Démarchage Téléphonique : décision du 27 septembre 2022 Cour d’appel de Pau RG n° 20/02744

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Démarchage Téléphonique : décision du 27 septembre 2022 Cour d’appel de Pau RG n° 20/02744

MM/ND

Numéro 22/3419

COUR D’APPEL DE PAU

2ème CH – Section 1

ARRET DU 27/09/2022

Dossier : N° RG 20/02744 – N° Portalis DBVV-V-B7E-HWBJ

Nature affaire :

Prêt – Demande en nullité du contrat ou d’une clause du contrat

Affaire :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

C/

[Z] [L]

[M] [U] épouse [L]

[B] [E]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 27 septembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 21 Juin 2022, devant :

Monsieur Marc MAGNON, magistrat chargé du rapport,

assisté de Madame SAYOUS, Greffière présente à l’appel des causes,

Marc MAGNON, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Jeanne PELLEFIGUES et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente

Monsieur Marc MAGNON, Conseiller

Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

immatriculée au RCS de Paris sous le n° 542 097 902, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette quallité au siège

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Philippe BORDENAVE, avocat au barreau de PAU

Assistée de la SCP RAMAHANDRIARIVELO – DUBOIS -DEETJEN ‘RED’, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Monsieur [Z] [L]

né le [Date naissance 3] 1969 à [Localité 9] (Espagne)

de nationalité française

[Adresse 5]

[Localité 6]

Madame [M] [U] épouse [L]

née le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 8] (64)

de nationalité française

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentés par Me Justine GIARD, avocat au barreau de PAU

Assistés de Me Samuel HABIB, avocat au barreau de PARIS

Maître [B] [E]

en sa qualité de mandataire ad hoc de la SARL SUNGOLD

domicilié [Adresse 4]

assigné

sur appel de la décision

en date du 04 NOVEMBRE 2020

rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE BAYONNE

EXPOSÉ DES FAITS ET PROCÉDURE :

Dans le cadre d’un démarchage à domicile, Monsieur [Z] [L] et Madame [M] [U] épouse [L] out fait l’acquisition, le 22 avril 2015, d’une installation de production d’électricité photovoltaïque auprès de la société Sungold, exerçant sous l’enseigne commerciale Institut des Nouvelles Energies, moyennant le prix de 22500,00 euros TTC financé par un crédit affecté de même montant, souscrit auprès de la société Sygma Banque, selon offre contractuelle du même jour acceptée par les époux [L].

Le crédit était remboursable en 132 échéances de 242,38 euros chacune, hors assurance facultative, au terme d’un différé d’amortissement de 12 mois.

Le vendeur s’engageait à prendre à sa charge la pose de l’installation, les démarches administratives et le raccordement au réseau.

Le raccordement de l’installation au réseau a été réalisé le 17 décembre 2015 et le contrat de rachat d’électricité a été signé le 21 mars 2016 pour une durée de 20 ans à compter du 17 décembre 2015.

Par actes d’huissier du 31 mai 2019, Monsieur et Madame [Z] [L] ont assigné la SA BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de Sygma Banque, et la SARL Sungold à l’enseigne lnstitut des Nouvelles Energies, prise en la personne de Me [P], mandataire liquidateur de cette société, devant le tribunal d’instance de Bayonne.

Par acte d’huissier du 29 janvier 2020, Monsieur et Madame [Z] [L] ont assigné la SARL Sungold en la personne de Maître [E], en qualité de mandataire ad’hoc de cette société, et la SA BNP Paribas Personal Finance devant le tribunal judiciaire de Bayonne, aux fins de voir :

‘ ordonner à la SA BNP Paribas Personal Finance la communication d’un état des sommes qu’ils ont remboursées en vertu du contrat de crédit du 22 avril 2015,

‘ débouter la SA BNP Paribas Personal Finance de ses demandes,

‘ prononcer l’annulation du contrat conclu avec la SARL Sungold,

‘ prononcer |’annulation du contrat de crédit affecté,

‘ dire et juger que la SA BNP Paribas Personal Finance a commis des fautes engageant sa responsabilité,

‘ dire et juger que la SA BNP Paribas Personal Finance ne pourra se prévaloir des effets de l’annulation à l’égard des emprunteurs,

‘ ordonner le remboursement par la SA BNP Paribas Personal Finance des sommes qu’ils ont versées, à savoir 14200,44 euros, somme arrêtée au mois d’août 2020, ce jusqu’au jugement à intervenir, outre les mensualités postérieures acquittées, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

à titre subsidiaire

‘ Condamner la SA BNP Paribas Personal Finance à leur payer la somme de 14200,00 euros sauf à parfaire, à titre de dommages et intérêts, au titre du préjudice résultant de la négligence fautive de la banque,

En tout état de cause :

‘ condamner la SA BNP Paribas Personal Finance au paiement des sommes de :

+ 5128,45 euros au titre du préjudice financier,

+ 4000,00 euros au titre du préjudice économique et du trouble de jouissance,

+ 3000,00 euros au titre du préjudice moral,

‘ condamner la SA BNP Paribas Personal Finance au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens,

‘ ordonner l’exécution provisoire,

à titre subsidiaire :

‘ ordonner l’exécution provisoire sur l’arrêt des prélèvements bancaires à venir,

à titre subsidiaire :

– en cas de rejet des demandes de Monsieur et Madame [Z] [L], dire

qu’ils reprendront le paiement mensuel des échéances du prêt.

Par jugement du 4 novembre 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bayonne a :

Annulé le contrat principal conclu entre Monsieur et Madame [Z] [L] et la SARL Sungold,

Annulé le contrat de crédit affecté conclu entre Monsieur et Madame [Z] [L] et Sygma Banque,

Débouté la SA BNP Paribas Personal Finance de ses demandes à l’encontre de Monsieur et Madame [Z] [L],

Débouté Monsieur et Madame [Z] [L] de leurs demandes au titre du préjudice financier, du préjudice moral et du trouble de jouissance,

Condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à Monsieur et Madame [Z] [L] la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et aux dépens,

Ordonné l’exécution provisoire.

Par déclaration en date du 25 novembre 2020, la BNP Paribas Personal Finance a relevé appel de ce jugement.

L’ordonnance de clôture est du 12 janvier 2022.

L’affaire a été fixée au 7 février 2022 puis renvoyée au 21 juin 2022.

Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l’espèce des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l’exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessous.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Vu les conclusions signifiées le 02 mars 2021à Me [B] [E], mandataire ad hoc de la SARL SUNGOLD et celles notifiées le 13 juillet 2021 de la société SA BNP Paribas Personal Finance qui demande :

Vu les articles 9 du code de procédure civile et 1315 du code civil,

Vu les articles 1134 et 1147, 1338 du code civil,

Vu les article L. 311-31 ancien et L. 312-48 nouveau du code de la consommation,

Vu les pièces produites,

Infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

Au principal,

Dire et juger qu’à supposer démontrées des causes de nullité du contrat de prestation et fourniture conclu avec la société Sungold, les époux [L] ont couvert ces nullités en exécutant volontairement et spontanément le contrat de prestation de service, en réceptionnant sans réserve ni grief les travaux et prestations accomplis qu’ils ont déclaré comme pleinement achevés au prêteur, en faisant procéder au raccordement après installation puis en souscrivant le contrat de rachat d’électricité, en exécutant le contrat de prêt, puis en percevant les revenus de leur production depuis plus de quatre années, de manière paisible et non équivoque, y compris après délivrance de l’assignation en annulation,

En conséquence,

Débouter les époux [L] de l’intégralité de leurs moyens et demandes,

A titre subsidiaire, dans l’hypothèse d’une annulation du contrat de prêt par accessoire,

Dire et juger qu’il ne pèse sur l’établissement de crédit aucune obligation de contrôle de la conformité du contrat principal aux dispositions impératives du code de la consommation, ni aucun devoir de conseil quant à l’opération économique envisagée par le maître d’ouvrage,

Dire et juger que toute privation du droit à restitution du capital mis à disposition en application de l’article L. 311-31 du code de la consommation implique que la prestation principale ne fut pas fournie, ce qui n’est pas le cas des époux [L] dont les obligations à l’égard du prêteur ont bien pris effet au sens de l’article L. 311-31 (L. 312-48), et ce à compter de la mise en service de la centrale photovoltaïque le 17/12/2015,

Débouter les époux [L] de leurs moyens et demandes tels que dirigés contre la SA BNP Paribas Personal Finance,

Condamner en conséquence solidairement les époux [L] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance, au titre des remises en état entre les parties, la somme de 22.500€ avec déduction des échéances déjà versées,

En toute hypothèse :

Condamner les époux [L] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 1.500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Les Condamner aux entiers dépens.

*

Vu les conclusions signifiées le 06 mai 2021à Me [B] [E], mandataire ad hoc de la SARL SUNGOLD et celles notifiées le 6 décembre 2021 par les époux [L] qui demandent de :

Vu les articles L. 311-1, L. 311-6, L. 311-8, L. 311-13, L. 311-32, L. 311-35, L. 312-2, L. 312-7, L. 312-11, L. 312-33, L. 313-1, L. 313-3 à L. 313-5, et D. 311-4-3 du Code de la consommation ,

Vu les articles L.111-1, L.111-2, L.113-3, L.133-3, L.121-17, L.121-18-1, L.121-21 et R.121-1 du Code de la consommation dans leur rédaction applicable au cas d’espèce,

Vu les articles L.421-1 à L.421-5 et L.480-4 du Code de l’urbanisme,

Vu les articles L.313-5-1, L.519-1 et L.546-1 du Code monétaire et financier,

Vu l’article L.512-1 du Code des assurances,

Vu les articles 1109, 1116, 1710 et 1792 du Code civil,

Vu les articles 11, 515 et 700 du Code de procédure civile,

Vu les pièces produites,

Il est demandé à la cour d’appel de PAU, de :

‘ Confirmer le jugement du Juge des contentieux de la protection du Tribunal de proximité de Bayonne en ce qu’il a :

o Annulé le contrat principal conclu entre Monsieur et Madame [Z] [L] et la SARL Sungold ;

o Annulé le contrat de crédit affecté conclu entre Monsieur et Madame [Z] [L] et Sygma Banque ;

o Débouté la SA BNP Paribas Personal Finance de ses demandes à l’encontre de Monsieur et Madame [Z] [L] ;

o Condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à Monsieur et Madame [Z] [L] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

o L’a condamnée aux dépens ;

o Ordonné l’exécution provisoire.

‘ Infirmer le jugement susvisé pour le surplus ;

Et statuant à nouveau,

Condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Sygma Banque à verser à Monsieur [Z] [L] et Madame [M] [U] épouse [L] la somme de :

‘ 5.128,45 € au titre de leur préjudice financier, sauf à parfaire ;

‘ 4.000,00 € au titre de leur préjudice économique et de leur trouble de jouissance ;

‘ 3.000,00 € au titre de leur préjudice moral ;

A titre subsidiaire :

Si le Tribunal ne faisait pas droit aux demandes des époux [L] considérant que les banques n’ont pas commis de fautes :

Prononcer la déchéance du droit de la banque aux intérêts du crédit affecté.

A titre infiniment subsidiaire :

Si par extraordinaire, le Tribunal venait à (‘.) Monsieur [Z] [L] et Madame [M] [U] épouse [L] de l’intégralité de leurs demandes,

Dire et juger que Monsieur [Z] [L] et Madame [M] [U] épouse [L] reprendront le paiement mensuel des échéances du prêt.

MOTIVATION :

Le mandataire ad hoc de la SARL SUNGOLD ayant été assigné par acte signifié le 11 décembre 2020 dans les formes de l’article 659 du code de procédure civile, l’arrêt sera rendu par défaut.

Sur la nullité du contrat de vente :

La SA BNP Paribas Personal Finance conclut à l’infirmation du jugement qui a prononcé la nullité du contrat principal, aux motifs notamment qu’aucune disposition légale n’imposait de préciser, sur le bon de commande, le rendement attendu de l’installation puisque ce dernier dépend pour partie de la durée de l’ensoleillement.

Elle ajoute que les allégations, selon lesquelles l’installation photovoltaïque ne serait pas rentable ou ne produirait pas assez d’électricité, sont purement gratuites et que la rentabilité économique ne constitue une caractéristique essentielle d’une telle installation qu’à la condition que les parties l’aient fait entrer dans le champ contractuel, ce qui n’est pas établi.

S’agissant de l’absence d’indication sur le bon de commande de la forme sociale du prestataire, elle relève que le numéro d’immatriculation de la société Sungold au registre du commerce figure lisiblement au pied du contrat et que les époux [L] n’ont jamais eu aucune difficulté pour identifier le vendeur et mener une procédure contre lui.

Concernant le grief, retenu par le premier juge, relatif à l’absence de précisions sur la forme, la surface, la couleur des panneaux, les procédés d’installation et leur impact sur l’aspect général de la construction, elle soutient qu’il ne s’agit pas là de caractéristiques essentielles devant figurer sur le bon de commande.

Elle ajoute qu’en tout état de cause, les époux [L] ont exécuté volontairement leurs engagements, après la découverte des causes de nullité ; qu’ils ont ainsi manifesté leur volonté non équivoque d’accepter l’installation, par des actes répétés d’exécution du contrat, jusqu’au raccordement de l’installation et la signature du contrat de rachat d’électricité avec EDF, percevant depuis les revenus de la revente d’électricité, ce qui était le but de l’opération financée.

Elle conteste de même l’existence d’un dol.

Les époux [L] soutiennent au contraire que le contrat de vente est nul, compte tenu du non respect des dispositions impératives du code de la consommation prévoyant un certain nombre de mentions obligatoires devant figurer sur le bon de commande, à peine de nullité, telles que :

‘ les caractéristiques essentielles des biens ou des services proposés ; ils relèvent à cet égard que les marques mentionnées sur le bon de commande ne correspondent pas à celles du matériel livré et installé ;

‘ la date de livraison du bien ou d’exécution de la prestation, et le délai de livraison qui, au recto du document, est de 3 mois, date indicative car le délai maximum indiqué dans les conditions générales peut aller jusqu’à 200 jours soit plus de six mois; le délai de mise en service qui conditionne le point de départ de la production n’étant pas mentionné ;

‘ les informations relatives au paiement et au coût du financement ;

‘ l’absence de prix détaillé, le prix indiqué étant global, sans indication du prix unitaire de chaque composant ;

‘ des conditions générales ne reprenant pas les articles issus de la loi du 17 mars 2014 et en particulier l’article L. 111-1 du code de la consommation.

‘ le non respect sur le bon de commande des dispositions concernant le droit de rétractation: le formulaire ne respecte pas les dispositions imposées par le code de la consommation et fait référence aux anciens articles L. 121-23 à L. 121-26 alors que ces derniers n’étaient plus applicables.

Les époux [L] contestent que l’exécution du contrat puisse être analysée comme une confirmation non équivoque des nullités entachant le bon de commande.

Les intimés font valoir également que le contrat de vente est nul pour vice du consentement, pour dol, car au-delà de l’absence des nombreuses mentions obligatoires devant figurer sur le bon de commande, ni le contrat en cause, ni aucun élément remis ou communiqué dans le cadre de l’opération, ne contient d’information concernant :

‘ le délai de raccordement ;

‘ l’ assurance obligatoire à souscrire en cas d’acquisition de tels matériels ;

‘ la location obligatoire d’un compteur de production auprès de la société EDF sur 20 ans, impliquant un coût supplémentaire ;

‘ la durée de vie des matériels et notamment de l’onduleur électrique qui devra être remplacé plusieurs fois au cours de l’exploitation de la centrale.

Ils considèrent que les manoeuvres dolosives sont caractérisées par :

‘ la référence à des partenariats mensongers avec EDF et ERDF;

‘ une présentation fallacieuse de la rentabilité de l’installation, le vendeur ayant fait croire aux acheteurs que les revenus énergétiques issus de leur installation suffiraient à couvrir les mensualités de leur crédit, les époux [L] ayant emprunté quatre fois plus qu’ils ne pouvaient gagner en revendant de l’électricité ;

‘ la présentation dolosive de l’ensemble contractuel, la case contrat d’achat n’étant pas cochée sur le bon de commande, afin de laisser penser aux époux [L] que leur signature ne les engageait pas.

En droit, à la date du bon de commande, le contrat était soumis aux dispositions des articles L. 111-1 et L. 111-2 du code de la consommation dans leur rédaction issue de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014.

Selon le premier de ces textes,

« Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;

3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s’il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’Etat… »

Selon l’article L. 111-2,

« I.-Outre les mentions prévues à l’article L. 111-1, tout professionnel, avant la conclusion d’un contrat de fourniture de services et, lorsqu’il n’y a pas de contrat écrit, avant l’exécution de la prestation de services, met à la disposition du consommateur ou lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’Etat. Ce décret précise celles des informations complémentaires qui ne sont communiquées qu’à la demande du consommateur… »

Selon l’article L. 121-17 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date du contrat de vente,

« I.-Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L. 121-21-5 ;

5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L. 121-21-8, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;

6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l’utilisation de la technique de communication à distance, à l’existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’Etat.

II.-Si le professionnel n’a pas respecté ses obligations d’information concernant les frais supplémentaires mentionnés au I de l’article L. 113-3-1 et au 3° du I du présent article, le consommateur n’est pas tenu au paiement de ces frais.

III.-La charge de la preuve concernant le respect des obligations d’information mentionnées à la présente sous-section pèse sur le professionnel. »

Selon l’article L. 121-18 du même code ,

« Dans le cas d’un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l’accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues au I de l’article L. 121-17. Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible. »

Aux termes de l’article L121-18-1

« Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties.

Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l’article L. 121-17.

Le contrat mentionne, le cas échéant, l’accord exprès du consommateur pour la fourniture d’un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l’expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l’exercice de son droit de rétractation.

Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° du I de l’article L. 121-17. »

Selon l’article R 121-1 du même code,

« Le formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 121-17 figure en annexe au présent article »

Selon cette annexe, le formulaire de rétractation doit comporter les mentions suivantes :

MODÈLE DE FORMULAIRE DE RÉTRACTATION

(Veuillez compléter et renvoyer le présent formulaire uniquement si vous souhaitez vous rétracter du contrat.)

A l’attention de [le professionnel insère ici son nom, son adresse géographique et, lorsqu’ils sont disponibles, son numéro de télécopieur et son adresse électronique] :

Je/nous (*) vous notifie/notifions (*) par la présente ma/notre (*) rétractation du contrat portant sur la vente du bien (*)/pour la prestation de services (*) ci-dessous :

Commandé le (*)/reçu le (*) :

Nom du (des) consommateur(s) :

Adresse du (des) consommateur(s) :

Signature du (des) consommateur(s) (uniquement en cas de notification du présent formulaire sur papier) :

Date :

(*) Rayez la mention inutile :

S’agissant du délai de rétractation, il ressort des dispositions de l’article L. 121-21 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur à la date du bon de commande que :

« Le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L. 121-21-3 à L. 121-21-5. Toute clause par laquelle le consommateur abandonne son droit de rétractation est nulle.

Le délai mentionné au premier alinéa du présent article court à compter du jour :

1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l’article L. 121-16-2 ;

2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens et les contrats de prestation de services incluant la livraison de biens. Le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.

Dans le cas d’une commande portant sur plusieurs biens livrés séparément ou dans le cas d’une commande d’un bien composé de lots ou de pièces multiples dont la livraison est échelonnée sur une période définie, le délai court à compter de la réception du dernier bien ou lot ou de la dernière pièce… »

En l’espèce, le bon de commande ne comporte aucune indication précise des caractéristiques essentielles de l’installation.

En effet, figurent sur ce document la mention, par ailleurs erronée, de « 3 » Wc (watt crête) au lieu de 3 Kwc, pour la puissance globale de l’installation, le nombre de panneaux photovoltaïques « 12 », leur puissance individuelle « 250 », la référence à la norme NF EN 61215 classe II, la marque des panneaux «  Thomson », la marque de l’onduleur «  Schneider ». En revanche, sont absentes les références des matériels commandés ou leurs performances techniques de nature à permettre au consommateur d’effectuer une comparaison avec le matériel proposé par d’autres fabricants et d’éclairer son choix.

La garantie de rendement des panneaux dans le temps n’est pas non plus indiquée, pas plus que la durée de la garantie constructeur sur les éléments essentiels de l’installation, en cas de panne, à savoir principalement l’onduleur et les panneaux photovoltaïques.

Le calendrier d’exécution des prestations d’installation et de raccordement est absent, seul un délai maximum de livraison de trois mois étant mentionné, ce qui est notoirement insuffisant pour renseigner l’acheteur sur l’échéancier global de l’opération, d’autant qu’au dos des conditions générales figure la mention suivante :

«  le délai de livraison figurant au recto du présent contrat est donné à titre indicatif et ne peut dépasser une limite de 200 jours à compter de la prise d’effet du contrat… »

Enfin, plus grave, le bon de commande ne comporte pas une information complète sur l’exercice du droit de rétractation. En effet, seul le premier alinéa de l’article L. 121-21 est reproduit de sorte que le point de départ de l’exercice de ce droit n’est pas indiqué.

En effet, en matière de vente de bien ou de contrat de prestation incluant la vente de bien, le délai de rétractation court du jour de la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, le consommateur ayant également la possibilité d’exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.

Or, cette information ne figure pas sur le bon de commande, alors que le formulaire de rétractation fait partir le délai de renonciation du jour de la commande privant ainsi l’acheteur d’une information complète sur l’option qui s’offrait à lui, puisqu’il pouvait encore exercer son droit de renonciation dans le délai de 14 jours suivant la réception des biens vendus.

En outre, la référence aux articles L. 121-23 à L. 121-26 anciens du code de la consommation relatifs au délai de rétractation, portée sur le formulaire de rétractation était de nature à induire un peu plus en erreur l’acheteur, puisque l’article L. 121-25, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, prévoyait un délai de renonciation de sept jours.

Dès lors, le bon de commande ne comportait pas toutes les mentions prescrites à peine de nullité par les articles L. 121-17 et L. 121-18-1 précités et doit être annulé, notamment parce que les acheteurs n’ont pas été mis en mesure d’exercer leur droit de renonciation à défaut d’avoir reçu une information complète et exacte à ce sujet.

La volonté non équivoque des époux [L] de confirmer le bon de commande, en dépit des irrégularités affectant ce document, ne saurait résulter de la signature du document pré imprimé autorisant le prêteur à libérer les fonds, lequel ne vaut pas procès-verbal de réception sans réserve de l’ouvrage, ni de la signature du contrat de rachat d’électricité et du paiement des mensualités de remboursement du crédit affecté.

En effet, le rappel, sur le bon de commande, de textes incomplets ou qui n’étaient plus en vigueur, ne leur permettait pas de se rendre compte par eux-mêmes des mentions lacunaires ou inexactes du bon de commande, concernant notamment l’étendue de leur droit de renonciation qui pouvait être exercé jusqu’au 29 mai 2015, la livraison étant intervenue le 15 mai 2015, soit plus d’un mois après la signature du bon de commande du 22 avril 2015.

Cette irrégularité, indécelable, n’a pu faire l’objet d’une quelconque ratification de la part des époux [L] qui, induits en erreur sur le caractère définitif de la vente, n’ont pas été mis en mesure d’exercer, ni a fortiori, de renoncer à exercer, leur droit de rétractation, ce qui leur cause nécessairement un préjudice, alors en outre qu’ils ont remis en cause, par courrier du 25 septembre 2016 adressé au vendeur, l’équilibre économique du contrat et le calendrier de mise en production de l’installation.

En conséquence de la violation des dispositions légales relatives au droit de rétractation, les consorts [L] sont fondés à demander la nullité du contrat de vente.

Sur la nullité du contrat de crédit affecté :

En application de l’article L. 311-32 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la date de la convention, le contrat de crédit affecté souscrit par les époux [L] est annulé de plein droit en conséquence de l’annulation du contrat principal.

Le jugement sera donc confirmé sur l’annulation du contrat de crédit affecté.

Sur la responsabilité du prêteur :

En droit, il résulte des articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 que la résolution ou l’annulation d’un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu’il finance, emporte pour l’emprunteur l’obligation de restituer au prêteur le capital prêté, mais que le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

En l’espèce, la société BNP Paribas Personal Finance a commis une faute contractuelle en libérant les fonds sans avoir relevé l’irrégularité, de surcroît flagrante, du bon de commande enfermant l’exercice du droit de rétractation dans un délai de 14 jours à compter de la commande, quand il devait courir à compter de la réception des biens livrés, persuadant le consommateur du caractère définitif de la commande avant l’expiration du délai légal.

Au vu de cette irrégularité, il lui appartenait de s’assurer que les époux [L], dûment informés de leurs droits, entendaient renoncer à exercer leur faculté de rétractation.

En manquant à ses obligations contractuelles, la banque a laissé les époux [L] s’engager dans une opération contractuelle complexe adossée à un prêt important sans bénéficier des dispositions protectrices du droit de la consommation, mettant à leur charge l’obligation de rembourser un prêt affecté à un contrat, conclu dans des conditions irrégulières, ne leur permettant pas d’exercer un choix éclairé pendant le délai légal de renonciation.

Les consorts [L], qui ne doivent pas supporter les conséquences financières des fautes de la banque, sont fondés à voir la BNP Paribas Personal Finance privée de son droit à restitution du capital prêté.

La société BNP Paribas Personal finance sera donc déboutée de sa demande de restitution du capital prêté, au titre des remises en état entre les parties.

Si dans le dispositif de leurs conclusions, les intimés ne demandent pas expressément la restitution des mensualités de remboursement du crédit affecté, le présent arrêt confirmatif de la nullité de l’ensemble contractuel constitue, avec le jugement confirmé, le titre constatant la créance de restitution des sommes versées par les époux [L] au prêteur, en exécution du contrat de crédit conclu avec Sygma Banque.

Le jugement entrepris sera complété en ce sens.

Sur le préjudice distinct subi par les époux [L] :

Les intimés ne démontrent pas subir un préjudice financier par suite de l’impossibilité de restituer le matériel photovoltaÏque au vendeur, qui a disparu, de sorte qu’ils seraient eux-mêmes contraints de financer les travaux de dépose de l’installation et de remise en état de la couverture.

Ils n’établissent pas en effet la nécessité de déposer dans un délai impératif l’installation qui, à défaut de preuve contraire, est fonctionnelle et continue de produire de l’électricité, le revenu perçu par la revente d’électricité étant de nature à couvrir le coût de dépose du matériel et de remise en état de leur toiture, tel qu’il ressort des devis qu’ils versent aux débats.

Le préjudice économique n’est pas non plus caractérisé, par suite de la déchéance du prêteur de son droit à restitution des sommes prêtées et alors que la banque n’avait pas à conseiller l’emprunteur sur l’équilibre économique de l’opération financée, à défaut d’en avoir pris l’engagement.

Le trouble de jouissance lié au fait que, contraints financièrement par une opération dont ils estiment le coût exorbitant, les emprunteurs auraient renoncé à différents projets personnels (vacances, loisirs, travaux divers, acquisitions) n’est pas non plus établi.

Enfin, le préjudice moral lié aux manoeuvres frauduleuses du vendeur, à la réalisation des travaux de l’installation solaire et au fait de devoir supporter une installation aussi inutile qu’inesthétique n’est pas non plus démontré et serait en tout état de cause sans lien de causalité directe avec la faute du prêteur.

S’agissant du manquement de la banque à ses obligations d’information pré contractuelle, la cour peut vérifier, au travers de la liasse du contrat de crédit versée aux débats, que la Banque Sygma a satisfait à ses obligations légales en la matière , en s’assurant notamment, par la fiche de dialogue, du caractère proportionné du crédit aux revenus et charges des emprunteurs.

Là encore le préjudice moral n’est pas caractérisé.

Les époux [L] sont en conséquence déboutés de leur appel incident.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

La BNP Paribas Personal Finance, qui succombe, supportera la charge des dépens de première instance et d’appel.

Au regard des circonstances de la cause et de l’issue du litige, l’équité justifie de condamner la BNP Paribas Personal Finance à verser aux époux [L] une somme de 3000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens de l’entière procédure. Le jugement sera réformé en ce sens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, rendu par défaut et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bayonne le 4 novembre 2020, sauf en ce qui concerne l’application de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,

Rappelle que le présent arrêt et le jugement confirmé constituent le titre de restitution des sommes versées par les époux [L] à la BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la banque Sygma, en exécution du contrat de crédit affecté annulé,

Condamne la SA BNP Paribas Personal Finance aux dépens d’appel,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à Monsieur et Madame [L] une somme de 3000,00 euros au titre des frais non compris dans les dépens de l’entière procédure.

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions.

Le présent arrêt a été signé par Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.

La GreffièreLa Présidente

 


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