frais d’entreprise de la façon suivante :

« L’employeur peut être conduit à rembourser des dépenses engagées par le salarié ou à mettre à sa disposition des biens ou services, sans qu’il s’agisse pour autant d’un élément de rémunération, d’un avantage en nature ou d’une indemnisation de frais professionnels.

Les sommes, biens ou services ainsi attribués correspondent à la prise en charge de frais relevant de l’activité de l’entreprise et non de frais liés à l’exercice normal de la profession du salarié.

Les frais pris en charge à ce titre par l’employeur sont donc exclus de l’assiette des cotisations.





Ces frais correspondent à des charges d’exploitation de l’entreprise et doivent remplir simultanément trois critères :

– Caractère exceptionnel,

– Intérêt de l’entreprise,

– Frais exposés en dehors de l’exercice normal de l’activité du travailleur salarié.

Toutefois, pour constituer des frais d’entreprise, les dépenses engagées par le salarié doivent être justifiées par :

– L’accomplissement des obligations légales ou conventionnelles de l’entreprise,

– La mise en oeuvre des techniques de direction, d’organisation ou de gestion de l’entreprise,

– Le développement de la politique commerciale de l’entreprise. »

Sont considérés comme des frais d’entreprise :

‘ « (…)

‘ l’avantage procuré au salarié eu égard à sa participation à des manifestations organisées dans le cadre de la politique commerciale de l’entreprise (réception, cocktails, etc.) alors que l’exercice normal de sa profession ne le prévoit pas ;

(…) »

La circulaire précise que :

« Les conditions d’exclusion de l’assiette des frais d’entreprise varient en fonction de la nature de ces derniers et doivent donner lieu à la production de justificatifs et notamment :

‘ pour les frais d’achat de matériel et de cadeaux, les dépenses réellement engagées par le salarié sont considérées comme frais d’entreprise. Les factures constituent la justification des dépenses ;

‘ pour les frais de repas d’affaires, l’employeur doit produire les pièces comptables attestant la réalité du repas d’affaires, de la qualité des personnes y ayant participé et du montant de la dépense ;

(…) ».



La SAS [I] [U] soutient qu’il s’est agi ici d’une dépense exceptionnelle – bien que récurrente puisqu’engagée tous les ans pendant 3 années consécutives – , engagée dans l’intérêt de l’entreprise – bien que son caractère promotionnel ne soit pas démontré -, et que les frais ont été engagés en dehors de l’activité normale de ses salariés dans le cadre du développement de sa politique commerciale.



Elle produit deux listes d’invités à l’Evian Championship, l’une non datée et donc non exploitable, l’autre concernant « Evian 2016 » comportant les prénoms [L] ([I] ‘), [W] ([Z] ‘) et [D] (‘) susceptibles d’être son directeur général et deux de ses salariés, comme l’admet l’URSSAF, ainsi que les noms et prénoms ou raison sociale de personnes susceptibles d’être des clients invités, et une facture du 30 juin 2017 émise par la SAS [13] ([18]) à l’ordre de [M] [I] [L] [I] d’un montant de 13 800 € TTC (17 500 € sous déduction d’un « échange » d’un montant de 6 000 € soit 11 500 € + 2 300 € de TVA) pour la mise à disposition dune demi-loge privative du jeudi 14 au dimanche 17 septembre 2017.



La cour considère, compte-tenu de l’indication pour l’avenir contenue dans la lettre d’observations (‘Il conviendra à l’avenir de mettre en place des fichiers détaillant la participation au tournoi avec le nom, la qualité des bénéficiaires et le nom de la société qu’il représente ainsi que le SIRET de cette dernière, à l’appui d’une liste d’émargement.’) qui ne fait que rappeler la règle contenue dans la circulaire, que la société rapporte suffisamment la preuve de l’exposition de frais d’entreprise pour l’année 2016, à l’exclusion de l’année 2015 et de l’année 2017 pour lesquelles aucune liste de participants ou invités n’est produite.



Le redressement de ce chef sera en conséquence partiellement annulé, par retranchement de la somme réclamée au titre de l’année 2016 soit 5 686 €.



La SAS [I] [U] qui succombe partiellement devra supporter les dépens de l’entière instance.

Il parait équitable de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles d’appel.














Dispositif

PAR CES MOTIFS





La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi,



Confirme le jugement sauf en ce qui concerne les points de redressement n° 7 et 10,



Statuant à nouveau de ces chefs,



Annule partiellement le chef de redressement n°7 Frais professionnels non justifiés : compte 625130 Voyages&déplacements [L] [I] : 12 763 € en ce qui concerne les frais exposés pour la participation de salariés à la formation [5] du 10 au 12 février 2016 pour un montant de 1 086,40 €,



Annule partiellement le chef de redressement n°11.Avantages non soumis à cotisation : 16 821 € en ce qui concerne la mise à disposition en 2016 de plusieurs salariés et invités de la société [I] [U] d’une demi-loge privative sur le parcours du golf d’Evian à l’occasion de la manifestation ‘The Evian Championship’ pour un montant de 5 686 €,



Ordonne les dégrèvements correspondant,



Y ajoutant,



Condamne la SAS [I] [U] aux dépens d’appel,



Déboute la SAS [I] [U] et l’URSSAF Rhône-Alpes de leurs demandes par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour leurs frais irrépétibles d’appel.



Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.



Signé par M. DELAVENAY, président et par M. OEUVRAY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





Le greffier Le président


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