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4 août 2022
Cour d’appel de Versailles
RG n°
20/01493
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
21e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 04 AOUT 2022
N° RG 20/01493 – N° Portalis DBV3-V-B7E-T6O4
AFFAIRE :
S.A.R.L. LABORATOIRE DES PRESTATIONS ANALYTIQUES ENVIRONNEMENTALES (anciennement dénommée SOCIETE AGENCE [M] AIR ENVIRONNEMENT ‘A.L.A.E.’)
C/
[C] [V]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Mai 2020 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de DREUX
N° Chambre :
N° Section : AD
N° RG :
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
la SCP HADENGUE et Associés
la SCP IMAGINE BROSSOLETTE
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUATRE AOUT DEUX MILLE VINGT DEUX après prorogation du SEPT JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX,et prorogation du TRENTE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX, les parties en ayant été avisées.
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A.R.L. LABORATOIRE DES PRESTATIONS ANALYTIQUES ENVIRONNEMENTALES (anciennement dénommée SOCIETE AGENCE [M] AIR ENVIRONNEMENT ‘A.L.A.E.’)
N° SIRET : 809 424 781
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Sophie CORMARY de la SCP HADENGUE et Associés, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98
Représentant : Me Isabelle COUDRAY BLANCHET, Plaidant, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 148
APPELANTE
****************
Monsieur [C] [V]
né le 15 Février 1990 à [Localité 4] (92)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Valérie RIVIERE-DUPUY de la SCP IMAGINE BROSSOLETTE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000034, susbtituée à l’audience par Maître MONTI Marc, avocat au barreau de CHARTRES
INTIME
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 04 Avril 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Odile CRIQ, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Thomas LE MONNYER, Président,
Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,
Madame Odile CRIQ, Conseiller,
Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU,
FAITS ET PROCEDURE
Selon contrat de travail à durée indéterminée, M. [V], né le 15 février 1990, a été engagé à compter du 27 octobre 2016 en qualité de ‘technicien et tâches administratives’ , par la société Agence [M] Air Environnement (ALAE), filiale de la société Laboratoire des Prestations Analytiques Environnementales (LPAE), moyennant un salaire mensuel brut de 1 800 euros pour 35 heures de travail hebdomadaire.
M. [V] est le compagnon de Mme [X], elle-même engagée par la société LPAE en qualité de Responsable laboratoire en février 2015, qu’elle quittait en juin 2018 dans le cadre d’une rupture conventionnelle.
La société qui développe une activité d’analyses d’air et réalise des diagnostics relatifs à l’environnement et au cadre de vie, emploie plus de dix salariés.
Les 1er et 4 juin 2018, M. [V] se voyait notifier deux avertissements.
Le 7 juin 2018, M. [V] remettait au directeur de la société, M. [M], le double d’un courrier adressé à la Direccte par lequel il se plaignait de ses conditions de travail.
Le 18 juin 2018, le salarié contestait les avertissements des 1er et 4 juin 2018 et en sollicitait l’annulation.
M. [V] était placé en arrêt maladie du 8 au 23 juin 2018, prenait ses congés du 25 juin au 2 juillet 2018, avant d’être de nouveau placé en arrêt maladie du 9 juillet au 16 septembre 2018.
Le 21 septembre 2018, il était déclaré apte à la reprise de son poste par le médecin du travail.
M. [V] a de nouveau été en arrêt maladie le 26 septembre, puis du 1er octobre jusqu’à son courrier de prise d’acte en date du 6 novembre 2018.
Par requête enregistrée le 29 octobre 2019, M. [V] a saisi le conseil de prud’hommes de Dreux afin d’entendre juger que sa prise d’acte produit les effets d’un licenciement nul et, subsidiairement, ceux d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d’obtenir la condamnation de la société à lui verser diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.
Par jugement réputé contradictoire rendu le 15 mai 2020, le conseil a statué comme suit :
Déclare M. [V] recevable en ses demandes,
Dit que la véritable fonction de M. [V] est responsable administratif,
Requalifie la prise d’acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Annule les sanctions disciplinaires des 1er et 4 juin 2018,
Condamne la société LPAE à payer à M. [V] les sommes suivantes :
– 9 332,05 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 22 648,89 euros à titre de complément de salaire du 2 novembre 2016 au 6 novembre 2018
– 1 926 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,
– 7 145,04 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis.
Ordonne à la société LPAE de délivrer les documents sociaux sous astreinte journalière de 50 euros commençant à courir à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement que le conseil se réserve le droit de ne pas liquider,
Dit que par application des dispositions des article R1454 28, R 1454 14 et R 1454 15 du code du travail le paiement des sommes susmentionnées et la délivrance des documents, bénéficient hormis le paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l’exécution provisoire de droit dans la limite de neuf mois de salaire calculée sur la moyenne des trois derniers mois de salaire,
Fixe la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 2 888,49 euros conformément aux dispositions de l’article R 1454 28 du code du travail,
Condamne la société LPAE au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement
de l’article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples ou contraires des parties,
Condamne la société LPAE aux entiers dépens.
Le 16 juillet 2020, la société Laboratoire des Prestations Analytiques Environnementales a relevé appel de cette décision par voie électronique.
Par ordonnance rendue le 1er février 2021, le conseiller de la mise en état, saisi par M. [V] aux fins de radiation, lui a donné acte de son désistement de l’incident soulevé.
Par ordonnance rendue le 9 mars 2022, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 4 avril 2022.
‘ Aux termes de ses dernières conclusions, en date du 28 septembre 2021, la société Laboratoire des Prestations Analytiques Environnementales demande à la cour d’infirmer le jugement rendu dans toutes ses dispositions, et de :
Ecarter des débats les attestations de M. [N] (pièces adverses 12 et 59), Mme [S] (pièce adverse 22), Mme [F] (pièce 23), Mme [Y] (pièce 24), M. [R] (pièce 60), et les pièces adverses 41,48 49, 51, 53,
Juger qu’il n’y a pas lieu à requalification du contrat de travail,
Juger que la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail en date du 6 novembre 2018 s’analyse comme une démission,
Juger que les avertissements du 1er et 4 juin 2018 sont réguliers,
Juger que M. [V] n’a fait l’objet d’aucun fait de harcèlement moral,
Dire et juger que la prise d’acte de la rupture faite par lettre en date du 6 novembre 2018 doit s’analyser comme une démission,
Relever la société LPAE des condamnations prononcées à son encontre,
Débouter M. [V] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Condamner M. [V] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Cormary de la SCP Hadengue conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
‘ Selon ses dernières conclusions du 7 octobre 2021, M. [V] demande à la cour de :
Débouter la société LPAE de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Dire et juger qu’il est recevable et bien fondé en son appel incident,
Infirmer en conséquence le jugement rendu en ce qu’il a écarté le harcèlement moral et condamné la société LPAE à lui verser une somme de 9 332,05 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Statuant à nouveau :
Dire que la prise d’acte du 6 novembre 2018 aura les effets d’un licenciement nul,
Condamner la société LPAE à lui verser une somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,
Confirmer le jugement pour le surplus,
Y ajoutant,
Condamner la société LPAE à lui verser une somme de 3 600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
La condamner aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.
MOTIFS
I – Sur le rejet des pièces n° 12, 22, 23, 24, 41, 48, 49, 51, 53, 59, 60
Tout en plaidant, d’une part, que, si la preuve est libre en matière prud’homale, celle résultant de la production en justice de documents obtenus par un procédé déloyal est irrecevable, et, d’autre part, qu’il appartient au juge d’apprécier si l’utilisation d’une preuve porte atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie privée et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie privée à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi, la société sollicite de la cour d’écarter des débats les attestations de M. [N] (pièces adverses 12 et 59), Mme [S] (pièce adverse 22), Mme [F] (pièce 23), Mme [Y] (pièce 24), M. [R] (pièce 60), et les pièces adverses 41,48 49, 51, 53, affirmant qu’il s’agit de moyens de preuve déloyaux et illicites.
M. [V] rétorque que les attestations produites présentent manifestement des garanties suffisantes pour confirmer de la qualité de son auteur ainsi que la sincérité de ses déclarations et qu’il n’existe aucun motif permettant d’affirmer que les irrégularités relevées constituent des inobservations d’une formalité substantielle ou d’ordre public faisant grief.
Les règles édictées par l’article 202 du code de procédure civile, relatives à la forme des attestations en justice, ne sont pas prescrites à peine de nullité. Il appartient au juge d’en apprécier la valeur probante. La demande de l’employeur d’écarter les attestations produites sera rejetée.
En ce qui concerne les autres pièces, la demande de rejet sera appréciée ci-après au fil de la motivation de la présente décision.
II – Sur la qualification en tant que responsable administratif de l’entreprise :
La société critique le jugement qui a requalifié le contrat de travail et a reclassé M. [V] comme cadre administratif. Elle précise que le salarié a suivi une formation de techniques administratives du 8 août 2016 au 26 octobre 2016 avant d’être engagé par la société LPAE le 27octobre 2016 mais qu’il n’a jamais eu la qualification et les compétences pour occuper le poste de responsable administratif de l’entreprise, soulignant que le service administratif était externalisé.
M. [V] réplique qu’à aucun moment la société LPAE ne vient justifier, ainsi qu’elle le prétend, que la gestion administrative de l’entreprise était externalisée. Il soutient qu’il ressort des documents et des témoignages qu’il communique que, dès le 2 novembre 2016, il occupait au sein de l’entreprise la fonction de responsable administratif, ce qui ressort également de l’organigramme de la société. Il sollicite donc la confirmation du jugement qui a fait droit à sa demande de requalification de son poste de travail en qualité de responsable administratif et qu’il conviendra d’appliquer la position 2.2 coefficient 130 de la grille de classification du collège cadre, ce qui correspond au classement minimum pour ce poste, conformément à la grille de classification de la convention collective.
Il appartient au salarié qui se prévaut d’une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu’il exerce concrètement les responsabilités relevant de cette classification.
Recruté en qualité de technicien et tâches administratives, indice 2.2, coefficient 310, de la convention collective Syntec, positionnement correspondant à ‘l’exercice de la fonction impliquant la connaissance des méthodes, procédés et moyens propres à une technique et l’initiative d’établir entre eux les choix appropriés’, M. [V] revendique un emploi de responsable administratif position 2.2 coefficient 130, statut cadre, ainsi défini :
‘Remplissent les conditions de la position 2.1 ( c’est à dire emploi d’ingénieur ou cadre ayant au moins 2 ans de pratique de la profession, qualités intellectuelles et humaines leur permettant de se mettre rapidement au courant des travaux d’études. Coordonnent éventuellement les travaux de techniciens, agents de maîtrise, dessinateurs ou employés, travaillant aux mêmes tâches qu’eux dans les corps d’état étudiés par le bureau d’études) et, en outre, partant d’instructions précises de leur supérieur, doivent prendre des initiatives et assumer des responsabilités que nécessite la réalisation de ces instructions ; étudient des projets courants et peuvent participer à leur exécution. Ingénieurs d’études ou de recherches, mais sans fonction de commandement.’
Observation préalable faite que l’employeur plaide que, conformément aux stipulations de son contrat de travail, M. [V] exerçait des fonctions de natures, d’une part, technique et, d’autre part, administrative, le salarié produit au soutien de sa demande un organigramme de la société du 21 mars 2017 sur lequel il est noté qu’il occupe les fonctions de responsable administratif.
M. [N] confirme l’organigramme et les fonctions de responsable administratif du salarié sont confirmés par M. [N] aux termes de son attestation en date du 10 octobre 2018, ainsi que par Mme [I] selon attestation du 20 décembre 2018, aux termes de laquelle elle déclare que lors de son arrivée chez ALAE en février 2017, M. [V] lui a été présenté par M. [M] comme étant au poste d’assistant qualité et responsable administratif.
M. [V] produit encore une fiche de fonction de responsable administratif à son nom ainsi que le rapport d’accréditation Cofrac faisant état de sa qualité de ‘responsable administratif’.
Le salarié affirme avoir exercées les tâches suivantes, depuis au moins juillet 2017, lesquelles correspondent à la fiche de fonction responsable administratif :
-Les bons de commande, ( rédaction, suivi, enregistrement, classement, envoi)
-Les plannings des techniciens de prélèvement, (rédaction, suivi, enregistrement, classement, envoi)
-Les factures, (rédaction, factures et avoirs, suivi, enregistrement, classement, validation, envoi et relance)
-Les fiches de maintien d’habilitation des agents administratifs, (rédaction, suivi, enregistrement, classement, validation)
-Des rapports d’essai et d’analyse, (rédaction, suivi, enregistrement, classement, validation, envoi ainsi que les calculs de résultats)
-Des données de prélèvement informatique, (rédaction, suivi, enregistrement, classement, validation)
-Des dossiers clients, fournisseurs sous-traitants (suivi, enregistrement, classement).
Il ajoute avoir également supervisé la réception des échantillons, avoir été en charge de la sauvegarde journalière des documents présents sur le serveur de l’entreprise, avoir assuré le bon fonctionnement du secrétariat administratif et de la logistique en lien avec l’activité du service comme par exemple s’assurer que les correspondances avec les clients fournisseurs et sous-traitants étaient effectuées, que les demandes des collaborateurs étaient traitées dans les délais imposés. Il indique qu’il répondait régulièrement aux demandes des clients et collaborateurs.
Il est établi par le salarié qu’il a assuré la formation de Mme [F], opératrice de saisie, mission figurant sur la fiche de fonction dont il se prévaut.
Toutefois, alors que l’employeur souligne que l’expérience professionnelle du salarié, antérieurement à son engagement était sans lien avec les fonctions occupées au sein de l’entreprise (selon son curriculum vitae, le salarié avait jusqu’alors occupé des emplois d’éducateur sportif à temps partiel, de livreur ou manutentionnaire – pièce 7) et qu’il a bénéficié préalablement à son engagement d’une ‘action de formation préalable au recrutement conclue sous l’égide de Pôle-emploi’ (pièce n° 7 de l’appelant), force est de relever que le salarié ne disposait pas des deux années d’expérience requises au positionnement 2.1, pour pouvoir prétendre au positionnement revendiqué.
De ce seul chef, la réclamation salariale formée par l’intimé sur la base du positionnement 2.2 coefficient 130 – statut cadre – n’est pas justifiée.
En outre, tenant la taille modeste du laboratoire, le salarié ne justifie pas avoir exercé des responsabilités relevant du niveau indiqué.
Certes, le salarié se prévaut des propos de M. [M] figurant dans un mail du 16 mai 2017, par lequel il adresse le projet d’organigramme à Mme [X], puis dans un mail adressé à M. [E] qui indique que M. [V] aurait été placé comme « bouche trou administratif » dans le cadre de l’audit, qui confirmerait, selon l’intimé, qu’ ‘il a bien été placé comme responsable dans l’organigramme, la société en étant dépourvu’. Cependant, le fait que l’employeur ait présenté l’intéressé comme responsable administratif dans le cadre d’un audit de certification Cofrac est dépourvu de portée et n’est pas susceptible de caractériser que l’intéressé relevait du niveau conventionnel l’autorisant à revendiquer un rappel de salaire conventionnel.
En l’état du seul élément établi, à savoir qu’il a formé Mme [F], et à défaut pour le salarié de démontrer qu’il a effectivement exercé les responsabilités attachées au niveau de positionnement revendiqué, le jugement sera infirmé en ce qu’il a accueilli la demande de repositionnement conventionnel et accordé à M. [V] le rappel de salaire subséquent.
III – Sur l’annulation des avertissements des 1er et 4 juin 2018
M. [V] conteste les avertissements qui lui ont été notifiés, affirmant que les faits relatés sont largement contestés par les témoins présents sur place, à savoir non seulement Mme [X] mais également Mme [F] et que la matérialité des faits à l’origine de la sanction est très largement mise à caution.
La société objecte que les avertissements notifiés à M. [V], sont parfaitement justifiés, et soutient que les documents produits à l’appui de sa contestation sont irrecevables.
L’avertissement disciplinaire du 1er juin 2018 notifié au salarié sanctionnait le comportement de ce dernier pour s’être emporté envers M. [M] en le traitant de menteur devant l’ensemble des collègues.
Il résulte du témoignage de Mme [F] que celle-ci déclare s’agissant de la discussion du 1er juin 2018 : ” J’atteste qu’à aucun moment [C] [V] a fait preuve de colère ni d’énervement envers [A] [M]. Au contraire c’est [A] [M] qui s’est énervé, lorsque [T] [X], [C] [V] et moi-même lui avons fait la remarque que ( illisible ) dire était faux “.
Cependant, il convient de constater que M. [V] ne donne aucune explication sur les circonstances de fait l’ayant conduit à dire à M. [M] qu’il mentait, alors qu’il reconnait lui-même avoir tenu ce propos aux termes de sa lettre de contestation de l’avertissement en date du 18 juin 2018.( pièce n° 14 de la société) .
Tenant le caractère excessif de tels propos, l’employeur a pu, sans violer la liberté d’expression reconnue au salarié, sanctionner l’intéressé d’un avertissement.
La demande d’annulation de cet avertissement sera rejetée et le jugement infirmé sur ce point.
L’avertissement disciplinaire le 4 juin 2018 notifié au salarié sanctionnait son insubordination pour lui avoir annoncé le matin qu’il ne pouvait se rendre au rendez-vous fixé auprès d’un organisme réalisant les ‘fittest’, nécessaire à ses fonctions de technicien, sa charge de travail limitée à la partie administrative n’étant pas suffisante pour un temps plein’, et ce au motif qu’il devait accompagner son fils à la journée d’intégration à la crèche.
S’agissant de cet avertissement, si M. [V] concède aux termes de sa lettre du 18 juin 2018 avoir été en retard en raison du fait qu’il devait accompagner son fils en journée d’intégration, ce dont il affirme avoir avisé le directeur, mais réfute toute désorganisation du laboratoire de son fait.
En l’absence d’élément communiqué par l’employeur sur ce point, et au bénéfice du doute pour le surplus qui profite au salarié, il sera jugé que le grief reproché n’est pas établi. La notification d’un avertissement pour le simple retard reconnu par le salarié apparaît disproportionné.
Par suite, c’est à bon droit que le conseil a annulé cet avertissement. Le jugement sera confirmé à ce titre.
IV – Sur le harcèlement moral
M. [V] soutient qu’il a dû faire face, dès le mois de février 2018 correspondant à l’annonce de la grossesse de sa compagne, à des faits de harcèlement moral imputables exclusivement à son employeur. Il indique que les faits se sont ensuite particulièrement aggravés à compter de la fin du mois de mai 2018, date à laquelle Mme [X], sa compagne, a annoncé sa volonté de quitter l’entreprise.
M. [V] relate qu’il a dû faire face à une hostilité clairement affichée de la part de M. [M], son Directeur, qui s’est matérialisée par un dénigrement systématique de son travail, par un contrôle particulièrement serré de son activité et de ses heures de travail matérialisées notamment par l’obligation de remplir des fiches d’entrée et de sortie de l’entreprise et des comptes rendus d’activités heure par heure. Il explique qu’après le départ de sa compagne, il a dû en outre subir les dénigrements et observations déplacées de la part de Mme [U].
La société conteste tout acte de harcèlement moral et indique qu’elle est accréditée COFRAC ce qui explique que des fiches d’heures aient été mises en place de manière plus rigoureuse pour l’ensemble des employés, que Mme [U] s’est contentée de formuler des observations sur le travail de M. [V], qui n’était pas exempt de reproches, et que M. [M] n’a fait qu’user de son pouvoir hiérarchique en sanctionnant légitimement des avertissements litigieux. La société souligne par ailleurs que le salarié procède par affirmations et qu’il a été déclaré apte par le médecin du travail le 21 septembre 2018.
Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
En vertu de l’article L. 1154-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
S’agissant du dénigrement du travail de M. [V] par Mme. [U], auditeur indépendant, consultant qualité et technique, chargée par M. [M] en février 2018, d’effectuer un audit interne du laboratoire, le salarié produit aux débats :
– Une plainte de M. [V] auprès du procureur de la République le 8 août 2018, pour faits de harcèlement moral et de dénonciation calomnieuse à l’encontre de son directeur M. [M].
– Des courriers de M. [V] des 10 juillet, 07 août, 18 et 26 septembre 2018, adressés au gérant de la société M. [E], dénonçant la dégradation de ses relations de travail avec M. [M].
-Une attestation du 27 décembre 2018 de Mme [S] qui déclare avoir travaillé avec Mme [U] d’avril 2008 à juin 2016 en étant son adjointe de juin 2015 à juin 2016. Elle relate un quotidien professionnel difficile avec sa supérieure hiérarchique et avoir subi au quotidien harcèlement moral.
-Le témoignage de M. [N] en date du 10 octobre 2018 qui indique : ” Je suis intervenu au sein de la société ALAE comme prestataire extérieur de janvier 2016 jusqu’au 28 avril 2017 (‘) j’ai par ailleurs travaillé huit ans avec [P] [U] qui était responsable technique au sein de la société euro service labo et travaillait sous ma responsabilité. Les relations de travail avec cette personne étaient très difficiles. Elle ne respectait jamais les voies hiérarchiques et voulait travailler directement avec le PDG qui était mon supérieur. Son management était de type tyrannique et avait peu de respect pour ses collaborateurs. (..) M. [M] m’a par ailleurs fait part qu’il regrettait d’avoir embauché un couple et que cela fragilisait la structure de son entreprise. C’est la raison pour laquelle il ne souhaitait pas avoir à la fois [T] [X] comme responsable technique et son compagnon [C] [V] comme responsable qualité.”
Le dénigrement de M. [V] par Mme [U] ne ressort pas des pièces produites. En effet, les courriers adressés par M. [V] à M. [E] produits aux débats ne reposent que sur les déclarations du salarié. Les attestations produites ne portent pas sur la relation de travail entre M. [V] et Mme [U].
Ce grief n’est pas caractérisé.
Sur le contrôle de l’activité de M. [V] et de ses heures de travail par M. [M], le salarié produit aux débats :
-Ses plannings hebdomadaires sur lesquels figurent ses heures d’arrivée, heures de pause, heures de déjeuner et heures de départ.
-Ses relevés hebdomadaires de ses horaires, notamment pour les mois de mai et juin 2018 signés par lui-même et visés par son supérieur hiérarchique.
S’agissant de l’obligation de M. [M] d’établir des comptes rendus d’activités heure par heure, aucune pièce n’est produite par le salarié.
À ce titre le salarié n’établit qu’une chose, à savoir qu’il a renseigné des fiches horaires dont l’employeur prenait connaissance.
Il suit en outre de ce qui précède que l’ avertissement notifié le 4 juin 2018 était injustifié.
S’agissant du dénigrement du travail de M. [V] par M. [M], le salarié produit aux débats :
– Un mail adressé à M. [E], gérant de la société, le 6 juillet 2018, aux termes duquel M. [M] déclare :
“[W], je ne pense pas que je vais tenir !!!! Ce mec je vais le péter en n’importe quel moment ‘Je n’en peux plus de ce RAT. En même temps [O] est un peu C… de tout faire devant nos bureaux même [P] m’a dit qu’il aurait pu faire tout ça avant d’arriver à [Localité 3]. Bref, M. MOU du GENOU a encore laissé des trâces”.
– L’attestation de Mme [F] en date du 18 juillet 2018, selon laquelle elle atteste : “que M. [M] m’a donné les accès au boîte mail de la société afin de remplir les missions qu’il m’a confiées’ et que sur celle-ci ‘j’ai constaté des échanges :
– il envisage de demander à M. [V] [C] de partir,
– l’inspection de l’ACPM lui demande de joindre une attestation,
– il dit clairement ” je ne pense pas que je vais tenir !!!! Ce mec je vais le péter à n’importe quel moment, je n’en peux plus de ce RAT (en parlant de M. [V] [C]) “.
La société conteste la production aux débats de la photographie de ce mail qui est attribué à M. [M] en observant que M. [V] n’était pas destinataire d’un tel message, qui lui aurait été remis par Mme [F], qui n’est pas non plus en copie. Elle soulève une difficulté tenant au procédé déloyal mis en ‘uvre par le salarié pour obtenir ce document en faisant valoir la violation du secret de la correspondance du supérieur hiérarchique.
S’il est exact que ce message n’était pas adressé à M. [V], ni à Mme [F], cette dernière atteste en avoir eu connaissance dans le cadre de l’exercice de ses fonctions du fait de l’habilitation qui lui a été accordée pour accéder à la boîte mail de la société afin de remplir les missions qui lui étaient confiées.
Alors qu’il n’est pas allégué par l’employeur que le message litigieux du directeur était protégé par une boîte personnelle et qu’il a été adressé en utilisant les outils professionnels, message auquel Mme [F] pouvait avoir accès dans le cadre de ses fonctions, tenant l’habilitation qui lui a été donnée pour accéder à la boîte mail de la société, la société appelante n’est pas fondée à invoquer l’illicéité de cette preuve.
Le salarié informé de son existence et se plaignant d’un harcèlement moral, étant légitime à se prévaloir de cette pièce, qu’il n’a pas obtenu par fraude.
L’employeur, qui fait valoir que cette pièce, à la supposer vraie, ne permettrait pas de faire un lien avec M. [V], qui était présent dans l’entreprise à cette date, ne communique pas l’échange de courriers électroniques dans lequel s’inscrivait ce message susceptible d’établir que M. [V] n’était pas concerné.
– Le témoignage de M. [R], collègue de Mme [X], (compagne du salarié) dans son nouveau poste à [Localité 5] qui atteste dans les termes suivants :
” Le 11 octobre 2018, M. [M] me contacte par SMS pour me disant que Mme [X], son ancien responsable labo lui a un peu saboté ses stocks. Le jour même, il m’a dit aussi de rester vigilant et surtout sur mes gardes. Toujours le même jour, il remet en cause un accident de voiture de M. [V] et l’arrêt de travail qui en découle. Le 18 octobre 2018, il me fait part de ses craintes de revoir Mme [X] sur la région parisienne, ce qui voudrait dire que son râleur de mari retournerait travailler et qu’il en serait malade car il ne supporte pas les hypocrites et surtout qu’il en était à son quatrième arrêt de travail. Ceci ne sont que des SMS, en conversation téléphonique c’est bien pire. ”
S’agissant du témoignage de M. [R], la société observe que celui-ci n’est pas conforme aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile, qu’il n’est pas manuscrit et qu’il ne reproduit pas la pièce d’identité de son auteur. Nonobstant, le fait que ce témoignage ne répond pas aux exigences de l’article 202 du code de procédure civile, le contenu des échanges rapportés par M. [R] n’est pas contesté par la société.
Quant à son contenu, la société se limite à minimiser la portée de ce témoignage, mais cette dépréciation ne convainc pas la cour, M. [R] évoquant des conversations téléphoniques pires que les SMS.
Le dénigrement de M. [V] par M. [M] résulte de la teneur du courriel adressé par M. [M] à M. [E], teneur qui est confirmée par Mme [F], mais également de l’attestation de M. [R] de laquelle il résulte que le salarié est qualifié par M. [M] de râleur, d’hypocrite et du fait qu’il serait malade du fait de son retour à son poste.
Ce grief est établi.
Par ailleurs, M. [V] justifie avoir été en arrêt maladie du 2 juillet au 16 septembre 2018 en raison d’un ‘stress au travail’ et avoir été traité par antidépresseurs.
De plus, il se prévaut de la plainte qu’il a déposé auprès du procureur de la République le 8 août 2018, pour faits de harcèlement moral et de dénonciation calomnieuse à l’encontre de son directeur M. [M] et des courriers qu’il a adressés les 10 juillet, 07 août, 18 et 26 septembre 2018, au gérant de la société M. [E], dénonçant la dégradation de ses relations de travail avec M. [M].
Pris dans leur ensemble, ceux des faits matériellement établis, suffisamment précis et concordants, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral.
Il appartient à l’employeur d’établir que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement moral et que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
L’employeur, qui est tenu aux termes de la Loi de justifier des horaires effectivement accomplis est fondé à inviter ses collaborateurs à renseigner des fiches horaires et à les vérifier. Il justifie ainsi par des éléments étrangers à tout harcèlement la demande faite au salarié d’établir ces fiches et de les viser.
En revanche, alors que l’employeur concède aux termes de ses conclusions que le ‘déroulement du contrat de travail n’a pas posé de difficulté jusqu’en juin 2018″ et que le salarié donnait donc apparemment satisfaction, le mois de juin 2018 coïncidant avec le départ de l’entreprise de Mme [X], compagne de ce dernier, qui exerçait les fonctions de responsable de laboratoire et ce pour aller travailler dans un laboratoire en région toulousaine, la société, qui se prévaut de manière inopérante de la certification Cofrac, ne justifie pas par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement le brutal changement de comportement du directeur à l’égard de l’intéressé et le dénigrement dont il a fait l’objet vis-à-vis du gérant de la société et de tiers à l’entreprise, ni de la sanction prononcée contre lui le 04 juin 2018.
Si l’employeur fait valoir que le médecin du travail a délivré un avis d’aptitude le 21 septembre 2018 sans restriction, l’examen de l’avis et du dossier médical révèle que le médecin s’est contenté de délivrer une ‘attestation de suivi’, sans se prononcer expressément sur l’aptitude du salarié à exercer ses fonctions, le salarié lui ayant indiqué selon le dossier ‘appréhender la reprise et être angoissé par rapport aux conflits avec sa hiérarchie’ mais souhaiter reprendre son emploi et travailler.
En l’état de l’ensemble de ces éléments, la cour retient que le salarié a été victime d’un harcèlement moral sans répercussion durable sur son état de santé psychique.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a écarté le harcèlement moral.
V – Sur la prise d’acte
La prise d’acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l’employeur empêchant la poursuite du contrat de travail. Lorsqu’un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifiaient, soit, dans le cas contraire, d’une démission.
La charge de la preuve des faits qu’il allègue à l’encontre de l’employeur à l’appui de sa prise d’acte pèse sur le salarié.
Outre le harcèlement moral, M. [V] invoque le non respect par l’employeur de son obligation de régler les salaires sans retard, retards qui ont eu lieu sur une période allant d’avril 2017 jusqu’à novembre 2018, et la non prise en compte des fonctions de ‘responsable administratif’ et du respect du salaire conventionnel.
La société conteste les griefs qui lui sont reprochés en faisant valoir que les retards ne sont pas établis au regard des pièces versées aux débats.
Le contrat de travail de M. [V] stipule que son salaire est payé entre le cinq du mois suivant et le lundi suivant, si le cinq du mois tombe un week-end.
M. [V] produit aux débats plusieurs courriels en date des 7 septembre, 09 octobre et 18 octobre 2018 , qu’il a adressé à M. [E], gérant de la société, constatant le non versement de son salaire à la date des courriels envoyés et lui demandant le versement de son salaire sans délai. Il produit également cinq SMS adressés en 2017 au directeur par sa compagne Mme [X], faisant état du fait qu’elle-même et M. [V] ne recevaient pas leur salaire dans les délais.
Par application des dispositions de l’article 1315 du code civil, devenu 1353, s’il appartient à celui qui se prévaut d’une obligation d’en justifier, il revient à celui qui prétend s’en être libéré de justifier du paiement ou du fait extinctif. En application de cet article, il appartient à l’employeur d’apporter la preuve qu’il a payé le salaire de M. [V] à la date convenue.
Alors que la société ne produit aucune pièce, il résulte de l’examen des pièces soumises aux débats, SMS et courriels adressés à l’employeur, que le versement des salaires n’était pas effectué à la date d’envoi de ces messages qui excédait le 5 du mois suivant, tel que stipulé par contrat de travail et qui se sont échelonnés sur deux années, de sorte que le reproche formé par le salarié est établi dans sa matérialité.
Par ailleurs, il suit de ce qui précède que le salarié a été victime de harcèlement moral.
Ces manquements graves imputables à l’employeur empêchant la poursuite de la relation de travail, justifient la prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur, laquelle produit les effets d’un licenciement nul en application de l’article L. 1152-3 du code du travail.
Le jugement du conseil de prud’hommes sera infirmé à ce titre.
VI – Sur l’indemnisation de la rupture :
La rupture du contrat de travail de M. [V] ouvre droit à ce dernier d’une part aux indemnités de rupture et, d’autre part à une indemnité pour licenciement nul qui ne peut être inférieure au salaire des six derniers mois.
Au jour de la rupture, M. [V] était âgé de 28 ans, et détenait une ancienneté de 2 ans.
Son salaire moyen brut s’élevait à la somme de 1 950 euros. Le jugement sera infirmé en ce qu’il a fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 2 888,49 euros en retenant un rappel de salaire conventionnel injustifié. Il est constant que le salarié a retrouvé un emploi chez C2S aux termes d’un contrat à durée déterminée.
M. [V] affirme avoir subi au moment de la rupture un préjudice du fait de l’attitude particulièrement violente et vexatoire de son employeur et des agissements répétés dont il a été victime qui se sont intensifiés sur les derniers mois de la relation de travail.
Le salarié ne justifie aucunement de l’évolution de sa situation professionnelle. Par suite, il conviendra de l’indemniser à hauteur de 12 000 euros. Le jugement sera infirmé quant au montant alloué au salarié.
Le salarié peut prétendre au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis, correspondant, conformément à l’article L. 1234-5 du code du travail, à la rémunération brute qu’il aurait perçue s’il avait travaillé pendant la période du délai-congé.
Le salarié ne bénéficiant pas du statut de cadre, le jugement sera infirmé en ce qu’il a fixé le montant de l’indemnité compensatrice de préavis à la somme de 7 145,04 euros. Tenant compte de son salaire et de son ancienneté, le salarié est bien fondé à percevoir deux mois de délai congé, soit la somme de 3 900 euros, outre 390 euros au titre des congés payés afférents, laquelle était intégrée dans la somme allouée par les premiers juges.
Sur la base d’une ancienneté au terme du préavis auquel il avait droit, de 2 ans et 2 mois, du salaire de référence de 1 950 euros et conformément aux dispositions de l’article R. 1234-2 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, l’indemnité de licenciement à laquelle la société sera condamnée sera fixée à la somme de 1 055,92 euros (1950/4 x 2,166).
Le jugement sera confirmé quant au principe mais réformé sur le montant de l’indemnité légale de licenciement.
Il suit de ce qui précède que la rupture du contrat de travail ayant été prononcée au mépris des dispositions de l’article L. 1152-3 du code du travail, il sera ordonné le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Dreux rendu le 15 mai 2020 en ce qu’il a d’une part, dit que la véritable fonction de M. [V] était responsable administratif et fixé la moyenne de ses 3 derniers mois de salaire à 2 888,49 euros, d’autre part annulé l’avertissement du 01 juin 2018, de troisième part, requalifié la prise d’acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse, et, enfin, Condamné la société Laboratoire des Prestations Analytiques Environnementales à payer à M. [V] la somme de 22 648,89 euros à titre de complément de salaire pour la période du 2 novembre 2016 au 6 novembre 2018, la somme de 9 332,05 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse, celle de 7 145,04 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et celle de 1 926 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Rejette la demande de retrait des débats des pièces n° 12, 22, 23, 24, 41, 48, 49, 51, 53, 59 et 60 de M. [V].
Déboute M. [V] de sa demande de requalification conventionnelle et de rappel de salaire conventionnel et de sa demande d’annulation de l’avertissement du 01 juin 2018,
Dit que M. [V] a subi un harcèlement moral,
Requalifie la prise d’acte en licenciement nul,
Condamne la société Laboratoire des Prestations Analytiques Environnementales à payer à M. [C] [V] les sommes suivantes :
– 12 000 euros bruts de dommages intérêts pour licenciement nul,
– 3 900 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 390 euros bruts au titre des congés payés afférents,
– 1 055,92 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,
Confirme le jugement pour le surplus,
Condamne la société Laboratoire des Prestations Analytiques Environnementales à payer à M. [C] [V] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société Laboratoire des Prestations Analytiques Environnementales aux dépens d’appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, et par Monsieur TAMPREAU, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le président,