Dénonciation calomnieuse : 22 novembre 2022 Cour d’appel de Nîmes RG n° 19/02366

·

·

Dénonciation calomnieuse : 22 novembre 2022 Cour d’appel de Nîmes RG n° 19/02366
Ce point juridique est utile ?

22 novembre 2022
Cour d’appel de Nîmes
RG n°
19/02366

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°1281

N° RG 19/02366 – N° Portalis DBVH-V-B7D-HMJF

YRD/ID

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NIMES

16 mai 2019 RG :17/00898

S.A.S. TRANSDEV OCCITANIE PAYS NIMOIS

C/

[J]

Grosse délivrée

le

à

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NIMES en date du 16 Mai 2019, N°17/00898

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Leila DAFRE, Vice-présidente placée

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 26 Octobre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 22 Novembre 2022.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

SAS TRANSDEV OCCITANIE PAYS NIMOIS Venant aux droits de la SOCIETE DES TRANSPORTS DEPARTEMENTAUX DU GARD, SAS immatriculée au RCS sous le numéro 326 396 108,

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Patrick LANOY de la SELARL CAPSTAN – PYTHEAS, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Anne laure PERIES de la SELARL CAPSTAN – PYTHEAS, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Stéphanie MASSIAVE avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMÉ :

Monsieur [L] [J]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me Eve SOULIER de la SELARL EVE SOULIER – JÉRÔME PRIVAT – THOMAS AUTRIC, avocat au barreau D’AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 28 Septembre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 22 Novembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

M. [L] [J] a été engagé en qualité de chauffeur par la société des Transports Départementaux du Gard (STDG) à compter du 1er septembre 2004 suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel, puis à temps complet à compter du 10 septembre 2007.

Le 1er septembre 2009, il accédait au poste de contrôleur.

Après avoir été convoqué à un entretien préalable en vue d’une éventuelle procédure disciplinaire le 13 septembre 2017, M. [J] se voyait proposer une rétrogradation disciplinaire le 16 octobre 2017, avec prise d’effet au 1er novembre 2017.

Par courrier du 25 octobre 2017, le salarié contestait les faits qui lui étaient reprochés.

A compter du 15 novembre 2017, M. [J] était placé en arrêt de travail.

Suivant courrier du 23 novembre 2017, M. [J] était convoqué à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement fixé le 6 décembre 2017.

Le 12 décembre 2017, il était licencié pour faute simple aux motifs suivants :

‘Suite à l’entretien que nous avons eu le 6 décembre 2017, nous sommes au regret de vous notifier, par la présente, votre licenciement.

Cette mesure repose sur les motifs que nous vous avons exposés lors de cet entretien préalable.

Cet entretien préalable fait suite à un entretien préalable du 25 septembre 2017 et à un courrier du 16 octobre 2017 exposant des faits graves nous ayant conduit à envisager la rétrogradation, sauf «en cas de refus » de votre part.

Or, vous avez refusé la rétrogradation que nous vous proposions et, suite à notre entretien du 6 décembre 2017, nous avons pris la décision de vous licencier pour les faits que nous vous rappelons ci-après.

Par courrier en date du 06 juin 2017, vous nous demandiez un entretien afin de nous informer d’une situation extrêmement grave au sein du service tout en précisant que M. [S], votre responsable hiérarchique, en serait à l’origine.

Vous nous avez précisé également, qu’à défaut de régler ensemble cette situation, vous aviez l’intention de saisir la justice à l’encontre de Monsieur [S] pour dénonciation calomnieuse, harcèlement et préjudice moral», conformément à l’article 226-10 du Code pénal.

C’est dans ces conditions que nous vous avons reçu le 12 juin 2017 afin de comprendre la situation.

Lors de cet entretien, vous avez indiqué que vous auriez subi des dénonciations calomnieuses de la part de Monsieur [S]. Vous précisez qu’il serait intervenu auprès de l’un de vos collègues de l’équipe contrôle, Monsieur [B], et qu’il lui aurait déclaré que vous jugiez Monsieur [B] incompétent à son poste ainsi qu’alcoolique.

Pour corroborer vos dires, vous nous avez affirmé que l’ensemble des membres de l’équipe contrôle attesteraient cette allégation et du comportement soi-disant répréhensible de votre responsable hiérarchique, Monsieur [S].

Je n’ai eu d’autres choix, face à ces accusations extrêmement graves, que de diligenter une enquête.

J’ai dans un premier temps reçu le 28 juin 2017 Monsieur [S], qui a formellement contesté vos accusations et indique qu’il s’agissait d’une tentative de manipulation grossière de votre part en tentant de liguer l’ensemble de l’équipe contrôle contre lui.

Compte de tenu de la position contradictoire de Monsieur [S] à la votre, je me suis en second temps entretenu avec l’ensemble des membres de l’équipe pour comprendre la situation.

Monsieur [B] directement cité par l’objet de votre courrier était reçu le 6 juillet 2017 afin de recueillir ses explications.

Monsieur [B] a totalement infirmé vos propos et a précisé que, bien au contraire, Monsieur [S] n’était aucunement à l’origine des faits explicités et que c’est vous-même

qui étiez à l’origine du problème. Il a poursuivi en indiquant qu’il comprenait maintenant que vous l’aviez manipulé depuis plusieurs mois, que vous teniez des propos diffamatoires et mensongers à son encontre et ses collègues, dans le seul but de déstabiliser l’équipe, de monter les contrôleurs les uns contre les autres et surtout contre Monsieur [S].

Il a conclu son entretien en précisant qu’il ne voulait plus travailler avec vous en binôme, que votre retour dans l’équipe n’était pas possible, et que pendant votre absence l’équipe s’était ressoudée et retravaillait en confiance.

J’ai poursuivi mes entretiens en recevant individuellement chaque contrôleur de l’équipe.

Les entretiens se sont déroulés en juillet et août en tenant compte des congés de tout un chacun, le dernier ayant eu lieu le 17 ao0t 2017.

Tous vos collègues attestent les propos de Monsieur [B] et Monsieur [S].

Chacun a pu même compléter le comportement inapproprié et inadmissible de votre part, tel que :

– tenue de propos excessifs et mensongers à des fins manipulatrices ce qui a induit des dissensions au sein de l’équipe préjudiciables au bon exercice des missions de contrôles et visant a discréditer votre supérieur hiérarchique.

– Dans certains cas des propos insultants et diffamatoires à l’encontre des uns et des autres.

Vos collègues et votre Responsable hiérarchique ont été très choqués de votre tentative de cabale à l’encontre de ce dernier.

Non seulement vous avez perdu leur confiance mais la quasi-totalité de l’équipe ne souhaite

plus travailler avec vous et refuse votre réintégration dans l’équipe devant tant de manipulations, de mensonges et de propos fallacieux tenus à leur égard.

Ils précisent que pendant votre absence de 5 mois l’équipe était soudée et managée avec sérénité par Monsieur [S].

Compte tenu des faits corroborés par l’ensemble des entretiens de chacun des membres de l’équipe Contrôle, nous considérons que la lettre que vous nous avez adressée est mensongère et n’avait pour objet que d’essayer de faire porter vos propres difficultés relationnelles à un tiers, en l’occurrence votre Responsable hiérarchique. Les auditions de vos collègues sont saisissantes et démontrent que vous avez-vous-même créé une situation et que vous en portez l’entière responsabilité.

Vos tentatives de déstabilisations et d’allégations graves, mensongères, vous ont enlevé toute crédibilité vis-a-vis de l’équipe.

Ce comportement est d’autant plus inacceptable que vous êtes assermenté pour mener des contrôles envers la clientèle. Cela nécessite une équipe soudée, et c’est indispensable dans l’exercice de vos missions pour votre propre sécurité et celle de l’équipe.

Pour l’ensemble de ces raisons nous nous voyons contraints de vous notifier par la présente

votre licenciement pour faute simple.’.

Contestant la légitimité de la mesure prise à son encontre, le 22 décembre 2017, M. [J] saisissait le conseil de prud’hommes de Nîmes en paiement d’indemnités de rupture pour licenciement sans cause réelle et sérieuse lequel, par jugement contradictoire du 16 mai 2019, a :

Vu les dispositions de l’article L1235-3 du code du travail,

Suivant le principe ‘non bis in idem’

– dit que le licenciement de M. [J] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

– condamné la société STDG au règlement des sommes suivantes :

* 27 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

* 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– dit qu’il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire sur le fondement de l’article 515 du code de procédure civile

– condamné la société STDG aux dépens de l’instance.

Par acte du 13 juin 2019, la SAS Transdev Occitane Pays Nîmois venant aux droits de la société STDG a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 15 septembre 2022, la SAS Transdev Occitane Pays Nîmois venant aux droits de la société STDG demande à la cour de :

– réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nîmes le 16 mai 2019 en ce qu’il :

* a caractérisé l’existence d’une double sanction,

* a dit que le licenciement de M. [J] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

* l’a condamnée au règlement des sommes suivantes :

° 27 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

° 1 500 euros au titre de l’ article 700 du code de procédure civile

* l’a condamnée aux dépens de l’instance

En conséquence :

A titre principal :

– constater l’absence de double sanction ;

– constater le bien-fondé du licenciement prononcé ;

– débouter M. [J] de l’ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire :

– ramener les demandes de M. [J] à de plus justes quantums ;

En tout état de cause :

– condamner M. [J] au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner M. [J] aux entiers dépens.

Elle soutient que :

– la mesure de rétrogradation n’ayant jamais été mise en oeuvre, il ne peut y avoir double sanction,

– les faits reprochés à l’appui de la mesure de licenciement ne sont pas prescrits, le moyen nouveau développé sur ce point est irrecevable en appel, et sont parfaitement établis.

En l’état de ses dernières conclusions en date du 10 décembre 2019, M. [L] [J] demande à la cour de :

– recevoir l’appel de la société Transdev Occitane Pays Nîmois venant aux droits de STDG,

– le dire mal fondé,

En conséquence,

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nîmes, en ce que son licenciement était jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

– condamner la société STDG, à lui régler à les sommes suivantes :

* 28.000 ( en réalité c’est la somme de 27.000 euros qui a été allouée par le conseil de prud’hommes ) euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

* 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Il fait valoir que :

– l’employeur a épuisé son pouvoir disciplinaire après lui avoir infligé une rétrogradation,

– les faits sont prescrits et non établis.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 14 mars 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 28 septembre 2022. L’affaire a été fixée à l’audience du 12 octobre 2022.

MOTIFS

Sur l’application de la règle non bis in idem

Il est constant que l’employeur ne peut sanctionner deux fois le même manquement et que le prononcé d’une sanction épuise son pouvoir disciplinaire.

M. [J] soutient que son licenciement est motivé par des faits déjà sanctionnés par une mesure de rétrogradation prise à son encontre le 16 octobre 2017 avec effet au 1er novembre 2017.

En l’espèce il est établi par l’employeur que la mesure de rétrogradation était d’une part subordonnée à l’acceptation du salarié, d’autre part qu’elle n’a jamais été mise en application.

En effet, l’employeur précise sans être utilement contredit que le planning de roulement prévisionnel auquel se réfère M. [J], qui avait été établi dans le cas où ce dernier accepterait la rétrogradation, afin qu’il soit informé par avance de son roulement, n’a pas été mis à exécution étant rappelé qu’il a été placé en arrêt de travail à compter du 15 novembre jusqu’à son licenciement alors qu’il lui était laissé un délai expirant le 14 novembre pour accepter ou refuser cette rétrogradation.

Le bulletin de salaire de novembre 2017 de M. [J] confirme qu’il a conservé son poste de contrôleur ainsi que le salaire afférent.

Ainsi, le courrier de sanction du 16 octobre 2017 indique que la rétrogradation est prévue « à effet du 1er novembre 2017 », et qu’ « en cas de refus de votre part, nous n’aurions d’autre choix que d’engager une procédure de licenciement à votre encontre ».

Par courrier du 25 octobre 2017 M. [J] reconnaît lui-même que l’employeur « envisag[e] à [son] égard » une rétrogradation ou « en cas de refus de [sa] part », une mesure plus grave, à savoir un licenciement.

Par courrier du 7 novembre 2017, l’employeur répond à M. [J] en lui indiquant qu’il maintient sa décision de lui appliquer une rétrogradation disciplinaire, en lui rappelant « il vous appartient de l’accepter ou de la refuser », prorogeant le délai de réflexion au 14 novembre, et en attirant son attention sur les conséquences de son choix : en cas d’acceptation : intégration initiale au sein de l’équipe des conducteurs volants à compter du 15 novembre 2017 ; en cas de refus : engagement d’une procédure de licenciement.

Une modification du contrat de travail ne pouvant être imposée au salarié, l’employeur qui se heurte au refus d’une mesure de rétrogradation impliquant une modification du contrat de travail, peut, dans l’exercice de son pouvoir disciplinaire, prononcer une autre sanction, y compris un licenciement pour faute grave aux lieu et place de la sanction refusée.

C’est à juste titre que la société appelante conclut que la notification de la sanction ne vaut pas application, comme tente de le soutenir M. [J].

Ainsi, la lettre de licenciement indique expressément que « bien qu’il s’agisse d’une faute grave pouvant être sanctionnée par un licenciement, nous avons opté pour une rétrogradation pour vous laisser la possibilité de conserver un poste dans l’entreprise » puis elle précise que le licenciement est notifié au lieu et place de la rétrogradation refusée par le salarié : « or, vous avez refusé la rétrogradation que nous vous proposions et, suite à notre entretien du 6 décembre 2017, nous avons pris la décision de vous licencier ».

Il ne peut être soutenu que l’employeur a violé la règle «non bis in idem», le jugement encourt la réformation.

Sur la prescription des faits fautifs

Conformément à l’article L. 1332-4 du code du travail « Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de 2 mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales. »

– Sur la recevabilité de ce nouveau moyen :

La société appelante rappelle qu’en vertu du principe de concentration des moyens, il incombe au demandeur de présenter, dès l’instance relative à la première demande, l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder celle-ci. Elle considère que ce moyen est irrecevable en appel.

Il résulte de l’article 1351 du code civil, devenu 1355 qu’il incombe aux parties de présenter dès l’instance initiale l’ensemble des moyens qu’elles estiment de nature, soit à fonder la demande, soit à justifier son rejet total ou partiel.

D’une part, cette règle est circonscrite aux effets attachés à l’autorité de la chose jugée visée par ledit article en ce qu’elle fait obstacle à une nouvelle instance poursuivant le même objet mais fondée sur de nouveaux moyens, d’autre part l’article 123 du code de procédure civile prévoit que les fins de non recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, comme peuvent l’être les moyens de défense au fond selon l’article 72 du même code.

Sur la prescription :

M. [J] soutient qu’il s’évince des pièces versées par l’employeur lui-même que dès le 6 juin 2017, il avait alerté son employeur sur les difficultés qu’il rencontrait avec son supérieur, M. [M] [S], que dès le 6 juillet 2017, l’employeur était informé des difficultés rencontrées, que l’employeur n’a jamais mené une enquête impartiale, puisque c’est lui-même qui s’est chargé d’interroger des membres de l’équipe des contrôleurs et c’est lui-même qui a établi les comptes rendus d’entretiens en demandant simplement aux salariés d’attester simplement qu’ils étaient d’accord avec ce compte rendu, que ce n’est pas la démonstration d’une enquête fiable, que cette enquête aurait dû être diligentée par le CHSCT puisqu’il était question de dénonciations sur des problématiques de conditions de travail et de sécurité dénoncées par lui.

Il ajoute que la SAS Transdev Occitane Pays Nîmois recevait les positions prétendument inverses de plusieurs salariés dans le cadre de la pseudo enquête diligentée :

– dès le 6 juillet, concernant M. [B].

– dès le 11 juillet, concernant M. [A].

– dès le 26 juin concernant M. [T].

Or ce n’est pas le courrier du 6 juin 2017 de M. [J] qui a permis à l’employeur d’avoir une entière connaissance des faits à l’origine de la procédure disciplinaire mais l’enquête menée dans les mois qui ont suivi l’envoi de ce courrier et qui s’est terminée le 17 août 2017 après le dernier entretien, à savoir celui de M. [N].

Les comptes-rendus d’enquête ont par ailleurs été rédigés peu après ce dernier entretien, soit le 22 août 2017.

Il en résulte que la convocation à entretien préalable le 13 septembre 2017 est intervenue dans le délai de deux mois prévu à l’article susvisé.

La prescription n’est donc pas acquise.

Sur l’existence d’une cause réelle et sérieuse

La SAS Transdev Occitane Pays Nîmois relate que par courrier du 6 juin 2017, M. [J] a demandé un entretien à son directeur, M. [T], au sujet d’une prétendue « situation extrêmement grave au sein du service » dont son responsable hiérarchique, M. [S], serait à l’origine. Elle ajoute qu’à défaut de règlement de la situation, il était prêt à saisir la justice de faits de « dénonciation calomnieuse, harcèlement et préjudice moral », que M. [J] a été reçu par M. [T] dès le 12 juin 2017, qu’une enquête interne a été diligentée afin de procéder à l’audition de tous les intéressés, qu’à l’issue de cette enquête il apparaissait que M. [J] était en réalité à l’origine de toutes les difficultés relatées.

L’enquête révélait que M. [J] a tenté de manipuler l’employeur et de liguer l’ensemble de l’équipe contre M. [S], alors qu’il était personnellement à l’origine de la dégradation du climat social au sein du service et qu’il était sur le point de devoir en répondre auprès de la Direction.

Les comptes rendus d’entretien démontrent que les faits suivants pouvaient être reprochés à M [J] :

– des propos excessifs et mensongers à des fins manipulatrices, induisant des dissensions au sein de l’équipe, préjudiciables au bon exercice des missions de contrôle, visant à déstabiliser l’équipe et discréditer son supérieur hiérarchique, et à monter les conducteurs les uns contre les autres

– des propos insultants et diffamatoires à l’encontre de différents membres du personnel.

En effet, les auditions révèlent que M. [J] est à l’origine de la dégradation de la situation au sein du service, qu’il manipule ses interlocuteurs et profère des propos mensongers dans un but manifeste de nuire à l’équipe, l’ensemble des contrôleurs confirme qu’ils ne veulent plus travailler avec lui et que, depuis son absence, l’équipe s’est ressoudée et retravaille en confiance.

Ainsi, la cour relève les déclarations suivantes faites devant M. [T], directeur, qui les a reproduites et qui sont confirmées par voie d’attestations par les salariés entendus :

– M. [N] : «M. [N] n’a pas vécu le problème du remplacement de M. [A] par M. [P] pendant l’été 2016 et ne se prononce pas sur le fait que M. [J] ne voulait pas travailler avec lui.

Par contre sur l’historique des faits depuis maintenant 6 ans qu’il est dans l’équipe des contrôleurs, M. [N] confirme que M. [J] manipulait les membres de l’équipe à des fins personnelles !

C’est bien la vérité. [M] [S] était manipulé par M. [J], et ce dernier s’en vantait ouvertement.

Notamment, M. [N] confirme que M. [J] a bien intrigué pour que la 306 ne soit pas attribuée au binôme auquel c’était le tour…

Par ailleurs M. [J] critiquait la façon d’effectuer les contrôles de mon binôme [N]/[D], en disant à [M] [S] que nous avions peur de faire des contrôles en amont/dépan’ des véhicules.

D’où les questions que [M] [S] nous posait à ce sujet, étant sous influence de M. [J].

M. [J] transformait également nos propos auprès de [M]

Et il ne voulait pas travailler avec moi ! En prétextant que j’avais une façon de travailler qui ne lui convenait pas.

Etait-ce la bonne raison ‘ Je me pose des questions…

De la même façon, il manipulait aussi [G] [H], [V] [B] et [O] [A] et colportait des informations tronquées.

N’ayant pas encore compris cela, nous nous en prenions à [M] [S]…

Nous avons petit à petit appris à vivre avec son comportement manipulateur. ll critiquait notre travail, tant sur les aspects quantitatifs que qualitatifs.

Plus grave, il a été à l’origine d’une dispute entre [G] et [U].

En critiquant ouvertement l’épouse de [G], qualifiée de “Blonde”, et en essayant de faire porter la responsabilité à [U].

Il était impossible que [U] tienne de tels propos, je le connais trop bien.

Concernant [V] [B], ce dernier en a gros sur la patate !

Le retour de M. [J] sera très compliqué pour lui.

Fréquemment, [L] [J] nous montait les uns contre les autres. Et surtout, il transformait nos propos et nous manipulait.

ll n’a besoin d’aucune aide, ni de compassion de la part de l’équipe.

Tout le monde est tombé dans le panneau.

Depuis qu’il est absent, tout va beaucoup mieux!

[M] [S] est plus à l’écoute et il y a une bien meilleure entente dans l’équipe.

C’est une évidence.

Le retour de M. [J] sera compliqué, et surtout je ne le vois pas changer de comportement à 50 ans.»

– M. [B] : « Faits déclencheurs de l’été 2016 à mars 2017:

M. [B] précise qu’il était en binôme avec M. [H].

M. [J] est en binôme avec M. [A].

Sur [Localité 4], en mars 2017, en attente du car un mercredi soir, les binômes présents étaient

[A]/[J] et [H]/[B].

M. [J] discutait avec M. [H], M. [A] et M. [B].

M. [J] dit à M. [B] : [M] [S] ne voulait pas que tu sois avec M. [P] pendant l’été 2016 car il ne te jugeait pas capable de gérer efficacement M. [P], au motif de ton manque d’implication et d’engagement dans ta mission de contrôleur.

La mayonnaise montée et j’étais très énervé et remonté….

Il fallait que je voie M. [S] pour avoir des explications. Je le vois 2 jours après un vendredi.

M. [B] explique tout à M. [S], pourquoi de tels propos à mon encontre’ M. [S] n’était pas très à I’aise…

M. [S] s’est lâché! Oui ! J’ai dit que tu ne pouvais pas être en binôme avec M.[P] ! Mais j’ai été quelque part forcé.

En fait M. [J] le manipule depuis 6 ans !

M. [J] balance (je cite) sur tous les contrôleurs depuis 6 ans et nous dénigré à tour de rôle…

M. [S] était sous son emprise!

Il y a des tensions depuis 6 ans à cause de cela. M. [J] arrivait à faire se disputer les contrôleurs entre eux, car il parlait trop et sur tout le monde !

Avec du recul, j’ai enfin les réponses à toutes les questions que je me posais ces années passées.

M. [J] tirait toutes les ficelles et nous montait les uns contre les autres.

J’ai travaillé 3 ans avec M. [J], c’est fini, je ne veux plus travailler avec lui!

ll faut savoir que M. [J] s’est séparé de sa femme-

ll était alors très mal. Je l’invitais alors régulièrement à dîner chez moi, même plusieurs fois par

semaine. Et le lendemain, ça ne l’empêchait pas de balancer une saloperie sur moi !

Je l’apprenais via les autres contrôleurs de l’équipe. Je n’ai plus confiance en lui!

Il faut que vous rencontriez les autres contrôleurs qui vous diront la même chose que moi.

Autres exemples :

il y a environ 3 ans, M. [J] a dit à M. [H], un autre contrôleur, que M. [S] voulait sa peau !

M. [H] est devenu blême et a été très déstabilisé.

Il s’est arrêté une semaine suite à ces propos, qui étaient très excessifs, comme à l’accoutumé.

M. [J] est toujours dans un délire verbal.

Sinon fin 2016, il y a eu un problème avec l’attribution de la 306 au binôme [D]/[N].

C’était à leur tour de l’avoir, et M. [J] est intervenu auprès de M. [S] pour qu’ils ne l’aient pas.

M. [S] a été influencé et a cédé.

-Je comprends maintenant beaucoup de choses !

M. [J] est volontairement intriguant depuis toujours pour diviser l’équipe à des fins personnelles.

Je n’ai plus confiance en lui, je n’ai plus de compassion pour lui. il ne doit pas réintégrer l’équipe.

Depuis qu’il n’est plus là, tout va mieux entre nous, c’est ça la réalité.

Tous les contrôleurs le diront».

– M. [A] : «M. [J] est à la base de tout dans cette affaire. Au jeu des échecs, je cite, il serait imbattable !

Il a toujours 3 coups d’avance.

Son arrêt de travail du mois de mars a été planifié par lui-même !

Cela fait 3 ans qu’il manipule tout le monde, à commencer par M. [S]. Et il s’en vantait! ” Le chef, j’en fais ce que je veux “.

Dans cette histoire, M. [S] s’est fait avoir et a été trop conciliant ! C’est sa seule erreur.

M. [J] nous utilisait tous à des fins personnelles !

Je l’ai amené plusieurs fois à [Y], sachant qu’il avait au préalable oeuvré auprès de M. [S] pour que le binôme soit affecté sur place, au motif de soi-disant, problèmes sur la ligne 510.

En fait M. [J] restait sur [Y] pour aller voir sa copine, je cite…

Il manipulait également M. [B] afin de le monter contre M. [S], car il se voyait bien à sa place…

Tous les cadavres ressortent depuis l’incident avec M. [B] qui fait que M. [J] s’est arrêté.

Mais maintenant, tout est découvert !

En fait, tout le monde temporisait et calmait le jeu, à commencer par M. [S], et c’est tout à son honneur. Mais la vérité est que M. [J] s’est servi de nous tous !

Et maintenant, il voudrait revenir la fleur au fusil au sein de l’équipe’

C’est impossible ! Lui et M. [B] vont se battre, c’est sur!

M. [B] l’a aidé beaucoup. Et dès qu’il avait le dos tourné, M. [J] le sabrait !

Je le sais car j’étais en binôme avec lui.

ll a fait la même chose avec [C] [N] (“je ne travaillerai pas avec un melon).

ll critiquait même les femmes des collègues ([X], [U] et [V]).

ll y avait une vraie strategie de sa part! Et il a planifié son arrêt de travail en essayant de faire porter le chapeau à M. [S].

Depuis qu’il n’est plus là, on s’éclate tous les cinq !»

– M. [S] : «Pendant l’été 2016, M. [S] a demandé à M. [J] de faire équipe avec M. [P], intérimaire remplaçant de M. [A].

M. [J] a emis des réticences et ne souhaitait pas faire équipe avec M. [P], car il était

inexperimenté, non assermenté.

ll a demandé à M. [S] que M. [P] fasse équipe avec M. [H].

Apres discussion, un compromis a été trouvé et M. [J] a accepté d’ouvrir avec M. [P] sur le secteur du Viganais, un secteur à faible fraude, lui en tant que contrôleur, l’autre en tant que vérificateur.

M. [S] me precise que M. [J], usuellement en binôme avec M. [B], s’est montré très

critique envers M. [B], en pointant ses manquements, à savoir, TXP en panne, pas de port de cravate, retards au travail, et moins de contrôles opérés que les autres contrôleurs.

M. [S] me precise pourtant que M. [S] et M. [B] se connaissent depuis longtemps.

En 2013, lorsque M. [J] a eu des soucis personnels, [V] [B] l’a aidé et écouté.

Lors des entretiens individuels annuels effectués avec ses contrôleurs, M. [S] me confirme qu’effectivement il a constaté une activité de M. [B] environ 40% inférieure à celle de ses

collègues.

Lors d’une réunion de service, le 8 mars 2017, avec Mme [I] [Z], [M] [S] et les contrôleurs, M. [J] a pris la parole et pointé le sujet des extractions de données à partir des appareils de contrôle WP.

M. [J] a contesté les chiffres concemant M. [B] et l’a alors défendu.

M. [U] [D] et M. [C] [N], également présents, n’ont rien dit.

[V] [B] a alors remercié en séance M. [J].

M. [J] a alors précisé à M. [B] que M. [S] avait dit qu’il n’était pas capable de prendre M.[P] en binome.

M. [S] s’est alors entretenu personnellement avec M. [B].

La conclusion de cet entretien est que M. [V] [B] n’a pas cru aux propos tenus par M. [S] à son encontre et qui lui ont été rapporté par M. [J].

Entre temps, M. [J] a été mis en arrêt maladie par son médecin (le 13 mars exactement).

L’équipe des contrôleurs tourne donc à 5 personnes depuis cette date.

L’équipe des contrôleurs a ensuite bien confirmé la réalité de la situation, à l’exception de M. [X] [H]. M. [U] [D] a confirmé que tout allait mieux.

Le 26 avril, M. [B] a demandé un entretien a Mme [I] [Z], et lui a exprimé sa déception sur le comportement de M. [J].

M. [B] a également précisé que depuis l’arrét de M. [J], tout allait mieux au sein de l’équipe.

M. [S] a précisé ensuite qu'[L] [J] l’avait appelé le 26 mai pour une demande de rendez-vous afin de clarifier la situation.

M. [S] lui a alors précisé qu’il le recevrait des lors que son arrêt maladie serait échu et qu’il serait en situation de reprendre le travail.

Le 6 juin dernier, M. [J], toujours en arrêt maladie, s’est présenté a Marguerittes en tenue de contrôleur.

ll a demandé à rencontrer M. [S]. M. [O] [A] et M. [C] [N] étaient présents.

M. [S] a confirmé à M. [J] qu’il le recevrait lorsqu’il reprendrait le travail.

M. [J] lui a alors remis en mains propres un nouvel arrêt de prolongation ainsi que la lettre à l’attention de M. [T] et objet de l’entretien de ce jour ».

Dès lors, peu importe l’existence de comptes-rendus d’entretiens annuels d’évaluation des années 2014, 2015 et 2016 ne remettant pas en cause la qualité du travail de M. [J], ce qui ne présente aucun lien avec les griefs contenus dans la lettre de licenciement lesquels datent de juin 2017.

Le seul courrier de M. [H] produit par l’intimé pour démontrer le comportement exécrable de M. [S] ne peut emporter la conviction au regard des témoignages recueillis au cours de l’enquête étant relevé que ce courrier ne fait aucunement référence au cas personnel de M. [J]. Au demeurant, seul M. [H] a refusé que ses déclarations figurent dans le compte rendu d’enquête alors que les autres salariés ont confirmé leurs déclarations par voie d’attestations ce qui confirme une certaine collusion entre celui-ci et l’intimé.

M. [J] ne produit aucun élément pertinent de nature à contester les résultats de l’enquête effectuée de manière objective par l’employeur, le licenciement apparaît donc justifié.

M. [J] sera débouté de l’ensemble de ses prétentions.

L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner M. [J] à payer à la SAS Transdev Occitane Pays Nîmois la somme de 1.500,00 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

– Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, déboute M. [J] de l’intégralité de ses prétentions,

– Rappelle en tant que de besoin que le présent arrêt infirmatif tient lieu de titre afin d’obtenir le remboursement des sommes versées en vertu de la décision de première instance assortie de l’exécution provisoire ;

– Condamne M. [J] à payer à la SAS Transdev Occitane Pays Nîmois la somme de 1.500,00 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne M. [J] aux dépens de première instance et d’appel.

Arrêt signé par le président et par la gréffière.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x