Dépendance économique : 27 septembre 2017 Cour d’appel de Paris RG n° 16/05050

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Dépendance économique : 27 septembre 2017 Cour d’appel de Paris RG n° 16/05050

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 4

ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2017

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/05050

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Février 2016 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 14/013953

APPELANT

Maître [T] [V],

ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la SA M.G.E.

Demeurant [Adresse 1]

[Localité 1]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représenté par Maître [A] [N], avocat au barreau de PARIS, toque : B0753

Ayant pour avocat plaidant Maître Rita BODE avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMÉE

SAS FAURECIA AUTOMOTIVE INDUSTRIE

Ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 3]

N° SIRET : 915 722 011 (NANTERRE)

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Frédéric DEREUX de l’AARPI GOWLING WLG (France) AARPI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0127

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 21 Juin 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Irène LUC, Présidente de chambre

Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère

Monsieur François THOMAS, Conseiller, rédacteur

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur François THOMAS dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Monsieur Vincent BRÉANT

ARRÊT :

– contradictoire,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Irène LUC, Présidente et par Madame Cécile PENG, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS

La société MGE est spécialisée dans la fabrication et la conception d’outillages pour pièces équipant l’intérieur de véhicules automobiles.

La société Faurecia Automotive Industries (ci-après, la société Faurecia) est spécialisée dans le développement, la fabrication et la commercialisation de composants, ensembles, sous ensembles, destinés à l’équipement intérieur de véhicules automobiles.

La société MGE indique avoir entretenu des relations commerciales avec la société Faurecia qui consistaient en la fourniture de pièces nécessaires à l’exécution des marchés confiés.

En 2010, la société MGE a connu des difficultés financières et estimé qu’elles étaient imputables à la société Faurecia, à laquelle elle a demandé réparation de son préjudice et qu’elle prenne des engagements de commandes afin de lui venir en aide.

Aucun accord n’a été trouvé entre la société Faurecia et la société MGE.

La société MGE a fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire du 13 septembre 2010, puis de liquidation judiciaire du 12 décembre 2010, et Maître [T] [V] est intervenue en qualité de mandataire judiciaire de la société MGE.

Par acte du 17 juin 2013, Maître [V], reprochant à la société Faurecia une rupture brutale des relations commerciales établies, l’a assignée devant le tribunal de grande instance de Strasbourg, lequel s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris par ordonnance du 3 février 2014.

Par jugement du 8 février 2016, le tribunal de commerce de Paris :

– a dit que Maître [T] [V], ès-qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société MGE, ne rapporte pas la preuve de l’existence d’une relation commerciale établie,

– l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes indemnitaires,

– l’a condamnée à payer à la société Faurecia la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– a débouté les parties de leurs demandes autres plus amples ou contraires,

– a condamné Maître [T] [V], ès-qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société MGE, aux dépens de la présente instance, dont ceux à recouvrer par greffe, liquidés à la somme de 82,44 euros dont 13,52 euros de TVA.

La cour est saisie de l’appel interjeté par Maître [T] [V], ès-qualités, du jugement du tribunal de commerce de Paris du 8 février 2016.

Par conclusions du 24 mai 2017, Maître [T] [V], ès-qualités de mandataire judiciaire liquidateur, demande à la cour de :

– déclarer l’appel recevable et bien fondé,

– infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 8 février 2016,

statuant à nouveau,

Vu l’article L.442-6, I, 5° du code de commerce,

– dire et juger que la société Faurecia Automotive Industrie a rompu brutalement les relations commerciales établies avec la société M.G.E,

– condamner la société Faurecia Automotive Industrie à réparer les conséquences préjudiciables de la rupture des relations commerciales établies,

– condamner la société Faurecia Automotive Industrie à payer à Maître [T] [V] ès-qualités de mandataire liquidateur de la société M.G.E, un montant de 1.721.830 euros et subsidiairement de 1.100.000 euros à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,

– condamner la société Faurecia Automotive Industrie aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction en ce qui concerne les dépens d’appel au profit de Maître [A] [N], ainsi qu’à un montant de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les 2 instances.

Par conclusions du 2 juin 2017, la société Faurecia Automotive Industrie demande à la cour de :

Vu l’article L.442-6, I, 5° du code de commerce,

à titre principal,

– constater que la relation entre Faurecia et MGE ne présente pas les caractéristiques d’une relation commerciale établie au sens de l’article L.442-6 I 5° du code de commerce,

– constater qu’aucune rupture brutale imputable à Faurecia n’est caractérisée,

en conséquence,

– confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

à titre subsidiaire,

– constater que MGE ne justifie d’un préjudice indemnisable,

en conséquence,

– débouter la demanderesse de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

à titre infiniment subsidiaire,

– déterminer la durée de la relation entre Faurecia et MGE,

– déterminer le préavis applicable à la relation litigieuse,

en conséquence,

– limiter la condamnation de Faurecia au montant correspondant à son réel préjudice sur la période de préavis déterminée,

en tout état de cause,

– condamner Maître [L] ès-qualités de liquidateur de la société MGE au paiement de la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

MOTIVATION

Sur la rupture des relations commerciales établies

Sur l’éventuelle existence de relations commerciales établies

Maître [C] [V] soutient que les relations commerciales qui liaient la société MGE -qui a succédé aux sociétés RUDLOFF puis SOMMER-ALLIBERT- et la société Faurecia existaient depuis 1970, l’intimée indiquant dans le protocole conventionnel qu’elle a rédigé que MGE était un ‘fournisseur historique’, et le bilan économique et social de l’administrateur judiciaire rappelant l’historique des relations entre les deux sociétés depuis les années 1970.

Elle précise que ses propres archives comportent des commandes datant d’au moins 1979, que les relations commerciales étaient stables dans la mesure où la société MGE a produit des tableaux d’évolution du chiffre d’affaires depuis 1981 démontrant la régularité des relations commerciales. Elle ajoute qu’est révélée la part prépondérante du chiffre d’affaires réalisé avec la société Faurecia qui pouvait représenter jusqu’à 90% de son chiffre d’affaires total, ce qui démontre son état de dépendance économique à l’égard de la société Faurecia. Selon elle, la société Faurecia ne peut contester que les relations ont été rompues de son fait à partir de 2006.

Elle ajoute que la société Faurecia ne démontre pas avoir eu recours à une procédure par appels d’offres, ni même mise en concurrence, et qu’elle ne saurait contester la rupture en 2006 des relations commerciales et l’obligation de respecter un préavis lors de la rupture de ces relations. Elle souligne qu’au vu de l’ancienneté des relations, elle était fondée à croire en leur poursuite.

La société Faurecia soutient que les relations commerciales en cause ne présentent pas les caractéristiques d’une relation commerciale établie au sens de l’article L442-6, I, 5ème du code de commerce et sollicite la confirmation du jugement.

Elle conteste le fait selon lequel les sociétés auraient été en relation depuis 1970 dans la mesure où les relations entretenues entre la société MGE et les sociétés Sommer-Allibert ne portaient pas sur le même courant d’affaires que les relations entre la société MGE et la société Faurecia de sorte que la reprise d’ancienneté de relation n’est pas établie.

Elle soutient que l’appelante ne démontre pas le caractère suivi, stable et habituel de la relation, que les marchés attribués à la société MGE l’ont été par le biais d’une procédure de mise en concurrence, ce qui correspond à un appel d’offres et prive ainsi la relation de stabilité. Elle ajoute que c’est la société MGE qui a pris l’initiative de la rupture, et à toute fin qu’une simple diminution des commandes ne caractérise pas une rupture de relations commerciales, a fortiori une rupture dont la brutalité lui serait imputable.

Enfin, la société Faurecia soutient que la relation était une relation de sous-traitance présentant donc par nature un caractère précaire.

Sur ce

Une relation commerciale entre deux sociétés est établie, au sens de l’article L442-6, I, 5ème du code de commerce, lorsqu’elle présente un caractère stable, suivi et habituel.

En l’occurrence, si le bilan économique social et environnemental de la société MGE établi en novembre 2010 par l’administrateur judiciaire fait état de l’ancienneté et de l’importance des relations commerciales avec la société Faurecia, ce rapport ne saurait justifier en lui-même que ces relations présentent le caractère établi prévu par l’article L442-6, I, 5ème du code de commerce, faute de production de pièces justificatives complémentaires.

De la même façon, l’indication dans un accord transactionnel non signé par aucune des deux sociétés, que la société MGE était un ‘fournisseur historique’ de la société Faurecia ne saurait démontrer l’existence de relations commerciales établies au sens dudit article, pas plus que les tableaux et graphiques versés par l’appelante et dressés par la société MGE elle-même.

C’est à la partie qui revendique une ancienneté de relations commerciales, de la démontrer, et la société MGE ne peut reprocher à la société Faurecia de ne pas produire de pièces relatives à l’historique de leurs relations.

De surcroît il ne ressort pas de la lecture du jugement de 1ère instance que la société MGE ait présenté une sommation de communiquer, et une telle demande est absente du dispositif de ses conclusions récapitulatives d’appel.

En l’occurrence, la société MGE revendique une ancienneté de relation depuis 1970, mais elle produit une pièce 27 démontrant l’existence de relations entre les années 1979 et 1985, et une pièce 28 sur des relations entre 1999 et 2002.

Il n’est pas justifié de l’existence de relations antérieures à 1979, ni entre les années 1985 et 1999, ni après 2002.

Aussi ces pièces 27 et 28 ne démontrent pas une stabilité et une continuité de la relation commerciale entre les deux sociétés, ou celles aux droits desquelles elles viennent, depuis 1970. Elles ne justifient donc pas de l’existence d’une relation établie en 2006, année à laquelle serait intervenue la rupture selon la société MGE.

Aussi, et au seul vu de ce qui précède, le caractère établi de la relation commerciale entre les deux sociétés en 2006, année de la rupture brutale selon l’appelante, n’est pas rapporté, et les conditions d’application de l’article L442-6, I, 5ème ne sont pas réunies.

Le jugement du tribunal de commerce du 8 février 2016 sera ainsi confirmé.

Sur les autres demandes

L’appelante sera condamnée au paiement des dépens.

Elle sera également condamnée au paiement d’une somme supplémentaire de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONFIRME le jugement du 8 janvier 2016 ;

y ajoutant,

CONDAMNE Maître [V] au paiement des dépens ;

CONDAMNE Maître [V] au paiement d’une somme supplémentaire de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le GreffierLa Présidente

Cécile PENG Irène LUC

 


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