AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Philippe d’Estienne du Bourguet, président de société, demeurant à Paris (16e), …, en cassation d’un arrêt rendu le 8 juillet 1991 par la cour d’appel de Paris (19e chambre, section A), au profit de Mme Simone Z…, demeurant Le Pecq (Yvelines), …, défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 24 novembre 1993, où étaient présents : M. Grégoire, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Thierry, conseiller rapporteur, M. Renard-Payen, conseiller, M. Lupi, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Thierry, les observations de Me Choucroy, avocat de M. Y…, de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de Mme Z…, les conclusions de M. Lupi, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, qu’en 1987 Mme Z… a été chargée de la rénovation et de la décoration de l’appartement de M. d’Estienne du Bourguet, sis à Paris 16e ; que, le 29 novembre 1987, elle a envoyé à ce dernier un décompte définitif des travaux et fournitures, s’élevant à la somme globale de 950 680 francs ; que, soutenant que ses honoraires se montaient à 10 % de ce chiffre, soit 95 068 francs, et n’ayant reçu qu’une partie de cette somme, elle a assigné le 17 mai 1988 son client en paiement du solde ; que l’arrêt attaqué (Paris, 8 juillet 1991) a condamné M. d’Estienne du Bourguet à payer à Mme Z… la somme de 40 068 francs ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que M. d’Estienne du Bourguet fait grief à l’arrêt de l’avoir condamné au paiement de cette somme, alors, selon le moyen, d’une part, que c’est subsidiairement et après avoir soutenu que le pourcentage avancé de 10 % était un pourcentage exorbitant par rapport à l’usage constant des décorateurs parisiens en ce qui concerne leurs rémunérations, que M. d’Estienne du Bourguet avait mentionné que « les sommes réclamées par Mme Z…, correspondant à 10 % du montant des travaux et fournitures, ne pourraient être réglées que si cette dernière apportait la preuve de son activité de décoratrice » ; que, devant la cour d’appel, il avait fait valoir de nouveau que la rémunération des décorateurs ne dépassait pas 5 à 7 % ; que, dès lors, en fondant sa décision sur cette prétendue déclaration non démentie, l’arrêt attaqué a dénaturé le sens clair et précis des écritures de première instance, violant ainsi l’article 1134 du Code civil ; et alors, d’autre part, qu’en énonçant que M. d’Estienne du Bourguet ne rapportait pas la preuve de l’usage d’un autre taux de rémunération chez les décorateurs parisiens, sans constater que Mme Z… ait fait la démonstration, dont la charge lui incombait, que le taux de 10 % correspondait bien à celui habituellement pratiqué, la cour d’appel
a inversé la charge de cette preuve en violation de l’article 1315 du Code civil, et privé sa décision de base légale au regard de l’article 1134 du même code ;
Mais attendu, d’abord, qu’ayant constaté que M. X… ne discutait pas l’existence d’un accord verbal sur le taux des honoraires, mais seulement son contenu, qu’ayant ensuite relevé qu’il avait écrit dans ses conclusions de première instance, non démenties en appel, que « subsidiairement, les sommes réclamées par Mme Z…, correspondant à 10 % du montant des travaux, ne pourraient être réglées que si cette dernière apportait la preuve de son activité de décoratrice », et qu’ayant enfin retenu que cette preuve avait été administrée, c’est sans dénaturer ces conclusions qu’elle a souverainement interprétées, que la cour d’appel leur a conféré le caractère d’un aveu judiciaire faisant pleine foi contre son auteur, et qu’elle a estimé que le taux des honoraires avait bien été contractuellement fixé à 10 % du montant global des travaux et fournitures ;
Attendu, ensuite, que dès l’instant où il soutenait que l’usage des décorateurs parisiens était de fixer le taux de leurs honoraires entre 5 et 7 %, M. d’Estienne du Bourguet était demandeur à une exception ; que c’est donc sans inverser la charge de la preuve, que la cour d’appel a constaté qu’il ne démontrait pas l’existence d’un tel usage et qu’elle a estimé qu’un taux de 10 % n’avait rien d’excessif ;
Qu’il s’ensuit que le premier moyen ne peut être accueilli en aucune de ses deux branches ;
Sur le second moyen :