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Nier les compétences d’une société en matière de transactions immobilières, constitue une divulgation d’une information de nature à jeter sur elle le discrédit constitutif d’un dénigrement commercial.
Selon l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. L’acte de concurrence déloyale ou parasitaire suppose une immixtion dans le sillage d’un autre professionnel, afin de tirer profit de ses investissements, de sa renommée et de son savoir-faire, en réalisant ainsi des économies injustifiées. Le dénigrement, susceptible de caractériser un acte fautif au sens de l’article 1240 du code civil, qui constitue une catégorie d’acte de concurrence déloyale, consiste à jeter publiquement le discrédit sur les produits, l’entreprise ou la personnalité d’un concurrent pour en tirer un profit. La stigmatisation de la personne du concurrent ne suffit pas à caractériser un dénigrement sanctionné par la responsabilité civile. Il faut que s’y ajoute un motif commercial et il convient de démontrer que les allégations désobligeantes avaient pour objectif de capter la clientèle du commerçant critiqué. |
→ Résumé de l’affaireL’affaire oppose la société Aux Belles Demeures et son président à la société Citya Belvia [Localité 1] pour des faits de concurrence déloyale. La société Citya Belvia [Localité 1] accuse la société Aux Belles Demeures et son président d’avoir dénigré ses services, détourné des éléments de sa base de données clients, pratiqué un démarchage déloyal et violé des règles légales. Le tribunal de commerce de Carcassonne a initialement débouté la société Citya Belvia [Localité 1] de ses demandes, mais cette dernière a fait appel. La société Citya Belvia [Localité 1] réclame des dommages et intérêts pour les préjudices subis. La société Aux Belles Demeures et son président contestent les accusations de concurrence déloyale et demandent le rejet des demandes de la société Citya Belvia [Localité 1].
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 02 JUILLET 2024
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 22/05083 – N° Portalis DBVK-V-B7G-PSFX
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 14 SEPTEMBRE 2022
TRIBUNAL DE COMMERCE DE CARCASSONNE
N° RG 2019 002003
APPELANTE :
S.A.R.L. CITYA BELVIA [Localité 1] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Sandy RAMAHANDRIARIVELO de la SCP RAMAHANDRIARIVELO – DUBOIS, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Monsieur [C] [U]
né le 17 Septembre 1962 à [Localité 6] (89)
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représenté par Me Iris RICHAUD, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Yann GARRIGUE de la SELARL LX MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant
Représenté par Me Charline BREUIL, avocat au barreau de CARCASSONNE, avocat plaidant
S.A.S AUX BELLES DEMEURES prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représenté par Me Iris RICHAUD, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Yann GARRIGUE de la SELARL LX MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant
Représenté par Me Charline BREUIL, avocat au barreau de CARCASSONNE, avocat plaidant
Ordonnance de clôture du 30 Avril 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l’article 914-5 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 MAI 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par le même article, devant la cour composée de :
Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre
Mme Anne-Claire BOURDON, conseillère
M. Thibault GRAFFIN, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Audrey VALERO
ARRET :
– Contradictoire
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Audrey VALERO, greffière.
La S.A.S. Aux Belles Demeures, inscrite au RCS de Carcassonne depuis le 20 septembre 2001, exerce l’activité d’agence immobilière sous l’enseigne Laforêt Immobilier. M. [C] [U] en était le gérant puis en est devenu le président en février 2016.
La société Aux Belle Demeures travaillait sur des transactions et locations immobilières avec la S.A.R.L Citya Belvia [Localité 1] (anciennement dénommée Belvia Immobilier), également agence immobilière à [Localité 1].
Par ordonnance du 3 mars 2017, le tribunal de commerce de Carcassonne a fait droit à la requête de la société Citya Belvia Carcassonne sollicitant à titre conservatoire la copie par huissier de tous supports informatiques pouvant caractériser des actes de concurrence déloyale.
Le 22 mars 2017, la SCP Arnaud Durand & Benoît Vervueren, huissiers de justice, a procédé à un constat suite à la copie de plusieurs dossiers clients de la société Aux Belles Demeures.
Le 10 novembre 2017, un nouveau constat d’huissier a été réalisé au titre d’une ordonnance du tribunal de commerce de Carcassonne du 28 septembre 2017.
Par exploit du 30 septembre 2019, la société Citya Belvia [Localité 1] a assigné la société Aux Belles Demeures et M. [C] [U] en paiement.
Par jugement contradictoire du 14 septembre 2022, le tribunal de commerce de Carcassonne a :
– constaté l’absence de preuve permettant de conclure que la société Aux Belles Demeures et M. [U] ont détourné des éléments de la base des données de la société Citya Belvia [Localité 1] ;
– déclaré que la société Aux Belles Demeures et M. [U] n’ont commis aucun fait fautif de concurrence déloyale à l’encontre de la société Citya Belvia [Localité 1]’;
– débouté la société Citya Belvia [Localité 1] de l’ensemble de ses demandes et de toutes ses demandes en réparation de son préjudice’;
– débouté la société Citya Belvia [Localité 1] de sa demande portant interdiction faite Aux Belles Demeures et à M. [U] d’entrer en contact avec des clients de Citya Belvia [Localité 1]’;
– ordonné l’exécution provisoire du jugement en application de l’article 514 du code de procédure civile’;
– condamné la société Citya Belvia [Localité 1] au paiement d’une somme de 3’500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
– et condamné la société Vitya Belvia [Localité 1] aux entiers dépens dont frais de greffe liquidés à la somme de 94,34 euros dont 15,73 euros de TVA.
Par déclaration du 5 octobre 2022, la société Citya Belvia [Localité 1] a relevé appel de ce jugement.
Par conclusions du 14 février 2024, la société Citya Belvia [Localité 1] demande à la cour, au visa des articles 9, 202 et 405 du code de procédure civile, de l’article 1382 ancien du code civil et de l’article L.342-1 du code de la propriété intellectuelle, de :
– infirmer le jugement querellé’;
– et statuant à nouveau, dire établies et caractérisées les fautes conjointes de concurrence déloyale de par la société Aux Belles Demeures et M. [U] par le dénigrement de Citya sur ses services de transactions et la présentation des intimés de fausse qualité ; le détournement sans droits des éléments de la base de données et fichiers de clientèle comportant les données personnelles de propriétaires de Citya, la violation des articles L. 107-1, R. 107 A -1 à R. 109 A-2 du livre des procédures fiscales et une violation de la loi n° 78 – 17 du 6 janvier 1978′; faits prévus et réprimés par les articles 226 ‘ 21,226- 31, 226 ‘ 24 du code pénal ; l’utilisation de ces informations pour un démarchage déloyal ciblé à fréquence répétée de la clientèle de la concluante, la violation des règles légales issue la loi dite Hoguet n° 70-9 du 2 janvier 1970 avec pratique des tarifs illicites et pratiques commerciales abusives ; dire déloyal le démarchage des intimés de la clientèle de Citya par le cumul des actes ainsi établis ;
– dire que ces fautes ont causé les préjudices établis par l’appelante et les déclarer responsables, tenus à indemnisation et cessation.’;
– en conséquence : condamner in solidum la société Aux Belles Demeures et M. [C] [U] à lui payer à titre dommages et intérêts, sous réserves d’en parfaire l’évaluation, les sommes de :
– 113.184,22 euros en réparation du préjudice résultant de la perte des mandats de gérance détournés ;
– 179 190 euros en réparation du préjudice résultant de la perte de commissions sur transactions’;
– 44. 000 euros en réparation du préjudice subi au titre du détournement sans droits des bases de données et du fichier de clientèle de la concluante, issus des investissements de la concluante’;
– enjoindre solidairement à la société Aux Belles Demeures et M. [U], sous astreinte de 3000 euros par jour à compter du prononcé de la décision à intervenir, ladite astreinte courant à titre provisoire pendant 90 jours et se réservant la liquidation de celle-ci, d’avoir à procéder sans délai à la destruction de tous fichiers obtenus, détenus ou élaborés sur la base de données de la concluante tels que listés au constat d’huissier du 22 mars 2017 et à ses annexes et des clients issus du fichier Citya tels que listés en pièce 1 en tous leurs systèmes informatiques et sur tous supports sans en conserver une quelconque copie ; disant que la destruction devra s’opérer sur constat d’huissier et du technicien les ayant récoltés savoir M. [P] [M], expert agréé près la cour d’appel de Montpellier pour assister à ces opérations sur tout support détenu par la société Aux Belles Demeures et M. [U] et qui en dressera constat technique à annexer au constat d’huissier dont les frais comme ceux du technicien seront à leur charge comme dépens’;
– faire défense à la société Aux Belles Demeures et à M. [U], sous astreinte de 15 000 euros par infraction constatée d’utiliser quelque information que ce soit contenue à ces fichiers, ni les transmettre à quiconque à quelque titre que ce soit pour le passé, le présent et l’avenir’;
faire défense à la société Aux Belles Demeures et M. [U], de faire quelque acte de concurrence à Citya à quelque titre que ce soit sur l’ensemble des clients et contacts désignés tels que listés au constat d’huissier du 22 mars 2017 et à ses annexes et des clients issus du fichier Citya tels que listés en pièce 1 pendant une durée de trois années à compter du prononcé de la décision à intervenir et sur l’ensemble du département de l’Aude (11)’;
– ordonner la publication de l’arrêt à intervenir dans un journal de presse locale à charge solidaire des frais avancés des intimés pour une limite de frais de 5000 euros ;
– condamner in solidum la société Aux Belles Demeures et M. [U] à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens en application des articles 696 et 699 du code de procédure civile ; dont ceux des deux constats d’huissier du 22 mars 2017 et 10 novembre 2017 et ceux du rapport de son technicien M. [M]; ainsi que ceux afférents au constat technique de M. [M] et au constat d’huissier à réaliser pour constat de destruction des données’;
– et, débouter les intimées de leurs demandes comme irrecevables et infondées.
Au soutien de son appel, elle fait valoir pour l’essentiel que’:
– en premier lieu, contrairement à ce qu’ont décidé les premiers juges, les intimés se sont livrés à des actes de dénigrement, M. [U] affirmant à un de ses clients que «’la société Citya Belvia [Localité 1] n’avait pas de service de transactions, ne faisait que de la gestion de syndic, de la gestion locative”»’; ce qu’il a d’ailleurs reconnu en première instance en indiquant que ses propos n’étaient en rien dénigrants'(alors qu’en appel, il conteste désormais les avoir tenus) ;
– ces propos caractérisent une atteinte à la réputation et aux capacités de concurrence de la société Citya Belvia [Localité 1] sur le marché de la transaction et jettent sur elle un discrédit sur les produits et services qu’elle commercialise’;
– en second lieu, il résulte également de l’attestation de l’ancien gérant de l’agence de la société Citya Belvia [Localité 1] que M. [U] lui a affirmé détenir des fichiers de clients de cette dernière ;
– la détention des listes est en outre confirmée par le constat d’huissier du 22 mars 2017, duquel il ressort que la société Aux Belles Demeures a conclu au moins 9 mandats de vente sur la base de la prospection systématique de ses fichiers de clients’;
– curieusement, alors que les mandats arrivaient à leur terme avec ses clients, lesquels résidaient dans toute la France, ceux-ci les ont résiliés tous sur le même modèle’et ont vendu leurs biens par l’intermédiaire de la société Aux Belles Demeures ;
– les intimés ont même admis que sur une période de 3 ans, au moins 31 ventes de biens avaient été effectuées à partir de ses fichiers de clients’;
– il en résulte que la prospection déloyale de la société Aux Belles Demeures et de M. [U] sont établis’;
– de surcroît, la société Aux Belles Demeures a violé les règles concernant les honoraires de transaction lui permettant ainsi de capter ses clients et s’est ainsi livrée à des pratiques commerciales trompeuses’;
– s’agissant de son préjudice, 33 mandats de gestion ont été résiliés à la suite du démarchage de la société Aux Belles Demeures’; ce qui correspond à un préjudice de 113’184,22 euros’;
– par ailleurs, la perte de chance de réaliser une transaction sur la vente des biens doit également être indemnisée à hauteur de 179 190 euros.
Par conclusions du 20 mars 2023, la société Aux Belles Demeures et M. [U] demandent à la cour, au visa de l’article 1240 du code civil, de’:
– confirmer le jugement querellé’;
– en conséquence,
– constater l’absence de faits caractérisant des faits de concurrence déloyale de leur part’;
– constater l’absence d’appréhension et donc de détournement de la base de données de la société Citya Belvia [Localité 1] par la société Aux Belles Demeures et de M. [U] et donc de l’absence de détournement des fichiers clients contenus dans cette base de données’;
– constater l’absence de démarchage déloyal de clientèle de leur part’;
– constater l’absence de pratiques tarifaires illicites et de pratiques commerciales abusives qu’ils auraient commises’;
– en conséquence, constater l’absence de préjudice de la société Citya Belvia [Localité 1] portant sur la perte de mandats de gestion, sur la perte de commissions de transaction et sur le détournement de fichiers clients’;
– débouter la société Citya Belvia [Localité 1] de l’ensemble de ses demandes’;
– condamner la société Citya Belvia [Localité 1] au paiement d’une somme de 10’000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Ils indiquent principalement que’:
– la société Citya Belvia [Localité 1] et la société Aux Belles Demeures et M. [U] ont un temps collaboré puisque la seconde était chargée de trouver pour la première qui gérait des appartements en loi de défiscalisation des locataires pour le compte des clients de la première’;
– les propos que la société Citya Belvia [Localité 1] lui prête, et qu’elle a toujours contesté avoir tenus, ne sont absolument pas constitutifs de dénigrements, en l’absence de toute appréciation péjorative et de toute intention malveillante’; en outre, ces propos ont été tenus dans un contexte privé et non pas public, de sorte que la seule attestation d’un de ses collaborateurs ne permet pas à l’appelante de démontrer l’existence d’un tel dénigrement’;
– le constat huissier ne démontre nullement l’existence de dossiers de clients qui proviendraient de la société Citya Belvia [Localité 1], mais en réalité des clients issus de son travail de prospection faisant suite à l’insatisfaction des propriétaires de cette dernière’;
– il ressort du constat d’huissier du 22 mars 2017, que seulement 10 dossiers d’anciens clients de la société Citya Belvia [Localité 1] ont été retrouvés dans ses fichiers informatiques’;
– en définitive, la société Citya Belvia [Localité 1] soutient que 33 mandats de ses clients auraient été détournés, ce qui sur une période de 8 ans correspond à quatre clients par an’;
– elle utilise des méthodes de prospection tout à fait classiques qui ne sont pas déloyales ; au demeurant, quand bien même elle est titulaire de mandats de gestion, la société Citya Belvia [Localité 1] ne dispose pas d’un droit exclusif de mandat en cas de vente’par ses clients de leurs biens immobiliers ;
– il n’est nullement rapporté la preuve qu’elle ne respecterait pas la réglementation en matière d’honoraires ; elle pratique tout à fait classiquement des honoraires compris entre 8 et 9 % du prix des biens la vente’;
– la société Citya Belvia [Localité 1] ne justifie en outre nullement de ses préjudices.
L’ordonnance de clôture est datée du 30 avril 2024.
Selon l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Sur le fondement de ces dispositions, la société Citya Belvia [Localité 1] sollicite la condamnation de la société Aux Belles Demeures et de M. [U] à lui payer diverses sommes correspondant à ses préjudices patrimoniaux consécutifs aux actes de concurrence déloyale commis à son préjudice.
Elle doit rapporter la preuve de fautes, d’un préjudice et d’un lien de causalité direct entre eux imputables à la société Aux Belles Demeures et à M. [U].
L’acte de concurrence déloyale ou parasitaire suppose une immixtion dans le sillage d’un autre professionnel, afin de tirer profit de ses investissements, de sa renommée et de son savoir-faire, en réalisant ainsi des économies injustifiées.
Sur le dénigrement
Le dénigrement, susceptible de caractériser un acte fautif au sens de l’article 1240 du code civil, qui constitue une catégorie d’acte de concurrence déloyale, consiste à jeter publiquement le discrédit sur les produits, l’entreprise ou la personnalité d’un concurrent pour en tirer un profit.
La stigmatisation de la personne du concurrent ne suffit pas à caractériser un dénigrement sanctionné par la responsabilité civile. Il faut que s’y ajoute un motif commercial et il convient de démontrer que les allégations désobligeantes avaient pour objectif de capter la clientèle du commerçant critiqué.
En l’espèce, la société Citya Belvia [Localité 1] reproche à la société Aux Belles Demeures et à M. [U] les propos suivant tenus par ce dernier à l’un de ses clients qu’elle considère comme dénigrants, aux termes desquels : «’Cytia n’a pas de service de transaction, pas de professionnels de transaction car elle ne gère que la location et le syndic (…), Citya n’est pas connue pour la transaction’».
M. [U] conteste avoir tenu les propos qui lui sont précisément prêtés, tout en indiquant que ceux-ci ont été sortis de leur contexte et que dans tous les cas ils ne sont ni malveillants ni dégradants pour l’image de la société Citya Belvia [Localité 1].
La teneur de ses propos résulte toutefois de l’attestation circonstanciée de Mme [H], collaboratrice de la société Citya Belvia [Localité 1], qui a été témoin direct de la conversation tenue par M. [U] au téléphone avec un client de la société Citya Belvia [Localité 1], alors que ce dernier ignorait sa qualité.
La précision de son témoignage ne saurait devoir être remise en doute eu égard à sa qualité de collaboratrice de la société Citya Belvia [Localité 1].
En outre, ces propos ont bien été tenus publiquement puisque destinés à un client de la société Citya Belvia [Localité 1], et leur objectif était assurément de le capter.
Or, en niant les compétences de la société Citya Belvia [Localité 1] en matière de transactions immobilières, M. [U] s’est livré à la divulgation d’une information de nature à jeter sur elle le discrédit constitutif d’un dénigrement commercial.
En conséquence, ce dénigrement de la société Citya Belvia [Localité 1] auquel s’est livré M. [U] auprès d’un des clients de cette dernière, destiné assurément à être diffusé à une clientèle nombreuse de propriétaires d’appartements, acquis selon un dispositif fiscal temporaire et donc devant entraîner des cessions immobilières régulières et nombreuses, a causé à la société Citya Belvia [Localité 1] un préjudice qui sera entièrement réparé par l’octroi de la somme de 15’000 euros à titre de dommages-intérêts.
Le jugement sera réformé de ce chef.
Sur le détournement de fichiers
Le démarchage de la clientèle d’une société par une société concurrente est licite en vertu du principe de la liberté du commerce et de l’industrie, sauf acte déloyal.
Sur autorisation du président du tribunal de commerce de Carcassonne, la société Citya Belvia Carcassonne a fait établir deux constats d’huissier les 22 mars et 10 novembre 2017 afin de rechercher si la société Aux Belles Demeures et M. [U] détenaient son fichier de clients comportant environ 1200 personnes.
Or, il ressort du premier procès-verbal de constat que l’huissier instrumentaire n’a nullement découvert le fichier de clients de la société Citya Belvia [Localité 1], identifiant seulement 9 dossiers d’anciens clients de cette dernière dans les documents papiers ou informatiques de la société Aux Belles Demeures et de M. [U].
Lors du second constat d’huissier, ledit fichier n’a pas non plus été découvert dans les ordinateurs de la société Aux Belles Demeures et de M. [U], l’huissier mentionnant en outre dans son procès-verbal : «’nous avons ensuite lancé des outils d’indexation de contenus numériques et interrogé chacun des 1119 noms de clients du fichier de la société Citya Belvia [Localité 1] et 16 mots-clés de l’ordonnance. Aucune correspondance n’a été trouvée’».
Il sera observé que la nécessité pour la société Citya Belvia [Localité 1] de faire procéder à un second constat d’huissier suppose qu’elle ait considéré, comme le fait également à cet instant la cour, que le premier n’avait pas été probant dans sa démarche d’identification d’un procédé de concurrence déloyale de la part de la société Aux Belles Demeures et de M. [U]’; alors en outre que le second procès-verbal de constat huissier n’a pas davantage permis une telle découverte.
Même si la société Citya Belvia [Localité 1] verse aux débats une attestation d’un nommé M. [J], directeur d’une agence Citya dans la région de [Localité 7], dans laquelle celui-ci indique que M. [U] lui avait dit qu’il détenait un fichier des clients de la société Citya Belvia [Localité 1], un tel fichier n’a pas été retrouvé ni dans les ordinateurs professionnels ni dans les ordinateurs personnels de la société Aux Belles Demeures ou de M. [U].
Il n’est en conséquence par rapporté la preuve par la société appelante que certains de ses clients l’ayant délaissée pour devenir des clients de la société Aux Belles Demeures et de M. [U] le seraient devenus par un procédé de concurrence déloyale, à savoir la détention d’un de ses fichiers obtenu illégalement.
Cette preuve n’est pas rapportée par la circonstance que certains de ses anciens clients ont utilisé un modèle unique de lettre pour résilier le mandat les liant à la société Citya Belvia [Localité 1], qui n’établit pas non plus l’existence d’un fichier clients de la société Citya Belvia [Localité 1] détenu illégalement par la société Aux Belles Demeures et M. [U].
La société Citya Belvia [Localité 1] étant défaillante à rapporter la preuve de la détention illégale par les intimés d’un fichier de clients lui appartenant, le moyen tiré de la prospection déloyale, c’est-à-dire basée sur ledit fichier, ne peut qu’être également rejeté, et ce nonobstant les explications de la société Aux Belles Demeures et de M. [U] sur leurs méthodes de prospection et la critique qui en est faite par la société Citya Belvia [Localité 1], notamment quant à la licéité de certaines de ces méthodes, en particulier s’agissant de la consultation du cadastre à des fins commerciales pourtant prohibée, inopérantes à cet égard.
Il en résulte donc que la société Citya Belvia [Localité 1] ne rapporte pas la preuve que la concurrence que lui livre la société Aux Belles Demeures et M. [U] serait déloyale.
Elle sera dès lors déboutée de ses demandes formées de ce chef, et le jugement sera confirmé.
Sur la violation des règles concernant les honoraires de transaction
La société Citya Belvia [Localité 1] reproche à la société Aux Belles Demeures de ne pas respecter les dispositions applicables en matière d’annonces de vente immobilière, issues notamment de la loi n° 70- 9 du 2 janvier 1970, en ce qui concerne les honoraires qu’elle pratique et qui ne seraient pas clairement énoncés dans ses annonces immobilières.
Cependant, l’appelante procède par voie d’affirmation ou par déduction, sans verser aux débats aucune pièce probante, alors que la société Aux Belles Demeures et M. [U] produisent de nombreux mandats de vente qui mentionnent, d’une part la perception par le mandataire de commissions dont le montant est clairement indiqué, ainsi que celui du vendeur ou de l’acheteur qui doit en payer le prix, et qui démontrent, d’autre part qu’elle applique des honoraires compris entre 8 et 10% conformément aux pratiques de la profession.
Le moyen sera également rejeté et le jugement également confirmé.
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté la S.A.R.L Citya Belvia [Localité 1] de ses demandes au titre d’un dénigrement commercial,
Statuant à nouveau de ce chef,
Condamne in solidum la S.A.S. Aux Belles Demeures et M. [C] [U] à payer à la S.A.R.L Citya Belvia [Localité 1] la somme de 15’000 euros à titre de dommages-intérêts,
Confirme pour le surplus le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne in solidum la S.A.S. Aux Belles Demeures et M. [C] [U] aux dépens d’appel, ainsi qu’à payer à la S.A.R.L Citya Belvia [Localité 1] la somme de 3’000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
le greffier, la présidente,