Déclaration des Ressources dans le Cadre des Allocations de Solidarité aux Personnes Âgées

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Déclaration des Ressources dans le Cadre des Allocations de Solidarité aux Personnes Âgées

FAITS

M. [E] [R] a contesté une décision de la commission de recours amiable de la Caisse nationale d’assurance vieillesse, qui avait rejeté sa demande concernant un indu d’allocations de solidarité aux personnes âgées, s’élevant à 32 052,76 euros, pour la période du 1er juin 2007 au 30 septembre 2020.

PROCÉDURE

Le tribunal a rendu un jugement le 20 juin 2023, déclarant que l’action en répétition de la Caisse était soumise au délai de prescription de droit commun, établissant l’existence d’une fausse déclaration. M. [E] [R] a été condamné à rembourser 30 096,86 euros et a vu ses demandes déboutées, avec exécution provisoire de la décision.

PRÉTENTIONS DE M. [E] [R]

M. [E] [R] a interjeté appel, demandant à la cour de le juger recevable et fondé dans ses demandes, d’infirmer le jugement en question, et de reconnaître que la Caisse n’apportait pas la preuve d’une intention frauduleuse. Il a également soutenu que la prescription de deux ans s’appliquait à sa situation.

PRÉTENTIONS DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE VIEILLESSE

La Caisse a demandé à la cour de confirmer le jugement initial, affirmant qu’elle était fondée à recouvrer l’intégralité des sommes versées indûment à M. [E] [R] et a contesté les demandes de délais de paiement formulées par ce dernier.

ARGUMENTS DE M. [E] [R]

M. [E] [R] a fait valoir qu’il n’avait pas été correctement informé de ses obligations déclaratives, que les formulaires n’étaient pas clairs et qu’il avait été aidé par un tiers pour remplir les documents. Il a également souligné sa situation financière difficile et a demandé un échelonnement de la dette.

ARGUMENTS DE LA CAISSE

La Caisse a soutenu que M. [E] [R] avait omis intentionnellement de déclarer ses rentes d’accident du travail, malgré des instructions claires. Elle a affirmé que la fraude justifiait le recouvrement des sommes sur une période de vingt ans et que la prescription biennale ne s’appliquait pas.

DÉCISION DE LA COUR

La cour a déclaré recevable l’appel de M. [E] [R], mais a confirmé le jugement du tribunal, rejetant toutes ses demandes et condamnant M. [E] [R] aux dépens. La demande de la Caisse au titre de l’article 700 du code de procédure civile a été déboutée.

Questions / Réponses juridiques :

 

Quelles sont les implications de la prescription en matière de remboursement d’allocations indûment perçues ?

La prescription en matière de remboursement d’allocations indûment perçues est régie par plusieurs articles du Code de la sécurité sociale et du Code civil.

L’article L. 815-11 du Code de la sécurité sociale stipule que l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) peut être suspendue, révisée ou retirée si les ressources varient. En cas de fraude ou de fausse déclaration, l’article 2224 du Code civil prévoit que le délai de prescription est de cinq ans à compter de la découverte de la fraude.

Ainsi, dans le cas de M. [E] [R], le tribunal a retenu que la prescription de droit commun ne s’appliquait pas, car la Caisse nationale d’assurance vieillesse avait agi dans les cinq ans suivant la découverte du comportement frauduleux de l’allocataire.

Cela signifie que la caisse peut recouvrer l’intégralité des sommes versées indûment sur une période de vingt ans, conformément à l’article L. 355-3 du Code de la sécurité sociale, qui précise que toute action en restitution d’un indu de prestations de vieillesse ou d’invalidité, engagée dans le délai de cinq ans à compter de la découverte de la fraude, permet de recouvrer la totalité de l’indu.

En résumé, la prescription en matière de remboursement d’allocations indûment perçues est un sujet complexe qui dépend de la nature de la fraude et des délais de prescription applicables.

Quelles sont les obligations déclaratives des bénéficiaires d’allocations de solidarité ?

Les obligations déclaratives des bénéficiaires d’allocations de solidarité, telles que l’ASPA, sont clairement définies dans le Code de la sécurité sociale.

L’article R. 815-38 stipule que le bénéficiaire est tenu de déclarer à la caisse tout changement intervenu dans ses ressources, sa situation familiale ou sa résidence. Cela implique que toute ressource, y compris les rentes d’accident du travail, doit être déclarée.

De plus, l’article R. 815-39 permet aux organismes de sécurité sociale de procéder à des vérifications des ressources à tout moment. Cela souligne l’importance pour les bénéficiaires de fournir des informations précises et complètes sur leurs ressources.

Dans le cas de M. [E] [R], le tribunal a constaté qu’il n’avait pas déclaré plusieurs rentes d’accident du travail, malgré les indications claires dans les formulaires et notices fournies par la caisse.

Le tribunal a également noté que, même si M. [E] [R] avait fait appel à un tiers pour remplir les formulaires, il restait responsable des informations fournies, car il avait signé les documents.

Ainsi, les bénéficiaires d’allocations de solidarité ont une obligation légale de transparence et de précision dans leurs déclarations, et le non-respect de cette obligation peut entraîner des conséquences financières significatives.

Comment la bonne foi du débiteur est-elle évaluée dans le cadre d’un recours contre une décision de remboursement ?

La bonne foi du débiteur est un élément crucial dans l’évaluation des recours contre une décision de remboursement d’allocations indûment perçues.

Dans le cadre de l’article L. 815-11 du Code de la sécurité sociale, la bonne foi peut être invoquée pour contester la décision de remboursement, mais elle doit être prouvée par le débiteur.

Dans le cas de M. [E] [R], bien qu’il ait soutenu qu’il n’avait pas compris ses obligations déclaratives en raison de son illettrisme, le tribunal a jugé que son expérience en tant que gérant de restaurant démontrait une certaine maîtrise des démarches administratives.

Le tribunal a également noté que les documents fournis par la caisse étaient suffisamment clairs pour que M. [E] [R] comprenne ses obligations.

Ainsi, la bonne foi est évaluée en tenant compte de la capacité du débiteur à comprendre et à respecter ses obligations déclaratives. Si le tribunal estime que le débiteur a agi de manière intentionnelle ou négligente, la bonne foi peut ne pas être retenue, ce qui peut avoir des conséquences sur la décision de remboursement.

En conclusion, la bonne foi est un facteur déterminant dans l’évaluation des recours, mais elle doit être étayée par des preuves concrètes et des circonstances qui justifient l’absence de déclaration.

Quels sont les recours possibles pour un débiteur en situation de surendettement face à une décision de remboursement ?

Un débiteur en situation de surendettement a plusieurs recours possibles face à une décision de remboursement d’allocations indûment perçues.

Tout d’abord, il peut demander un échelonnement de la dette, comme le prévoit l’article L. 331-1 du Code de la consommation, qui permet aux débiteurs de solliciter un plan de redressement.

Dans le cas de M. [E] [R], il a demandé un échelonnement de sa dette sur une durée de 24 mois, en raison de sa situation financière difficile. Cependant, le tribunal a rejeté cette demande, considérant qu’il n’avait pas démontré d’efforts suffisants pour rembourser sa dette.

De plus, le débiteur peut également faire appel à la commission de surendettement, qui peut proposer des solutions adaptées à sa situation, comme le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, prévu par l’article L. 330-1 du Code de la consommation.

Enfin, le débiteur peut contester la décision de remboursement devant les juridictions compétentes, en invoquant des arguments tels que la bonne foi, l’absence d’intention frauduleuse ou des erreurs dans le calcul des sommes dues.

En résumé, les recours possibles pour un débiteur en situation de surendettement incluent la demande d’échelonnement de la dette, le recours à la commission de surendettement et la contestation de la décision devant les juridictions compétentes. Toutefois, la réussite de ces recours dépendra des circonstances spécifiques de chaque cas et de la capacité du débiteur à prouver sa bonne foi et sa situation financière.

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

15 novembre 2024
Cour d’appel de Paris
RG
23/07403
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 13

ARRÊT DU 15 Novembre 2024

(n° , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 23/07403 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CIQRT

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Juin 2023 par le Pole social du TJ de CRETEIL RG n° 21/01082

APPELANT

Monsieur [E] [R]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Véronique LUCAS-DUVAL, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : 474, (bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro C-75056-2023-501085 du 27 octobre 2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEE

CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE VIEILLESSE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par M. [D] [W] en vertu d’un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Septembre 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. Raoul CARBONARO, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M Raoul CARBONARO, président de chambre

Mme Sohie COUPET, conseillère

M Gilles REVELLES, conseiller

Greffier : Mme Fatma DEVECI, lors des débats

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé

par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par M Raoul CARBONARO, président de chambre et par Mme Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l’appel interjeté par M. [E] [R] (l’assuré) d’un jugement rendu le 20 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Créteil dans un litige l’opposant à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (la caisse).

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de préciser que M. [E] [R] a formé un recours devant une juridiction en charge du contentieux de la sécurité sociale à l’encontre de la décision de la commission de recours amiable de la Caisse nationale d’assurance vieillesse ayant rejeté sa contestation d’un indu d’allocations de solidarité aux personnes âgées d’un montant de 32 052, 76 euros pour la période du 1er juin 2007 au 30 septembre 2020.

Par jugement en date du 20 juin 2023, le tribunal :

dit que l’action en répétition exercée par la Caisse nationale d’assurance vieillesse est soumise au délai de prescription de droit commun, l’existence d’une fausse déclaration étant établie ;

condamne M. [E] [R] à verser à la Caisse nationale d’assurance vieillesse la somme de 30 096, 86 euros au titre du trop-perçu initial de 32 052, 76 euros, au remboursement des sommes indûment perçues au titre de l’allocation de sommes acquittées aux personnes âgées sur la période du 1er juin 2007 au 30 septembre 2020 ;

déboute M. [E] [R] de ses demandes ;

ordonne l’exécution provisoire de la décision.

Le tribunal a retenu que les questionnaires annuels pour le versement de l’allocation se limitaient à mentionner que le requérant percevait une retraite de la caisse de 360, 27 euros, une pension servie par le RSI pour cent 12, 62 euros ainsi qu’une retraite complémentaire pour 314, 16 euros, alors que l’intéressée percevait trois rentes accident du travail pour un montant respectif trimestriel de 418, 68 euros, 116, 10 euros et 92 88 euros. Il a retenu que l’illettrisme ne constituait pas un cas de force majeure permettant de déroger à l’obligation de déclaration des ressources et alors que l’intéressé avait géré un restaurant durant 50 ans sur le territoire national, ce qui démontrait sa maîtrise de la gestion administrative et de la comptabilité. En tout état de cause, le tribunal a retenu que, si la déclaration avait été remplie par un tiers, elle ne pouvait l’être sur les renseignements fournis par l’intéressé. Il a retenu la clarté des formulaires quant aux sommes à déclarer, de telle sorte que le caractère intentionnel des fausses déclarations était démontré. Il a donc retenu la prescription de droit commun qui n’avait pas couru dès lors que la caisse a agi dans les cinq ans suivant le jour où elle a connu le comportement frauduleux de l’allocataire. Le tribunal a jugé que l’indu était justifié au regard des sommes dont la caisse justifiait le paiement.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception remise à une date non déterminée à M. [E] [R] qui en a interjeté appel par déclaration formée par voie électronique le 16 novembre 2023 après dépôt d’une demande d’aide juridictionnelle du 18 juillet 2023 et décision du 27 octobre 2023.

Par conclusions n° 2 écrites visées et développées oralement à l’audience par son avocat, M. [E] [R] demande à la cour de :

juger M. [E] [R] recevable et bien fondé en toutes ses demandes ;

infirmer le jugement attaqué en ce qu’il a :

dit que l’action en répétition exercée par la Caisse nationale d’assurance vieillesse est soumise au délai de prescription de droit commun, l’existence d’une fausse déclaration étant établie ;

condamné M. [E] [R] à verser à la Caisse nationale d’assurance vieillesse la somme de 30 096,86 euros au titre du trop-perçu initial de 32 052,76 euros en remboursement des sommes indûment perçues au titre de l’allocation de solidarité aux personnes âgées versées sur la période du 1er juin 2007 au 30 septembre 2020 ;

débouté M. [E] [R] de ses demandes ;

ordonné l’exécution provisoire de la décision ;

condamné M. [E] [R] aux dépens ;

statuant à nouveau :

à titre principal :

dire que la Caisse nationale d’assurance vieillesse n’apporte pas la preuve d’une intention frauduleuse ;

juger que la prescription de deux ans prévue à l’article L.815-11 4° du code de sécurité sociale s’applique à la présente demande de remboursement du trop-perçu ;

ordonner la déduction de toute somme d’ores et déjà remboursée ;

en conséquence,

juger que M. [E] [R] est redevable de la somme de 3 023,44 euros auprès de la Caisse nationale d’assurance vieillesse au titre du trop-perçu ;

juger que toute somme réclamée au-delà est prescrite ;

à titre subsidiaire :

juger que la prescription quinquennale de droit commun prévue à l’article 2422 du code civil s’applique à la présente demande de remboursement du trop-perçu ;

ordonner la déduction de toute somme d’ores et déjà remboursée ;

en conséquence,

juger que M. [E] [R] est redevable de la somme de 10 406,44 euros auprès de la Caisse nationale d’assurance vieillesse au titre du trop-perçu ;

juger que toute somme réclamée au-delà est prescrite ;

en tout état de cause :

juger que, compte tenu de la situation du débiteur, le remboursement de la dette fera l’objet d’un échelonnement sur une durée totale de 24 mois ;

condamner la Caisse nationale d’assurance vieillesse aux entiers dépens.

M. [E] [R] expose que la caisse prétendait en première instance qu’il a été informé de manière claire et non équivoque, a plusieurs reprises sur les ressources à déclarer et donc sur la nécessité de déclarer la rente AT ; que ce n’est pas le cas ; que s’agissant de la demande réalisée en 2007, la notice communiquée relative au formulaire de demande mentionne expressément la « rente accident du travail » ; que cette notice est annoncée dans le formulaire, datée et sa référence est la même que celle du formulaire de demande ; qu’elle n’est pas contestable ; que toutefois, le formulaire de demande, pour sa part, ne vise pas clairement ni explicitement la rente AT ; que s’agissant des questionnaires réalisés en 2008 et 2010, les questionnaires de ressources, à l’instar du formulaire de demande ASPA, ne visent pas clairement ni précisément la rente AT ; que la notice vise expressément les rentes accidents du travail ; que cependant, l’existence et la validité de ce document sont particulièrement contestables ; qu’aucun des deux questionnaires de ressources transmis ne fait référence à ce document ; qu’en fournissant ce document imprimé sur papier blanc, la caisse ne prouve ni son existence, ni sa validité, ni son opposabilité aux assurés ; qu’il ne maîtrisait pas suffisamment la langue française pour comprendre et compléter la demande puis les formulaires ultérieurs ; qu’il s’en est remis à une personne de son entourage qui l’a rempli pour lui, sans connaître toute sa situation ; que le fait d’avoir exercé plusieurs années en qualité d’auto-entrepreneur pour tenir un commerce ne démontre pas qu’il disposait des compétences linguistiques nécessaires pour traiter ce type de procédures administratives, ni qu’il ait agi volontairement et frauduleusement ; que la contradiction de règles entre différents services de l’Administration (CNAV et Administration fiscale) est indubitablement susceptible d’induire l’administré en erreur ; qu’il est évident qu’alors qu’il était amené, chaque année, à déclarer ses ressources selon la règle fiscale, il a commis une erreur en indiquant les mêmes ressources pour compléter les formulaires destinés à la caisse ; qu’il n’a jamais été amené à déclarer une quelconque modification de sa situation tel qu’il s’y est engagé en signant chaque formulaire ; qu’il a d’ailleurs systématiquement fourni l’ensemble des pièces justificatives demandées à l’appui desdites déclarations, y compris les justificatifs de sa situation fiscale réclamés à chaque fois ; que ses déclarations lors de l’entretien du 10 mars 2020 retranscrites par l’Agent de contrôle dans son rapport correspondent parfaitement aux informations récoltées lors des investigations administratives avant audition ; que la prescription de 2 ans prévue à l’article L. 815-11 4° s’applique dans le cas d’espèce ;

Que si la prescription de droit commun devait être retenue, toute somme réclamée au titre d’une période antérieure au 1er octobre 2015 est prescrite ;

Que, bien que retraité, il est, à ce jour charge de famille ; que son épouse ne travaille pas et ils élèvent deux enfants mineurs ; que par décision en date du 5 décembre 2023, il a fait l’objet d’une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, faisant état de charges bien supérieures aux ressources du foyer ; qu’en effet, la [5] qui a qualifié sa situation d’ « irrémédiablement compromise » compte tenu de ses charges courantes et de ses revenus mensuels, conclut à une capacité de remboursement mensuelle de -699 euros, hors la dette de la caisse ; qu’il lui est donc totalement impossible de payer la somme réclamée en l’état actuel des choses sans bénéficier des mesures d’aménagement les plus souples.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l’audience par son représentant, la Caisse nationale d’assurance vieillesse demande à la cour de :

dire et juger que c’est à juste titre que la Caisse nationale d’assurance vieillesse a révisé le montant de l’ASPA attribuée à M. [E] [R] à compter du 01 juin 2007 en raison de l’absence de déclaration de ses ressources réelles ;

dire et juger que la Caisse est fondée à recouvrer l’intégralité des sommes versées indument au titre de l’ASPA du 01 juin 2007 au 30 septembre 2020 ;

condamner M. [E] [R] à rembourser à la Caisse nationale d’assurance vieillesse la somme de 30 096,86 euros correspondant au solde de l’indu initial d’un montant de 32 052, 76 euros ;

se déclarer incompétente quant aux délais de paiement allongés sollicités par M. [E] [R] ;

en confirmant le jugement entrepris en toutes ses dispositions ,

et en rejetant toutes les autres demandes présentées par M. [E] [R] ;

condamner M. [E] [R] à lui payer 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La Caisse nationale d’assurance vieillesse expose que l’ASPA est une allocation non contributive destinée à assurer un minimum de ressources aux personnes âgées ; que cette allocation est soumise au principe du déclaratif quant au respect de la situation familiale mais également de la condition de ressources ; qu’ainsi, l’article R. 815-38 du Code de la sécurité sociale prévoit expressément qu’en matière d’allocation de solidarité aux personnes âgées, le bénéficiaire dudit avantage est tenu de déclarer à la caisse tout changement intervenu dans ses ressources sa situation familiale ou sa résidence ; que par ailleurs l’article R. 815-39 du code de sécurité sociale dispose que les organismes et services mentionnés à l’article L. 815-7 peuvent procéder, à tout moment, à la vérification des ressources, de la résidence ou de la situation familiale des demandeurs ou au contrôle des ressources, de la résidence ou de la situation familiale des bénéficiaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées ; qu’il en résulte que si les caisses ont un droit de contrôle des situations, il ne s’agit nullement d’une obligation annuelle pour tous les assurés qui se verraient ainsi relevés de leur obligation déclarative ; que conformément à l’article R. 815-22 du code de la sécurité sociale, qu’à l’exception des ressources expressément exclues, toutes les ressources sont retenues ; qu’enfin, les articles L. 815-11 et R. 815-42 du code de la sécurité sociale prévoient que l’allocation de solidarité aux personnes âgées peut être suspendue, révisée ou retirée si les ressources varient ; que l’enquête diligentée par la caisse au cours de l’année 2019 a mis en évidence le fait que l’assuré bénéficiait de 3 rentes accident de travail servies par la CPAM à compter des 11. février 1972, 6 juillet 1976 et 5 septembre 1990 dont le montant cumulé s’élevait à 186,51 euros au 1 er mai 2007 ; que ces ressources n’ayant jamais été déclarées par l’assurée ni sur son formulaire de demande d’ASPA, ni sur les questionnaires postérieurs à contraint la caisse à revoir sa situation ainsi qu’à notifier une révision du montant de son ASPA ; que c’est ainsi que par notification du 9 octobre 2020, la Caisse révisait le droit de l’intéressé afin de tenir compte de ces rentes depuis le 1er juin 2007, ladite révision générant au surplus un indu de 32 052,76 euros pour la période du 1er juin 2007 au 30 septembre 2020 ; que dans le cas où l’assuré se serait fait aider pour compléter les formulaires (la preuve de l’intervention d’un tiers n’est au demeurant même pas rapportée en l’espèce), il lui appartenait toutefois de communiquer aux tiers aidants tous ses revenus et justificatifs pour que les déclarations soient correctement effectuées ; que, de plus, en apposant sa signature sur le questionnaire de ressources joint à la demande d’ASPA ainsi que sur tous les questionnaires ultérieurs (au nombre de 2), il a systématiquement validé le contenu des déclarations et engagé sa responsabilité à ce titre ; que l’assuré a su, outre procéder aux démarches administratives pour son entreprise, se prévaloir d’un nombre important de droits prévus par la législation de la sécurité sociale en procédant à des demandes préalables (rente AT, pension d’invalidité, retraite personnelle au titre de l’inaptitude au travail, retraite complémentaire, ASPA) mais se serait étrangement retrouvé dans l’incapacité, a contrario, de satisfaire aux obligations déclaratives lui incombant ; qu’il ne saurait valablement prétendre qu’il ignorait son obligation de déclarer ses rentes AT eu égard à une prétendue absence d’information claire et équivoque transmise par la caisse en matière de déclaration notamment de la rente d’accident du travail ; qu’en effet, pour s’en convaincre, il suffit de reprendre et de lister les différentes occasions au cours desquelles il a été interrogé sur ses ressources personnelles (et celles de son ménage) en visant, de manière claire et non équivoque, les avantages et biens devant être déclarés ; que sur la notice jointe à la demande d’allocation de solidarité aux personnes âgées, il était fait expressément mention du fait de déclarer la rentre AT ; que sur la demande d’allocation de solidarité aux personnes âgées elle-même, il était bien fait mention, au §5, du fait de déclarer « les pensions, retraites, rentes personnelles et de réversion ; qu’il ne saurait pas plus prétendre à une absence d’information claire et équivoque délivrée par la caisse ; que les formulaires sont clairs ; que le fait que la rente accident de travail ne soit pas imposable est en réalité sans incidence sur l’obligation incombant à l’assuré de déclarer ladite rente à la caisse, cet avantage apparaissant expressément dans les ressources à déclarer par le demandeur, sans qu’il ne soit prévu aucune exception selon son caractère imposable ou non ; que le fait pour l’assuré d’interroger l’administration fiscale (et non la Caisse) le 9 juin 2023. soit 16 ans après la demande d’ASPA formulée en juin 2007, ne serait en aucun cas permettre à ce dernier de se prévaloir de sa bonne foi ; que celle-ci n’a pas été retenue par la commission de surendettement ; qu’une procédure de pénalité financière a été mise en ‘uvre et a donné lieu à un jugement confirmatif de la décision du 23 novembre 2021 qui n’a pas été frappée de recours ; qu’au regard des fausses déclarations, elle est fondée à récupérer sur les 20 années précédant sa décision les arrérages versés dont elle justifie, La prescription biennale ne pouvant être opposée ; que les juridictions du contentieux n’ont pas compétence pour statuer sur les demandes de délais de paiement qui relèvent exclusivement des caisses ; qu’elle n’a pas été saisie d’une telle demande.

SUR CE

– sur la demande en paiement :

Il résulte de la combinaison des articles 2224 et 2232 du code civil et de l’article L. 355- 3 du code de la sécurité sociale , dans sa rédaction issue de la loi n° 2011 1906 du 21 décembre 2011 de financement de la sécurité sociale pour 2012, qu’en cas de fraude ou de fausse déclaration, toute action en restitution d’un indu de prestations de vieillesse ou d’invalidité, engagée dans le délai de cinq ans à compter de la découverte de celle-ci, permet à la caisse de recouvrer la totalité de l’ indu se rapportant à des prestations payées au cours des vingt ans ayant précédé l’action (Ass. plén., 17 mai 2023, pourvoi n° 20 20.559).

La fraude peut résulter de l’omission intentionnelle de déclarer l’ensemble de ses revenus.

L’article L. 815-9 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue de l’ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004, applicable au litige, dispose que :

« L’allocation de solidarité aux personnes âgées n’est due que si le total de cette allocation et des ressources personnelles de l’intéressé et du conjoint, du concubin ou du partenaire lié par un pacte civil de solidarité n’excède pas des plafonds fixés par décret. Lorsque le total de la ou des allocations de solidarité et des ressources personnelles de l’intéressé ou des époux, concubins ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité dépasse ces plafonds, la ou les allocations sont réduites à due concurrence ».

L’article R. 815-38 du Code de la sécurité sociale prévoit expressément qu’en matière d’allocation de solidarité aux personnes âgées, le bénéficiaire dudit avantage est tenu de déclarer à la caisse tout changement intervenu dans ses ressources sa situation familiale ou sa résidence.

En l’espèce, M. [E] [R] a sollicité la liquidation de sa retraite personnelle le 19 février 2007 et a demandé le bénéfice de l’allocation de solidarité aux personnes âgées le 14 juin 2007. Il lui a été demandé de déclarer les indemnités maladie, maternité accident du travail, dont il bénéficiait, ainsi que des pensions, retraite et rentes personnelles et de réversion. Il indique à cet égard avoir formé une demande de retraite à la Caisse nationale d’assurance vieillesse ainsi qu’auprès du RSI. Il ne

déclare aucune rente accident du travail alors que la notice précise qu’elles doivent figurer dans les revenus à déclarer.

Or, l’intéressé est titulaire de trois rentes accident du travail à effet respectivement du 11 février 1972, 6 juillet 1976 du 5 septembre 1990 pour un montant trimestriel total de 559, 94 euros, soit 186, 51 euros par mois.

Interrogé à nouveau par la caisse, l’assuré répond dans un premier questionnaire pour l’année 2008 en ne mentionnant aucune perception de rente accident du travail alors que la notice jointe lui demande de le signaler dans les revenus de toutes sortes. Il en est de même pour l’année 2010 où il déclare le montant de ces retraités des versements de la caisse d’allocations familiales sans pour autant mentionner les rentes accident du travail qu’il perçoit alors même que la notice qui était jointe lui en faisait part.

Il en résulte qu’à trois reprises, alors qu’il était avisé du fait qu’il devait déclarer les rentes accident du travail qu’il percevait, l’assuré n’en a rien fait. Il n’a spontanément pas corrigé les déclarations erronées.

Le fait qu’il ait reçu les documents de la caisse justifiant de l’obligation de déclarer les rente accident de travail exclut toute confusion avec les obligations fiscales, étant précisé que l’absence de déclaration aux impôts, si elle est justifiée par les textes, n’a aucune incidence sur l’obligation envers les caisses et que la réponse apportée par le centre des impôts à son interrogation quant au caractère déclarable des rentes au plan fiscal n’est pas susceptible d’avoir engendré une quelconque confusion dès lors qu’elle n’est intervenue que le 9 juin 2023, soit postérieurement à la notification de l’indu.

S’il a déclaré spontanément l’ensemble des ressources, y compris les rentes accident du travail, lors de l’enquête, l’assuré n’a pas justifié devant l’enquêteur les raisons pour lesquelles il avait omis de le faire dès sa demande initiale et lors des contrôles de ressources.

Les documents, sans la notice explicative, étaient suffisamment clairs pour comprendre qu’il convenait de déclarer l’ensemble des ressources perçues et non celles qui devaient l’être uniquement aux impôts, pas moins de huit items de déclaration figurant dans les formulaires pour balayer l’ensemble des revenus possibles, y compris des revenus de nature indéterminée.

Endossant la responsabilité des déclarations, puisqu’il les a signées, il ne saurait s’abriter derrière le fait qu’un tiers ait rempli les documents pour échapper aux griefs du manque de caractère intentionnel de ses omissions.

C’est donc à bon droit que le tribunal a retenu le caractère intentionnel des omissions et à écarter le jeu de la prescription biennale. La découverte de la fraude résulte de l’enquête diligentée, de telle sorte que la prescription n’a commencée qu’à courir de cette date. La caisse était donc autorisée à recouvrer l’ensemble des paiements effectués sur les vingt années précédentes.

Dès lors, la caisse qui justifie des arrérages versés sur les 20 dernières années démontre la réalité de sa créance qui, déduction faite de prélèvements déjà effectués, s’élève à la somme de 30 096, 86 euros à ce jour.

Le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point.

– sur la demande de délais de paiement :

La demande est recevable dès lors qu’il ne s’agit pas du recouvrement de cotisations.

Au fond, l’assuré déclare un revenu de 7604 euros par an sans tenir compte des rentes versées.

Il ne démontre aucun effort pour rembourser sa dette et ne peut arguer de son actuelle bonne foi, alors même que cette dette est constituée en raison d’une fraude reconnue.

La demande de délais de paiement sera donc rejetée.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

L’ensemble des demandes formulées par M. [E] [R] sera donc rejeté.

M. [E] [R], qui succombe, sera condamné aux dépens. L’équité commande de ne pas faire droit à la demande formée par la caisse au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CE MOTIFS :

LA COUR,

DÉCLARE recevable l’appel de M. [E] [R] ;

CONFIRME le jugement rendu le 20 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Créteil en ses dispositions soumises à la cour ;

DÉBOUTE M. [E] [R] de l’intégralité de ses demandes ;

DÉBOUTE la Caisse nationale d’assurance vieillesse de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [E] [R] aux dépens.

La greffière Le président


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