Dénonciation calomnieuse : 1 décembre 2022 Cour d’appel de Rouen RG n° 20/01854

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Dénonciation calomnieuse : 1 décembre 2022 Cour d’appel de Rouen RG n° 20/01854
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1 décembre 2022
Cour d’appel de Rouen
RG n°
20/01854

N° RG 20/01854 – N° Portalis DBV2-V-B7E-IPPB

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 01 DECEMBRE 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES D’EVREUX du 21 Avril 2020

APPELANTE :

Société ENGIE HOME SERVICES

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Céline BART de la SELARL EMMANUELLE BOURDON-CÉLINE BART AVOCATS ASSOCIÉS, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Laure MOREAU-ANSART, avocat au barreau de LILLE

INTIMEE :

Madame [K] [V]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Marion QUEFFRINEC de la SCP PICARD LEBEL QUEFFRINEC BEAUHAIRE MOREL, avocat au barreau de l’EURE substituée par Me Florent MOREL, avocat au barreau de l’EURE

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 20 Octobre 2022 sans opposition des parties devant Madame BIDEAULT, Présidente, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame BIDEAULT, Présidente

Madame ALVARADE, Présidente

Madame POUGET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme WERNER, Greffière

DEBATS :

A l’audience publique du 20 Octobre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 01 Décembre 2022

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 01 Décembre 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu le jugement en date du 21 avril 2020 par lequel le conseil de prud’hommes d’Evreux, statuant en formation de départage dans le litige opposant Mme [K] [V] à son ancien employeur, la société Engie Home Services, a dit le licenciement de la salariée dépourvu de cause réelle et sérieuse, a condamné l’employeur au paiement de diverses sommes à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire (1 419,91 euros) et congés payés afférents (141,99 euros), indemnité compensatrice de préavis (2 237,38 euros), indemnité de licenciement (6 401,30 euros), indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (15 000 euros), indemnité de procédure (1 500 euros), a condamné l’employeur à rembourser à Pôle Emploi les indemnités chômage versées à la salariée dans le limite de six mois, a débouté la salariée de sa demande au titre des retenues sur salaire, a ordonné à l’employeur, sous astreinte, de rectifier les bulletins de paie erronés, a condamné l’employeur aux entiers dépens et a assorti la décision de l’exécution provisoire ;

Vu l’appel interjeté par voie électronique le 17 juin 2020 par la société Engie Home Service à l’encontre de cette décision qui lui a été notifiée le 18 mai précédent ;

Vu la constitution d’avocat de Mme [V], intimée, effectuée par voie électronique le 24 juin 2020 ;

Vu les dernières conclusions enregistrées au greffe et notifiées par voie électronique le 20 janvier 2021 par lesquelles l’employeur appelant, soutenant que les faits reprochés à la salariée sont matériellement établis et d’une gravité justifiant le licenciement prononcé, sollicite l’infirmation du jugement entrepris et requiert, à titre principal, que le licenciement pour faute grave soit déclaré fondé, que la salariée soit déboutée de ses demandes et condamnée au paiement d’une indemnité de procédure ( 3 500 euros), à titre subsidiaire, qu’il soit dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, que la salariée soit déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement illégitime, à titre infiniment subsidiaire, que le montant des dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse soit réduit au minimum de 3 mois prévu par le code du travail et demande, en tout état de cause, que soit ordonnée la restitution des sommes versées dans le cadre de l’exécution provisoire de la décision entreprise ;

Vu les dernières conclusions enregistrées au greffe et notifiées par voie électronique le 16 novembre 2020 aux termes desquelles la salariée intimée, réfutant les moyens et l’argumentation de la partie appelante, contestant en partie la matérialité des faits reprochés au sein de la lettre de rupture, considérant que les griefs formulés ne reposent sur aucun élément de preuve, sollicite pour sa part la confirmation de la décision déférée en toutes ses dispositions et la condamnation de l’appelante au paiement d’une indemnité en application de l’article 700 du code de procédure civile (6 000 euros), requiert qu’il soit dit qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement et en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire en application des dispositions de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996, devraient être supportées par la société en sus de l’indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu l’ordonnance de clôture en date du 22 septembre 2022 renvoyant l’affaire pour être plaidée à l’audience du 20 octobre 2022 ;

Vu les conclusions transmises le 20 janvier 2021 par l’appelante et le 16 novembre 2020 par l’intimée auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d’appel ;

SUR CE, LA COUR

La société Engie Home Services (anciennement Savelys) est une entreprise de prestation de services pour la maintenance, la réparation d’équipement, l’installation de chaudière individuelle ou de mini chaufferie en habitat collectif.

La société emploie près de 4 200 salariés et applique la convention collective de l’industrie métallurgique de la région parisienne.

Mme [K] [V] a été embauchée par la société Savelys en qualité de secrétaire d’agence à compter du 19 février 2007 aux termes d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet.

Au dernier état de la relation contractuelle, Mme [V] exerçait les fonctions de conseiller clientèle, niveau II, échelon 3, coefficient 190.

Mme [V] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 8 février 2018 par lettre du 30 janvier précédent, mise à pied à titre conservatoire puis licenciée pour faute grave par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 23 février 2018 motivée comme suit :

‘En date du 30 janvier 2018, il vous a été adressé une convocation à un entretien préalable à licenciement, qui s’est déroulé le 8 février 2018 à 12h, à l’agence d'[Localité 3], en présence de Madame [U], directeur opérationnel de secteur et Madame [N], responsable d’agence. Au cours de cet entretien, vous étiez assistée de Madame [C] [F], représentante du personnel.

Compte tenu de la gravité des faits, cette convocation était accompagnée d’une mise à pied conservatoire jusqu’à la décision définitive concernant votre procédure.

Le 5 décembre 2017, Monsieur [E], technicien, intervient pour une visite d’entretien chez un client, Monsieur [A]. Lors de cette visite, il a constaté une odeur de gaz. Le technicien a pensé au début que l’odeur provenait d’une des bouteilles de gaz stockées dans le garage. Après plusieurs recherches, il s’aperçoit que l’odeur vient de la vanne d’arrivée de gaz dans le logement. Conformément à la procédure, le technicien vous a appelé pour vous demander de programmer une nouvelle intervention afin de réaliser les travaux nécessaires de réparation.

Lors de cet appel, vous lui avez expliqué que vous connaissiez bien Monsieur [A]. Vous lui avez demandé de prendre des photos des bouteilles de gaz. Le technicien a refusé votre demande qui sortait de vos champs d’intervention respectifs.

Vous êtes donc allée voir Madame [N], en début d’après-midi, pour l’informer que Monsieur [E] était intervenu chez l’oncle du père de votre fils, Monsieur [A], qu’il avait vu chez ce client des bouteilles de gaz en grand nombre, qu’il s’agissait d’une famille dangereuse et qu’il était du devoir de Madame [N] de faire un signaler (sic) au commissariat.

Madame [N] a immédiatement appelé le technicien pour avoir sa version des faits. Ce dernier a précisé sur un ton amusé qu’il ne comprenait pas l’objet de votre demande d’autant plus que ce type de bouteilles de gaz destinées à souder du cuivre ne présentait pas de dangerosité. Il a indiqué que s’il avait constaté une situation de risque, il l’aurait bien entendu signalée à Madame [N].

Le 25 janvier 2018, deux personnes du service départemental du renseignement territorial sont venues à l’agence pour questionner Madame [N], et ce, en présence du personnel présent.

Cette audition faisant suite à un courrier de votre part adressé, dans le cadre de votre vie privée, au Procureur de la République dans lequel vous dénoncez Monsieur [A], également proche de votre famille, comme une personne dangereuse.

Madame [N] a été fortement perturbée et surprise que l’on vienne la questionner sur l’intervention qui s’était déroulée le 5 décembre dernier et notamment sur sa vie personnelle.

Celle-ci a répondu aux questions posées et précisé, par ailleurs, que le type de bouteilles de gaz stockées chez Monsieur [A], destinées à souder du cuivre, ne présentaient pas de dangerosité.

Les personnes du service départemental du renseignement territorial ont rassuré Madame [N] en disant que les premiers éléments de l’enquête tendaient à démontrer qu’il s’agissait probablement d’une dénonciation calomnieuse mais qu’ils étaient contraints de poursuivre l’enquête car il était question de risque d’actes terroristes.

Madame [N] leur a fait part de son inquiétude vis-à-vis de cette affaire personnelle qui perturbe le travail de l’agence et notamment vis-à-vis du client qui était en mesure de se retourner contre l’agence pour dénonciation calomnieuse.

Madame [U] a, par ailleurs, confirmé à Madame [N] qu’il ne lui appartenait pas, dans le cadre de ses fonctions, de faire un signalement au commissariat à l’encontre d’un client de l’agence dans le cadre d’une affaire privée qui concerne un salarié.

Au vu de ce qui précède, nous ne pouvons tolérer davantage :

– D’une part que des faits inhérents à votre vie personnelle puisse venir interférer, perturber l’organisation de l’agence et mettre en difficulté votre responsable. En effet, vous avez instrumentalisé et fait pression auprès de votre collègue et de votre hiérarchie pour alimenter un contentieux personnel.

– D’autre part, que vous teniez de tels propos menaçant à l’encontre de votre responsable d’agence et que vous mettiez en cause ses décisions.

– Enfin, que vos accusations envers votre hiérarchie et la société mettent en cause gravement la crédibilité ainsi que l’image de l’agence et de la société auprès de ses clients.

Au cours de l’entretien, vous n’avez pas contredit les faits qui vous sont reprochés.

Au vu de la gravité des faits, votre maintien dans l’entreprise s’avère impossible.

Nous vous notifions donc, par la présente, votre licenciement pour faute grave sans préavis, ni indemnité, qui prendra effet à la date de la présentation de cette lettre en recommandé à votre domicile, date de fin de votre contrat de travail.

Votre période de mise à pied qui a pris effet à la date de présentation de votre convocation à entretien à votre domicile, ne vous sera pas rémunérée. (…)’

Contestant la légitimité de son licenciement et estimant ne pas avoir été remplie de ses droits au titre de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail, Mme [V] a saisi le conseil de prud’hommes d’Evreux, qui, statuant par jugement du 21 avril 2020, dont appel, s’est prononcé comme indiqué précédemment.

A titre liminaire, la cour constate que Mme [V] n’a pas formé d’appel incident.

En outre, il y a lieu de rappeler qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.

En conséquence, en l’absence d’appel incident, au vu des conclusions de la salariée aux termes desquelles elle sollicite la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, la cour n’est pas saisie de sa demande au titre des retenues sur salaire injustifiées.

Sur le licenciement

La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l’employeur, qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d’autres griefs que ceux qu’elle énonce.

La faute grave s’entend d’une faute d’une particulière gravité ayant pour conséquence d’interdire le maintien du salarié dans l’entreprise.

La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l’employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d’apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, et s’ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l’éviction immédiate du salarié de l’entreprise.

En l’espèce, il résulte de la lettre de licenciement telle que reproduite ci-dessus que l’employeur reproche à Mme [V] d’avoir dénoncé un client de l’agence au Procureur de la République, dans le cadre du différent l’opposant à son ex-compagnon, d’avoir instrumentalisé et fait pression auprès d’un collègue et de sa hiérarchie pour alimenter un contentieux personnel,d’avoir porté des accusations envers sa hiérarchie et la société mettant en cause gravement la crédibilité ainsi que l’image de l’agence et de la société auprès de ses clients.

L’employeur verse aux débats les témoignages de M. [E] et Mme [N].

Il ressort de ces éléments que Mme [K] [V], soeur de Mme [M] [V], également salariée de l’entreprise, était en conflit avec le père de son fils, M. [P] [A], au sujet de la garde de leur enfant ; qu’un technicien de l’agence est intervenu le 5 décembre 2017 au domicile de l’oncle du père de l’enfant, M. [O] [A], que Mme [V] a demandé au technicien de prendre des photographies de bouteilles de gaz entreprosées au domicile du client et que suite à cette intervention, un signalement pour suspicion de radicalisation et actes de terrorisme a été effectué auprès des forces de l’ordre, Mme [N], responsable de l’agence ayant été auditionnée par des membres du service départemental du renseignement territorial.

Mme [K] [V] conteste être à l’origine de la saisine des services de police. Elle reconnaît avoir demandé au technicien de prendre des photographies mais observe que ce dernier ne l’a pas fait, le client n’ayant subi aucun préjudice.

Elle indique qu’au regard de la situation inquiétante sur le territoire français, du contexte de terrorisme, des consignes données par les pouvoirs publics, il était de sa responsabilité d’alerter sa supérieure hiérarchique sur la situation inquiétante découverte au domicile de M. [A]. Elle soutient que la circonstance que le client serait apparenté au père de son enfant est sans intérêt dès lors qu’elle n’a pas personnellement alerté les forces de l’ordre.

Il ne résulte pas des éléments produits par l’employeur que Mme [K] [V] soit à l’origine de la dénonciation effectuée à l’encontre de M. [O] [A] puisque d’une part ce courrier n’est pas produit et, d’autre part, que Mme [N] indique elle-même qu’il aurait été rédigé non pas par Mme [K] [V] mais par la mère de cette dernière.

Si la société soutient que Mme [V] aurait procédé à cette dénonciation au cours de son audition par les forces de l’ordre, elle ne verse aux débat aucun élément corroborant ses allégations.

En revanche, l’employeur établit que la salariée, qui a eu connaissance dans le cadre de son travail, de la présence de bouteilles de gaz au domicile d’un membre de la famille de son ex-conjoint a utilisé ses fonctions afin de tenter d’obtenir des photographies du domicile du client, méconnaissant ainsi le principe de respect de la vie privée du client ainsi que son devoir contractuel de discrétion et de confidentialité.

Le contrat de travail de la salariée mentionne expressément que cette dernière est tenue au secret professionnel et s’engage à ne pas divulguer, au sein de la société ou en dehors, les informations dont elle aurait connaissance de quelque façon que ce soit du fait de l’exercice de ses fonctions.

En demandant au technicien de la société de prendre des photos du domicile d’un client, en faisant pression sur sa responsable hiérarchique pour qu’elle procède à un signalement du client, alors qu’il est établi qu’elle était à titre personnel en litige avec la famille de celui-ci, Mme [V] a commis des faits qui constituent une violation des obligations découlant de son contrat de travail.

Mme [V] ne peut légitimement arguer du contexte de terrorisme pour expliquer son acte au regard d’une part des liens personnels la liant avec M. [A] et d’autre part de l’ananlyse de M. [E], technicien, qui a expressément indiqué que les bouteilles de gaz découvertes ne présentaient aucun danger en ce qu’elles étaient destinées à la soudure, le frère du client étant plombier.

S’il ressort de l’attestation établie par Mme [N] que la salariée a fortement insisté pour que cette dernière procède à un signalement des faits auprès des forces de l’ordre, il ne ressort pas des éléments produits que Mme [V] ait tenu des propos, des accusations envers sa hiérarchie et la société mettant en cause gravement la crédibilité ainsi que l’image de l’agence et de la société auprès de ses clients.

En conséquence, si au vu des éléments produits, les griefs adressés à la salariée apparaissent partiellement établis et de nature à constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, il n’apparaît cependant pas qu’ils aient revêtu un caractère de gravité suffisant pour rendre impossible le maintien de la salariée dans l’entreprise pendant la durée limitée du préavis au regard notamment de leur caractère isolé, de l’ancienneté de Mme [V], de son absence d’antécédents disciplinaires.

En conséquence, le licenciement pour faute grave de Mme [V] doit être requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu’il a jugé illégitime le licenciement de Mme [V].

La salariée peut par conséquent prétendre au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis ainsi qu’à une indemnité de licenciement et à un rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire.

Les sommes accordées à ce titre par les premiers juges ne sont pas spécifiquement contestées dans leur quantum.

Le jugement entrepris est confirmé de ces chefs.

Par infirmation de la décision déférée, la demande de dommages et intérêts pour licenciement illégitime doit en revanche être rejetée.

Le licenciement étant désormais jugé légitime, le jugement entrepris est également infirmé en ses dispositions ayant condamné l’employeur au remboursement des indemnités à Pôle Emploi.

Sur la restitution des sommes versées en exécution de la décision de première instance

La société demande que soit ordonnée la restitution des sommes qu’elle a versées en vertu du jugement.

Cependant le présent arrêt, qui infirme partiellement la décision de première instance, ouvre droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement. Les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la notification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution.

Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur la demande de l’employeur à ce titre.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Mme [V], succombante dans la présente instance est condamnée aux entiers dépens.

Aucune considération tirée de l’équité ou de la situation respective des parties ne conduit à faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’une quelconque des parties en appel.

Sur la demande au titre de l’article 10 du décret du 8 mars 2001

Il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de la salariée en ce que le droit visé à l’article 10 du décret du 8 mars 2001 n’est pas dû lorsque le recouvrement ou l’encaissement des sommes dues en vertu d’une décision de justice par un huissier de justice est effectué sur le fondement d’un titre exécutoire constatant une créance née de l’exécution d’un contrat de travail, en vertu des dispositions de l’article 11 du même décret.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant contradictoirement et en dernier ressort ;

Infirme le jugement du conseil de prud’hommes d’Evreux du 21 avril 2020 en ce qu’il a dit le licenciement de Mme [K] [V] dépourvu de cause réelle et sérieuse, en ce qu’il a condamné la société Engie Home Services au paiement de dommages et intérêts et au remboursement à Pôle Emploi des allocations chômage versées à Mme [K] [V] ;

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

Requalifie le licenciement pour faute grave de Mme [K] [V] en licenciement pour cause réelle et sérieuse ;

Déboute Mme [K] [V] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement illégitime ;

Rappelle que le présent arrêt constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement ;

Dit que les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la signification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution ;

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne Mme [K] [V] aux entiers dépens d’appel.

La greffière La présidente

 


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