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Y compris en cas de départ de l’équipe commerciale à la concurrence, le principe est celui de la liberté du commerce, et ne sont sanctionnés au titre de la concurrence déloyale que des comportements fautifs en violation des usages loyaux du commerce.
Le bien-fondé d’une action en concurrence déloyale est subordonné à l’existence de faits fautifs générateurs d’un préjudice, et non à l’existence d’une situation de concurrence directe et effective entre les sociétés considérées.
En cas de comportements fautifs, la société victime pourra être autorisée à procéder à des saisies (par commissaire de justice) de documents chez la concurrence, au moyen d’une ordonnance sur requête rendue par le Président du tribunal de commerce.
Si elle est mal fondée, l’ordonnance pourra toutefois être rétractée par arrêt de la cour d’appel qui ordonnera la restitution, sous astreinte, de l’ensemble des documents saisis ainsi que la remise des procès -verbaux dressés par le commissaire de justice.
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D’APPEL DE PARIS Pôle 5 – Chambre 1 ARRET DU 28 SEPTEMBRE 2022 Numéro d’inscription au répertoire général : 19/22446 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CBEC7 Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Octobre 2019 -Tribunal de Commerce de PARIS – 3ème chambre – RG n° 2016039585 APPELANTE SASU CHARLOTT Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON sous le numéro 399 368 307 Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège [Adresse 9] [Localité 8] Représentée par Me Anne MESSAS de la société TAOMA PARTNERS, avocat au barreau de PARIS, toque P539 Assistée de Me Anne LAPORTE substituant Me Anne MESSAS de la société TAOMA PARTNERS, avocats au barreau de PARIS, toque P539 INTIMEES Madame [C] [W] Exerçant son activité sous la forme d’EIRL Société au capital de 10 000 euros Inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON sous le numéro 343 503 306 [Adresse 2] [Localité 7] Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111 Assistée de Me Jean-Marie PERINETTI de la SELARL JURISQUES, avocat au barreau de LYON, toque T365 SASU [S] FRANCE Société au capital de 500 000 euros Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LILLE METROPOLE sous le numéro 518 797 311 Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège [Adresse 3] [Localité 6] Représentée par Me Emmanuel JARRY de la SELARL RAVET & ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0209 Assistée de Me Benjamin MOUROT de la SCP BIGNON LEBRAY, avocat au barreau de LILLE, toque 158-159 SA [S] [U] Société de droit belge Inscrite au registre des personnes morales du tribunal de commerce de Bruxelles sous le numéro BE 0444.219.715 Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège [Adresse 10] [Adresse 1] Représentée par Me Emmanuel JARRY de la SELARL RAVET & ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0209 Assistée de Me Benjamin MOUROT de la SCP BIGNON LEBRAY, avocat au barreau de LILLE, toque 158-159 SARL IDNESIS Société au capital de 10 000 euros Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de VIENNE sous le numéro 531 002 905 Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège [Adresse 4] le Saxo [Localité 5] Représentée et assistée de Me Aude DUCRET, avocat au barreau de PARIS, toque : K0041 COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 15 Juin 2022, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre, Mme Françoise BARUTEL, conseillère, Mme Deborah BOHEE, conseillère. qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile. Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON ARRET : Contradictoire par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *** Vu le jugement du tribunal de commerce de Paris du 31 octobre 2019, Vu l’appel interjeté à l’encontre dudit jugement le 4 décembre 2019 par la société Charlott’, Vu les dernières conclusions numérotées 6 remises au greffe et notifiées, par voie électronique, le 7 mars 2022 par la société Charlott’, appelante et intimée incidente, Vu les dernières conclusions numérotées 2 remises au greffe et notifiées, par voie électronique, le 3 février 2022 par les sociétés [S] France et [S] [U] (ensemble [S]), intimées et appelantes incidentes, Vu les dernières conclusions numérotées 3 remises au greffe et notifiées, par voie électronique, le 18 mars 2022 par la société Idnesis, intimée, Vu les dernières conclusions numérotées 3 remises au greffe et notifiées, par voie électronique, le 9 mars 2022 par l’EIRL [W] [C], intimée et appelante incidente, Vu l’ordonnance de clôture rendue le 22 mars 2022, SUR CE, LA COUR, Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties. Il sera simplement rappelé que la société Charlott’, créée en 1994, est spécialisée dans la vente en réunion de lingerie fine, à domicile, en France et à l’étranger (Belgique, Allemagne, Luxembourg), par des conseillères et animatrices de ventes qui sont des vendeuses indépendantes. La société [S] [U] est une société de droit belge spécialisée dans la vente en réunion de bijoux. La société [S] France est sa filiale à 100 % et exerce son activité sur le marché français. La SARL Idnesis, est une société qui exerce l’activité d’achat pour la revente à domicile de produits non alimentaires dont la gérante est Mme [Z] [E], laquelle exerçait son activité pour la société Charlott’ par le biais de la SARL Idnesis. Mme [E] a rejoint le poste de formatrice au sein de la société [S] à compter du 3 janvier 2014. La société [W] [C] est une EIRL qui exerce l’activité de vente à domicile de bijoux, de lingerie, de cosmétiques et de produits de la maison. Mme [W] était ‘animatrice secteur’ de la société Charlott’ de janvier 2009 à décembre 2012. Elle est devenue ‘responsable secteur’ de la société [S] à compter de février 2014 et expose qu’elle souhaitait exercer pour les sociétés Charlott’ et [S] parallèlement. Faisant valoir avoir été victime, au cours du second semestre 2012, du départ d’une partie de sa force de vente et notamment de membres occupant des postes clés de son réseau qui seraient partis pour le réseau [S], la société Charlott’ a obtenu sur requête du 17 février 2014 une ordonnance du Président du tribunal de commerce de Lille du 19 février 2014 aux fins de constat, laquelle a été rétractée par arrêt de la cour d’appel de Douai du 9 avril 2015 qui a ordonné la restitution, sous astreinte, de l’ensemble des documents saisis ainsi que la remise des procès -verbaux dressés par l’huissier de justice. C’est dans ces conditions que par actes en date des 17, 24 et 29 juillet 2015 et 4 août 2015, la société Charlott’ a fait assigner devant le tribunal de commerce de Lyon la SAS [S] France, la SA [S] [U], la SARL Idnesis et l’EIRL [W] [C] sur le fondement de la concurrence déloyale et des agissements parasitaires. Par jugement en date du 30 mai 2016, le tribunal de commerce de Lyon a renvoyé la cause devant le tribunal de commerce de Paris. Par décision du 4 octobre 2016, le juge de l’exécution, saisi par la société [S], a condamné la société Charlott’ à lui payer la somme de 15 000 euros à titre d’astreinte provisoire. Par jugement d’incident du 6 novembre 2017, le tribunal de commerce de Paris a débouté la société Charlott’ de sa demande de communication forcée de pièces. Par jugement dont appel, le tribunal de commerce de Paris a statué de la façon suivante: — Dit la SAS Charlott’ irrecevable en ses demandes formulées à l’encontre de la SA [S] [U], — Déboute la SAS Charlott’ de l’ensemble de ses demandes, — Condamne la SAS Charlott’ à payer à la SAS [S] France la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts, — Condamne la SAS Charlott’ à payer à la EIRL [W] [C] les sommes de : *1.262,85 € au titre de sa rémunération de juin 2014, *2.000 € au tire de sa rémunération de juillet 2014, *20.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, — Condamne la SAS Charlott’ à payer à la SAS [S] France la somme de 30.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, — Condamne la SAS Charlott’ à payer à la EIRL [W] [C] la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, — Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement nonobstant appel et sans caution, — Déboute les défenderesses de leurs demandes autres, plus amples ou contraires, — Condamne la SAS Charlott’ aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquides à la somme de 213,04 € dont 35,08 € de TVA. Sur la recevabilité des demandes de la société Charlott’ à l’encontre de la société [S] [U] La société Charlott’ soutient que la société [S] [U] réalise un chiffre d’affaires en France qui est passé de 1.202.460 euros à 4.270.698 euros entre 2013 et 2014, ce qui correspond à des ventes de produits sur le territoire français, outre que la société [S] France indique elle-même se conformer aux directives de la société [S] [U] pour procéder aux formations de ses équipes, ce programme de formation faisant partie des griefs au titre du parasitisme, de sorte qu’elle justifie de son intérêt à agir à l’encontre de la société [S] [U]. Les sociétés [S] font valoir que les sociétés [S] [U] et [S] France ont deux personnalités distinctes, que la seule existence d’une filiation entre deux sociétés est insuffisante pour conférer un intérêt à agir au demandeur contre l’une et l’autre ; que [S] France a bien développé son propre programme de formation adapté à la France même si elle reçoit des consignes de [S] [U]. C’est par de justes motifs approuvés par la cour que le tribunal a retenu que la société [S] [U] a été attraite sur le fondement de la concurrence déloyale et du parasitisme pour des faits allégués de vente directe aux particuliers en France et que la société Charlott’ n’apporte aucune pièce probante permettant de soutenir que la société [S] [U] exerce une telle activité de vente directe en France. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a dit irrecevable la société Charlott’ en ses demandes formées à l’encontre de la société [S] [U]. Sur les actes de concurrence déloyale à l’encontre de la société [S] France La société Charlott’ soutient qu’elle est en situation de concurrence directe avec la société [S] France en ce que les entreprises de sous-vêtements proposent régulièrement à la vente sous la même marque à la fois de la lingerie et des articles de bijouterie qui doivent donc être considérés comme des produits complémentaires ; que dans le domaine de la vente à domicile, c’est le réseau de vendeurs, et non les produits commercialisés, qui détermine la situation de concurrence entre deux entreprises ; qu’en tout état de cause le rapport de concurrence n’est pas une condition de l’action. Elle reproche l’embauche du responsable de la formation M. [R], alors que lorsqu’il a débuté en tant que directeur commercial en janvier 2013 au sein de la société [S] France, il était encore lié à la société Charlott’ par contrat avec une obligation de non-concurrence, d’exclusivité et de discrétion. La société Charlott’ fait aussi grief de l’embauche simultanée par la société [S] France de plusieurs têtes de réseau et de leurs équipes, entraînant la désorganisation et la chute de son chiffre d’affaires. Elle soutient que les conseillères avaient une obligation de l’informer de leur départ chez [S] et que l’absence d’information par les conseillères de vente constitue bien une faute qui démontre une volonté de dissimulation ; que la simultanéité des départs révèle une concertation et/ou une opération de déstabilisation de l’entreprise concurrente. La société Charlott’ ajoute que M. [R] et Mme [E] ont tenu des propos dénigrants sur son activité supposée non rentable, pour débaucher de nouvelles vendeuses pour [S] ; que Mme [W] a adopté une attitude dénigrante en critiquant le concept commercial et marketing de Charlott’ auprès du réseau des vendeuses Charlott’ ; que les intimées se sont livrés à des pratiques agressives pour débaucher les membres du réseau de Charlott’ en exerçant des pressions. Elle soutient que l’ensemble des pièces produites démontre que la prise de contact systématique des conseillères du réseau Charlott’ n’a pu être réalisée qu’au moyen des fichiers de vendeurs et de prospects que cette dernière s’était constituée au fil du temps ; qu’il s’agit donc d’un détournement fautif de fichiers. La société [S] France réplique que les produits vendus par Charlott’ et [S] France ne peuvent être considérés comme des produits concurrents ; qu’elle n’a procédé à aucune man’uvre déloyale dans le recrutement de M. [R] en ce qu’il a été embauché dans le cadre d’un processus de sélection, qu’il a quitté la société Charlott’ dans un contexte contentieux au regard de sa rupture conventionnelle, qu’il n’a jamais travaillé concomitamment pour les deux entreprises, que la clause de non concurrence n’est applicable que pendant la durée du contrat de travail, et qu’elle n’avait pas connaissance qu’il était encore lié à la société Charlott’. Elle ajoute que la société Charlott’ ne justifie pas de désorganisation et que la seule baisse du chiffre d’affaires n’est pas suffisant ; que le statut des VDI rend impossible tout débauchage fautif en ce qu’ils sont par nature indépendants, ne sont pas salariés et donc non soumis à une obligation d’exclusivité ; que l’absence d’information des départs des conseillères ne lui est pas imputable ; que le prétendu « pillage » du réseau de vendeuses n’est pas établi en ce que le recrutement se fait par candidature spontanée en ligne et que les attestations ne sont pas suffisamment probantes ; que les départs des VDI sont isolés et volontaires et que certains départs sont à l’initiative de la société Charlott’ ; et que c’est au contraire le contexte économique et social de Charlott’ qui explique que certains de ces VDI ont sollicité un agrément de [S] France en ce que Charlott’ ne fidélise pas ses VDI et ne leur offre pas de commissions. Elle prétend que les éléments communiqués par la société Charlott’ n’établissent même pas un début de commencement de preuve de dénigrement ni de détournement de fichiers, et que la société [S] n’étant en tout état de cause pas employeur des VDI, elle n’est pas responsable de leur comportement. La cour rappelle que le bien-fondé d’une action en concurrence déloyale est subordonné à l’existence de faits fautifs générateurs d’un préjudice, et non à l’existence d’une situation de concurrence directe et effective entre les sociétés considérées. Il est acquis en outre que le principe est celui de la liberté du commerce, et que ne sont sanctionnés au titre de la concurrence déloyale que des comportements fautifs en violation des usages loyaux du commerce. En l’espèce, les sociétés Charlott’ et [S] France vendent selon un même canal de vente à savoir la vente à domicile, des produits différents (à savoir les sous-vêtements pour Charlott’ et les bijoux pour [S]), de sorte qu’elles ne sont pas directement concurrentes. S’agissant de l’embauche reprochée de M. [R] qui était directeur de formation et animateur du réseau de la société Charlott’, ainsi que l’a retenu le tribunal par des motifs que la cour adopte, il est constant qu’il a quitté la société Charlott’ avec son accord dans le cadre d’une rupture conventionnelle en date du 4 janvier 2013, de sorte que cela n’est pas constitutif de faute, pas plus que le fait qu’il a été embauché par la société [S] le 19 janvier 2013, la société Charlott’ n’apportant pas la preuve que M. [R] n’était pas libre de reprendre une autre activité, outre en tout état de cause que cela ne peut être reproché à la société [S] qui n’en avait pas nécessairement connaissance. Sur les reproches relatifs au départ des conseillères de vente, le tribunal a, à juste titre, rappelé que les vendeurs à domicile indépendants « VDI » peuvent travailler pour plusieurs réseaux à la fois en fonction du temps de travail qu’ils souhaitent effectuer, et que tout VDI signataire d’un contrat d’agrément avec la société Charlott’ est donc libre de compléter son activité avec la société [S] dès lors que leurs produits respectifs (lingerie et bijoux) ne sont pas directement concurrents, et ce conformément à l’article 4 dudit contrat qui lie les VDI à la société Charlott’, étant au surplus observé que cela ne concerne qu’une douzaine de personnes parmi plusieurs milliers de VDI. Il en a donc justement conclu que ces faits n’étaient pas fautifs. En outre, les emails versés au débat relatant des faits évasifs et des témoignages par personnes interposées, tout comme la lettre de Mme [F], qui n’est corroborée par aucun élément matériel et relève d’évidence d’un témoignage de complaisance, Mme [F] étant la soeur de la fondatrice de la société Charlott’, ne constituent pas des éléments probants d’une quelconque faute au titre de prétendus débauchages. Les actes prétendus de dénigrement ne sont pas davantage prouvés. La cour rappelle que le dénigrement consiste, au-delà d’une forme de critique admissible parce qu’objective et mesurée, à divulguer une information de nature à jeter le discrédit sur l’activité d’un concurrent et à en tirer profit. En l’espèce, les éléments rapportés à savoir la lettre de résiliation que la société Charlott’ a adressé à [C] [W], l’email de Mme [D] du 15 janvier 2014 et celui du directeur du développement de la société Charlott’ du 7 mai 2015 relatent des faits évasifs ou par personne interposée, sans élément matériel précis de nature à caractériser des actes de dénigrement, outre en tout état de cause que ces faits sont relatifs au prétendu comportement de vendeurs à domicile indépendants, dont la société [S] France ne peut être tenue responsable en l’absence de tout élément qui lui serait directement imputable. S’agissant enfin du prétendu détournement de fichiers, la société Charlott se borne à prétendre que la prise de contact systématique des conseillères du réseau ayant occasionné leur débauchage, dont il vient d’être jugé qu’elle n’est pas établie, n’a pu être réalisée qu’au moyen de fichiers détournés, sans produire aucune pièce pour justifier de ce supposé détournement. Il résulte des développements qui précèdent qu’il convient de débouter la société Charlott’ de l’ensemble de ses demandes au titre de la concurrence déloyale. Le jugement entrepris sera dès lors confirmé de ce chef. Sur les actes de parasitisme à l’encontre de la société [S] France La société Charlott’ soutient qu’elle a fait des investissements colossaux pour créer et animer son réseau ; que la société [S] a exploité les données lui appartenant pour tenter de détourner à son profit des personnes clés du réseau ainsi qu’une clientèle fidélisée ; qu’elle a utilisé ses outils, ses supports de formation et son savoir-faire. La société [S] France réplique que la preuve de son rôle actif dans les départs et de l’utilisation du réseau n’est pas rapportée ; que la société Charlott’ ne démontre pas l’appropriation de ses outils de formation en ce que la société [S] [U] a des outils de formation qui lui sont propres et a consenti des investissements importants en terme de formation des délégués, et que la société Charlott’ ne documente pas matériellement sa demande, et ne prouve pas la présence de Mme [E] à la prétendue formation du 5 décembre 2013. Il a déjà été jugé que les faits de détournement de fichiers par la société [S] n’ont pas été démontrés, de sorte que le parasitisme de ce chef n’est pas caractérisé, pas plus que celui pour détournement de clientèle, en l’absence de tout élément de preuve de manoeuvres déloyales, étant rappelé que le démarchage de la clientèle d’un concurrent, qui au demeurant en l’espèce n’est établi par aucune pièce, et le cas échéant sa captation, ne constituent des actes de concurrence déloyale que si la preuve de procédés déloyaux est rapportée. La société Charlott’ n’établit pas davantage la captation de ses outils de formation, le seul fait que Mme [E], vendeuse et animatrice de réseau au sein de la société Charlott’ sous le statut de VDI, a été embauchée par la société [S] comme formatrice, ne suffisant pas à caractériser une telle captation, la société [S] France démontrant en outre organiser ses formations en application des consignes de la société [S] [U] et être adhérente au programme de la plateforme d’apprentissage Vente Directe Académie, formation en e-learning qui ne correspond pas à celle de la Charlott’s Académie. Le jugement entrepris doit donc être approuvé en ce qu’il a débouté la société Charlott’s de toutes ses demandes sur le fondement du parasitisme. Il sera confirmé de ce chef. Sur les actes de concurrence déloyale et parasitaire à l’encontre de la société Idnesis La société Charlott’ soutient que le contrat d’agrément des animatrices et conseillères prévoyait une non-exclusivité, une obligation de loyauté et d’information et une utilisation du réseau de vente Charlott’ pour les seuls besoins de l’activité de la société Charlott’, et que, malgré sa mise en garde, Mme [E] a détourné des conseillères de son secteur en violation de l’obligation de loyauté, peu importe que les personnes débauchées aient été des vendeuses indépendantes. Elle prétend aussi que Mme [E] a utilisé le fichier du réseau de vente Charlott’ au profit de la société [S] et que le simple fait d’utiliser le fichier des vendeuses en dehors de son activité pour Charlott’ constitue une violation de l’engagement de secret contenu dans le contrat d’agrément ; que les fichiers récapitulant les VDI attachés à la société Charlott” et leurs coordonnées ont été utilisés par la société Idnesis, qui n’était pas supposée disposer de ces informations afin de piller la force de vente de la société Charlott’. Elle ajoute que Mme [E] a utilisé les outils de formations de la société Charlott’ au profit de la société [S] et pour la mise en place de son propre programme de formation Vente Directe Académie. La société Charlott’ prétend enfin que Mme [E] a tenu des propos dénigrants contre elle lors de réunions et par des mails en prétendant que son activité n’était pas rentable afin d’entraîner une démotivation des équipes. La société Idnesis réplique qu’en vertu du contrat d’agrément les VDI pouvaient travailler avec plusieurs sociétés en même temps, et que la société Charlott’ n’apporte pas la preuve que la société Idnesis aurait démarché et débauché quatre personnes au profit de la société [S] ; que les VDI, qui peuvent travailler sur plusieurs réseaux, sont seules propriétaires de leur propre fichier client, et que la société Charlott’ se contente d’affirmer sans preuve que la société Idnesis a utilisé son fichier client ; que la mise en place du programme de formation de la Vente Directe Académie a été réalisée avant le recrutement et la prise de poste de Mme [E] début janvier 2014 et que la société Charlott’ ne fournit aucun document afin de prouver que les formations sont identiques ; que le dénigrement ne saurait reposer sur une attestation d’une personne (Mme [D]) rapportant les propos d’une autre personne (Mme [K]), sans autre élément de preuve. En l’espèce, et ainsi qu’il a déjà été dit, la société Charlott n’est pas fondée à reprocher à la société Idnésis le fait que quatre conseillères de vente, qui sont des travailleuses indépendantes, aient librement choisi de travailler pour une autre société, outre au surplus qu’il n’est démontré aucune preuve de démarchage fautif. Aucune faute n’est davantage caractérisée à l’encontre d’Idnesis pour la prétendue utilisation du fichier du réseau de vente de la société Charlott’ alors que les VDI peuvent travailler sur leur propre fichier et que Mme [E] pouvait donc contacter les conseillères de vente de son fichier, ce dont il n’est au demeurant pas justifié, Mme [E] ayant intégré la société [S], non pour créer un nouveau réseau, mais en qualité de formatrice salariée. La société Charlott’s procède également par affirmation en prétendant à un détournement des outils de formation, qui se déduirait de ce que Mme [E], gérante de la société Idnésis, aurait bénéficié de formations en novembre et décembre 2013 dont la matérialité n’est au demeurant pas établie, ce seul élément étant en tout état de cause insuffisant à caractériser un détournement fautif. Enfin le seul mail du 15 janvier 2014 de Mme [D], rapportant les propos d’une autre conseillère Mme [K], selon lesquels la société Idnésis aurait soutenu en réunion que l’activité de la société Charlott’ n’était pas rentable, est insuffisant à prouver des propos dénigrants et à les imputer à la société Idnesis. Les demandes de la société Charlott’s sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire à l’encontre de la société Idnesis seront donc rejetées. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef. Sur les actes de concurrence déloyale et parasitaire à l’encontre de l’EIRL [C] [W] La société Charlott’ soutient qu’en dissimulant son activité concurrente au profit de la société [S], Mme [W] a violé son obligation contractuelle d’information à son égard et qu’elle n’a pu prendre les mesures nécessaires pour compenser son absence, ce qui a conduit à des pertes sur son réseau ; que deux animatrices de son secteur sont allées travailler en même temps que Mme [W] pour le compte de la société [S] et qu’après son départ neuf vendeuses de son entourage ou de sa ‘lignée’ l’ont suivie ; que Mme [W] a tenu des propos dénigrants en critiquant son concept commercial et marketing auprès du réseau des vendeuses et des formateurs de la société Charlott’. L’EIRL [W] réplique que les sociétés Charlott’ et [S] ne sont pas en situation de concurrence ; qu’elle n’est soumise à aucune exclusivité envers la société Charlott’ au regard du contrat ; qu’elle a informé la société Charlott’ début janvier 2014 de son départ pour la société [S]; que l’attestation de Mme [F] ne peut être retenue en ce qu’elle est la s’ur du PDG de la société Charlott’ ; que cinq des neuf personnes parties pour la société [S] ne faisaient pas partie de son ‘équipe’ et que les 9 personnes incriminées n’étaient soumises à aucune exclusivité ; que la société Charlott’ refuse de communiquer le nombre total de personnes qui a quitté cette dernière sur la même période ; que le courrier invoqué au titre du dénigrement est rédigé pour les besoins de la cause et n’est étayé par aucun élément. Ainsi qu’il a déjà été dit, Mme [W], qui avait le statut de « VDI », était libre de compléter son activité avec la société [S], qui n’est pas une concurrente de la société Charlott’, de sorte qu’aucune dissimulation fautive ne peut lui être reprochée. Il n’est pas davantage démontré de débauchage fautif, les 9 personnes invoquées étant libres de choisir de rejoindre la société [S], étant au surplus observé que la société Charlott’, en dépit des sommations reçues, n’a pas communiqué le nombre total de VDI l’ayant quittée sur la période. Il n’est enfin démontré aucun dénigrement, la société Charlott’s se bornant à produire, au soutien de cette demande, la lettre de résiliation qu’elle a elle-même rédigée et adressée à Mme [W] et qui n’est étayée par aucun autre élément. Les demandes de la société Charlott’s sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire à l’encontre de l’EIRL [W] seront donc rejetées. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef. Sur la demande reconventionnelle en paiement de commissions à l’EIRL [W] La société Charlott’ prétend que Mme [W] a manqué à ses obligations de sorte que sa rémunération pour les mois de juin et juillet 2014 n’est pas due. L’EIRL [W] soutient que la société Charlott’ a manqué à ses engagements contractuels en ne lui réglant pas ses rémunérations de juin et juillet 2014. C’est par de justes motifs approuvés par la cour que le tribunal a retenu que les rémunérations de l’EIRL [W] [C] au titre des mois de juin et juillet 2014 n’ont pas été réglées par la société Charlott’, et a condamné cette dernière à ce titre à régler à l’EIRL [W] [C] la somme de 3 262, 85 euros. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef. Sur la demande des sociétés [S] pour procédure abusive La société [S] [U] soutient que la procédure engagée par la société Charlott’ est fantaisiste, dilatoire et réalisée dans l’intention de lui nuire. Elle demande 50 000 euros de dommages-intérêts de ce chef. La société [S] France soutient que la société Charlott a fait preuve d’un acharnement procédural, d’un abus de droit et d’une intention de nuire qui a porté atteinte à son image. Elle demande 100 000 euros de dommages-intérêts de ce chef. La société Charlott’ réplique que le droit d’ester en justice constitue un droit fondamental et qu’en l’espèce ni un retard de paiement, ni les procédures engagées ne peuvent caractériser un abus de droit alors qu’elle a fondé ses demandes sur des preuves et qu’elle a mis en garde les sociétés [S] avant d’agir en justice. L’accès au juge étant un droit fondamental et un principe général garantissant le respect du droit, ce n’est que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles que le fait d’agir en justice ou d’exercer une voie de recours légalement ouverte est susceptible de constituer un abus. En l’espèce, les sociétés [S] ne démontrent pas la faute commise à leur égard par la société Charlott’ qui aurait fait dégénérer en abus son droit d’agir en justice, cette dernière ayant pu légitimement se méprendre sur l’étendue de ses droits à leur encontre. Elles ne démontrent pas en outre l’existence d’un préjudice distinct de celui causé par la nécessité de se défendre en justice qui sera réparé par l’allocation d’une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a débouté la société [S] [U] de ses demandes de ce chef, et sera infirmé en ce qu’il a condamné la société Charlott à payer des dommages-intérêts pour procédure abusive à la société [S] France Sur la demande au titre de la procédure abusive des sociétés Idnesis et [W] La société Idnesis soutient que la société Charlott’ poursuit un acharnement procédural contre elle alors que c’est une petite entreprise, que Mme [E] a cessé toute activité en rejoignant [S] et qu’elle n’est contrainte à maintenir son existence que pour les besoins de la procédure. Elle demande 20 000 euros de dommages-intérêts à ce titre. L’EIRL [W] sollicite en réparation de son préjudice lié à la procédure abusive la somme de 30 000 euros. La société Charlott’ réplique que son action est fondée et vitale pour elle, et que la preuve du caractère abusif de la procédure à l’encontre des sociétés Idnesis et [W] n’est pas apportée. L’accès au juge étant un droit fondamental et un principe général garantissant le respect du droit, ce n’est que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles, telles que le caractère malveillant de l’action, une attitude malicieuse, l’intention de nuire ou une légèreté blâmable, que le fait d’agir en justice ou d’exercer une voie de recours légalement ouverte est susceptible de constituer un abus. En l’espèce, la société Charlott’, en dépit du statut de VDI et de dispositions contractuelles claires, a attrait dans la cause l’EIRL [W] [C] et la SARL Idnesis, qui sont de toutes petites structures, en sollicitant en première instance puis en appel leur condamnation solidaire à lui verser des sommes de plus de 6 millions d’euros. Cette procédure et le montant disproportionné des sommes réclamées sans fondement à l’encontre de l’EIRL [W] [C] et la SARL Idnesis traduisent un acharnement procédural et une légèreté blâmable caractérisant l’abus du droit d’agir en justice. Les sociétés Idnesis et [W] [C] ont enduré pendant six ans un risque disproportionné de condamnation leur occasionnant un trouble que le tribunal, qui a constaté que la société Idnesis ne demandait rien à ce titre en première instance, a justement réparé à hauteur de 20 000 euros à l’égard de l’EIRL [W] [C]. Le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef et complété en ce que la société Charlott’ sera condamnée à payer à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive la somme de 20 000 à la société Idnésis. PAR CES MOTIFS, LA COUR, Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a condamné la société Charlott’ à payer des dommages-intérêts pour procédure abusive à la société [S] France, Statuant à nouveau et y ajoutant, Rejette la demande formée sur le fondement de la procédure abusive par la société [S] France, Condamne la société Charlott’ à payer à la société Idnésis la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, Condamne la société Charlott’ aux dépens d’appel, et vu l’article 700 du code de procédure civile la condamne à verser les sommes de 20 000 euros aux sociétés [S], 7 000 euros à l’EIRL Servigant [C], et 7 000 euros à la SARL Idnesis au titre des frais irrépétibles d’appel. LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE | |