Délégation de paiement : 19 juillet 2022 Cour d’appel de Grenoble RG n° 19/01250

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Délégation de paiement : 19 juillet 2022 Cour d’appel de Grenoble RG n° 19/01250

N° RG 19/01250 – N° Portalis DBVM-V-B7D-J5ZZ

N° Minute :

C4

Copie exécutoire délivrée

le :

à

la S.E.L.A.R.L. LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY

Me Margot BLANCHARD

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 19 JUILLET 2022

Appel d’un Jugement (N° R.G. 17/01586) rendu par le Tribunal de Grande Instance de VALENCE en date du 28 février 2019, suivant déclaration d’appel du 18 Mars 2019

APPELANTE :

Société d’assurances AVIVA ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Alexis GRIMAUD de la S.E.L.A.R.L. LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, plaidant par Me Catherine GIRARD-REYDET , Avocat au Barreau de PARIS

INTIMÉS :

M. [W] [O]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 6]

Mme [K] [F]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 6]

S.C.I. TATBOY prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentés et plaidant par Me Margot BLANCHARD, avocat au barreau de GRENOBLE et Me Christian GABRIELE, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Emmanuèle Cardona, présidente

Anne-Laure Pliskine, conseillère,

Frédéric Dumas, vice-président placé, en vertu d’une ordonnance en date du 18 novembre 2021 rendue par la première présidente de la cour d’appel de Grenoble

DÉBATS :

A l’audience publique du 15 février 2022, Frédéric Dumas, vice-président placé qui a fait son rapport, assisté de Caroline Bertolo, greffière, a entendu seul les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.

Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu à l’audience de ce jour.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Suivant acte sous seing privé du 12 mai 2009 M. [W] [O] et Mme [K] [F] épouse [O] ont souscrit auprès de la société anonyme Aviva Assurances un contrat d’assurance ‘Multirisque Habitation -formule confort’, pour une maison d’habitation de six pièces principales sise [Adresse 5] à [Localité 6] (26), comportant notamment une garantie ‘catastrophes naturelles’ avec une franchise de 380 euros, doublée, triplée ou quadruplée en cas de survenance répétitive de sinistres dans une commune non dotée d’un plan de prévention des risques.

La maison est la propriété de la société civile immobilière Tatboy, dont ils sont les associés à concurrence chacun de 50 % du capital social.

Le 23 octobre 2013 à la suite de très fortes pluies sur le territoire de la commune de [Localité 6] et du débordement de la rivière qui la traverse, le terrain, la piscine et le rez-de-chaussée de la maison de la société Tatboy ont été inondés par de l’eau boueuse (sur une hauteur d’environ 50 centimètres à l’intérieur de l’habitation).

M. et Mme [O] ont adressé une déclaration de sinistre à la société Aviva Assurances, qui a désigné la société Eurexo dès le 24 octobre 2013 pour réaliser une expertise ‘catastrophes naturelles’.

Un arrêté de catastrophe naturelle, concernant notamment la commune de [Localité 6], est paru au Journal Officiel le 27 novembre 2013.

La société Eurexo a procédé à quatre réunions sur les lieux, en présence de M. [O], les 29 octobre 2013, 4 décembre 2013, 17 décembre 2013 et 31 janvier 2014.

Pendant les opérations d’expertise :

– les assurés ont remis à la société Eurexo un état des pertes daté du 8 novembre 2013, un ‘devis-proposition’ de la société Aquilus Piscines pour la remise en état de la piscine, des factures de M. [T] (exploitant une entreprise de ‘dépannage-vente-installation-TV- Vidéo-Camera-Electroménager’) datées du 12 novembre 2013, puis d’autres factures de ce même entrepreneur datées du 28 décembre 2013, relatives au remplacement ou à la réparation d’appareils électroménagers et électriques,

– la société Aviva Assurances a versé un acompte de 5 000 euros le 21 novembre 2013 et un acompte de 6 000 euros le 6 janvier 2014, à valoir sur l’indemnisation du sinistre.

La société Eurexo évoquant une suspicion de fraude des assurés, la société Aviva Assurances a mandaté M. [X], gérant de l’agence recherches privées ‘S.A.R.L. CPRI’, pour procéder à une enquête.

M. [X] a déposé un rapport d’enquête daté du 23 avril 2014, aux termes duquel les factures émises le 12 novembre 2013 par l’entreprise [T] et présentées par M. [O] à l’appui de sa réclamation, ne correspondraient pas à la réalité des travaux et achats effectués et n’apparaissaient pas dans la comptabilité de l’entreprise.

La société Eurexo a déposé un rapport d’expertise ‘catastrophes naturelles’ daté du 26 mai 2014, mentionnant les réclamations suivantes des assurés :

– dommages immobiliers (y compris radiateurs et chauffe-eau) : 32 308,30 euros,

– embellissements : (murs des différentes pièces) : 13 084,60 euros,

– dommages mobiliers (vétusté déduite) : 18 4870,80 euros,

– frais annexes : (piscine) : 9 470,00 euros,

– total général : 72 373,70 euros (dont, selon l’avis de l’expert : réclamation justifiée pour 28 239,34 euros, plausible pour 1 700,00 euros, exagérée pour 28 385,46 euros et frauduleuse pour 15 752,30 euros).

Par lettre du 10 juin 2014 la société Aviva Assurances a informé M. et Mme [O] de ses décisions de refus de prise en charge du sinistre et de déchéance de la garantie prévue par les dispositions contractuelles et l’article L113-2 du code des assurances.

M. et Mme [O] ont saisi le médiateur de l’Assurance qui a proposé aux parties, suivant avis écrit en date du 7 octobre 2016, de considérer que les fausses déclarations des assurés étaient avérées, sans que leur caractère intentionnel soit établi, et a invité en conséquence la société Aviva Assurances à mettre en oeuvre la garantie ‘catastrophes naturelles’.

La société d’assurances ayant maintenu son refus de garantie et aucun accord amiable n’étant intervenu entre les parties M. et Mme [O] ainsi que la société Tatboy ont, par exploit du 10 avril 2017, fait assigner la société Aviva Assurances devant le tribunal de grande instance de Valence aux fins notamment de l’entendre condamner à les indemniser.

Suivant jugement du 28 février 2019 assorti de l’exécution provisoire le tribunal de grande instance de Valence a :

– condamné la société Aviva Assurances à payer à M. et Mme [O] la somme de 61 583,70 euros outre intérêts au taux légal à compter du jugement,

– débouté M. et Mme [O] et la société Tatboy du surplus de leurs prétentions,

– condamné la société Aviva Assurances à payer à M. et Mme [O] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Les 18 et 22 mars 2019 la société Aviva Assurances a interjeté appel du jugement à l’encontre de M. et Mme [O] puis de la société Tatboy.

Par ordonnance du 21 mai 2019 le conseiller de la mise en état a prononcé la jonction des deux procédures.

Aux termes de ses dernières conclusions la société Aviva Assurances demande à la cour de :

– débouter M. et Mme [O] et la société Tatboy de l’ensemble de leurs demandes et de leur appel incident,

– subsidiairement fixer le montant de la garantie à la somme de 50 583,90 euros,

– déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [O] et la S.C.I. Tatboy au paiement de la somme de 5 212,90 euros déjà intégrée dans l’évaluation des dommages fixée par l’expert,

– subsidiairement, les en débouter,

– reconventionnellement les condamner à lui payer la somme de 11.000 euros avec intérêts de droit à compter du 7 avril 2016 ainsi que celle de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions l’appelante fait valoir que :

– elle a opposé la déchéance de garantie à M. et Mme [O] qui avaient surévalué leur préjudice en produisant intentionnellement de fausses factures,

– dès qu’un assuré transmet des factures à son assureur, l’entreprise qui les a établies est censée avoir accompli sa prestation et l’assuré avoir réparé les dommages dont il demande le remboursement alors que l’enquête diligentée par M. [X] a établi le contraire,

– n’ayant pas été complètement indemnisés d’un précédent sinistre survenu en 2008 les assurés ont tenté de se faire indemniser des désordres consécutifs à celui-ci au motif que certains éléments auraient été changés avant d’être de nouveau sinistrés en 2013,

– la société Eurexo n’a pas constaté que les éléments d’équipement déclarés par les assurés auraient été détruits (radiateurs, réfrigérateur, ballon d’eau chaude, portes fenêtres de la salle à manger et de la cuisine),

– le cabinet d’expertise n’a fait que transmettre à la société Aviva Assurances les réclamations des époux [O] alors que ni l’expert, ni l’enquêteur n’ont constaté la mise hors d’usage de ces éléments,

– les factures présentées pour la remise en état ou le remplacement de la piscine, des radiateurs, réfrigérateurs et chauffe-eau, portes fenêtres, tondeuse et home cinéma ne correspondent pas à la réalité ou apparaissent particulièrement contestables,

– l’assuré est tenu de déclarer, de bonne foi, à l’assureur l’étendue du sinistre dans les vingt jours de celui-ci,

– les conditions particulières du contrat d’assurance stipule une clause de déchéance de garantie en cas de fourniture d’un devis estimatif des biens endommagés inexact, ce qui est le cas du devis de remise en état de la piscine, de la facture des radiateurs, du réfrigérateur, du chauffe-eau, de deux lave-vaisselle et deux lave-linge,

– le caractère intentionnel de la fausse déclaration des époux [O] est établi au regard du rapport de M. [X], des attestations produites et des constats de l’enquêteur,

– ils ont par ailleurs tenté de se faire indemniser deux fois les mêmes désordres lors de deux sinistres différents survenus le 6 septembre 2008 et en 2013 (portes fenêtres, radiateurs, tondeuse électrique et home cinéma).

En réplique, selon leurs dernières écritures dont le dispositif doit être expurgé de toutes mentions qui ne constituent pas des demandes mais reprennent les moyens soutenus dans les motifs, M. et Mme [O] concluent à ce que la cour confirme le jugement déféré et :

– réforme le jugement entrepris en ce qu’il a :

– appliqué une franchise à déduire de 760 euros,

– considéré que la somme de 5 212,90 euros au titre de la prestation de l’entreprise 3ID mandatée par Aviva Assurances a été intégré au chiffrage de la société Eurexo.,

– déduire des sommes dues par la société Aviva Assurances aux époux [O] une franchise contractuelle de 360 euros,

– condamne la société Aviva Assurances à leur payer la somme de 5 212,90 euros au titre de la prestation de l’entreprise 3ID,

– condamne la société Aviva Assurances à payer aux époux [O] :

– la somme de 61 983, 90 euros (évaluation de l’expert sous déduction de la somme de 11 000 euros perçue) outre intérêts au taux légal à compter du jugement de première instance,

– la somme de 5.212,90 euros au titre de la prestation de l’entreprise 3ID (mandatée par Aviva Assurances ensuite de son refus de délégation de paiement), outre intérêts au taux légal à compter du jugement de première instance,

– une somme de 3 000 euros pour procédure abusive,

– une somme de 2 500 euros d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamne la société Aviva Assurances aux entiers dépens de l’instance distraits au profit de maître Blanchard, sur son affirmation de droit.

Les intimés exposent que :

– les conditions générales de la police d’assurance ne contiennent aucune clause de déchéance de garantie relative à une surévaluation des préjudices,

– la société Aviva Assurances visait initialement dans son refus de prendre en charge l’indemnisation des époux [O] l’article L113-2 du code des assurances (courrier du 10 juin 2014) et ne peut donc se prévaloir désormais d’une clause de déchéance de garantie stipulée dans les conditions générales de la police sans contrevenir au principe de l’estoppel,

– l’estimation que M. [T] a maladroitement faite à partir de documents intitulés factures aux lieu et place de devis ne suffit pas à établir la mauvaise foi des assurés s’agissant des matériels électroménagers endommagés,

– les devis et factures transmis dans un premier temps avant d’être réévalués, alors qu’il appartient à l’expert mandaté par l’assureur d’estimer les dommages à leur juste mesure, ne sauraient démontrer l’intention frauduleuse des assurés,

– seule une franchise de 380 euros peut être retenue au regard de du plan de prévention des risques approuvé le 25 juillet 2013, soit avant le sinistre du 23 octobre 2013.

L’instruction a été clôturée suivant ordonnance du 5 janvier 2022.

MOTIFS

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées.

Sur les demandes principales

Aux termes de l’article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au présent litige les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

L’article 1353 du code civil prévoit enfin que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et, réciproquement, que celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

En l’espèce les conditions générales de la police d’assurance stipulent en page 22 à l’attention de l’assuré que ‘aussitôt qu’un sinistre survient, vous devez : nous le déclarer… nous fournir dans le délai de 20 jours, un état estimatif, certifié exact et signé, des biens détruits ou endommagés et des biens sauvés ;…

Tout manquement à ces obligations vous expose à une réduction de votre indemnité proportionnellement au préjudice que ce manquement nous fait subir. Toute fausse déclaration intentionnelle de votre part entraîne la perte de tout droit à indemnité.’

En application de l’article 9 du code de procédure civile, selon lequel il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention, il appartient à l’assureur de démontrer que les conditions de la déchéance de garantie des assurés sont réunies.

Nulle violation du principe de l’estoppel ne peut être reprochée à la société Aviva Assurances au motif qu’elle avait refusé initialement l’indemnisation de ses assurés sur le fondement de l’article L113-2 du code des assurances, la mise en oeuvre de la clause de déchéance de garantie incluse dans les conditions générales n’étant aucunement incompatible avec les dispositions légales et renvoie au surplus à l’obligation générale d’exécuter les conventions de bonne foi.

La société Aviva Assurances détaille ses griefs à l’encontre de M. et Mme [O] comme suit :

– un devis-proposition pour la remise en état de la piscine établi le 7 novembre 2013 par la société Aquilus Piscines, d’un montant de 9 470 euros, alors que la remise en route de la piscine a pu s’effectuer le 11 février 2014 moyennant le paiement d’une facture de la société Aquilus Piscines d’un montant limité à 733,40 euros,

– en ce qui concerne les radiateurs électriques, facture de M. [T] datée du 12 novembre 2013, d’un montant de 4 270 euros, pour l’achat et la pose de quatre radiateurs de type ‘Galapagos digital’, alors que les investigations menées par M. [X] ont permis de démontrer que les anciens radiateurs n’avaient été enlevés que le 28 mars 2014 et que leur détérioration, consécutive au sinistre, n’était pas établie,

– en ce qui concerne le réfrigérateur, facture de M. [T] datée du 12 novembre 2013, d’un montant de 660 euros, pour l’achat d’un réfrigérateur de marque Bosch modèle KIR 24V2117, alors que l’ancien réfrigérateur était encore présent dans la maison et fonctionnait lors du dernier passage de l’expert de la société Eurexo le 31 janvier 2014 et que sa détérioration, consécutive au sinistre, n’était pas démontrée,

– en ce qui concerne le chauffe-eau, facture datée du 12 novembre 2013, d’un montant de 1 260 euros pour son remplacement par un nouveau chauffe-eau de même marque, alors même que l’ancien chauffe-eau a pu être réparé et remis en état le 28 décembre 2013, moyennant le paiement d’une facture de M. [T] d’un montant limité à 370 euros,

– en ce qui concerne les deux lave-vaisselle et deux lave-linge, facture datée du 12 novembre 2013, d’un montant global de 2 660 euros (pour ces seuls éléments), alors que le coût réel de remplacement de ces machines s’est révélé inférieur (1 750 euros pour trois des machines, suivant factures datées du 28 décembre 2013, au lieu de 2 110 euros pour ces mêmes machines),

– ils ont tenté de se faire indemniser deux fois pour le même préjudice matériel, portant sur les mêmes éléments d’équipement, déjà détériorés lors d’un précédent sinistre survenu en 2008 et non remplacés en 2013 (portes-fenêtres de la cuisine et de la salle à manger, radiateurs, tondeuse électrique, home-cinéma).

Les principaux éléments pris en compte par le premier juge pour écarter toute intention frauduleuse des assurés sont les suivants :

– selon le rapport d’enquête de M. [X], mandaté par la société Aviva Assurances, et l’attestation établie par M. [S] (responsable technique de la société Aquilus Piscines) à la demande de l’enquêteur d’assurances le devis-proposition d’un montant de 9 470 euros correspond au montant de la totalité des travaux estimés nécessaires par l’entreprise spécialisée pour la remise en état complète de la piscine,

– la sincérité de cette estimation n’a pas été remise en cause par l’enquêteur, étant rappelé qu’il appartenait à la société Eurexo, en sa qualité d’expert amiable, de se faire communiquer ou de faire établir elle-même d’autres devis si elle estimait le ‘devis-proposition’ de la société Aquilus Piscines injustifié ou excessif, aucune fausse déclaration des assurés ne pouvant être retenue sur ce poste de préjudice (intitulé ‘frais annexes’ sur l’évaluation des dommages effectuée par la société Eurexo),

– la réalité des détériorations affectant les portes-fenêtres de la cuisine et de la salle à manger, les radiateurs, la tondeuse électrique et le home cinéma a été constatée par ‘l ‘inspecteur sinistre’ de la société Aviva Assurances qui a déposé un ‘rapport de reconnaissance’ daté du 26 novembre 2013 (‘au rez-de-chaussée, les revêtements de mur, les radiateurs électriques, les meubles et leur contenu ont subi d ‘importants dommages. La véranda a été tordue par la poussées des eaux (..) Nature des objets mobiliers ou détruits : vêtements de prix, appareils hi-fi, livres, disques, montres ‘) et par l’expert du cabinet Eurexo, qui s’est rendu sur les lieux à quatre reprises (‘l’électroménager et de nombreux appareils HIFI ont été endommagés ou détruits. (..) Radiateurs et chauffe-eau électriques, prises et installations endommagés’),

– la réalité des détériorations subies par les radiateurs électriques, le chauffe-eau, le réfrigérateur, les deux lave-vaisselle et les deux lave-linge installés au rez-de-chaussée de la maison ne peut être sérieusement contestée au regard des constats précités (aucune réserve n’étant, à aucun moment, émise par ces professionnels sur l’éventuelle conservation de certains éléments d’électroménager ou d’équipement),

– il ressort de l’attestation de M. [T], établie à la demande de l’enquêteur mandaté par la société Aviva Assurances, que le réfrigérateur a ‘lâché’en janvier 2014, que le chauffe-eau (malgré sa remise en marche provisoire) et que les radiateurs, qui présentaient des fuites d’huile et/ou des problèmes électroniques, devaient être remplacés,

– la production par M. et Mme [O], à l’appui de leur état de pertes et de leur demande d’indemnisation relative aux dommages mobiliers, de documents datés du 12 novembre 2013, établis par M. [T] et improprement intitulés ‘factures’, ne peut en aucun cas suffire à établir l’existence d’une fausse déclaration intentionnelle des assurés, destinée à tromper la vigilance de l’assureur et à obtenir une indemnisation indue ou exagérée, dans la mesure notamment où ces documents ne mentionnent aucun règlement (contrairement à ceux établis en décembre), où l’expert s’est rendu à trois reprises sur les lieux postérieurement à leur établissement par M. [T] (de sorte qu’il ne pouvait ignorer que les éléments d’équipements visés n’avaient pas encore été acquis et/ou installés dans la maison) et où les factures ‘réelles’ datées du mois de décembre 2013 ont été volontairement présentées et remises à l’enquêteur par M. et Mme [O],

– le médiateur de l’assurance avait lui-même considéré, au vu des explications données par les assurés que ‘la preuve du caractère intentionnel de la fausse déclaration de M. et Mme [O] n ‘est (..) pas rapportée’ (page 3 de l’avis du médiateur).

De surcroît, ainsi que l’a également relevé le premier juge, l’existence d’un précédent sinistre de même nature, survenu le 6 septembre 2008 et ayant fait l’objet d’une indemnisation totale ou partielle, est sans incidence sur l’indemnisation du sinistre faisant l’objet du présent litige, la question du caractère frauduleux de la déclaration des assurés sur les dommages subis et leur évaluation étant totalement étrangère à la question d’un précédent sinistre.

Pour le surplus, en l’absence de nouveaux moyens et de nouvelles preuves présentés par les parties, c’est par des motifs pertinents au vu des justificatifs qui lui étaient soumis, que le tribunal s’est livré à une exacte analyse des faits et à une juste application des articles 1134 et 1153 susvisés en considérant que la société Aviva Assurances ne rapportait pas la preuve qui lui incombait de l’existence de fausses déclarations intentionnelles de M. et Mme [O] portant sur le montant des dommages, qui justifieraient l’application de la clause de déchéance contractuelle et le refus de prise en charge du sinistre.

A bon droit le tribunal, en application des dispositions contractuelles relatives à la garantie ‘catastrophes naturelles’, a condamné la société Aviva Assurances à payer à M. et Mme [O], pris en leur qualité de souscripteurs du contrat, les sommes intégrant les travaux effectués par la société 3ID, pour un montant de 5 212,90 euros correspondant aux postes ‘assèchement bâtiments, dépollution bâtiments, dépollution mobilier et pressing tapis’ dans le chiffrage de la société Eurexo, réparties comme suit :

– dommages immobiliers : 32 308,30 euros,

– embellissements : 13 084,60 euros,

– dommages mobiliers : 18 480,80 euros,

– frais annexes (piscine) : 9 470 euros.

En revanche s’il y a lieu de déduire les acomptes versés à hauteur de 11 000 euros la franchise à déduire doit être fixée, en application des conditions particulières de la police d’assurance, au montant de 380 euros eu égard à l’existence d’un plan de prévention des risques naturels concernant la commune de [Localité 6] approuvé le 25 juillet 2013.

Il conviendra donc d’infirmer le jugement déféré sur le quantum de la condamnation de la société Aviva Assurances, laquelle sera tenue d’indemniser les époux [O] à hauteur de :

73 343,70 – 11 000 – 380, soit 61 963,70 euros outre intérêts au taux légal à compter du jugement du 28 février 2019.

M. et Mme [O] et la société Tatboy seront enfin déboutés du surplus de leurs prétentions s’agissant de leur demande d’indemnisation relative à la procédure prétendument abusive de la société Aviva Assurances, dont les intimés n’expliquent ni en quoi consiste cette procédure ni la teneur de leur préjudice.

Sur les demandes annexes

Il serait inéquitable de laisser à la charge des intimés les frais exposés pour faire valoir leurs droits devant la cour. La société Aviva Assurances sera donc condamnée à leur verser une indemnité de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’appelante qui succombe sera en outre condamnée aux entiers dépens de la procédure d’appel distraits au profit de maître Blanchard.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement du 28 février 2019 du tribunal de grande instance de Valence sauf en ce qui concerne la condamnation de la société Aviva Assurances à payer a M. et Mme [O] la somme de 61 583,70 euros outre intérêts au taux légal à compter du jugement,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la S.A. Aviva Assurances à payer à M. [W] [O] et Mme [K] [F] épouse [O] la somme de 61 963,70 euros (soixante et un mille neuf cent soixante trois euros soixante dix cents) outre intérêts au taux légal à compter du 28 février 2019,

Déboute M. et Mme [O] du surplus de leurs demandes,

Condamne la S.A. Aviva Assurances à verser à M. [W] [O] et Mme [K] [F] épouse [O] ainsi qu’à la S.C.I. Tatboy une indemnité de 2 500 euros (deux mille cinq cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la S.A. Aviva Assurances aux entiers dépens de la procédure d’appel en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère substituant la Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière, Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERELA PRESIDENTE

 


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