Démarchage Téléphonique : décision du 6 décembre 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 20/04691

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Démarchage Téléphonique : décision du 6 décembre 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 20/04691

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1re chambre sociale

ARRET DU 06 DECEMBRE 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 20/04691 – N° Portalis DBVK-V-B7E-OXMV

Arrêt n° :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 13 OCTOBRE 2020 du CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE PERPIGNAN

N° RG F18/00489

APPELANTE :

Madame [L] [K]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, (postulant) substitué par Me LAPORTE, avocate au barreau de Montpellier

et représentée par Me VILELLA, avocate au barreau des Pyrénées-Orientales (plaidant)

INTIMEE :

S.A.R.L. SASDELMAS, enregistrée au RCS de Perpignan sous le n°493 890 230, prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 2]

Représentée par Me Christine AMADO, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES

Ordonnance de clôture du 20 Septembre 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 OCTOBRE 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Madame Magali VENET, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Marie BRUNEL

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par Mme Marie BRUNEL, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Mme [L] [K] a été engagée par la SARL Action 2D devenue SARL SAS [R] par contrat de travail à durée indéterminée en qualité d’assistante administrative et comptable, sous contrat initiative emploi à durée indéterminée à compter du 1er mars 2012 en contrepartie d’une rémunération brute mensuelle de 1598 euros pour 169 heures de travail.

La convention collective applicable est celle des vins, cidres jus de fruits, sirops, spiritueux et liqueurs de France du 13 février 1969, étendue par arrêté du 1er juin 1973 JONC 2 septembre 1973.

Du 2 au 12 janvier 2018 puis du 27 avril au 29 mai 2018 Mme [K] a été placée en arrêt de travail.

Le 29 mai 2018 le médecin du travail l’a déclarée inapte à son emploi en précisant: ‘l’état de santé du salarié fait obstacle tout reclassement dans un emploi’.

Par courrier du 29 juin 2018 l’employeur a notifié à Mme [K] son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 3 décembre 2018, Mme [K] a saisi le conseil de prud’hommes de Perpignan afin de contester son licenciement et voir condamner l’employeur au paiement de diverses sommes.

Par jugement en date du 13 octobre 2020, Mme [K] a été déboutée de l’intégralité de ses demandes.

Par déclaration en date du 27 octobre 2020, Mme [K] a relevé appel de la décision.

Vu les dernières conclusions de Mme [L] [K] en date du 21 mars 2023 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions.

Vu les dernières conclusions de la société SAS [R] en date du 17 septembre 2023 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions.

L’ordonnance de clôture est en date du 20 septembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’exécution du contrat de travail:

Sur les rappels de salaire:

Rappel de salaire au titre de l’application d’une classification supérieure:

La convention collective applicable est celle des vins, cidres jus de fruits, sirops, spiritueux et liqueurs de France du 13 février 1969, étendue par arrêté du 1er juin 1973 JONC 2 septembre 1973.

La classification des emplois des ouvriers et employés est déterminée par l’accord du 31 janvier 1994 étendu par arrêté du 29/06/94 modifié par avenant n°1 du 22 octobre 2002 étendu par arrêté du 26 mars 2013 (JORF 4 avril 2003)

La salariée qui revendique l’application d’un niveau de classification supérieure à celui qui lui est appliqué, doit établir qu’elle exerce effectivement les fonctions correspondant à cette dernière qualification.

En l’espèce, le contrat de travail et les fiches de paie de Mme [K] ne mentionnent ni sa classification, ni son échelon.

Elle était cependant rémunérée à hauteur du SMIC, ce qui correspond à une classification niveau 1 échelon 1

Mme [K] revendique d’être classée au niveau III échelon A de la convention collective applicable et sollicite en outre une majoration de salaire correspondant à la position hiérarchique immédiatement supérieure , niveau III échelon B(sans modifier sa position hiérarchique) en tant qu’employée utilisant habituellement une ou plusieurs langues étrangères et assurant la traduction, ou sténographie en langue étrangère.

L’employeur retient une classification inférieure, II B

La classification niveau II se définit ainsi :

‘Exécution de travaux qualifiés, en appliquant des consignes verbales ou écrites, laissant place à des initiatives limitées. Niveau CAP (voie scolaire ou formation professionnelle continue ou expérience professionnelle équivalente.)Opérations à enchaîner de façon cohérente en vue des résultats à obtenir ou opérations caractérisées par leur variété et leur complexité. Salarié placé sous le contrôle d’un salarié de qualification supérieure.

Et L’échelon B se définit ainsi: Exécution d’un cycle d’opérations cohérentes ou particulières nécessitant des connaissances professionnelles, pouvant être contrôlée immédiatement d’après les directives.’

La classification niveau III se définit ainsi:

‘Exécution de travaux très qualifiés impliquant autonomie et initiative, exigeant la mise en oeuvre de connaissances particulières. Métier complètement maîtrisé. Choix du mode d’exécution, de la succession des opérations et contrôle du résultat. Etablit des documents selon la spécialité. Rôle d’entraînement , d’assistance et d’information. BP ou bac ou certificat de qualification professionnelle(CQP)de la spécialité(voie scolaire ou formation professionnelle équivalente). Salarié placé sous la responsabilité d’une personne de qualification supérieure.

Et l’échelon A se définit ainsi:

‘Exécution d’opérations complexes de production de travaux techniques ou administratifs de difficulté équivalente.’

Mme [K] fait valoir que les fonctions qu’elle exerçait réellement étaient celle d’une assistante administrative et commerciale, intitulé figurant sur ses fiches de paie, et qu’elle bénéficiait d’autonomie dans l’exercice de ses missions qui étaient les suivantes:

– La correspondance en français et en anglais :

* Accueil téléphonique : traitement des demandes, litiges, etc.

* Traitement courriel : réception, réponse, transmission

Elle verse aux débats un courriel de son employeur du 27 mars 2012 lui demandant de ‘ faire la traduction de 8 lignes concernant le muscat 2005″, ainsi que des courriels très brefs échangés en langue anglaise avec des clients pendant la période de travail , et enfin un échange de courriels avec M. [W] [U] au cours du mois de décembre 2019 dans lequel ce dernier indique : ‘vous parlez suffisamment bien l’anglais et vos mails étaient toujours dans le bon sens’

– La clientèle en français et en anglais :

* Commandes : enregistrement et suivi des commandes (clients particuliers, professionnels

France, Europe et Grand Export) ‘

* Encadrement de la préparation des commandes

* Gestion des enlèvements (calcul ou demande de cotation, choix du transporteur,

enregistrement, préparation des documents d’expéditions, documents douaniers et

réglementaires

* Parfois livraison

* Négociation litiges avec les transporteurs

* Facturation quand la patronne est absente

* Relance règlements en retard

* Récupération et tri courrier postal (procuration lettres recommandées pour le Mas [R] mais également pour la fille de Mr [R] et un client de Mme [R] : elle tient la comptabilité pour les établissements Nettwork Mr [H])

* Enregistrement des règlements par chèques et dépôt en banque

Elle verse aux débats des bordereaux de remises de chèque, des bordereaux relatifs à des préparations et expédition de commandes incluant les modes de calcul du port, des échanges de mails relatifs au développement des ventes à l’étranger.

Elle produit en outre l’autorisation qui lui serait donnée, en sa qualité d’assistante commerciale, de récupérer au siège du Mas [R] ainsi qu’au bureau de poste du courrier d’un client de Mme [R]

– Prospection en français et en anglais :

* Recherche nouveaux clients (avant tournée ou en temps zéro), par téléphone, par mail = envoi

des documents commerciaux, tarifs et échantillons (emballage échantillons et envoi).

* Tenue et suivi des renseignements prospects puis clients

* Accueil physique de la clientèle en français et en anglais particulière (toujours) et professionnelle (quand le patron n’est pas là)

– Tournées, salons et concours:

* Elaboration des tournées : prises de contact clients par tel. pour commandes ; prises de contacts de prospects ; élaboration du parcours (calculs distance, temps de trajet et temps de rendez-vous); réservations (hôtel, avion, etc.) ; adaptation en temps réel quand désistement.

Elle verse aux débats, des cartes géographiques relatives au déroulement de tournées, des justificatifs relatifs à sa participation , en sa qualité de représentante du Mas [R], à des réunions professionnelles ,d’information ou de préparation de salons, ainsi que les listings de préparation de matériel pour les salons.

* Elaboration des dossiers d’inscription, envoi des échantillons ; suivi; négociation sur délais de paiement

– Administration communication et réseaux sociaux :

* Mise en place au fil des armées d’un réseau de sommeliers et grands chefs de renommée via Facebook

Elle verse aux débats sa page facebook intitulée ‘ [L] [K] Mas [R]’ relative à l’activité de l’entreprise

* Exploitation de ce réseau pour les tournées ou déplacements

– Mise en forme et mise ajour des documents d’entreprise

* Personnalisation de la mise en forme des bons de commandes, documents de préparations, fiches techniques des vins, tarifs.

* Mise à jour des augmentations tarifs

Elle verse aux débats l’élaboration du tarif TTC particulier 2016/2017 ainsi que la procédure suivie pour le calcul des tarifs Mas [R].

– Encadrement et formation de stagiaires en commerce vin

Elle produit aux débats des justificatifs selon lesquels elle encadrait des stagiaires, signait les conventions de stage, rédigeait les évaluations en qualité de responsable du stage

Elle verse en outre aux débats une attestation de [J] [D], assistante commerciale, rédigée en ces termes:

Pendant ma période d’activité au sein de l’entreprise [R] il m’a toujours été acquis que Madame [K] avait un poste d’encadrement ou du moins que Monsieur et Madame [R] lui confiaient des missions de délégués en cas d’absence.

En effet, je suis arrivée l’été 2016 en tant que stagiaire. Madame [K] avait été citée comme responsable de stage car Madame [R] ne serait pas là pendant 10 jours pour déménager son fils en Belgique.

nous sommes retrouvées seules pendant ces 10 jours sur trois semaines de stage pendant lesquelles Madame [K] a chapeauté mon travail tout en gérant ses tâches administratives et logistiques quotidiennes.

Par la suite de mon embauche en novembre 2016 pour 8 mois, cette situation a perduré. Madame [R] disait ne pas avoir le temps de s’occuper de m’aider à approfondir mes connaissances en comptabilité bien que la raison de mon embauche était liée à un accord de formation avec Pôle Emploi.

En l’absence des dirigeants, Madame [K] devait pallier à tout, les commandes, échanger avec les transporteurs en cas de litige, se rend à la banque pour déposer les chèques après avoir signé les bordereaux. Le facteur lui déposait les recommandées car elle avait procuration.

En parallèle, elle faisait de la prospection et du démarchage pour enrichir le carnet clientèle et préparer les tournées commerciales de Monsieur [R], tout en alimentant les réseaux sociaux.

Lors des départs en salons de Monsieur et Madame [R] Madame [K] était tenue de préparer les cargaisons prévues à la vente ainsi que le matériel(tables, fonds de caisse, verrerie’)

M. [O] [A] atteste également : ‘j’ai travaillé en tant que stagiaire en 2014 avec Madame [K]. Elle m’a formée sur les commandes, la facturation, les DAE, le démarchage téléphonique au Mas [R] à [Localité 4]. Elle fut d’une grande aide car les propriétaires sont souvent absents car ils étaient à travers la France pour faire la promotion de leurs vins. Par conséquent, Madame [K] assurait seul l’accueil physique et téléphonique, l’administrative du domaine, la gestion des commandes, la formation des stagiaires, le suivi commercial et administratif , l’acheminement des commandes, la gestion des salons et la prise en charge des clients particuliers et professionnels. Elle était toujours à l’écoute et de bon conseil quand j’avais besoin d’informations sur les vins et l’organisation du Mas [R].’

Ces témoignages établissent que Mme [K] encadrait effectivement les stagiaires.

– Missions diverses

Elle justifie également au regard des mails produits, qu’elle surveillait les stocks et émettait des alertes en cas de rupture, qu’elle élaborait des textes commerciaux afin de promouvoir les Vignes du Mas [R], et faisait des points de situation relatifs aux relations clientèles dans diverses régions de France.

Elle produit en outre des échanges de mails, plannings et photographies justifiant que Mme [R] accompagnait régulièrement son mari sur des salons, pendant des périodes de plusieurs jours, la laissant seule pour effectuer son travail.

Mme [G] , cliente, atteste également, dans un témoignage produit par l’employeur , au sujet de Mme [K]: ‘cette dame paraissait tout à fait à l’aise dans es fonctions, j’ai pu me rendre compte de la bienveillance de M. et Mme [R] à son égard qui la laissaient entièrement libre de gérer ses activités…” , ce témoignage, bien que produit par l’employeur , établit que cette dernière bénéficiait d’autonomie dans son travail.

L’employeur objecte que Mme [K] était chargée essentiellement de travaux d’exécution de type d’accueil téléphonique , secrétariat administratif et commercial, suivi des commandes, des encaissements, relance, facturation en l’absence de Mme [R] mais sous son contrôle , ne nécessitant pas des compétences techniques très poussées dès lors que la comptabilité de l’entreprise était assurée par Mme [R]. Il ajoute que la salariée a toujours effectué son travail suivant des directives précises verbales ou écrites données par son employeur et qu’elle n’a jamais prise d’initiative personnelle .

La société fait valoir, sans cependant en justifier, que les cartes géographiques de l’organisation de tournées versées aux débats par la salariée n’ont pas été réalisées par Mme [K] et ont été éditées postérieurement aux tournées qu’elles concernent.

Par ailleurs, si M. [N], agent commercial, énonce qu’il ne travaillait en direct qu’avec M. et Mme [R], M. [V], également agent commercial du Mas [R] atteste dans le cadre de son travail être principalement en relation avec [Y] [P] [R] et traiter avec ce dernier et précise: ‘je transmets par mail les les commandes à l’assistante commerciale qui en assure l’enregistrement et le traitement…’ce témoignage n’est nullement en contradiction avec les allégations de Mme [K] selon lesquelles elle exerçait une véritable activité d’assistante commerciale.

En ce sens M. [I] , client du Mas [R] atteste: également ‘les commandes étaient prises soit par Mme [L] [K], soit par [Y] [P] [R]’.

L’employeur verse aux débats des mail échangés entre lui et Mme [K] dans lesquels cette dernière sollicite l’avis ou l’accord de ses employeurs concernant des missions très variées. (Valorisation commande client, proposition commerciale, calculs de transport, proposition commerciale, suivi logistique litige avec un transporteur, , finalisation dossier inscription salon, proposition d’un texte d’accompagnement pour Facebook…) .

Ces échanges de mails, établissent seulement que Mme [K], en sa qualité d’employée, et comme tous salariés, travaillait bien sous l’autorité de ses employeurs qui lui donnaient des directives et contrôlaient son travail, sans cependant contredire utilement les attestations et justificatifs produits qui établissent qu’elle disposait d’autonomie et d’initiative au quotidien dans l’accomplissement de ses missions diversifiées.

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que les fonctions exercées par Mme [K] justifiait qu’elle soit classée au niveau III échelon A de la convention collective applicable.

En revanche, Mme [K] ne justifie pas , au regard des mails produits concernant la demande unique de son employeur de traduire 8 lignes en langue anglaise , ainsi que de l’échange de mails très restreint avec l’entreprise [W], qu’elle utilisait habituellement une ou plusieurs langues étrangères dans l’exercice de ses fonctions.

Au contraire, l’employeur justifie, au vu du compte rendu de la société Atlas Traduction, qui a analysé à sa demande la qualité rédactionnelle des écrits en langue anglaise produits par Mme [K] , que cette dernière ne maîtrisait pas correctement l’anglais.

Dès lors, il n’y a pas lieu de lui accorder la majoration sollicitée pour l’usage habituelle d’un langue étrangère.

Il en découle que les fonctions exercées par Mme [K] relevant de la classification III échelon A sans majoration pour l’usage habituel d’une langue étrangère, et qu’ il convient de lui accorder un rappel de salaire au titre des années 2016, 2017 et 2018 d’un montant de 1258,50 euros bruts outre 125,85 euros au titre des congés payés y afférents.

Rappel de salaire au titre du solde de la gratification annuelle:

L’article 42 ter de la Convention collective applicable prévoit qu’une gratification sera attribuée aux salariés justifiant d’une année de présence continue dans l’entreprise dont le montant est calculé en fonction de la position hiérarchique des intéressés et du salaire minimum conventionnel (SMC) pour 169 heures de travail en vigueur au moment du versement.

Pour bénéficier de cette gratification, le salarié doit être inscrit aux effectifs de l’entreprise à la date de paiement de la gratification. Le salarié ayant quitté l’entreprise pour son départ en retraite ou préretraite bénéficiera de la même façon que le salarié inscrit aux effectifs, au prorata du temps de travail effectivement accompli pendant l’année civile en cours.

Cette gratification ne sera pas obligatoire dans les entreprises accordant déjà des avantages similaires, quelle que soient leur périodicité et leur dénomination, tels que prime de vacances, de fin d’année, treizième mois, et qui seraient, dans leur ensemble, supérieure à ladite gratification.

Par contre si le montant prévu au paragraphe précédent n’est pas atteint, l’avantage global précédemment acquis sera complété à due concurrence.

En application de cette disposition, Mme [K] a droit, compte tenu de sa classification et de son départ de la société au cours de l’année 2018 sans qu’il ne s’agisse d’un départ à la retraite ou pré retraite, à un rappel au titre du solde de la gratification annuelle d’un montant de 1825,13 euros.

Sur la demande d’indemnité au titre de l’insuffisance des cotisations versées:

Mme [K] fait valoir qu’étant payée à un salaire inférieur à celui qu’elle aurait dû percevoir en raison de sa qualification, elle n’a pas bénéficié des cotisations retraites correspondant à sa classification. Elle précise qu’au regard de la prescription d’une des cotisations retraites, elle a travaillé pendant plusieurs années sans pouvoir se prévaloir des trimestres travaillés pour bénéficier des points de retraite correspondants et subit à ce titre un préjudice .

Il convient de rappeler que les droits à la retraite sont calculés sur la base de la rémunération annuelle moyenne des 25 meilleures années et que le sous classement de Mme [K] au titre des années 2012 à 2018 n’aura qu’un faible impact sur ses droits à la retraite.

Au regard de ces éléments, il convient de limiter le montant des dommages intérêts alloués à la somme de 2000 euros.

Sur la régularisation des versements des cotisations de retraite sur la période non prescrite:

Il convient d’enjoindre l’employeur ,sans qu’il ne soit nécessaire de prononcer une astreinte, de procéder, pour la période non prescrite à la régularisation des versements des cotisations aux organismes de retraite.

Sur la demande d’indemnité au titre de l’absence d’adhésion au régime de prévoyance obligatoire:

En l’espèce, pendant deux ans et demi l’employeur n’a pas honoré sa participation à la cotisation d’assurance complémentaire obligatoire pour Mme [K] qui justifie avoir dû souscrire personnellement une mutuelle d’un montant de 775,55 euros par an.

Il convient en conséquence de condamner l’employeur à lui verser la somme de 2000 euros en réparation du préjudice financier subi.

Sur le harcèlement:

L’article L 1152-1 du code du travail dispose que ‘aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel’.

L’article L1154-1 du code du travail précise qu’il appartient au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Mme [K] fait valoir que la dégradation de son état de santé et son inaptitude sont consécutives au harcèlement exercé par son employeur

Elle verse aux débats:

– des prescriptions médicale s de son médecin généraliste et un certificat médical de son psychiatre le docteur [S] établi en date du 16 mars 2018 mentionnant : ‘elle éprouve des difficultés personnelles depuis an, ses difficultés générant vécu persécutif et dépressif. Elle n’arrive plus à s’adapter à ses conditions de travail. Elle développe des attitudes phobiques vis à vis de sn lieu de travail. Elle se marginalise sur le plan social’.

– son dossier médical dans lequel le médecin du travail indique, suite à la visite de reprise du 29 mai 2018:

– arrêt maladie pour dépression a vu un psychique qui dans un courrier note que son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi du 29 mi 2018

– autre pb avec employeur a demandé une augmentation, a été menacée de licenciement pour faute grave a essayé de tenir depuis deux ans mais très difficile ne sait plus o* en est pleure, déprimée angoisse lui conseille d’arrêter et faire le point 26 avril 2018

– poste de travail idem en 2018, surcharge de travail ressentie; le travail lui plaît mais la relation entre elle et le patron n’est pas simple au quotidien, est souvent prise à partie

– stress ‘professionnel’ lié à directives par époux et épouse parfois divergentes tempérament anxieux, poste très polyvalent, beaucoup de choses en tête

– visite du 3 novembre 2015: depuis 10 jours employeur a été violent dit-elle de façon verbale; le pb assez cyclique; travaille du côté commercial, 2 autres personnes du côté vignoble, a été en colère et est partie, donc a mal à la tête, déprimée, ne veut pas arrêter ne veut pas prendre de gros médicaments…

– les attestation dactylographiée puis manuscrites de Mme [F] épouse [D] stagiaire puis embauchée en CDD de 8 mois au Mas [R] : ‘je me suis trouvée à maintes reprises et à mon grand regret, témoin de propos et de réactions plus que déplacées et inopportunes à l’encontre de Madame [K], à savoir des cris et des insultes que je n’ai plus fidèlement en mémoire mais qui m’avaient choquée à l’époque.

Monsieur [R], de rage, plus que menaçant et Madame [R] faisant la sourde oreille dans son bureau.

Une fois la tempête passée, Madame [R] sortait de son bureau en justifiant son tempérament colérique.

Je n’ai jamais été témoin d’excuses de la part de Monsieur [R], il pouvait rester dans cet esprit pendant plusieurs jours et rendre la vie impossible à tout le monde.

Pour ma part je n’aurais pas pu supporter cette ambiance délétère aussi longtemps que Madame [K].

C’est pourquoi mon médecin traitant par un arrêt maladie et le médecin conseil de la CPM après convocation ont conclu qu’il était fortement important pour mon bien-être et mon équilibre psychique de ces personnages toxiques’

Ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement.

Pour prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, l’employeur verse aux débats:

– le témoignage d’un salarié, M. [X] [T] ouvrier agricole , de M. [E] [M] employé au Mas [R] pour les vendanges, et de M. [I], client ayant participé à une journée de vendanges, qui décrivent une bonne ambiance dans l’entreprise, et décrivent des événements festifs auxquels Mme [K] participait.(repas de fin de vendanges).

– l’attestation de [B] [V], agent commercial qui mentionne entretenir de bonnes relations avec M. Et Mme [R].

– l’attestation de Mme [G], restauratrice et cliente du . Mas [R] décrivant Mme [K] comme étant à l’aise dans ses fonctions et précisant que cette dernière a participé dans la bonne humeur au repas de fin d’année 2017.

Ces attestations , rédigées par des tiers qui ne travaillaient pas dans le secteur administratif dans lequel Mme [K] exerçait son activité, et n’étaient pas témoins de ses échanges au quotidien avec ses employeurs, ne contredisent pas les éléments médicaux et le témoignage direct produits aux débats par la salariée qui établissent que les relations entre elle et ses employeurs étaient difficiles en raison des propos agressifs que son employeur pouvait tenir à son égard.

Il apparaît en conséquence que l’employeur ne démontre pas que son attitude à l’égard de Mme [K] était étrangère à tout harcèlement de sorte que le harcèlement est caractérisé.

Sur la rupture du contrat de travail :

En application de l’article L 1152-3 du code du travail : « toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L.1152-1 et L.1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul ».

Il en découle que le licenciement d’un salarié pour inaptitude , lorsque cette inaptitude est consécutive à un harcèlement moral, est nul.

En l’espèce, il ressort de l’attestation et des éléments médicaux produits, et plus particulièrement du dossier médical de Mme [K] , que le harcèlement moral subi par cette dernière est à l’origine de son inaptitude sur laquelle s’est fondée son licenciement, de sorte que le licenciement est nul.

Sur les conséquence de la rupture du contrat de travail:

Sur les dommages et intérêts:

En application de l’article L.1235-3-1 du code du travail, lorsque le licenciement est entaché de nullité, le juge lui octroie une indemnité , à la charge de l’employeur qui ne peut être inférieure au salaire des six derniers mois.

En l’espèce lors du licenciement, Mme [K] était âgée de 62 ans et bénéficiait d’une ancienneté de plus de 6 ans au sein de l’entreprise

Postérieurement au licenciement, elle a perçu des indemnités pôle emploi d’un montant moyen de 1000 euros par mois. Elle a tenté de mettre en vente sa maison de village pour laquelle elle assume un crédit puis l’a mise en location. Elle a contracté un crédit pour acheter un véhicule. Elle perçoit désormais des retraites d’un montant total de 623,26 euros par mois.

Au regard du préjudice subi par Mme [K], il convient de condamner l’employeur à lui verser la somme de 12 000 euros.

Sur l’indemnité compensatrice de préavis:

Mme [K] a droit à une indemnité compensatrice de préavis , calculée sur la base d’un salaire brut de 1799,19 euros, d’un montant de 3596,38 euros, outre 359, 64 euros au titre des congés payés y afférents.

Sur le solde de l’indemnité de licenciement:

En fonction de sa classification coefficient III A, et des indemnités déjà perçues, Mme [K] a droit à un solde dû au titre de l’indemnité de licenciement d’un montant de 240,82 euros.

Sur la délivrance des documents sociaux:

Il convient de condamner l’employeur, sans qu’il ne soit nécessaire d’assortir cette condamnation d’une astreinte, à délivrer les bulletins de paie, le certificat de travail et l’attestation pôle emploi rectifiés ainsi que les bulletins de paie des d’août et septembre 2015, mars 2016, mai à décembre 2016, janvier à mars 2017 et juin 2017

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens:

Il convient de condamner la SARL SASDelmas à verser à Mme [K] la somme de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de la procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour, par décision contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Perpignan le 13 octobre 2020 en ce qu’il a rejeté l’intégralité des demandes de Mme [K].

Statuant à nouveau:

– Dit que Mme [L] [K] devait bénéficier de la classification employée niveau III échelon A de la convention collective des vins, cidres jus de fruits, sirops, spiritueux et liqueurs de France du 13 février 1969, étendue par arrêté du 1er juin 1973 JONC 2 septembre 1973.

– Condamne la SARL SASDelmas à verser à Mme [L] [K] les sommes suivantes:

– 1258,50 euros de rappel de salaire au titre du changement de classification

– 125,85 euros au titre des congés payés y afférents.

– 1825,13 euros au titre du solde des gratifications annuelles

– 2000 euros au titre de l’insuffisance des cotisations retraites versées

– 2000 euros de dommages et intérêts au titre de l’absence d’adhésion au régime de prévoyance obligatoire

– 12000 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul

– 3596,38 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis

– 359, 64 euros au titre des congés payés y afférents.

– 240,82 euros au titre du solde de l’indemnité de licenciement

– Fait injonction à la SARL SAS [R] , de procéder, pour la période non prescrite à la régularisation des versements des cotisations aux organismes de retraite

– Dit qu’il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte

– condamne l’employeur à délivrer les bulletins de paie, le certificat de travail et l’attestation pôle emploi rectifiés ainsi que les bulletins de paie des mois d’août et septembre 2015, mars 2016, mai à décembre 2016, janvier à mars 2017 et juin 2017

– Dit qu’il n’y a pas lieu d’assortir cette condamnation d’une astreinte

– Condamne la SARL SASDelmas à verser à Mme [L] [K] la somme de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

– Condamne la SARL SASDelmas aux dépens de la procédure.

Le greffier Le président

 


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