Dépendance économique : 26 octobre 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 15-28.700

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Dépendance économique : 26 octobre 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 15-28.700

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 octobre 2017

Rejet non spécialement motivé

M. CHAUVET, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 11090 F

Pourvoi n° F 15-28.700

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par Mme Céline Y…, domiciliée […]                                 ,

contre l’arrêt rendu le 16 octobre 2015 par la cour d’appel de Lyon (chambre sociale B), dans le litige l’opposant à la société Servier France, venant aux droits de la société Ardix médical, société à responsabilité limitée, dont le siège est […]                          ,

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 26 septembre 2017, où étaient présents : M. Chauvet, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Barbé, conseiller référendaire rapporteur, M. Maron, conseiller, Mme Hotte, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de Me Le Prado, avocat de Mme Y…, de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Servier France ;

Sur le rapport de Mme Barbé, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Y… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par Me Le Prado , avocat aux Conseils, pour Mme Y…

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué ;

D’AVOIR débouté la salariée de ses demandes afférentes à un rappel de salaire au titre de la prime d’ancienneté et de congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE « la condition juridique d’un travailleur à l’égard de la personne pour laquelle il travaille n’est pas déterminée par la dépendance économique dudit travailleur et ne peut résulter que du contrat entre les parties ; que la qualité de salariée implique nécessairement l’existence d’un lien juridique de subordination du travailleur à la personne qui l’emploie ; qu’en l’espèce, le fait que Céline Y… ait constamment et exclusivement présenté les produits de la société Ardix dans le cadre du contrat de travail qui l’a liée successivement aux sociétés Danièle G…   et Sofip ne permet pas de présumer l’existence dès 1996 d’un lien juridique de subordination entre la salariée et le client de ses employeurs; que contrairement à ce qu’a jugé le conseil de prud’hommes, l’intimée ne démontre pas qu’elle rendait des comptes aux responsables de la société Ardix avant le 1er octobre 2002 ; qu’en conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a fait remonter l’ancienneté de Céline Y… au 16 septembre 1999 et lui a alloué un rappel de prime d’ancienneté ».

ALORS QUE le lien de subordination qui caractérise l’existence d’un contrat de travail se définit comme l’exécution d’un travail sous l’autorité de l’employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que l’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs ; que pour exclure l’existence d’un contrat de travail entre la société Ardix médical et la salariée entre le 16 septembre 1996 et le 1er octobre 2002, la cour d’appel a affirmé que l’intéressée était liée durant cette période aux sociétés Danielle G… et Sofip par deux contrats de travail successifs et qu’elle ne démontrait pas avoir rendu des comptes à la société Ardix médical avant le 1er octobre 2012; qu’en statuant ainsi sans caractériser l’absence de lien de subordination entre la salariée et la société Ardix médical entre le 16 septembre 1996 et le 1er octobre 2002, lors même que la salariée soulignait dans ses conclusions que son recrutement en 1996 avait été effectué dans les locaux de la société Ardix médical et que ses bulletins de paie visaient le « département Ardix », la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L. 1221-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

D’AVOIR dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et débouté la salariée de ses demandes afférentes à un licenciement abusif ;

AUX MOTIFS QUE « selon l’article L.1332-4 du code du travail, dès lors qu’un fait fautif a été commis plus de deux mois avant l’engagement des poursuites disciplinaires, il appartient à l’employeur de rapporter la preuve de ce qu’il n’en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l’engagement de ces poursuites ; qu’en l’espèce, il résulte de l’attestation de l’assistante du directeur de la visite médicale que celui-ci a été alerté par le directeur régional en mars 2013 et a fait procéder aussitôt à des vérifications; que les docteurs A… et B… ont délivré des attestations respectivement le 19 et le 22 mars 2013 ; que le service administratif du siège a transmis le 28 mars 2013 le résultat du rapprochement des relevés journaliers d’activité et des achats de carburant de Céline Y… ; que les faits reprochés à la salariée ne sont donc pas couverts par la prescription ; qu’il résulte des dispositions combinées des articles L.1232-1, L.1232-6, L.1234-1 et L.1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d’un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l’employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d’une part d’établir l’exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d’autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise pendant la durée limitée du préavis ; qu’en l’espèce, la lettre de licenciement ne vise pas exclusivement la fausse déclaration de visite au docteur F… D… le 15 janvier 2013, ce fait n’étant mentionné qu’à titre d’exemple; que l’utilisation des informations issues de cartes de péage et de relevés de compte carburant ne constitue pas un mode de preuve illicite dans la mesure où la salariée connaissait l’existence de ce dispositif ainsi que de son contenu ; qu’il résulte des pièces et des débats que Céline Y… devait successivement saisir ses visites sur son agenda électronique, transférer au siège un rapport journalier d’activité et établir un rapport hebdomadaire en fin de semaine; que la salariée a saisi sur le logiciel :MEDeSYS une visite au docteur A… le 7 mars 2014; que ce médecin a attesté qu’il était absent de son cabinet du 12 février au 11 mars 2013; que la salariée a mentionné qu’elle avait vu le docteur B… le 13 mars 2013, alors qu’elle avait seulement rencontré son remplaçant le docteur Abdou C…, ce qui modifiait le bénéfice à attendre de la visite; qu’elle a encore indiqué qu’elle avait rendu visite au docteur F… D… le 15 janvier 2013 de 10 heures 30 à 11 heures, ce qui était inconciliable avec son arrêt à 10 heures 50 dans une station-service de Genay; que le docteur F… D… a certifié qu’elle avait reçu Céline Y… vers 9 heures 45 et pendant une vingtaine de minutes; que selon l’article 3 de l’avenant nº2 (Dispositions relatives aux métiers de la promotion) à la convention collective nationale de l’industrie pharmaceutique, justifie un licenciement pour faute grave le fait d’indiquer, comme date de visite, une date autre que celle à laquelle elle a été réellement effectuée, après deux avertissements écrits pour le même objet de la part de l’employeur; que l’absence d’avertissement ne met cependant pas obstacle à ce que ce fait soit retenu comme motif de rupture du contrat de travail lorsqu’il s’ajoute à d’autres faits fautifs; que Céline Y… ne communique aucune donnée technique permettant de remettre en cause la fiabilité du logiciel MEDeSYS; qu’elle a été dans l’incapacité de communiquer l’identité du médecin qu’elle dit avoir rencontré aux lieu et place du docteur A…; que l’insistance de la convention collective nationale de l’industrie pharmaceutique (article 3 de l’avenant nº2) et du contrat de travail de la salariée (artícle 4 c) sur les conséquences du non-respect par celle-ci de ses obligations relatives aux rapports de visite ne lui permettait pas d’ignorer l’importance qui s’attachait à l’exactitude de ses rapports journaliers et hebdomadaires, seule source d’information de la société sur son activité; que la succession des opérations que Céline Y… devait effectuer, de la saisine sur son assistant personnel jusqu’au rapport hebdomadaire, comme autant d’occasions de vérifier l’exactitude des données, exclut que les faits reprochés dans la lettre de licenciement résultent d’erreurs répétées; que le caractère volontaire de ces faits fautifs justifie le licenciement de la salariée et exclut que la rupture ait un autre motif, au sujet duquel l’intimée reste d’ailleurs au stade d’assertions gratuites; que si les conventions et accords collectifs de travail peuvent limiter les possibilités de licenciement de l’employeur à des causes qu’ils déterminent, ils ne peuvent prévoir des cas de résiliation de plein droit du contrat de travail, a fortiori pour faute grave; que la S.A.R.L. Ardix médical ne démontre pas que les faits commis par Céline Y… sur une courte période, à rapporter à l’importance de son ancienneté, rendaient immédiatement impossible son maintien dans l’entreprise et constituaient une faute grave (..) ; qu’il s’en déduit que des tâches administratives étaient nécessairement exécutées au domicile, comme le stockage des matériels professionnels, ce qui justifie d’octroyer à Céline Y… une indemnité de sujétion ; que la cour s’estime suffisamment informée pour fixer à la somme de 100 euros mensuel cette indemnité sur une période de cinq ans, soit la somme totale de 6 000 euros ».

ALORS QUE nul ne peut se constituer une preuve à lui-même et qu’aux termes de l’article L.1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance ; que pour juger que les faits reprochés à la salariée dans la lettre de licenciement du 25 avril 2013 consécutive à une convocation à un entretien préalable du 10 avril 2013 n’étaient pas prescrits, la cour d’appel a énoncé qu’il résultait de l’attestation de l’assistante du directeur de la visite médicale que celui-ci a été alerté des agissements de la salariée par le directeur régional en mars 2013 et qu’il a fait procéder à des vérifications ; qu’en se fondant sur cet unique élément de preuve émanant d’un représentant de la société Ardix médical pour écarter le moyen tiré de la prescription, la cour d’appel a violé l’article 1315 du code civil, ensemble l’article L.1332-4 du code du travail ;

ET ALORS, à titre subsidiaire, QU’une filature organisée par un employeur pour contrôler et surveiller l’activité d’un salarié constitue un mode de preuve illicite dès lors qu’elle implique nécessairement une atteinte à la vie privée de ce dernier, insusceptible d’être justifiée, eu égard à son caractère disproportionné, par les intérêts légitimes de l’employeur; que pour dire que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, la cour d’appel s’est fondée sur des informations obtenues par l’employeur à l’insu de la salariée issues des cartes péage et relevés de compte carburant utilisés par l’intéressée en dehors de son lieu de travail pour ne pas avoir à supporter les frais exposés pour le compte de son employeur; qu’en se fondant sur ces moyens de preuve qui constituaient une véritable filature de la salariée organisée à son insu et qui portaient une atteinte à sa vie privée et liberté disproportionnée, la cour d’appel a violé les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil, 9 du code de procédure civile et L.1121-1 du code du travail.

ALORS, en toute hypothèse et à titre également subsidiaire, QU’un licenciement disciplinaire suppose une faute caractérisée résultant d’une abstention volontaire ou d’une mauvaise volonté délibérée du salarié ; qu’en excluant que les agissements reprochés à la salariée dans la lettre de licenciement, à savoir l’établissement de déclarations de visites médicales inexactes, résultent d’erreurs répétées non fautives, bien qu’elle ait relevé que ces agissements avaient été commis sur une courte période alors que la salariée comptait une grande ancienneté dans l’entreprise, qu’elle n’avait jamais fait l’objet de sanction disciplinaire et qu’elle supportait des conditions de travail difficiles, obligée d’exécuter une part non négligeable de sa prestation de travail à son domicile, ce dont il résultait une absence de comportement volontaire ou de mauvaise foi délibérée, la cour d’appel a violé l’article L.1235-3 du code du travail.

 


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