Il convient de toujours reproduire dans son assignation, y compris dans la partie “DISCUSSION”, les propos que la société victime estime être dénigrants à son égard. Si les termes évoquent des actes de dénigrement qui ne portent pas uniquement sur des produits et services mais s’appliquent aussi à la personne morale, le qualificatif « diffamant » étant même utilisé, la qualification est celle de la diffamation et suppose dont l’application du régime procédural dérogatoire du droit de la presse.
Il en va de même en présence de critiques directement portées contre la personne morale, notamment la commission d’infractions pénales au titre du code de la consommation en lien avec l’illégalité des produits vendus en toute connaissance de cause, ou encore la pratique du mensonge sur la composition des produits auprès de certains de ses clients et partenaires. Ces critiques étant indivisibles de la mise en cause des produits de l’entreprise, seul le fondement de la diffamation publique envers un particulier peut être invoqué en l’espèce. En application de l’article 12 du code de procédure civile, le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée. Lorsque le dommage ou le trouble invoqué trouve sa cause dans l’une des infractions définies par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, le demandeur ne peut, notamment pour échapper aux contraintes procédurales de cette loi, se prévaloir pour les mêmes faits de qualifications juridiques distinctes restreignant la liberté protégée par cette loi dans des conditions qu’elle ne prévoit pas. Seule l’existence de faits distincts justifie que les dispositions de la loi sur la liberté de la presse n’excluent pas l’application des dispositions de droit commun. Même en l’absence d’une situation de concurrence directe et effective entre les personnes concernées, la divulgation, par l’une, d’une information de nature à jeter le discrédit sur les produits, les services ou les prestations de l’autre peut constituer un acte de dénigrement, ouvrant droit à réparation sur le fondement de l’article 1240 du code civil. Cette divulgation n’entre pas dans les prévisions de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, dès lors qu’elle ne concerne pas la personne physique ou morale elle-même. Si les propos visent à la fois les prestations ou produits d’une entreprise et constituent une critique de son comportement ou son action, et qu’ainsi la mise en cause des produits ou prestations est indivisible de celle de l’entreprise à laquelle sont prêtés des faits ou actions, seul le fondement de la diffamation peut être invoqué. |
Résumé de l’affaire : La société LES NOUVELLES PAILLES a assigné [D] [T] en référé pour des actes de dénigrement, demandant l’injonction de cesser ces actes, de supprimer toute référence à elle sur un site internet, et de lui verser 5 000 euros au titre des frais de justice. [D] [T] a contesté l’assignation, demandant la requalification des faits en diffamation et la nullité de l’assignation pour défaut de mentions obligatoires, ainsi que le rejet des demandes de la société. À l’audience, le tribunal a décidé de requalifier l’action en diffamation, déclarant nulle l’assignation de la société, rejetant la demande reconventionnelle de [D] [T], et condamnant la société à verser 1 000 euros à [D] [T] pour les frais de justice, ainsi qu’aux dépens de l’instance.
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Q/R juridiques soulevées :
Sommaire Quelles sont les conditions de recevabilité d’une action en référé pour dénigrement ?L’article 835 du Code de procédure civile stipule que le référé est une procédure d’urgence permettant d’obtenir des mesures provisoires. Pour qu’une action en référé soit recevable, il faut que le demandeur prouve l’existence d’un trouble manifestement illicite. En l’espèce, la société LES NOUVELLES PAILLES a invoqué des actes de dénigrement à son encontre. Cependant, le tribunal a relevé que les propos dénigrants, tels que rapportés dans l’assignation, pourraient également être qualifiés de diffamation, ce qui relève d’une autre procédure. Ainsi, la qualification des faits est essentielle pour déterminer la recevabilité de l’action. Il est donc crucial que le demandeur précise les faits et les qualifications juridiques dans son assignation, conformément à l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881. Quelles sont les conséquences d’une requalification de l’action en diffamation ?La requalification d’une action en référé pour dénigrement en une action en diffamation a des conséquences procédurales importantes. En effet, la loi du 29 juillet 1881 impose des règles spécifiques pour les actions en diffamation, notamment en ce qui concerne la charge de la preuve et les délais de prescription. L’article 12 du Code de procédure civile précise que le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits litigieux. Dans le cas présent, le tribunal a constaté que les propos tenus par [D] [T] ne visaient pas seulement les produits de la société, mais également sa réputation, ce qui justifie la requalification. Cette requalification entraîne également l’application des dispositions de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881, qui impose des mentions obligatoires dans l’assignation, sous peine de nullité. Quels sont les effets d’une nullité d’assignation en référé ?La nullité de l’assignation en référé a pour effet d’annuler l’ensemble de la procédure subséquente. L’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 stipule que l’assignation doit contenir des mentions précises, faute de quoi elle est déclarée nulle. Dans le cas présent, le tribunal a constaté que l’assignation de la société LES NOUVELLES PAILLES ne respectait pas ces exigences, notamment en ce qui concerne la notification au ministère public et l’absence de mention des textes de loi applicables. Ainsi, la nullité de l’assignation entraîne l’irrecevabilité de la demande initiale, ce qui signifie que la société ne peut pas obtenir les injonctions demandées. De plus, cela ouvre la voie à des demandes reconventionnelles, comme celle de [D] [T] pour abus du droit d’agir. Quelles sont les implications d’une demande reconventionnelle pour abus du droit d’agir ?La demande reconventionnelle pour abus du droit d’agir repose sur l’idée que le demandeur a exercé son droit de manière excessive ou déloyale. En vertu de l’article 32 du Code de procédure civile, le juge peut sanctionner un abus de droit en condamnant le demandeur à des dommages-intérêts. Dans cette affaire, [D] [T] a demandé la condamnation de la société LES NOUVELLES PAILLES à lui verser 20 000 euros pour abus du droit d’agir. Cependant, le tribunal a rejeté cette demande, considérant qu’il n’était pas caractérisé d’abus dans l’exercice du droit d’ester en justice par la société demanderesse. Cela souligne l’importance de prouver l’existence d’une faute pour qu’une telle demande soit accueillie. Quelles sont les conséquences financières d’une décision de justice en matière de frais irrépétibles ?Les frais irrépétibles, régis par l’article 700 du Code de procédure civile, permettent à une partie de demander le remboursement de ses frais d’avocat et autres frais liés à la procédure. Dans cette affaire, la société LES NOUVELLES PAILLES a succombé dans ses demandes, ce qui a conduit le tribunal à la condamner aux dépens de l’instance. Le tribunal a également rejeté la demande de la société au titre de l’article 700, considérant qu’il serait inéquitable que le défendeur supporte l’intégralité de ses frais. Ainsi, la société a été condamnée à verser 1 000 euros à [D] [T] pour couvrir une partie de ses frais irrépétibles, illustrant l’application de l’article 700 dans les décisions de justice. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE PARIS
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N° RG 24/53171 – N° Portalis 352J-W-B7I-C4THO
N° : 1/MM
Assignation du :
29 Avril 2024
[1]
[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 08 octobre 2024
par Gauthier DELATRON, Juge au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,
Assisté de Minas MAKRIS, Faisant fonction de Greffier.
DEMANDERESSE
S.A.S. LES NOUVELLES PAILES
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Maître Julien BENSIMHON de la SCP BENSIMHON Associés, avocats au barreau de PARIS – #P0410
DEFENDEUR
Monsieur [D] [T]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représenté par Maître Lorraine GAY de la SELARL CABINET NOUVELLES, avocats au barreau de PARIS – #P0012
DÉBATS
A l’audience du 06 Septembre 2024, tenue publiquement, présidée par Gauthier DELATRON, Juge, assisté de Minas MAKRIS, Faisant fonction de Greffier,
Après avoir entendu les conseils des parties,
Par acte d’huissier en date du 29 avril 2024, la société LES NOUVELLES PAILLES a attrait [D] [T] à comparaître devant le présent tribunal, statuant en référé. Elle nous demande, au visa de l’article 835 du code de procédure civile, s’estimant victime d’actes de dénigrement :
– De faire injonction à [D] [T] de cesser tout acte dénigrement à l’encontre de la société LES NOUVELLES PAILLES sous astreinte de la somme de 5 000 euros par infractions constatées ;
– De faire injonction à [D] [T] de supprimer toute référence à la société LES NOUVELLES PAILLES sur le site internet www.canne-a-sucre.fr, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir ;
– De condamner [D] [T] à payer à la société LES NOUVELLES PAILLES la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 26 juin 2024 et déposées à l’audience du 06 septembre 2024, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, [D] [T] sollicite :
– in limine litis la requalification des faits en diffamation et subséquemment la nullité de l’assignation en référé pour défaut des mentions obligatoires prescrites par l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 et la prescription de l’action.
– A titre subsidiaire, il nous demande de dire n’y avoir lieu à référé.
– A titre très subsidiaire, il nous demande de juger que le dénigrement n’est pas caractérisé.
– En tout état de cause, il sollicite le rejet des demandes de la demanderesse et sa condamnation à lui verser la somme de 20 000 euros pour procédure abusive, outre 8000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que sa condamnation aux entiers dépens.
Les conseils des parties ont été entendus en leurs observations à l’audience du 06 septembre 2024.
À l’issue de l’audience, il leur a été indiqué que la présente décision serait rendue le 08 octobre 2024 par mise à disposition au greffe.
Sur la requalification sollicitée en défense :
En application de l’article 12 du code de procédure civile, le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.
Lorsque le dommage ou le trouble invoqué trouve sa cause dans l’une des infractions définies par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, le demandeur ne peut, notamment pour échapper aux contraintes procédurales de cette loi, se prévaloir pour les mêmes faits de qualifications juridiques distinctes restreignant la liberté protégée par cette loi dans des conditions qu’elle ne prévoit pas.
Seule l’existence de faits distincts justifie que les dispositions de la loi sur la liberté de la presse n’excluent pas l’application des dispositions de droit commun.
En l’espèce, le défendeur à l’instance et demandeur à l’incident sollicite la requalification de l’action engagée par la société LES NOUVELLES PAILLES, qui, en réalité, se plaindrait de faits de diffamation publique, sous couvert d’une action sur le fondement du dénigrement.
La demanderesse à l’instance et défenderesse à l’incident s’oppose à ce moyen en confirmant que son action se fonde sur des actes de dénigrement de [D] [T].
*
Même en l’absence d’une situation de concurrence directe et effective entre les personnes concernées, la divulgation, par l’une, d’une information de nature à jeter le discrédit sur les produits, les services ou les prestations de l’autre peut constituer un acte de dénigrement, ouvrant droit à réparation sur le fondement de l’article 1240 du code civil.
Cette divulgation n’entre pas dans les prévisions de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, dès lors qu’elle ne concerne pas la personne physique ou morale elle-même.
Si les propos visent à la fois les prestations ou produits d’une entreprise et constituent une critique de son comportement ou son action, et qu’ainsi la mise en cause des produits ou prestations est indivisible de celle de l’entreprise à laquelle sont prêtés des faits ou actions, seul le fondement de la diffamation peut être invoqué.
En l’espèce, la lecture de l’acte introductif d’instance témoigne de ce que la présente action tend à faire injonction à [D] [T] de cesser tout acte de dénigrement à l’encontre de la société LES NOUVELLES PAILLES et de supprimer toute référence à cette dernière sur le site internet www.canne-a-sucre.fr, au motif qu’il aurait « mis en place des actions de dénigrement de la société LES NOUVELLES PAILLES », à travers des courriels adressés aux clients de cette société ainsi que des publications sur un site internet créé par lui www.canne-a-sucre.fr et sur le réseau social LinkedIn. Il est avancé que ces actions causeraient à la société LES NOUVELLES PAILLES des préjudices financiers et d’image.
Il appartient dès lors au tribunal d’analyser l’acte introductif d’instance pour déterminer l’exacte qualification des faits que la demanderesse y allègue.
Il convient à titre liminaire de relever que la demanderesse ne reproduit dans son assignation, y compris dans la partie intitulée “DISCUSSION”, aucun des propos qu’elle estime dénigrants à son égard, qu’il s’agisse des courriels adressés à ses clients – à l’exception de l’extrait d’un courriel adressé à la société ECF GROUP, reproduit en pages 7 et 8 –, des propos tenus sur le site internet www.canne-a-sucre.fr ou encore sur le réseau social LinkedIn. S’il est renvoyé, dans l’assignation, aux pièces n°19 (“constat du site www.canne-a-sucre.fr”) et n°17 (“constat des messages publiés sur LINKEDIN par Monsieur [D] [T]”), celles-ci sont illisibles et ne permettent pas d’analyser les propos querellés sur ces supports. En outre, à l’exception de celui adressé à la société ECF GROUP (pièce n°13 en demande), aucun courriel qu’aurait adressé [D] [T] à ses clients ou partenaires n’est produit par la demanderesse.
Il sera relevé que l’assignation contient de nombreuses expressions qui désignent la demanderesse comme sujet du dénigrement dénoncé. Il en est ainsi en page 5 (« Monsieur [D] [T] et Madame [H] [E] en ont conclu une vindicte particulière à l’encontre de la société LES NOUVELLES PAILLES » ; « II. LES ACTIONS DE DENIGREMENT COMMISES PAR LA SOCIETE GALAXIE TECH AU PREJUDICE DE LA SOCIETE LES NOUVELLES PAILLES », « C’est dans ce contexte que Monsieur [D] [T] a mis en place des actions de dénigrement de la société LES NOUVELLES PAILLES »), en page 6 (« Monsieur [D] [T] a mis en place une campagne massive de dénigrement public à l’encontre de la société LES NOUVELLES PAILLES par laquelle elle prétendait que les produits qu’elle commercialisait ne respectaient pas les réglementations en vigueur », « essayant par tout moyen de faire publier un ou des articles dénigrants et diffamants la société LES NOUVELLES PAILLES »), en page 7 (« pour dénigrer la société LES NOUVELLES PAILLES et ses produits », « a entraîné un nouveau dénigrement à l’encontre de la société LES NOUVELLES PAILLES »), en page 10 (« toutes ces actions de dénigrement ont entrainé une atteinte à l’image de la société LES NOUVELLES PAILLES »), en page 12 (« B. Les actes de dénigrement commis par Monsieur [D] [T] visant la société LES NOUVELLES PAILLES », « Monsieur [D] [T] a commis et commet les actes de dénigrement suivants à l’encontre de la société LES NOUVELLES PAILLES et des produits qu’elle fabrique et commercialise », « Monsieur [D] [T] a mis au point une technique particulièrement insidieuse de dénigrement à l’encontre de la société LES NOUVELLES PAILLES »), et en page 14 (« Il a également publié des messages vindicatifs et dénigrants à l’encontre de la société LES NOUVELLES PAILLES sur les réseaux sociaux », « Les actes de dénigrement commis par Monsieur [D] [T] ont eu et ont des conséquences importantes pour la société LES NOUVELLES PAILLES et lui causent différents préjudices notamment financiers et d’image »).
Ainsi, ces termes évoquent des actes de dénigrement qui ne portent pas uniquement sur des produits et services mais s’appliquent aussi à la personne morale, le qualificatif « diffamant » étant même utilisé.
Par ailleurs, il ressort de l’assignation que la demanderesse reproche au défendeur, en page 7, de prétendre aux clients et partenaires de la société LES NOUVELLES PAILLES que les pailles qu’elle vend seraient illégales et ne respecteraient pas la règlementation en vigueur, la demanderesse y voyant des « accusations extrêmement graves qui sont constitutives d’infractions pénales au titre du code de la consommation », atteignant « la réputation commerciale de la société LES NOUVELLES PAILLES et sa probité », autrement dit une imputation susceptible d’être diffamatoire à son encontre. En page 9, elle reproche également au défendeur d’avoir, lors de courriels échangés avec l’organisme ORIGINE France GARANTIE, prétendu que la société LES NOUVELLES PAILLES aurait abusé cet organisme en lui donnant « des informations fausses » et en lui mentant sur les produits composant ces pailles, imputation qu’elle reprend en ces termes, page 14 : « Il a dans un deuxième temps tenté de salir l’honneur et la réputation de la société LES NOUVELLES PAILLES en prétendant qu’elle aurait abusé cet organisme ». En outre, en page 13, elle reproche au défendeur d’avoir « accusé la société LES NOUVELLES PAILLES de fabriquer et commercialiser des produits illégaux et a accusé la société ECF d’en être complice », d’avoir « effectué le même dénigrement, accusation d’illégalité des pailles fabriquées et commercialisées par la société LES NOUVELLES PAILLES et complicité », auprès de la société POMONA, la société LA CORNICHE, la société MMV, la société Groupe KASINOS BRETAGNE.
Or ces constatations permettent à elles seules d’observer que les propos querellés, à les supposer démontrés, ne viseraient pas seulement les produits vendus par la société LES NOUVELLES PAILLES mais comporteraient aussi des critiques directement portées contre la personne morale, notamment la commission d’infractions pénales au titre du code de la consommation en lien avec l’illégalité des produits vendus en toute connaissance de cause, ou encore la pratique du mensonge sur la composition des produits auprès de certains de ses clients et partenaires.
Ces critiques étant indivisibles de la mise en cause des produits de l’entreprise, seul le fondement de la diffamation publique envers un particulier peut être invoqué en l’espèce.
L’action engagée par la société LES NOUVELLES PAILLES doit donc être requalifiée en ce sens.
Sur la nullité de l’assignation invoquée en défense
Il est notamment soulevé la nullité de l’assignation en référé pour manquement aux prescriptions de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881.
A ce titre, il convient de rappeler qu’aux termes de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881, l’assignation délivrée à la requête du plaignant doit, à peine de nullité, préciser et qualifier le fait invoqué et indiquer le texte de loi applicable à la demande, contenir élection de domicile dans la ville où siège la juridiction saisie et être notifiée au ministère public ; ces dispositions sont applicables à l’action en référé.
En l’espèce, il est observé que la présente assignation n’a pas été dénoncée au ministère public et ne comporte aucune mention des textes de loi applicables aux faits ainsi requalifiés.
Dans ces conditions, il y a lieu de déclarer nulle l’assignation formée par la société LES NOUVELLES PAILLES et l’ensemble de la procédure subséquente.
Sur les autres demandes
Sur la demande reconventionnelle fondée sur un abus du droit d’agir :
Le défendeur à l’instance et demandeur à l’incident sollicite la condamnation de la société LES NOUVELLES PAILLES à lui payer la somme de 20.000 euros, pour abus du droit d’agir.
Il n’est caractérisé, en l’espèce, aucune faute de cette dernière faisant dégénérer en abus l’exercice du droit d’ester en justice.
Dans ces conditions, la demande de [D] [T] formée de ce chef sera rejetée.
Sur la demande formée au titre des frais irrépétibles :
La société LES NOUVELLES PAILLES succombant, elle sera condamnée aux entiers dépens de l’instance.
Sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
Il serait inéquitable que le défendeur à l’instance conserve l’intégralité de la charge de ses frais irrépétibles de sorte que la société demanderesse sera condamnée à lui payer la somme globale de 1000 euros.
LE TRIBUNAL statuant publiquement par ordonnance de mise à disposition au greffe, contradictoirement et en premier ressort,
Accueillons la demande formée par [D] [T] et disons y avoir lieu à requalification de l’action engagée par la société LES NOUVELLES PAILLES sur le fondement d’une action en référé de droit commun en une action en référée fondée sur l’existence d’une diffamation publique envers particulier prévue et réprimée par les dispositions de la loi du 29 juillet 1881,
Déclarons nulle l’assignation de la société LES NOUVELLES PAILLES signifiée en date du 29 avril 2024 ;
Rejetons la demande reconventionnelle pour abus du droit d’agir formée par [D] [T] ;
Rejetons la demande de la société LES NOUVELLES PAILLES au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamnons la société LES NOUVELLES PAILLES à payer à [D] [T], la somme de mille euros (1000 €) sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamnons la société LES NOUVELLES PAILLES aux dépens de l’instance.
Rappelons que la présente ordonnance est exécutoire de plein droit.
Fait à Paris le 08 octobre 2024
Le Greffier, Le Président,
Minas MAKRIS Gauthier DELATRON