Démarchage Téléphonique : décision du 17 mai 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/01159

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Démarchage Téléphonique : décision du 17 mai 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/01159

JG/ND

Numéro 23/1698

COUR D’APPEL DE PAU

2ème CH – Section 1

ARRET DU 17/05/2023

Dossier : N° RG 21/01159 – N° Portalis DBVV-V-B7F-H2T5

Nature affaire :

Demande en nullité de la vente ou d’une clause de la vente

Affaire :

[E] [C]

[F] [P] épouse [C]

C/

S.A.S. [W]

S.A.S. FUTURA INTERNATIONALE

S.A. DOMOFINANCE

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 17 Mai 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 06 Mars 2023, devant :

Madame Joëlle GUIROY, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame Nathalène DENIS, Greffière présente à l’appel des causes,

Joëlle GUIROY, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Marc MAGNON et en a rendu compte à la Cour composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Joëlle GUIROY, Conseillère

Monsieur [E] DARRACQ, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTS :

Monsieur [E] [C]

né le 27 Novembre 1955 à [Localité 8] (La Réunion) (974)

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Madame [F] [P] épouse [C]

née le 13 Mars 1952 à [Localité 9] (65)

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentés par Me Dominique CHEVALLIER-FILLASTRE de la SCP CHEVALLIER-FILLASTRE, avocat au barreau de TARBES

INTIMEES :

S.A.S. DESLORIEUX

prise en la personne de Maître [M] [W], pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SAS FUTURA INTERNATIONALE, immatriculée au RCS de PAris sous le numéro B 440.570.729, dont le siège social est anciennement à [Adresse 7] et actuellement [Adresse 10],

nommé à cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de Creteil (94) en date du 15 septembre 2021

[Adresse 4]

[Localité 6]

assignée

S.A. DOMOFINANCE

immatriculée au RCS de Paris sous le n° 450 275 490, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Philippe BORDENAVE, avocat au barreau de PAU

Assistée de la SCP RAMAHANDRIARIVELO – DUBOIS – DEETJEN ‘RED’, avocat au barreau de MONTPELLIER

sur appel de la décision

en date du 16 FEVRIER 2021

rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE PAU

Exposé du litige et des prétentions des parties :

A la suite d’un démarchage téléphonique, le 13 janvier 2016, Monsieur [E] [C] et Madame [F] [P] épouse [C] ont souscrit avec la Société Futura Internationale un contrat d’achat d’une installation photovoltaïque de 36 modules pour un coût de 45.900 euros.

Pour financer cet achat, la SASU Futura Internationale, qui représentait alors la SA Domofinance, leur a fait souscrire un contrat de prêt de 60.685,80 euros remboursables en 145 mois.

La société Futura Internationale a livré et installé le matériel sur la toiture du garage attenant à l’habitation des époux [C]. A cette occasion, elle a modifié la toiture en bac acier du garage.

Le système de production d’électricité a été raccordé au réseau d’électricité d’Enedis et a été mis en service le 8 juin 2016.

A la fin du 1er semestre 2017, les époux [C] constataient que la production d’électricité ne correspondait pas à leurs attentes et ne leur permettait pas de couvrir les échéances d’emprunt.

En outre, ils relevaient que les travaux d’installation des panneaux avaient provoqué des désordres sur leur immeuble, désordres qu’ils faisaient constater par procès-verbal de constat d’huissier du 25 juillet 2017 établi par Maître [T], huissier de justice à [Localité 9].

Dans ce contexte, par exploit d’huissier du 18 septembre 2017, Monsieur et Madame [C] ont assigné, devant le tribunal de grande instance de Pau statuant en référé, la société Futura Internationale aux fins de solliciter une mesure d’expertise judiciaire.

Par ordonnance de référé du 25 octobre 2017, une expertise était ordonnée et était confiée à Monsieur [B] qui déposait son rapport le 26 mars 2018.

Par suite, par exploits d’huissier en date du 13 juin 2018, les époux [C] ont fait assigner la SASU Futura Internationale et la SA Domofinance devant le tribunal de grande instance de Pau aux fins de solliciter la résolution des contrats de vente et de prêt ainsi que l’allocation de dommages et intérêts.

Par jugement réputé contradictoire en date du 16 février 2021, le tribunal judiciaire de Pau a :

– débouté Monsieur [E] [C] et Madame [F] [P] épouse [C] de leurs demandes de résolution du contrat de vente souscrit avec la SAS Futura Internationale et du contrat de crédit souscrit avec la SA Domofinance ;

– condamné la SAS Futura Internationale à payer à Monsieur et Madame [C] la somme de 3.712,50 € en réparation des désordres ;

– rejeté les autres demandes ;

– débouté la SA Domofinance de ses demandes,

– condamné la SAS Futura Internationale à payer à Monsieur et Madame [C] la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la SAS Futura Internationale aux entiers dépens comprenant les frais d’expertise.

Par déclaration au greffe en date du 6 avril 2021, Monsieur [E] [C] et Madame [F] [P] épouse [C] ont interjeté appel de ce jugement.

Par jugement du 15 septembre 2021, le tribunal de commerce de Créteil a prononcé la liquidation judiciaire de la société S.A.S.U Futura Internationale et a désigné la S.A.S. [W], prise en la personne de Maître [M] [W], en qualité de liquidateur.

Par acte du 17 janvier 2022, les époux [C] ont assigné en intervention forcée le mandataire à la liquidation de la société Futura Internationale.

Par courrier adressé à la cour du 17 janvier 2022, Maître [W] a indiqué que la procédure était impécunieuse et qu’il ne serait ni présent ni représenté à l’audience. Il a précisé que Monsieur et Madame [C] avaient déclaré leur créance au passif de la société pour un montant de 12.923,15 euros.

Par ordonnance du 3 février 2022, le magistrat de la mise en état a ordonné la jonction des deux instances.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 11 janvier 2023 et l’audience de plaidoirie a eu lieu le 6 mars 2023.

**

Dans leurs dernières conclusions notifiées le 29 avril 2022, Monsieur [E] [C] et Madame [F] [P] épouse [C] demandent à la cour de :

– les recevoir en leur appel, le dire bien fondé ;

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il :

– les a déboutés de leurs demandes de résolution du contrat de vente souscrit avec la SAS Futura Internationale et du contrat de crédit souscrit avec la SA Domofinance,

– a condamné la SAS Futura Internationale à leur payer la somme de 3.712,50 €uros en réparation des désordres,

– rejeté leurs autres demandes.

Et, vu l’article 910 du Code de Procédure Civile,

– juger recevable et bien fondée leur assignation en intervention forcée délivrée à la SAS [W], prise en la personne de Maître [M] [W], demeurant [Adresse 4], prise en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la S.A.S. Futura Internationale, nommée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Créteil (94) du 15 septembre 2021, en date du 17 janvier 2022 ;

Vu les articles 1323 et 1324 du code civil,

Vu l’article 1184 ancien du code civil,

Vu les articles 1217 et 1224 du code civil

Vu l’article 1186 du code civil,

Vu l’article 1218 ancien du code civil.

– juger qu’il y a indivisibilité entre le contrat de vente Futura Internationale et le contrat de prêt Domofinance ;

– juger qu’il y a inexécution du contrat de vente et en prononcer la résolution

– juger que la résolution du contrat de vente entraîne celle du contrat de prêt affecté, ce d’autant plus que le prêteur ne s’est pas assuré de la bonne exécution du contrat de vente avant le déblocage des fonds ;

– juger qu’ils désavouent formellement la prétendue signature apposée sur le P.V. de réception ;

– juger qu’ils sont créanciers de la S.A.S. [W], prise en la personne de Maître [M] [W], en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la S.A.S. Futura Internationale, nommée à cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de Créteil (94) du 15 septembre 2021 ;

– et juger qu’il convient de fixer leur créance à la somme de 4.420,50 €uros ;

– débouter la S.A. Domofinance et la S.A.S. [W], prise en la personne de Maître [M] [W], ès qualités, de leurs demandes contraires aux présentes conclusions ;

– condamner la S.A.S. [W] ès qualités et la SA Domofinance à leur payer 5.000 €uros d’indemnité article 700 CPC outre à supporter les entiers dépens en ce compris le coût de l’expertise judiciaire et celui du PV de constat du 25 juillet 2017.

– débouter la SA Domofinance de toutes ses fins, demandes et conclusions

**

Dans ses conclusions en date du 13 septembre 2021, la société Domofinance demande à la cour de :

Vu les articles 9 du code de procédure civile et 1315 du code civil,

Vu les articles 1134 et 1147, 1184 et 1338 du code civil,

Vu l’article L123-23 du code de la consommation,

Vu les pièces produites,

A titre principal,

– confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

– débouter les époux [C] de l’intégralité de leurs moyens et demandes,

A titre subsidiaire, dans l’hypothèse d’une résolution du contrat de prêt par accessoire,

– dire et juger qu’elle n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité civile contractuelle ou à la priver de son droit à restitution du capital mis à disposition, dès lors que les époux [C] l’ont déterminée à libérer les fonds entre les mains de la société Futura Internationale en signant la fiche de réception des travaux attestant de leur bonne et complète exécution, et donnant ordre au prêteur de libérer les fonds,

– rappeler et en tant que de besoin, dire et juger qu’elle n’est pas partie au contrat principal par application de l’article 1165 du code civil, alors qu’il lui est fait interdiction de s’immiscer dans les gestions des emprunteurs et d’apprécier l’utilité ou l’opportunité de la prestation objet du financement, pas plus qu’elle ne doit rendre compte de l’exécution par le prestataire, ni n’est tenue d’une obligation contractuelle de contrôle des prestations accomplies, ou d’assistance du maitre d’ouvrage à la réception,

– dire et juger que toute privation du droit à restitution du capital mis à disposition en application de l’article L312-48 (L311-31 ancien) du code de la consommation implique que la prestation principale ne fut pas fournie, ce qui n’est pas le cas des époux [C] dont leurs obligations à l’égard du prêteur ont bien pris effet au sens de l’article L312-48,

En conséquence,

– débouter les époux [C] de leurs demandes telles que dirigées contre la SA Domofinance,

– les condamner in solidum avec la SA Futura Internationale à lui payer, au titre des remises en état et restitution du capital mis à disposition, la somme de 45.900 € avec déduction des échéances déjà versées,

– dire et juger que la société Futura Internationale garantira les époux [C] de cette condamnation à son profit, en application de l’article L311-3 du code de la consommation,

– condamner la seule SA Futura Internationale à lui payer à titre de dommages et intérêts, la somme de 14.785,20€ correspondant au montant des intérêts contractuels que le prêteur aurait dû percevoir sur exécution normale du contrat de crédit,

A titre très subsidiaire, en cas de privation pour le prêteur de sa créance de restitution,

– condamner la SA Futura Internationale à lui payer, à titre de dommages et intérêts, la somme de 45.900€ au titre du capital mis à disposition entre ses mains, outre celle de14.785,20€ correspondant au montant des intérêts contractuels que le prêteur aurait du percevoir sur exécution normale du contrat de crédit,

En toute hypothèse, condamner tout succombant à lui payer la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens

**

Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l’espèce des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l’exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessus.

MOTIVATION :

– sur la procédure :

Par acte d’huissier du 17 janvier 2022, les époux [C] ont assigné en intervention forcée Maître [W] ès qualités de mandataire à la liquidation de la SASU Futura Internationale et lui ont signifié la déclaration d’appel ainsi que leurs conclusions.

Il n’a pas constitué avocat et n’a pas conclu.

La cour étant régulièrement saisie, il conviendra de statuer par arrêt réputé contradictoire.

Cependant, il résulte de l’article 472 du code de procédure civile que si, en appel, l’intimé ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l’appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés.

– sur la demande des époux [C] en résolution du contrat de vente :

Les époux [C] ne remettent pas en cause la validité du contrat de vente et de crédit affecté souscrits le 13 janvier 2016 auprès de Monsieur [U] [L], commercial de la société Futura Internationale, mais se fondent sur les dispositions du code civil, et notamment l’article 1184 du code civil dans sa version applicable au litige, pour soutenir que le contrat de vente doit être résolu pour manquements graves de l’installateur à ses obligations contractuelles.

En effet, ils affirment que l’installation a été mal étudiée et mal positionnée car installée sur le toit de leur garage orienté à l’ouest et masqué par des frondaisons d’arbres.

En outre, elle a entraîné des désordres et son montant a été surfacturé de telle sorte que son rendement en est affecté dans des proportions qui ne leur permettent pas d’amortir le coût du prêt contracté sur sa durée.

Or, ils déclarent que la production d’électricité nécessaire au remboursement du crédit en 145 mois était pour eux l’un des éléments essentiels au contrat. Ils invoquent alors les termes de l’article 1186 du code civil dans sa version applicable à compter du 1er octobre 2016 ou, à défaut en application des dispositions de l’article 1218 du même code dans sa version applicable à l’espèce.

Ils évoquent ainsi un vice du consentement sans toutefois prétendre à la nullité du contrat, ce grief sera dès lors examiné sous l’angle d’un éventuel manquement de l’installatrice à ses obligations contractuelles.

Ils demandent en outre que soit fixée au passif de la société Futura Internationale une créance de 4.420,50 euros TTC correspondant à la réparation des désordres causés par l’installation sur la toiture de leur garage outre 708 euros TTC correspondant aux frais de dossier qu’ils ont dû monter pour pouvoir vendre leur électricité à EDF.

En réponse, la SA Domofinance fait valoir qu’elle est créancière des époux [C] au titre d’une offre préalable de crédit accessoire à la prestation de service de la société Futura Internationale et qu’elle a débloqué les fonds après transmission du procès-verbal de réception ratifié le 17 février 2016 sans qu’il ne puisse lui être reproché une quelconque faute.

Elle souligne que la centrale photovoltaïque a été raccordée au réseau électrique le 8 juin 2016 et que ce n’est que deux ans plus tard que les appelants ont saisi une juridiction pour obtenir la nullité du contrat de vente et du contrat de crédit affecté se prévalant d’une expertise non contradictoire à son égard pour soutenir que les prestations attendues n’ont pas été accomplies et qu’elle a engagé sa responsabilité en débloquant les fonds sans vérifier la conformité de l’installation.

Elle demande la confirmation de la décision entreprise en ce qu’elle a retenu que le contrat ne comportait aucun engagement de rendement ni la promesse d’un autofinancement du prêt par la revente d’électricité et que les défauts d’exécution chiffrés par l’expert à la somme de 3.712,50 euros ne sont pas d’une gravité justifiant la résolution de l’ensemble contractuel dont le montant initial était de 45.900 euros.

A titre subsidiaire, la SA Domofinance expose que si la résolution du contrat de vente était prononcée et, par accessoire, celle du contrat de prêt, les époux [C] doivent être condamnés à lui restituer le capital prêté, déduction faite des paiements intervenus, sans qu’ils ne puissent lui opposer une quelconque faute de sa part dans le déblocage des fonds au regard de l’attestation de fin de travaux du 17 février 2016 qui lui a été délivrée ni compensation avec des dommages et intérêts qu’elle leur devrait en l’absence de lien de causalité entre le préjudice qu’ils dénoncent et la faute qu’ils lui reprochent.

En l’espèce, l’examen du bon de commande signé par Monsieur [C] le 13 janvier 2016 établit qu’il a été souscrit dans le cadre d’un contrat de démarchage à domicile pour une installation d’une puissance de 9.000 WC composée de 36 modules solaires photovoltaïques de type Solutech d’une puissance unitaire de 250 WC certifiés pour un prix de 45.900 euros, les démarches administratives et le raccordement EDF étant pris en charge par l’installateur et l’ondulateur étant garanti 20 ans.

Le règlement intervenait par crédit contracté le même jour par Monsieur et Madame [C] auprès de la SA Domofinance remboursable en 145 mensualités de 456,46 euros chacune.

Le 25 juillet 2017, les époux [C] ont fait dresser procès-verbal de constat d’huissier du positionnement et de la production de l’installation au regard de son ensoleillement et des désordres présents sur le toit du garage.

Puis, ils ont obtenu la désignation d’un expert par ordonnance de référé du 25 octobre 2017.

Or, il ressort du rapport déposé par l’expert que l’installation a été raccordée au réseau de distribution d’Enedis, qu’elle a été mise en service le 8 juin 2016 et qu’à la fin du premier semestre 2017, les demandeurs ont constaté un rendement inférieur à leurs attentes outre des désordres sur leur immeuble.

Sur le plan des désordres techniques, l’expert a conclu que : ” la mise en ‘uvre des opérateurs de la société Futura Internationale ne correspond pas aux règles de construction d’un homme de l’art en ce que la pose de l’installation photovoltaïque a été réalisée sur une ossature de charpente primaire incomplète (pannes sans chevrons) et en omettant de mettre en place une structure secondaire (par exemple contrelattes et liteaux). De fait, la continuité des points d’appui n’est pas respectée entraînant une instabilité sous charges ascendantes et horizontales. La planéité de la toiture n’est pas atteinte entraînant des contraintes sur le système d’étanchéité de l’installation photovoltaïque de époux [C]. Cette mise en ‘uvre met clairement en cause la solidité de l’ouvrage et sa viabilité, y compris les éléments de toiture constituant le champ photovoltaïque”.

S’agissant de l’estimation de production, l’expert a mis en évidence une baisse de production, après une première période de fonctionnement de 12 mois, de 41,18 % par rapport au productible attendu, ce qui, selon son chiffrage, correspond à une perte financière annuelle attendue de 918,87 euros.

Il relevait alors que le site n’était pas adapté à l’implantation d’un tel système de production d’électricité étant contigu à un bois de feuillus causant un phénomène d’ombre portée affectant le champ photovoltaïque.

Il concluait que les intervenants de la société Futura Internationale avaient clairement failli à leur devoir de conseil.

L’expert chiffrait les préjudices subis par les époux [C] à :

– 3.712,50 euros au titre de la remise en état du toit du garage ;

– 918,87 euros au titre des pertes financières annuelles estimées du productible de l’installation par rapport à une production normale ;

– 708 euros correspondant aux frais qu’ils ont dû engager pour constituer une société leur permettant d’encaisser les factures de EDF OA en respect de la réglementation fiscale.

Cependant, comme l’a relevé le premier juge, le contrat souscrit par Monsieur [C] avec la société Futura Internationale prévoyait en son article 7. Rendement – Aides – Crédits d’impôts – Tarif de rachat que : ” Le client reconnaît être informé que la production d’énergie dépend de nombreux paramètres et en conséquence que le vendeur ne saurait garantir un quelconque volume. Toutefois, la production d’énergie est garantie pour la première année suivant la mise en service (hors retard d’installation imputable au client ou à ERDF). Dans l’hypothèse où le client estimerait ne pas avoir atteint le niveau de production de garantie, il devra en avertir Futura Internationale dans les six mois suivants la fin de la 1ère année de production par lettre recommandée avec accusé de réception. Futura Internationale s’engage à lui verser une somme correspondant à la différence entre la production estimée et la production effectivement vendue à EDF, diminuée d’un abattement de 25 % pour prendre compte des éventuelles pertes liées aux températures, aux effets de réflectance angulaire, ou à d’éventuelles défaillances de câbles ou d’ondulateur (source PVGIS) et ce dans la limite de 1.500 heures d’ensoleillement. […].

Et Monsieur et Madame [C], qui ne fondent pas leur action sur un manquement de la société à son devoir de conseil, ne rapportent pas la preuve d’un engagement de la société Futura Internationale quant à un rendement énergétique de l’installation et/ou à sa rentabilité en lien avec un autofinancement de l’opération de nature à justifier une inexécution contractuelle de sa part.

De même, ils ne produisent aucun échange avec elle en lien avec la procédure contractuellement prévue dans le cas où le client estimerait ne pas avoir atteint le niveau de production de garantie alors même qu’il n’est pas contesté que la société venderesse a procédé à l’installation des panneaux photovoltaïques et a rempli les obligations de raccordement et administratives lui incombant.

En revanche, les désordres dont ils se plaignent comme affectant la toiture du garage sur laquelle les panneaux photovoltaïques ont été installés sont établis par les constatations de l’huissier que les époux [C] ont mandaté le 25 juillet 2017 et surtout par l’expertise de Monsieur [B] dont les conclusions ont été rappelées.

Cependant, ce dernier ayant chiffré les travaux de réfection à la somme de 3.712, 50 euros, c’est à bon droit que le premier juge a dit qu’ils ne constituent pas une défaillance de la société Futura Internationale justifiant la résolution du contrat.

Le jugement de première instance sera dès lors confirmé en ce qu’il n’a pas fait droit à la demande de résolution du contrat liant les appelants à la SASU Futura Internationale.

– Sur la demande des époux [C] à l’endroit de la SA Domofinance :

Les époux [C] demandent l’anéantissement du contrat de prêt du fait de l’anéantissement du contrat principal et reprochent à la société de crédit d’avoir débloqué les fonds destinés au financement de l’opération sans s’assurer et vérifier que l’installation était conforme précisant que “on sait pourtant, depuis le rapport d’expertise que cette installation ne pouvait être conforme “.

Ils soutiennent en outre qu’elle a libéré les fonds sur la base d’un procès-verbal de réception dont Monsieur [C] conteste être le signataire et qui constitue donc un faux.

Ils affirment dès lors que la SA Domofinance a commis une faute qui doit la priver de son droit à restitution du capital en cas de résolution du contrat et qu’il existe un lien de causalité certain avec leur préjudice en ce qu’elle a fait cause commune avec la venderesse en étant représentée par un de ses salariés au moment de la souscription des contrats. Ils ajoutent qu’ils n’auraient pas contracté s’ils avaient été loyalement et correctement informés des problèmes que l’installation présentait du fait de son emplacement, des désordres qu’elle a causés à la toiture du garage et de la surévaluation de son coût et de sa production.

La SA Domofinance réfute ces griefs et affirme que l’installation était conforme aux stipulations contractuelles et qu’elle a débloqué les fonds à réception de l’attestation de fin de travaux prévue à cet effet. Elle relève que Monsieur [C] conteste en avoir été le signataire mais n’a pas déposé de plainte du chef de faux, et qu’il semble que ce soit son épouse qui en ait été la signataire, ce qui lui permettait de valablement débloquer les fonds car elle était co-empruntrice au crédit.

En tout état de cause, elle argue que l’installation a été livrée, installée, raccordée au réseau et qu’elle a produit de l’électricité de telle sorte que la prestation financée a été exécutée et qu’il n’existe aucun préjudice pour les consorts [C] en lien avec la libération des fonds intervenue en février 2016.

En droit, faute de résolution du contrat principal, la résolution automatique du contrat de crédit affecté n’est pas encourue de telle sorte que la demande des époux [C] de ce chef sera écartée.

Par ailleurs, le préjudice invoqué par les demandeurs est sans lien de causalité avec le déblocage prématuré des fonds par le prêteur.

Et, au dispositif de leurs dernières conclusions, les époux [C] demandent qu’il soit jugé qu’ils désavouent formellement la prétendue signature apposée sur le procès-verbal de réception dont se prévaut la SA Domofinance mais n’en tirent aucune conséquence juridique ni même indemnitaire.

Il n’y a dès lors pas lieu de statuer sur cette demande.

– Sur les autres demandes des époux [C] :

Les époux [C] demandent l’indemnisation de leur préjudice à raison des désordres subis dans les suites de l’installation des panneaux photovoltaïques sur la toiture de leur garage.

En l’espèce, il n’est pas contesté que les travaux ont été effectués par la SASU Futura Internationale.

Or, il résulte tant du constat d’huissier réalisé le 25 juillet 2017 que du rapport d’expertise judiciaire déposé le 26 mars 2018 que la pose des panneaux est intervenue sur une ossature de charpente primaire incomplète (pannes sans chevrons) et en omettant de mettre en place une structure secondaire ce qui mettait clairement en cause la solidité de l’ouvrage et sa viabilité.

L’expert, sur la base d’un devis de Monsieur [H] produit par les demandeurs et annexé à son rapport, a chiffré les travaux de remise en état de la toiture à la somme de 3.712, 50 euros TTC.

Ainsi, c’est à bon droit que le premier juge a fait droit à la demande des époux [C] portant sur cette somme, étant cependant précisé que par suite de l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la société Futura Internationale, il n’y a désormais pas lieu de la condamner au paiement de cette somme qui doit être fixée au passif de la société.

Les époux [C] demandent également que la SASU Futura Internationale soit condamnée à prendre en charge la somme supplémentaire de 708 euros dont il ressort du rapport d’expertise qu’elle correspond au montant des frais qu’ils ont dû engager pour constituer une société leur permettant d’encaisser les factures de EDF OA en respect de la réglementation fiscale.

Cependant, s’ils produisent la facture d’honoraires d’une société d’expertise comptable en date du 26 septembre 2017 d’un montant de 480 euros TTC et celle de l’adhésion de Monsieur [C] au Centre de Gestion Agréée de Haute-Savoie en date du 9 février 2017 pour un montant de 228 euros, ils n’établissent pas que ces frais étaient contractuellement à la charge de la société Futura Internationale ou qu’ils ont dû les engager en raison de manquements de celle-ci.

Monsieur et Madame [C] seront dès lors déboutés de leur demande en remboursement de cette somme de 708 euros.

– Sur les autres demandes :

La société Domofinance a sollicité, à titre principal, la confirmation de la décision entreprise.

Et ce n’est qu’à titre subsidiaire et très subsidiaire qu’elle a formulé d’autres demandes lesquelles ne seront pas examinées, la prétention principale étant satisfaite.

Les époux [C] sollicitent la condamnation de la S.A.S. [W] ès qualités et de la SA Domofinance à leur payer 5.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens en ce compris le coût de l’expertise judiciaire et celui du procès-verbal de constat d’huissier du 25 juillet 2017.

La SA Domofinance demande la condamnation de tout succombant à lui payer la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Compte tenu de l’issue du litige, les époux [C] seront condamnés aux dépens d’appel, la décision entreprise étant confirmée sur les dépens de première instance sauf à les fixer au passif de la procédure collective de la société Futura Internationale.

Eu égard à la nature du litige et à la position des parties, l’équité justifie de fixer à la somme de 1.500 euros la créance des époux [C] au passif de la liquidation judiciaire de la société Futura Internationale au titre des frais non compris dans les dépens de première instance.

En revanche, l’équité ne justifie pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort;

Déclare recevable l’assignation en intervention forcée de Maître [W] en qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de la S.A.S.U Futura Internationale ;

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Pau rendu le 16 février 2021 en ce qu’il a :

– débouté Monsieur [E] [C] et Madame [F] [P] épouse [C] de leurs demandes de résolution du contrat de vente souscrit avec la S.A.S.U Futura Internationale et du contrat de crédit souscrit avec la S.A. Domofinance ;

– rejeté leurs autres demandes ;

– débouté la S.A. Domofinance de ses demandes

Infirme le jugement en ce qu’il a :

– condamné la SASU Futura Internationale à payer à Monsieur et Madame [C] la somme de 3.712,50 € en réparation des désordres ;

– condamné la SASU Futura Internationale à payer à Monsieur et Madame [C] la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la SASU Futura Internationale aux entiers dépens comprenant les frais d’expertise.

Statuant à nouveau sur ces chefs de décision infirmés et y ajoutant,

Fixe la créance de Monsieur [E] [C] et Madame [F] [P] épouse [C] au passif de la S.A.S.U Futura Internationale, représentée par son liquidateur, la société [W], à la somme de 3.712,50 € au titre de la réparation des désordres,

Fixe la créance de Monsieur [E] [C] et Madame [F] [P] épouse [C] au passif de la S.A.S.U Futura Internationale, représentée par son liquidateur la société [W], à la somme de 1.500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile appliquée en première instance,

Fixe au passif de la procédure collective de la S.A.S.U Futura Internationale les dépens de première instance,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne Monsieur et Madame [C] aux dépens d’appel,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’une ou l’autre des parties s’agissant des frais non compris dans les dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Marc MAGNON, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.

La Greffière, Le Président,

 


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