Démarchage Téléphonique : décision du 4 juillet 2022 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 19/04859

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Démarchage Téléphonique : décision du 4 juillet 2022 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 19/04859

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 04 JUILLET 2022

N° RG 19/04859 – N° Portalis DBVJ-V-B7D-LGZ5

[O] [D]

c/

SARL DMP INFORMATIQUE

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 15 juillet 2019 par le Tribunal d’Instance de BORDEAUX (RG : 1118004480) suivant déclaration d’appel du 05 septembre 2019

APPELANTE :

[O] [D]

née le 14 Septembre 1957 à SURESNE

de nationalité Française

demeurant [Adresse 1]

représentée par Maître SFEZ substituant Maître Clément RAIMBAULT de la SCP DELAVALLADE – RAIMBAULT, avocats au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SARL DMP INFORMATIQUE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 2]

représentée par Maître Alice RONDOT substituant Maître Mathieu BONNET-LAMBERT, avocats au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 mai 2022 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Vincent BRAUD, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Roland POTEE, président,

Vincent BRAUD, conseiller,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Le 9 novembre 2017, la société D. M. P. Informatique, ‘uvrant à l’équipement informatique des professions médicales et dentaires, a remis un devis à [O] [D], médecin généraliste, qui l’a accepté le même jour. Le devis comportait les prestations suivantes pour un total de 2 100 euros :

‘ installation du logiciel Axisanté 5,

‘ installation du logiciel Aximessage,

‘ migration des données de l’ancien logiciel Hellodoc vers Axisanté 5.

Le devis faisait également état de prestations mensuelles :

‘ licence du logiciel Axisanté : 76 euros toutes taxes comprises par mois,

‘ licence du logiciel Aximessage : 15 euros par mois,

‘ contrat d’assistance télémaintenance : 43 euros par mois,

‘ contrat de maintenance informatique : 27 euros par mois.

Le même jour, [O] [D] a signé une ouverture de compte à raison de 70 euros par mois, correspondant en fait aux contrats d’assistance sur les logiciels de dossier de patient et de télétransmission (35 euros), d’assistance sur le logiciel complémentaire de liaison avec les laboratoires (8 euros) et de maintenance matérielle sur site (27 euros).

Le 1er février 2018, [O] [D] a également signé un contrat d’abonnement et de location de lecteur de cartes bleues et de lecteur Sesam Vitale Vehis pour un montant de 24 euros toutes taxes comprises par mois. Par lettre du même jour, [O] [D] a cependant déclaré ne plus vouloir bénéficier de ce contrat.

Le 1er février 2018, les logiciels ont été livrés et le bon de livraison a été signé par [O] [D] : « bon pour réception ».

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 8 février 2018, [O] [D] a fait part à la société D. M. P. Informatique de son droit de rétractation prévu par l’article L. 121-25 du code de la consommation « pour résilier le contrat d’abonnement chez Axisanté ».

Le 7 mars 2018, la société D. M. P. Informatique a proposé à titre transactionnel à [O] [D] de prendre en compte la résiliation en contrepartie du payement de la somme de 1 000 euros. Cette offre restait sans suite.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 9 mars 2018, la société D. M. P. Informatique a indiqué à [O] [D] que, en tant que professionnel, elle ne pouvait bénéficier du droit de rétractation prévu par l’article L.121-25 du code de la consommation, et qu’elle était en conséquence tenue d’honorer les contrats signés.

Par lettre du 6 avril 2018, [O] [D] a confirmé à la société D. M. P. Informatique son refus de payer les sommes demandées.

Par lettre du 22 juin 2018 et rappel du 1er août 2018, la société D. M. P. Informatique a sollicité le payement de l’intégralité des sommes dues en exécution des engagements contractuels de [O] [D].

Par exploit en date du 10 octobre 2018, la société D. M. P. Informatique a assigné [O] [D] en payement devant le tribunal d’instance de Bordeaux.

Par jugement contradictoire en date du 15 juillet 2019, le tribunal d’instance de Bordeaux a :

‘ Condamné [O] [D] à payer à la société D. M. P. Informatique la somme de 2 100 euros au titre des logiciels livrés par cette dernière et contrats de maintenance et assistance afférents ;

‘ Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

‘ Condamné [O] [D] à payer à la société D. M. P. Informatique la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ Condamné [O] [D] aux dépens.

[O] [D] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 5 septembre 2019.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 6 mai 2022, [O] [D] demande à la cour de :

‘ Réformer le jugement du tribunal d’instance de Bordeaux en date du 15 juillet 2019 en ce qu’il a condamné [O] [D] à payer à la société D. M. P. Informatique la somme de 2 100 euros au titre des logiciels livrés et la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ Débouter la société D. M. P. Informatique de son appel incident et de l’intégralité de ses demandes,

fins et conclusions ;

Statuant à nouveau,

À titre principal,

‘ Acter l’usage légitime par [O] [D] de sa faculté de rétractation, en application des dispositions du code de la consommation ;

En conséquence,

‘ Débouter la société D. M. P. Informatique de l’ensemble de ses demandes ;

‘ Condamner la société D. M. P. Informatique au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice contractuel et financier subi ;

‘ Condamner la société D. M. P. Informatique au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ Condamner la société D. M. P. Informatique aux entiers dépens d’instance et d’appel ;

À titre subsidiaire, si la cour considérait que [O] [D] n’était pas fondée à faire valoir son droit de rétractation,

‘ Acter du bien-fondé de l’exception d’inexécution opposée par [O] [D] ;

En conséquence,

‘ Débouter la société D. M. P. Informatique de l’ensemble de ses demandes ;

‘ Condamner la société D. M. P. Informatique au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice contractuel et financier subi ;

‘ Condamner la société D. M. P. Informatique au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ Condamner la société D. M. P. Informatique aux entiers dépens d’instance et d’appel ;

À titre infiniment subsidiaire si la cour faisait droit à l’appel incident de la société D. M. P. Informatique et condamnait [O] [D] au titre du contrat d’assistance et de maintenance et au titre du contrat de location de lecteur de carte,

‘ Limiter la condamnation pécuniaire de [O] [D], au titre du contrat de maintenance et d’assistance, à la somme de 770 euros ;

‘ Réduire à néant conformément aux dispositions de l’article 1231-5 du code civil la clause pénale d’un montant de 84 euros sollicitée au titre du contrat de maintenance et d’assistance et la clause pénale d’un montant de 72 euros sollicitée au titre du contrat de location de lecteur de carte ;

‘ Condamner la société D. M. P. Informatique au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice contractuel et financier subi ;

‘ Condamner la société D. M. P. Informatique au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ Condamner la société D. M. P. Informatique aux entiers dépens d’instance et d’appel.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 15 septembre 2021, la société à responsabilité limitée D. M. P. Informatique demande à la cour de :

‘ Déclarer recevable mais mal fondée [O] [D] en son appel à l’encontre du jugement rendu par le tribunal d’instance de Bordeaux le 15 juillet 2019 ;

‘ Déclarer la société D. M. P. Informatique recevable et bien fondée en son appel incident à l’encontre dudit jugement ;

‘ Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a écarté l’application des dispositions relatives au droit de rétractation du consommateur ;

‘ Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a écarté l’application des dispositions relatives au droit de rétractation du professionnel ;

À titre subsidiaire, si la cour devait reconnaitre un quelconque droit de rétractation au bénéfice de [O] [D],

‘ Dire et juger que le délai de rétractation était expiré à la date du 8 février 2018 alors que les contrats de prestations de services la liant à la société D. M. P. Informatique ont été conclus le 9 novembre 2017 ;

‘ Constater que le courrier du 8 février 2018 ne mentionne que le contrat d’abonnement Axisanté, de sorte que [O] [D] n’a en tout état de cause jamais fait valoir son droit de rétractation pour les autres prestations qu’elle a souscrites auprès de la société D. M. P. Informatique ;

‘ Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a écarté l’exception d’inexécution invoquée à titre subsidiaire par [O] [D] ;

‘ Confirmer en conséquence le jugement entrepris en ce qu’il a fait droit à la demande en paiement présentée par la société D. M. P. Informatique au titre de sa facture du 23 février 2018 ;

‘ Condamner [O] [D] à payer à la société D. M. P. Informatique la somme de 2 100 euros au titre de la facture no FPME2018 1479 du 23 février 2018, assortie du taux d’intérêt contractuel depuis la mise en demeure adressée le 9 mars 2018 ;

‘ Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté [O] [D] de sa demande en réparation ;

‘ Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société D. M. P. Informatique de ses demandes inhérentes au défaut de résiliation régulière des contrats souscrits par [O] [D] ;

‘ Condamner en conséquence [O] [D] à payer à la société D. M. P. Informatique la somme totale de 1 860 euros, assortie du taux d’intérêt contractuel depuis la mise en demeure adressée le 9 mars 2018, laquelle se décompose comme suit :

– 840 euros au titre des échéances du contrat de services jusqu’au 1er février 2019,

– 84 euros à titre de clause pénale,

– 864 euros au titre du contrat de location du lecteur de cartes Vitale jusqu’au 1er février 2021,

– 72 euros au titre de la résiliation anticipée prévue par le contrat de location du lecteur ;

‘ Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société D. M. P. Informatique de sa demande au titre de la résistance manifestement abusive opposée par [O] [D] ;

‘ Condamner [O] [D] à payer à la société D. M. P. Informatique la somme de 1 500 euros en réparation de son préjudice du fait de la résistance abusive qu’elle a opposée à ses légitimes prétentions ;

‘ Condamner [O] [D] à payer à la société D. M. P. Informatique une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 9 mai 2022 et l’affaire fixée à l’audience du 23 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande en payement présentée par la société D. M. P. Informatique :

La société D. M. P. Informatique sollicite le payement des sommes suivantes :

‘ 2 100 euros au titre de la facture no FPME2018 1479 du 23 février 2018, faisant suite au devis accepté le 9 novembre 2017 (installation des logiciel Axisanté 5 et Aximessage, migration des données de l’ancien logiciel) ;

‘ 840 euros au titre des échéances du contrat d’assistance et de maintenance jusqu’au 1er février 2019 ;

‘ 84 euros à titre de clause pénale dudit contrat de services ;

‘ 864 euros au titre du contrat de location du lecteur de carte Vitale jusqu’au 1er février 2021 ;

‘ 72 euros au titre de la résiliation anticipée du contrat de location du lecteur.

En défense, [O] [D] se prévaut à titre principal de la résiliation des contrats par l’effet de son droit de rétractation. À titre subsidiaire, elle oppose l’exception d’inexécution aux prétentions de la société D. M. P. Informatique.

Sur le droit de rétractation :

L’appelante critique le jugement en ce qu’il a refusé de faire application de l’article L. 221-3 du code de la consommation pour reconnaître le droit de rétractation de [O] [D], alors que les conditions posées par ce texte sont remplies, et que notamment la prestation réalisée par la société D. M. P. Informatique n’entre pas dans le cadre de l’activité principale exercée par [O] [D], à savoir la médecine.

Antérieurement à la loi no 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, sous l’empire de l’ancien article L. 121-22, 4o, du code de la consommation, étaient exclues de la législation sur le démarchage à domicile les ventes, locations ou locations-ventes de biens ou les prestations de services lorsqu’elles avaient un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d’une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession.

Le droit applicable à l’espèce est celui qui est issu de la loi précitée du 17 mars 2014, dont l’article 34 précise que la loi est applicable aux contrats conclus après le 13 juin 2014.

Cette loi, destinée à transposer la directive no 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, a supprimé la notion de « rapport direct » avec l’activité professionnelle. Elle a créé l’article L.121-16-1, paragraphe III, du code de la consommation, devenu l’article L. 221-3 du même code par application de l’ordonnance du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation.

Les dispositions du chapitre premier Contrats conclus à distance et hors établissement du code de la consommation sont d’ordre public en vertu de l’article L. 221-29 dudit code.

Aux termes de l’article L. 221-3 du code de la consommation, les dispositions des sections 2, 3, 6 du chapitre premier Contrats conclus à distance et hors établissement applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l’objet de ces contrats n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.

L’expression « rapport direct » a ainsi été remplacée par celle du « champ de l’activité principale du professionnel sollicité », ce qui constitue un élargissement du périmètre du droit de la consommation.

En l’espèce, l’appelante explique en premier lieu que le contrat n’a pas été conclu au siège d’activité de la société D. M. P. Informatique mais au sein du cabinet de [O] [D], à la suite d’un démarchage effectué par un commercial de la société qui se trouvait être un de ses patients. L’intimée ne conteste pas le fait, mais considère que son commercial s’est présenté en qualité de simple patient, si bien qu’il n’a pas agi dans le cadre d’une prospection commerciale.

Ces circonstances caractérisent la conclusion d’un contrat dans un lieu qui n’est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d’une sollicitation ou d’une offre faite par le consommateur. Les contrats en cause ont ainsi été conclus hors établissement.

L’appelante justifie en second lieu qu’elle n’emploie pas plus de cinq salariés, en versant aux débats un extrait du site « societe.com » et un justificatif comptable (ses pièces nos 19 et 29).

En dernier lieu, ni l’installation de logiciels, ni la migration de données d’un logiciel à l’autre, non plus que l’assistance et la maintenance informatiques n’entrent dans le champ de la médecine générale, activité principale de [O] [D]. En revanche, l’usage d’un lecteur de carte Vitale entre dans ce champ.

Il doit s’en déduire que, s’agissant des premiers contrats, [O] [D] bénéficiait du droit de rétractation prévu par l’article L. 221-18 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure issue de l’ordonnance no 2016-301 du 14 mars 2016 (1re Civ., 12 sept. 2018, no 17-17.319), mais qu’elle ne disposait pas de cette faculté à l’égard du contrat de location du lecteur de carte Vitale.

L’article L. 221-18 du code de la consommation dispose :

« Le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25.

« Le délai mentionné au premier alinéa court à compter du jour :

1o De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l’article L. 221-4 ;

2o De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.

« Dans le cas d’une commande portant sur plusieurs biens livrés séparément ou dans le cas d’une commande d’un bien composé de lots ou de pièces multiples dont la livraison est échelonnée sur une période définie, le délai court à compter de la réception du dernier bien ou lot ou de la dernière pièce.

« Pour les contrats prévoyant la livraison régulière de biens pendant une période définie, le délai court à compter de la réception du premier bien. »

Les contrats d’installation de logiciels, de migration de données d’un logiciel à l’autre, d’assistance et de maintenance informatiques ont été conclus le 9 novembre 2017 par acceptation du devis du même jour et signature concomitante de deux contrats de services (pièces nos 1 à 3 de l’intimée). En application du texte précité, le délai de rétractation a donc couru à compter de cette date, nonobstant la prise d’effet des contrats et la livraison de la prestation principale le 1er février 2018 (pièce no 5 de l’intimée). Le délai était donc expiré lorsque [O] [D] a manifesté son intention de se rétracter par lettres des 1er et 8 février 2018. Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il écarte le droit de rétractation de [O] [D].

Sur l’exception d’inexécution :

Aux termes de l’article 1217 du code civil, la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sapropre obligation. Des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.

Aux termes de l’article 1219 du même code, une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

[O] [D] fait grief à la société D. M. P. Informatique d’avoir :

a) livré une prestation qui ne correspondait pas à ce qui avait été convenu ;

b) livré une prestation inopérante.

Il appartient à celui qui invoque l’exception d’inexécution en alléguant que son cocontractant n’a pas rempli son obligation, d’établir cette inexécution.

a) En premier lieu, alors qu’était convenue une migration des données de l’ancien logiciel Hellodoc vers Axisanté 5, [O] [D] expose qu’elle a dû rester sur son ancien logiciel comptable Hellodoc, faute d’extraction de sa comptabilité, et que le fonctionnement de son logiciel s’est amélioré à la suite du seul changement de son unité centrale.

Le premier juge a considéré à bon droit que la migration des données vers le nouveau logiciel était prouvée par les mentions du bon de livraison signé par [O] [D] le 1er février 2018 (pièce no 5 de l’intimée).

L’intervention de la société I. M. K. qui a remplacé l’unité centrale de [O] [D] le 9 février 2018, après quoi son ordinateur s’est mis à fonctionner normalement (pièce no 21 de l’appelante), révèle que les difficultés rencontrées par elle provenaient de son matériel informatique, et non des prestations de la société D. M. P. Informatique.

En second lieu, [O] [D] prétend que le devis de la société D. M. P. Informatique du 9 novembre 2017 comprend des mentions relatives à différentes contrats (Axisanté, Aximessage, assistance, télémaintenance et maintenance informatique) qui ne sont toutefois pas comptabilisés dans le montant total de la prestation, de sorte qu’il doit en être déduit que la souscription de ces abonnements ne fait pas partie de la prestation convenue entre les parties. Elle ajoute que les montants de la facture émise pour les contrats d’assistance et de maintenance (pièce no 16 de l’appelante) ne correspondent pas aux prix mensuels figurant dans le devis.

Outre que par cet argument, l’appelante n’excipe pas d’une inexécution contractuelle, le premier juge a retenu à bon droit que [O] [D] a signé le 9 novembre 2017 un contrat intitulé Ouverture de compte récapitulant les contrats de service acceptés par la cliente pour un montant mensuel de 70 euros.

b) En premier lieu, [O] [D] dénonce le fait que le technicien venu installer le système informatique ne l’a pas formée, ni même sa secrétaire, sur le logiciel installé ; qu’il n’y a donc eu aucun accompagnement contrairement à ce qui était prévu.

Si la secrétaire de l’appelante atteste que, présente lors de l’installation du logiciel médical par la société D. M. P. Informatique, elle n’a eu aucune information lors de la mise en service (pièce no 20 de l’appelante), le premier juge a relevé à bon droit que le bon de livraison du 1er février 2018 mentionne explicitement qu’une prise en main a été faite pour les dossiers des patients et les liaisons avec les laboratoires. Il est ainsi établi que la société D. M. P. Informatique s’est pleinement acquittée des obligations auxquelles elle était tenue envers sa cocontractante.

En second lieu, [O] [D] prétend que le système informatique s’est révélé inopérant, puisqu’elle a dû rappeler ses patients et procéder à la transmission manuelle des feuilles de soins sur papier lorsqu’elle a décidé pour la première fois de transférer près de 60 actes dans la base de données. À l’appui de ses dires, elle verse aux débats les feuilles de soins qu’elle a été contrainte d’envoyer manuellement (pièce no 22 de l’appelante).

L’intimée observe à raison que les feuilles de soins communiquées concernent pour la plus grande partie des actes réalisés les 5 et 6 février 2018 et pour les autres réalisés jusqu’au 9 février 2018, date à laquelle l’unité centrale défectueuse a été remplacée, de sorte qu’il n’est pas démontré que le mauvais fonctionnement dénoncé soit imputable à la société D. M. P. Informatique plutôt qu’à la panne du matériel personnel de [O] [D].

En définitive, l’appelante échoue à rapporter la preuve de l’inexécution alléguée contre son cocontractant. Le jugement querellé sera confirmé en ce qu’il écarte l’exception soulevée par [O] [D].

Sur les sommes dues :

a) Le jugement frappé d’appel n’est pas critiqué en ce qu’il condamne [O] [D] à régler la facture du 23 février 2018 d’un montant de 2 100 euros en payement de l’installation des logiciels. Conformément à l’article 1231-6 du code civil, cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2018, date de réception de la lettre de mise en demeure du 9 mars 2018.

b) Sur le contrat de maintenance et d’assistance qui a pris effet le 1er février 2018 pour une période d’un an, renouvelable par tacite reconduction, la société D. M. P. Informatique réclame le payement de 12 mensualités de 70 euros, majorées de 10 % au titre de la clause pénale prévue en cas de non-respect des engagements de paiement. Elle ne conteste cependant pas les motifs par lesquels le tribunal a relevé que la société D. M. P. Informatique n’avait réalisé aucune prestation à ce titre depuis le 8 février 2018, date à laquelle [O] [D] a manifesté sa volonté de mettre fin au contrat. À la suite de quoi, la société D. M. P. Informatique s’était déclarée prête, à titre transactionnel, à accepter l’annulation du contrat de maintenance et d’assistance (pièce no 10 de l’appelante). Si cette proposition n’a pas reçu l’agrément de [O] [D], force est de constater que la société D. M. P. Informatique n’a prélevé la mensualité de 70,00 euros due au titre du contrat de maintenance et d’assistance que pour le mois de février 2018, et qu’elle a cessé de le faire pour l’avenir (pièces nos 7 et 17 de l’appelante). Le tribunal a ainsi exactement qualifié de résiliation amiable la fin des relations contractuelles entre les parties, de sorte que [O] [D], qui s’est acquittée de la seule mensualité du mois de février 2018 dont elle était redevable, n’encourt pas la majoration contractuellement prévue. Le jugement sera confirmé de ce chef.

c) Sur le contrat de location de lecteur de carte Vitale qui a pris effet le 1er février 2018 pour une durée initiale de trois ans, la société D. M. P. Informatique réclame le payement de 36 mensualités de 24 euros, outre les frais de résiliation contractuellement fixés à trois mois. Il ressort cependant des éléments du dossier que [O] [D] ayant récemment changé de lecteur par l’intermédiaire de sa banque, elle a, sur le conseil de la société D. M. P. Informatique, entendu résilier dès le 1er février 2018 la location souscrite avec ladite société. Elle a confirmé sa volonté aux termes de sa lettre du 8 février suivant, où elle indiquait être disponible pour restituer le lecteur de carte Vitale. À la suite de quoi, la société D. M. P. Informatique s’est déclarée prête, à titre transactionnel, à accepter l’annulation du contrat de location (pièce no 10 de l’appelante). Si cette proposition n’a pas reçu l’agrément de [O] [D], force est de constater que la société D. M. P. Informatique n’a jamais prélevé une quelconque mensualité au titre de ce contrat (pièce no 17 de l’appelante). L’appelante soutient en conséquence que le contrat a été annulé d’un commun accord. Conformément à l’article 12, alinéa 2, du code de procédure civile, le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposé. Il ressort des faits de l’espèce que le contrat a, dès le jour de sa formation, été résilié de l’accord des parties, de sorte que [O] [D] n’est pas redevable de l’indemnité prévue par l’article 12 des conditions générales du contrat en cas de résiliation unilatérale par le client. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la demande en réparation présentée par [O] [D] :

[O] [D] demande la somme de 1 000 euros en réparation de l’anxiété causée par les poursuites en payement de la société D. M. P. Informatique, et du préjudice financier causé par la transmission manuelle des feuille de soins de ses patients.

Étant jugé que [O] [D] est débitrice de la somme de 2 100 euros envers la société D. M. P. Informatique, et qu’il n’est pas prouvé que celle-ci soit à l’origine des difficultés informatiques rencontrées, la décision du premier juge mérite confirmation en ce qu’il rejette cette demande.

Sur la demande en réparation présentée par la société D. M. P. Informatique :

La société D. M. P. Informatique demande la somme de 1 500 euros en réparation de la résistance abusive opposée par la partie adverse, résistance qui l’a privée de sommes dues et qui a porté atteinte à son image commerciale par une critique infondée de la qualité de ses prestations.

La société D. M. P. Informatique est toutefois déboutée de partie de ses demandes en payement. Par ailleurs, la bonne exécution de ses engagements contractuels est reconnue, si bien que son image commerciale n’est pas affectée par la présente procédure. La décision du premier juge mérite confirmation en ce qu’il rejette ce chef de demande.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. L’appelante en supportera donc la charge.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Sur ce fondement, [O] [D] sera condamnée à payer la somme de 1 600 euros à la société D. M. P. Informatique.

LA COUR,

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement ;

Y ajoutant,

Dit que la somme de 2 100 euros portera intérêts au taux légal à partir du 16 mars 2018 ;

Condamne [O] [D] à payer à la société D. M. P. Informatique la somme de 1 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne [O] [D] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,

 


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