Dépendance économique : 28 novembre 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 16-87.026

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Dépendance économique : 28 novembre 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 16-87.026

N° Z 16-87.026 F-D

N° 2846

AB8
28 NOVEMBRE 2017

CASSATION PARTIELLE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

– M. Yannick F… ,
– La société RPO carrelage, devenue Sud Rajoles,

contre l’arrêt de la cour d’appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 8 novembre 2016, qui, pour travail dissimulé, prêt illicite de main-d’oeuvre et marchandage, a condamné, le premier, à dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis, à 20 000 euros d’amende et à cinq ans d’interdiction de gérer, la seconde à 10 000 euros d’amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 17 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. X…, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;

Sur le rapport de M. le conseiller X…, les observations de la société civile professionnelle ROCHETEAU et UZAN-SARANO, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l’avocat général référendaire Y… ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I- Sur le pourvoi formé par la société RPO carrelage :

Attendu qu’aucun moyen n’est produit ;

II- Sur le pourvoi formé par M. Yannick F… :

Vu le mémoire produit ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure qu’à la suite de dénonciations par des ouvriers de nationalité roumaine, l’enquête diligentée a mis en évidence des faits qualifiés de travail dissimulé, de prêt illicite de main-d’oeuvre et de marchandage imputés à M. Yannick F… réalisés dans l’exercice de plusieurs entreprises contrôlées par ce dernier : la société MAGE, mise en redressement judiciaire le 21 novembre 2012, dont le prévenu était le gérant de droit, les sociétés RPO Carrelage et Roys, dont il assurait la gestion de fait, ainsi qu’une entreprise en nom propre de l’intéressé, toutes ces sociétés ayant fonctionné sous l’égide du GIE ABS présidé par le prévenu ; que les investigations ont établi qu’à la demande de ce dernier, des ouvriers de nationalité roumaine, employés en cette seule qualité, avaient été désignés comme co-gérants de la société RPO Carrelage, alors que les gérants de droit successifs de la société ROYS n’étaient intervenus qu’à titre de prête-nom ; que le prévenu, assurant la direction, de droit ou de fait, de la totalité de ces entités et ayant eu recours à un système de sous-traitance fictive, a été poursuivi,en sa qualité d’employeur et de gérant de fait de la société RPO Carrelage, des chefs de travail dissimulé résultant de l’absence de déclaration nominative préalable à l’embauche de quinze ressortissants roumains et de défaut de remise de leurs bulletins de salaire, en ayant donné à ces derniers, à leur insu, la qualité abusive de co-gérant de ladite société, afin d’éluder le paiement de cotisations sociales, ainsi que de prêt illicite de main d’oeuvre, en mettant le personnel de la société RPO. Carrelage, à la disposition de la société MAGE pour la réalisation de chantiers et de marchandage, dès lors que ces derniers agissements ont eu pour effet de causer un préjudice à ces travailleurs ; que le tribunal correctionnel a déclaré M. F… coupable des délits susvisés ; que le prévenu a relevé appel de cette décision, de même que le procureur de la République ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 8221-1, L. 8221-5, L. 8221-6, L. 8241-1, L. 8231-1, L. 8241-1 et L. 8241-2 du code du travail, 121-3 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. F… coupable d’exécution de travail dissimulé, de fourniture illégale de main d’oeuvre a but lucratif et de prêt de main d’oeuvre à but lucratif et, en répression, l’a condamné à la peine de dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis, à une amende de 20 000 euros et, à titre de peine complémentaire, à l’interdiction d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de cinq ans ;

« aux motifs que sur les sous-traitances fictives : qu’il résulte des éléments qui sont au dossier et de l’argumentation développée par les prévenus que la société Mage, donneur d’ordre, a sous-traité aux entreprises prestataires RPO Carrelage et Roys, l’exécution des marchés qu’elle a obtenus à compter du début de l’année 2013 alors qu’elle avait été placée en redressement judiciaire le 21 novembre 2012 et licencié tous ses salariés ; que pour qu’il y ait une véritable sous-traitance, il faut que soient réunies certaines conditions, le sous-traitant doit accomplir une tache spécifique et bien définie, fournir les matériaux nécessaires au travail, posséder le matériel nécessaire à l’exécution du travail, diriger lui-même son personnel, avoir sa propre clientèle et recevoir en paiement de sa prestation une rémunération librement négociée avec le donneur d’ordre ; qu’en l’espèce, les enquêteurs ont pu constater sur les chantiers contrôlés qu’il n’y avait pas de réelle autonomie des deux structures RPO Carrelage et Roys avec le donneur d’ordre, qu’elles n’étaient pas bien différenciées entre elles non plus : que les salariés des deux sociétés occupaient indifféremment des travaux de maçonnerie et de carrelage, qu’ils exécutaient les instructions données par les deux conducteurs de travaux de la SARL Roys, chargée de la coordination des chantiers selon l’organigramme des relations entre les sociétés composant le GIE, en la personne de MM. Z… et A… dans le respect des ordres donnés par M. F… ; que les salariés des deux entreprises ne pouvaient pas être différenciés, qu’ils avaient le même lieu de travail, qu’ils portaient la même tenue avec le nom ABS, qu’ils étaient soumis aux mêmes horaires de travail définis par la societe Mage ; que les papiers en-tête des différentes structures portaient le nom d’<< ABS >> et les véhicules utilisés sur l’ensemble des chantiers des deux entreprises prestataires étaient des véhicules ABS ; qu’en outre, MM. Illana B…, C…, G… et A…, salariés de la SARL Roys mentionnaient avoir été embauchés par M. F… lequel avait procédé à leur entretien d’embauche et leur avait fait signer leurs contrats de travail alors qu’il n’était pas le gérant de droit ; que de même pour la société RPO Carrelage, c’est encore M. F… qui avait demandé aux dirigeants de droit de faire venir des ressortissants roumains pour qu’ils travaillent sur des chantiers exécutés par cette entreprise pour la société Mage titulaires des marches de travaux ; que ces ressortissants roumains qui ne connaissent pas la langue francaise étaient trompés par les documents qu’il leur était demandé de signer redigés le plus souvent en langue francaise ; qu’il est versé aux débats des procès-verbaux d’assemblée générale de nomination en qualité de gérant de plusieurs roumains ; que ces pièces rédigées soit en roumain soit en français avec un nombre de co-gérants, présents ne correspondant pas le plus souvent aux nombres de signataires, ne sont pas de nature a établir la connaissance des intéressés du rôle de co-gérant qu’il leur était demandé de remplir aux lieu et place d’une activité salariée qui correspondait en réalité à leur travail de manoeuvre, sans connaissance particulière pour la gestion des entreprises ; que de surcroît, ainsi que l’ont souligné les clients, les factures de travaux étaient au nom de la société Mage mais le règlement par chèque était effectué au profit des sociétés Roys ou RPO Carrelage ; qu’ainsi, ces deux sociétés prestataires n’exerçaient pas à l’égard de leur personnel une réelle autorité directe et complète ; qu’au contraire, il existait pendant la période visée par la prévention un lien de subordination direct entre le donneur d’ordre, à savoir l’entreprise Mage et son représentant légal M. F… d’une part et d’autre part, les salariés des entreprises RPO Carrelage et Roys mis à sa disposition ; que cette situation s’analyse en une fausse sous-traitance dans les relations unissant la société Mage et les sociétés RPO Carrelage et Roys, M. F… étant en réalité le gérant de fait et l’employeur des co-gérants roumains de RPO Carrelage et des salariés de la SARL Roys ; sur l’infraction de travail dissimulé : que le délit de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié est constitué lorsque l’employeur ne déclare pas intentionnellement ses salariés, ou bien ne leur remet pas de bulletins de salaire ou appose sur ces documents des données erronées ; qu’en l’espèce, la situation de fausse sous-traitance ayant été mise en place dans les relations unissant l’entreprise Mage avec les sociétés RPO Carrelage et Roys, a eu pour objet de masquer la relation de travail ayant existé en réalité entre le donneur d’ordre et les personnes travaillant dans les entreprises prestataires : que M. F… était le gérant de fait de la société RPO Carrelage et le réel employeur des 15 co-gérants de droit qui étaient dans un lien de subordination directe à lui ; que la qualité abusive de co-gérant a dissimulé pour ces personnes leur emploi effectif de manoeuvres, ce qui a permis d’éluder l’application des dispositions du code du travail qui devaient leur être appliquées ainsi que le paiement des cotisations sociales et fiscales ; sur l’infraction de prêt illicite de main d’oeuvre : que le prêt illicite de main d’oeuvre est defini comme toute opération à but lucratif de prêt de salariés effectué par une entreprise qui met à disposition du personnel à une entreprise utilisatrice en dehors des règles du travail temporaire ; qu’ainsi est illicite le fait de mettre à disposition exclusive sous forme de location rémunérée, du personnel salarie sous couvert d’une opération de sous-traitance ; que le but lucratif se caracterise soit par le fait que l’utilisateur n’a pas à supporter les charges sociales et financières qu’il aurait supportées s’il avait employé ses propres salariés, soit parce que cette opération a donné lieu au versement d’une rémunération ; que seules les opérations à but non lucratif sont autorisées par la réglementation sous réserve de respecter certaines conditions visées par l’article L. 8241-2 du code du travail (convention de mise a disposition signée entre l’entreprise préteur et l’entreprise utilisatrice, accord du salarié concerné, avenant au contrat de travail signé par le salarié) ; que l’enquête a permis d’établir une mise à disposition de salariés à la societe Mage par les entreprises RPO Carrelage et Roys, laquelle ne remplit pas les conditions de l’article L. 8241-2 du code du travail ; qu’en effet, il y a eu une mise à disposition exclusive du personnel avec un encadrement des salariés de RPO Carrelage par les chefs de chantier de la SARL Roys (et non par ceux de la societe RPO) et les consignes ont été données par le donneur d’ordre l’EURL Mage en la personne de M. F… ; que les salariés des sociétés RPO et Roys avaient les mêmes horaires que ceux donnés par la société Mage ; que les tâches de sous-traitants n’étaient pas spécifiques, avec une absence de technicité des salariés prêtés qui étaient manoeuvres et une activite qui était identique à celle du donneur d’ordre, notamment la maçonnerie ; qu’en outre, il n’y avait pas de local spécifique pour les sous-traitants, les différentes sociétés étant installées dans le même immeuble ; que la société RPO Carrelage avait son siège social et son bureau à la même adresse que la SARL Mage où il y avait une boîte aux lettres en guise de siège social de la SARL Roys ; que le secrétaire de RPO Carrelage travaillait dans le même immeuble que le donneur d’ordre ; que les choix techniques et modes opératoires ainsi que les plannings ont été définis par le donneur d’ordre, les sous-traitants ne faisant que les exécuter ; que s’agissant de la fourniture du matériel et des matériaux, les salariés de RPO Carrelage et Roys n’apportaient que du petit matériel ; que les engins, les véhicules, les matériaux et le gros matériel étaient fournis et factures par le GIE ABS ; que cette mise à disposition de faux co-gérants a permis a la société Mage, bénéficiaire de la prestation, de faire l’économie des charges sociales et financières qu’elle aurait du supporter si elle avait du employer ces personnes dans le cadre d’un contrat de travail, étant ici rappelé que la société Mage était en redressement judiciaire et avait licencié tous ses salariés pour recourir ensuite exclusivement à la sous-traitance pour l’activité d’entreprise du bâtiment visée par la présente procédure ; que quant aux prestataires de service, les sociétés Roys et RPO Carrelage, le but lucratif est caractérisé par la facturation de la prestation à titre onéreux ; que les prestataires ont ainsi fait l’économie des frais liés à la recherche des chantiers et à la constitution des dossiers administratifs pour répondre aux appels d’offre dont la société Mage se chargeait, et ont aussi évite le coût des véhicules et du gros matériel qui ont été fournis par la société Mage ; que les entreprises prestataires n’ont fourni que la main d’oeuvre ; que ce faisant, elles ne justifient pas d’une clientèle propre, ni d’une indépendance économique et technique a l’égard de leur donneur d’ordre ; que M. F… a eu la volonté délibérée de faire appel, au moyen d’un montage juridique, à la sous-traitance de la société RPO Carrelage et de la société Roys dont il était le gérant de fait, en vue de s’affranchir des obligations fiscales et sociales en matière d’emploi direct de salariés ; que sur l’infraction de marchandage : que le marchandage se définit comme toute opération à but lucratif de fourniture de main-d’oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder l’application de dispositions légales ou de stipulations d’une convention ou d’un accord collectif de travail ; qu’en l’espèce, la société Mage en redressement judiciaire a réalisé des gains en termes de frais de gestion, notamment ceux liés au recrutement du personnel avec l’obtention de la nécessaire autorisation de travail pour les salariés étrangers, ceux nécessités par le suivi des contrats de travail des salariés et accessoires tels que prévus par la convention collective du bâtiment, et aussi pour les procédures de licenciement ; que cela lui a permis aussi de limiter le coût d’adhésion a un service de santé au travail et à la caisse nationale des congés payés du bâtiment ; qu’en outre, les salariés ont perçu selon la qualité de leur travail entre 1 000 et 1 200 euros nets par mois pour environ 40 à 45 heures de travail par semaine du lundi au vendredi soir soit un taux horaire de 5,12 euros à 6,92 euros nets selon le cas ; que certains ont déclaré avoir travaillé 70 heures par semaine, d’autres avoir travaillé le samedi matin en compensation de l’utilisation des véhicules à titre personnel pendant le week-end ou encore du logement qui leur a été fourni ; que la rémunération versée a été ainsi inférieure au SMIC horaire qui était en janvier 2013 de 9,43 euros bruts et de 7,38 euros nets, soit 1 119,30 euros nets mensuels sur une base de 35 heures hebdomadaires avec une majoration de 25% au-delà soit 9,22 euros nets, et à partir de la 44 ème heure une majoration de 50%, soit 11,07 euros nets de l’heure ; qu’il y a donc eu un manque à gagner pour les salariés qui n’ont notamment pas perçu la rémunération de base sur la base du SMIC pas plus que les majorations qui étaient dues au titre des heures supplémentaires qu’ils ont accomplies ; qu’ils n’ont pas non plus reçu de bulletins de salaire ni cotisé pour leur retraite ; qu’il apparaît ainsi que dans le but de faire des économies, les dispositions protectrices du droit du travail ont été éludées au préjudice des intéressés, de sorte que le délit de marchandage est constitué ;

« et aux motifs que sur la culpabilité de M. F… : qu’il résulte des éléments réunis lors de l’enquête et des débats à l’audience que M. F… , qui a été cité en sa qualité de gérant de fait de la société RPO Carrelage dans la convocation par officier de police judiciaire, en date du 15 juillet 2014, est à l’origine de la conception et de la réalisation du montage sous la forme du GIE ABS pour continuer une activité sans salariés à la suite de l’ouverture du redressement judiciaire le 21 novembre 2012 au profit de la SARL Mage ; qu’en sa qualité de gérant de fait des sociétés RPO Carrelage devenue Sud Rajoles et de la société Roys aujourd’hui en liquidation judiciaire, il a organisé un système caractérisant un travail dissimulé par dissimulation de salariés, en donnant à des manoeuvres roumains la fausse qualité de co-gérants de la SARL RPO Carrelage avec mise en place d’une fausse sous-traitance pour éluder notamment le paiement des cotisations sociales et la déclaration nominative préalable à leur embauche ainsi que la remise des bulletins de salaire ; qu’il s’est comporté comme le veritable employeur en donnant les instructions à MM. D… et E…, les associés majoritaires et gérants de droit pour l’embauche de manoeuvres roumains sous couvert d’un faux statut de co-gérant ; que c’est aussi lui qui a donné les directives aux chefs de chantiers de la société Roys encadrant les salariés pour l’exécution des travaux ; que c’est également M. F… qui a, en sa double qualité de dirigeant de fait de la société RPO Carrelage et de dirigeant de droit de la société Mage, fixé les règles et conditions de travail dans la société RPO Carrelage, l’entreprise qui a été celle des deux qui a effectivement réalisé les travaux de maçonnerie et de carrelage en exécution des chantiers obtenus par M. F… ; qu’il a trouvé avantage à cette mise à disposition de main d’oeuvre à but lucratif en mettant ces faux co-gérants à la disposition de la société Mage pour la réalisation des chantiers qu’elle avait obtenus et qui ont été payés à elle ou encore pour certains d’entre eux en partie en espèces directement à M. F… ; que cette pratique a causé un préjudice aux salariés qui n’ont pas perçu un salaire conforme au SMIC, n’ont pas eu paiement des heures supplémentaires, ni n’ont bénéficié des règles protectrices de la réglementation du travail ; que c’est donc par une juste appréciation des faits et circonstances de la cause que les premiers juges ont à bon droit retenu le prévenu dans les liens de la prévention ; qu’en conséquence, le jugement est confirmé sur la déclaration de culpabilité de M. F… pour l’ensemble des faits qui lui sont reprochés dans la citation par officier de police judiciaire, en date du 15 juillet 2014 ;

« 1°) alors que le fait que des sociétés membres d’un GIE mettent en avant, dans un but commercial, le sigle du GIE afin de montrer qu’elles constituent une entité importante et ainsi pouvoir remporter des marchés n’est pas de nature à caractériser le caractère fictif des contrats de sous-traitance qu’elles ont conclus entre elles ; qu’en l’espèce, pour conclure que les contrats de sous-traitance passés entre la société Mage et les sociétés RPO Carrelage et Roys étaient fictifs, la cour d’appel a relevé qu’il existait une confusion entre ces sociétés dans la mesure où leurs salariés ne pouvaient pas être différenciés, qu’ils avaient le même lieu de travail, qu’ils portaient la même tenue avec le nom ABS, que les papiers en-tête des différentes structures portaient le nom d’<< ABS >>, que les véhicules utilisés sur l’ensemble des chantiers des entreprises prestataires étaient des véhicules ABS et que les différentes sociétés avaient leur siège social à la même adresse ; qu’en statuant ainsi quand ces motifs, qui démontraient seulement que les trois sociétés appartenaient à un même GIE, étaient impropres à caractériser le caractère fictif des contrats de sous-traitance conclus entre elles, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

« 2°) alors que la contradiction de motif équivaut à une absence de motivation ; qu’en l’espèce, pour juger que les contrats de sous-traitance conclus entre la société Mage et la société RPO Carrelage étaient fictifs, la cour d’appel a affirmé que la société RPO Carrelage n’avait pas de clientèle propre, ni de dépendance économique à l’égard de son donneur d’ordre, la société Mage ; qu’elle avait pourtant préalablement relevé que la société Mage << représentait plus de 50% des encaissements client de la société RPO Carrelage >>, ce dont il s’évinçait que la moitié restante provenait d’autres clients que la société Mage et que la société RPO Carrelage avait donc bien une clientèle propre et une indépendance économique ; qu’en l’état de ces motifs contradictoires, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvises ;

« 3°) alors que la sous-traitance n’est pas exclusive d’un pouvoir de contrôle du donneur d’ordre sur le sous-traitant ; que les juges du fond ne peuvent donc se contenter de relever que le donneur d’ordre donne des ordres et des instructions au sous-traitant pour requalifier le contrat de sous-traitance en contrat de travail ; qu’en l’espèce, pour conclure à l’existence d’un contrat de travail entre le donneur d’ordre et la main d’oeuvre mis à disposition par les sous-traitants, la cour d’appel a relevé que si les instructions étaient données aux ouvriers par les deux conducteurs de travaux de la société Roys c’était << dans le respect des ordres donnés par M. F... >> et que les horaires de travail étaient définis par la société Mage ; qu’en se fondant sur de tels motifs qui ne suffisaient pas à caractériser un pouvoir de contrôle du donneur d’ordre excédant celui inhérent à un contrat de sous-traitance exercé qui plus est au sein d’un GIE, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;

« 4°) alors qu’en tout état de cause le but lucratif de l’opération de prêt de main d’oeuvre conclue entre des entreprises liées par des intérêts communs n’est caractérisé pour le prêteur de main d’oeuvre que s’il en tire un bénéfice, un profit ou un gain pécuniaire ; que la facturation de l’opération à l’entreprise utilisatrice ne suffit pas à caractériser un tel but lucratif ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a retenu que pour les sociétés Roys et RPO Carrelage, le but lucratif de l’opération de mise à disposition de main d’oeuvre était caractérisé par la facturation de la prestation à titre onéreux ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel, qui n’a caractérisé un bénéfice, un profit ou un gain qu’auraient retiré de l’opération les sociétés prêteuses, a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

« 5°) alors que le but lucratif de l’opération de prêt de main d’oeuvre conclue entre des entreprises liées par des intérêts communs n’est caractérisé pour le prêteur de main d’oeuvre que s’il en tire un bénéfice, un profit ou un gain pécuniaire ; qu’en l’espèce, pour juger que l’opération avait été à but lucratif, la cour d’appel a aussi retenu que les sociétés Roys et RPO Carrelage avaient ainsi fait l’économie des frais liés à la recherche des chantiers et à la constitution des dossiers administratifs pour répondre aux appels d’offre, dont la société Mage se chargeait, et avaient également évité le coût des véhicules et du gros matériel qui avaient été fournis par la société Mage ; qu’en statuant ainsi quand cette économie, qui n’était que la conséquence du fait que les sociétés Roys et RPO Carrelage appartenaient au même GIE que la société Mage, ne caractérisait pas un bénéfice, un profit ou un gain qu’auraient retiré de l’opération les sociétés prêteuses, la cour d’appel a encore privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

« 6°) alors en tout état de cause qu’il n’y a point de délit sans intention de le commettre ; qu’il ne peut être déduit une intention coupable au sens de l’article 121-3 du code pénal de la violation d’une prescription légale que si cette violation a été faite en connaissance de cause ; qu’en déclarant M. F… coupable des délits de travail dissimulé, prêt de main d’oeuvre illicite et marchandage pour avoir été à l’origine de la conception et de la réalisation du montage du GIE sans rechercher s’il ne l’avait pas créé en juin 2013 en toute transparence, au vu et au su du tribunal de commerce et de l’administrateur judiciaire et si ce n’est pas précisément parce que ce GIE était de nature à permettre à la société Mage, qui n’avait plus de salariés, de pouvoir continuer à exercer son activité que le tribunal de commerce avait autorisé un plan de continuation en novembre 2013, ce dont il s’évinçait qu’en créant ce GIE le prévenu n’avait pas eu conscience de violer une prescription légale, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

« 7°) alors qu’une personne ne peut être qualifiée de dirigeant de fait que si elle a accompli en toute indépendance et souveraineté des actes positifs de gestion et de direction dans une entreprise dont elle n’était pas dirigeant de droit ; que l’administrateur d’un GIE ne peut être qualifié de gérant de fait d’une société membre du GIE que pour des actes qui excèdent ses prérogatives d’administrateur ; qu’en l’espèce, après avoir relevé que les salariés des sociétés RPO Carrelage et Roys exécutaient les instructions données par les conducteurs de travaux de la société Roys << dans le respect des ordres donnés par M. F... >>, que ce dernier avait embauché les salariés de la société Roys et qu’il avait demandé aux dirigeants de droit de la société RPO Carrelage de faire venir des ressortissants roumains sur les chantiers, la cour d’appel en a déduit que M. F… était le gérant de fait des sociétés RPO Carrelage et Roys ; qu’en statuant ainsi sans rechercher si ces actes ne relevaient pas des prérogatives de M. F… en sa qualité d’administrateur du GIE ABS qui impliquait qu’il assure la coordination des chantiers remportés par le GIE, la cour d’appel a encore privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés » ;

 


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