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6 juillet 2023
Cour d’appel de Caen
RG n°
21/02366
AFFAIRE :N° RG 21/02366 –
N° Portalis DBVC-V-B7F-G2B5
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : DECISION en date du 16 Juillet 2021 du Tribunal de Commerce de LISIEUX
RG n° 2020.2120
COUR D’APPEL DE CAEN
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRÊT DU 06 JUILLET 2023
APPELANTE :
S.A.R.L. SOCIETE D’EXPLOITATION LA CHENEVIERE
N° SIRET : 339 915 787
[Adresse 11]
[Localité 1]
prise en la personne de son représentant légal
représentée par Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN
assistée de Me Thomas LECLERC, avocat au barreau de CAEN,
INTIMEES :
S.E.L.A.R.L. SBCMJ, prise en la personne de Me [T], mandataire judiciaire de la SARL MIROITERIE STAB
N° SIRET : 504 384 504
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée et assistée de Me Noël LEJARD, avocat au barreau de CAEN
MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS (MAF)
N° SIRET : 784 647 349
[Adresse 2]
[Localité 7]
prise en la personne de son représentant légal
S.A.R.L. DNS DUPONT NICOLAY
N° SIRET : 750 274 649
[Adresse 8]
[Localité 6]
prise en la personne de son représentant légal
représentées par Me Christine CORBEL, avocat au barreau de CAEN,
assistées de Me Jean DE BAZELAIRE DE LESSEUX, avocat au barreau de PARIS
AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE
N° SIRET : 775 699 309
[Adresse 4]
[Localité 9]
prise en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de la SCP FERRETTI HUREL LEPLATOIS, avocat au barreau de CAEN
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme EMILY, Président de Chambre,
Mme COURTADE, Conseillère,
M. GOUARIN, Conseiller,
DÉBATS : A l’audience publique du 11 mai 2023
GREFFIER : Mme LE GALL, greffier
ARRÊT prononcé publiquement le 06 juillet 2023 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme COLLET, greffier
* * *
Suivant contrat d’honoraires de maîtrise d’oeuvre en date du 22 mai 2017, la SARL Société exploitation La Chenevière, ayant pour activité commerciale l’exploitation d’un établissement hôtelier sous l’enseigne ‘Château La Chenevière’ situé à [Localité 10], a confié à la SARL DNS Dupont Nicolay, exerçant une activité d’architecte, la conception et la coordination des travaux d’extension d’une bâtisse dénommée l’Orangerie, consistant dans une verrière, pour un prix prévisionnel total de 336.000 euros HT.
Le 26 juin 2017, le cabinet Dupont Nicolay a transmis à la société La Chenevière un plan détaillé de la nouvelle construction.
Le permis de construire, sollicité le 17 juillet 2017, a été accordé par arrêté délivré par la commune de Commes le 20 novembre 2017, les travaux débutant en décembre 2017 et le planning de l’opération validée entre les parties prévoyant une livraison le 1er mai 2018.
Dans le cadre de ces travaux, la société La Chenevière a confié à la société Miroiterie STAB, selon marché direct conclu le 27 novembre 2017, la réalisation du ‘Lot n°4 menuiseries extérieures aluminium ‘ métallerie’ correspondant aux travaux de structure métallique de la construction projetée.
En fin de chantier, estimant que les travaux effectués ne correspondaient pas au plan détaillé qu’elle avait validé, la société La Chenevière a invoqué l’exception d’inexécution et refusé de régler les factures du cabinet Dupont Nicolay et de la société Miroiterie STAB.
Par lettre recommandée en date du 28 août 2018, la société Miroiterie STAB a mis en demeure la SARL Société d’exploitation La Chenevière de lui régler le solde de son marché s’établissant à la somme de 19.954,08 euros TTC.
Par exploit d’huissier de justice en date du 9 octobre 2018 la société Miroiterie STAB a assigné la société La Chenevière devant le tribunal de commerce de Caen.
Par jugement du 21 novembre 2018, le tribunal de commerce Caen a renvoyé l’affaire devant le tribunal de commerce de Lisieux pour des raisons de conflit d’intérêts.
Par exploit d’huissier de justice en date du 26 février 2019, la société La Chenevière a assigné en intervention forcée la société DNS Dupont Nicolay, en sa qualité de maître d’oeuvre, ainsi que la MAF et AXA en leurs qualités d’assureurs de l’architecte et de la société STAB.
Par jugement contradictoire en date du 16 juillet 2021, le tribunal de commerce de Lisieux a :
– débouté la SARL DNS Dupont Nicolay et la Mutuelle des architectes français en leur exception d’incompétence ;
– donné acte à la SELARL Bruno Cambon de son intervention en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Miroiterie STAB ;
– débouté la SARL exploitation château de La Chenevière de I’ensemble de ses demandes ;
– condamné la SARL exploitation château de La Chenevière à payer à la SELARL Bruno Cambon mandataire liquidateur de la SARL Miroiterie STAB la somme de 19.954,08 euros avec intérêts de droit à compter du 28 août 2018 au taux de 3 fois le taux d’intérêt légal ;
– condamné la SARL exploitation château de La Chenevière à payer à la société Miroiterie STAB la somme de 120 euros au titre de I’indemnité forfaitaire ;
– condamné la SARL exploitation château de La Chenevière à payer à la SELARL Bruno Cambon ès-qualités la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la SARL exploitation château de La Chenevière à payer à la SA AXA France IARD mutuelle et la Mutuelle des architectes français la somme de 1.000 euros chacune ;
– condamné la SARL exploitation château de La Chenevière aux entiers dépens comprenant le coût de l’ordonnance du 26 novembre 2020.
Par déclaration en date du 5 août 2021, la SARL La Chenevière a fait appel de ce jugement.
Par ordonnance en date du 30 mars 2022, le conseiller de la mise en état s’est déclaré incompétent pour infirmer le jugement entrepris et statuer sur l’exception d’incompétence soulevée par la SARL DNS Dupont Nicolay et la Mutuelle des architectes français , s’est déclaré également incompétent pour statuer sur la fin de non recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée et a rejeté la demande de radiation de l’affaire.
Par dernières conclusions du 29 septembre 2022, la SARL La Chenevière demande à la cour de :
– réformer le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence et donné acte à la SELARL SBCMJ de son intervention, et statuant à nouveau de :
A titre principal :
– joindre l’instance enrôlée sous le numéro 21/02367 à celle enrôlée sous le numéro 21/02366 ;
– débouter la société STAB de l’ensemble de ses demandes ;
– débouter la MAF et la société Dupont Nicolay de l’ensemble de leurs demandes ;
– fixer au passif de la société STAB la somme de 50.000 euros au titre des travaux permettant de reprendre la structure de manière conforme aux plans initiaux contractuellement prévus ;
– condamner solidairement le cabinet DNS Dupont Nicolay, la MAF et Axa à financer la reprise de l’ensemble de la structure de manière conforme aux plans initiaux contractuellement prévus d’un montant estimé à 50.000 euros, c’est-à-dire les plans transmis par le cabinet d’architecte Dupont-Nicolay le 26 août 2017 et présentés au soutien de la demande de permis de construire et notamment à relever la hauteur de la porte de la verrière à 2 mètres, c’est-à-dire à une hauteur égale à celle de la verrière existante, le tout sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
– condamner solidairement le cabinet DNS Dupont Nicolay, la MAF et Axa au paiement des intérêts contractuels liés au retard dans la livraison de l’ouvrage ;
– faire droit à l’exception d’inexécution de la société La Chenevière sur le paiement du prix des travaux jusqu’à l’exécution complète de ces derniers conformément au plan initial ;
A titre subsidiaire :
– Désigner tel expert qu’il plaira sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, à l’effet de déterminer les manquements contractuels et aux règles de l’art de la société STAB et du cabinet Dupont-Nicolay, dans le cadre de la mission dont le détail suit :
1. Convoquer les parties,
2. Se rendre sur place [Adresse 11],
3. Visiter les lieux et entendre les parties et tous sachants,
4. Se faire communiquer tous documents qu’il estimera utiles à l’accomplissement de sa mission,
5. Dire si l’exécution du plan transmis par le cabinet Dupont- Nicolay à la société La Chenevière le 26 juin 2017 était ou non techniquement réalisable,
6. Dire si le plan exécuté par la société STAB est conforme ou non à celui transmis par le cabinet Dupont-Nicolay à la société La Chenevière le 26 juin 2017 et si tel n’est pas le cas, relever l’ensemble des différences entre les plans,
7. Déterminer l’origine de ces différences à savoir (i) qui est à l’origine de ces dernières (ii) et la raison de chacune de ces différences,
8. Dire si les raisons des éventuelles différences entre les deux plans sont techniquement fondées, c’est-à-dire correspondent à des options contraintes inévitables ou si d’autres solutions auraient permis de mettre en oeuvre le plan du 26 juin 2017,
9. Dire si la société STAB a construit l’ouvrage de manière conforme au plan dont elle se prévaut c’est-à-dire à celui transmis par ses soins le 12 décembre 2017 par ‘We transfert’ ;
10. Dire si le plan et les travaux mis en oeuvre par la société STAB ont été conçu et exécutés de manière conforme aux règles de l’art ;
11. Dire si l’ouvrage est conforme aux normes de construction en vigueur et en particulier aux normes ERP ;
12. Relever tous désordres affectant l’ouvrage ;
13. Relever tous désordres affectant l’ouvrage ;
14. Déterminer les responsabilités de chacun dans les désordres ou non conformités aux normes de l’ouvrage ;
15. Chiffrer le coût de réparation desdits désordres et non conformités ;
16. Chiffrer le coût d’un rehaussement de la porte de l’extension de la verrière côté sud est à la même hauteur que celle de la verrière ancienne ;
17. Chiffrer le coût d’un rehaussement de la nouvelle verrière à hauteur du niveau de l’ancienne, de sorte que l’ouvrage soit parfaitement aligné sur cette dernière ;
18. Chiffrer le coût d’une démolition / reconstruction de l’ouvrage à l’identique du plan du cabinet Dupont-Nicolay du 26 juin 2017, si l’exécution dudit plan est techniquement possible,
19. Fournir tout élément technique de fait de nature à permettre à la juridiction éventuellement saisie de déterminer les responsabilités encourues,
20. Donner son avis sur les responsabilités,
21. Plus généralement, évaluer l’ensemble des préjudices subis par la société La Chenevière liés à la construction de l’ouvrage,
En tout état de cause :
– condamner solidairement la société STAB représentée par la SELARL Cambon, le cabinet DNS, la MAF et AXA au versement d’une somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance ;
– ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.
Par dernières conclusions du 15 novembre 2021, la SELARL Bruno Cambon, en sa qualité de mandataire judiciaire de la SARL Miroiterie STAB, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en l’ensemble de ses dispositions, de débouter la société exploitation château La Chenevière de toutes ses demandes, fins et ajoutant au jugement, de condamner la Société exploitation château La Chenevière au paiement d’une somme de 4.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Par dernières conclusions du 8 juillet 2022, les sociétés Mutuelle des architectes français (MAF) et DNS Dupont Nicolay demandent à la cour de :
– confirmer le jugement entrepris et débouter la société SARL exploitation La Chenevière et toutes autres parties de l’intégralité de leurs demandes formées contre la société DNS Dupont Nicolay et la MAF et de la demande d’expertise ;
– débouter la SELARL SBCMJ, mandataire judiciaire de la société Miroiterie STAB, et toutes autres parties de ses demandes formées à l’endroit de société DNS Dupont Nicolay et de la MAF ;
– condamner la société exploitation La Chenevière à verser à la MAF la somme de 8.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
– condamner la société exploitation La Chenevière aux entiers dépens qui pourront être recouvrés directement par Me Corbel Avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile et à verser à la MAF la somme de 8.000 euros à titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Subsidiairement,
– dire et juger irrecevables toutes demandes formées contre la MAF ;
– débouter la Société exploitation La Chenevière de ses demandes formées contre la société Dupont Nicolay architectes et la MAF ;
– rejeter toute demande d’expertise au contradictoire des concluantes ;
– rejeter la demande de jonction avec l’instance RG 21/02366 ;
– rejeter les demandes formées contre la société DNS Dupont Nicolay architectes et la MAF;
– condamner la société exploitation La Chenevière, la SELARL SCBMJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Miroiterie STAB SARL, et la société Axa assurances IARD mutuelle à garantir la DNS Dupont Nicolay architectes et la MAF des condamnations prononcées à leur encontre ;
– appliquer les termes et limites de la police souscrite par la société Dupont Nicolay architectes auprès de la MAF, dire et juger opposable la franchise pour toute condamnation prononcée sur un fondement autre que décennal.
Par dernières conclusions du 24 décembre 2021, la société Axa assurances IARD mutuelle, assureur de la responsabilité décennale de la société Miroiterie STAB, outre des demandes de ‘dire et juger’ qui ne sont pas des prétentions sur lesquelles il y a lieu de statuer, demande à la cour de :
– confirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions concernant Axa assurances IARD et rejeter toutes demandes formulées à son encontre ;
– rectifier le jugement de première instance s’agissant de la condamnation au titre des frais irrépétibles mise à la charge de la société exploitation La Chenevière et dire que la condamnation mise à la charge de la société exploitation La Chenevière à hauteur de 1.000 euros doit l’être au profit d’Axa assurances IARD mutuelle et non d’Axa France IARD mutuelle qui n’est pas partie à la procédure ;
– Au besoin, infirmer le jugement à ce titre et condamner la société exploitation La Chenevière à payer à Axa assurances IARD mutuelle la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance ;
A titre subsidiaire,
– condamner la société DNS Dupont Nicolay et la MAF à garantir Axa assurances IARD mutuelle de toutes condamnations prononcées à son encontre, en principal, intérêts, frais et accessoires ;
– rejeter la demande d’irrecevabilité formée par la société DNS Dupont Nicolay et la Mutuelle des architectes français ;
En toute hypothèse,
– condamner la société exploitation La Chenevière et subsidiairement tous succombants à payer à Axa assurances IARD mutuelle la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel ;
– condamner la société exploitation La Chenevière et subsidiairement tous succombants solidairement aux entiers dépens d’appel.
La clôture de la procédure est intervenue le 12 avril 2023.
Il est expressément renvoyé aux écritures précitées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
SUR CE, LA COUR
– Sur la demande de jonction
Il n’apparaît pas qu’il y ait entre les procédures n°21 2366 et n°21 2367 un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les juger ensemble.
La demande de jonction sera rejetée.
– Sur la rectification d’erreur matérielle
Aux termes de l’artcile 462 du code de procédure civile, les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l’a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande.
La société Axa demande la rectification du jugement entrepris qui a condamné la société La chenevière à payer une indemnité de procédure à la société Axa France Iard mutuelle qui n’était pas partie à la procédure, la condamnation devant être prononcée contre la société Axa assurances Iard mutuelle.
Il sera fait droit à cette demande.
– Sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la société DNS Dupont Nicolay et la MAF
La société DNS Dupont Nicolay et la MAF soulèvent l’irrecevabilité des demandes formées à l’encontre de l’architecte en arguant de l’autorité de la chose jugée que revêt l’arrêt rendu par la cour d’appel de Caen le 7 novembre 2019 dans l’instance opposant la société DNS Dupont Nicolay à la société la Chenevière pour le règlement des honoraires de la première et au cours de laquelle la société la Chenevière avait fait valoir le non respect par l’architecte des plans conventionnellement établis par les parties.
La société le Chenevière fait valoir que l’autorité de chose jugée ne peut être soulevée dans la mesure où les deux instances n’ont pas le même objet et que l’arrêt invoqué est une décision de référé dépourvue d’autorité de chose jugée.
Aux termes de l’article 1355 du code civil, l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.
Selon l’article 488 du code de procédure civile, l’ordonnance de référé n’a pas, au principal, l’autorité de la chose jugée.
Il sera relevé que l’arrêt du 7 novembre 2019 a été rendu en matière de référé et qu’il est donc dépourvu de l’autorité de la chose jugée au principal.
Par ailleurs, la demande n’est pas la même dans la présente instance, s’agissant d’une demande de dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité contractuelle.
L’exception d’irrecevabilité sera rejetée.
– Sur la demande de dommages et intérêts de la société la Chenevière
La société la Chenevière fonde ses demandes sur les articles 1103, 1104 et suivants et 1231-1 du code civil, invoquant l’inexécution du contrat conclu entre les parties.
Elle explique que les travaux réalisés n’ont pas respecté le plan initialement validé par elle-même qui consistait en la construction d’une verrière identique à celle existant déjà, qu’elle n’a pas validé les plans dont le liquidateur de la société STAB se prévaut, qu’elle s’est apercue à la fin des travaux qu’il y avait un problème d’alignement des structures et que la porte située façade sud mesurait 1,80 mètre au lieu de 2 mètres comme cela avait été contractuellement prévu.
La société la Chenevière reproche en outre à l’architecte un manquement à son devoir de conseil.
La SELARL SBCMJ, ès qualités, indique que contrairement à ce que soutient l’appelante, la société STAB a exécuté l’ouvrage tel que modifié en cours de chantier sur instruction expresse du maître d’ouvrage et du maître d’oeuvre, qu’il a été procédé à l’établissement des plans rectificatifs et que ces plans, diffusés à l’ensemble des intervenants qu’il s’agisse de la maîtrise d’oeuvre ou du maître d’ouvrage, ont été approuvés à l’occasion des comptes-rendus de chantier du 22 janvier 2018, date à laquelle a été passée la commande de la fabrication de la verrière.
Elle précise qu’indépendamment de l’inexistence d’un quelconque désaccord formulé en cours de chantier quant aux caractéristiques de l’ouvrage, l’appelante ne peut se prévaloir de l’existence d’un droit de créance et d’une éventuelle exception d’inexécution puisqu’elle s’est abstenue de régulariser une déclaration de créance au passif de la procédure collective de la société STAB et que par conséquent la créance supposée est inopposable à la liquidation judiciaire.
La société DNS Dupont Nicolay et la MAF, son assureur, intimés, font valoir que le plan ‘initial, validé’ évoqué par l’appelante est le plan du permis de construire qui n’a pas vocation à servir de plan d’exécution, que les plans d’exécution étaient à la charge de la seule entreprise exécutant les travaux, la société Miroiterie STAB, que celle-ci a réalisé ses plans d’exécution qu’ellle a adressés au maître de l’ouvrage qui n’a émis aucune observation, que la réception a été prononcée le 1er juillet 2018 avec une levée des réserves sauf pour la hauteur d’une porte qui n’a pas été levée, qu’il en résulte que la réception purge les vices apparents, et que la société la Chenevière ne peut pas prétendre que son ouvrage ne serait pas conforme aux plans acceptés par ses soins.
Elles précisent qu’il n’y a aucun commencement de preuve d’une non-conformité ou de désordre et que le maître d’ouvrage ne peut invoquer l’exception d’inexécution à l’égard de l’architecte qui a rempli sa mission qui est terminée, que le permis de construire a été obtenu et la réception prononcée.
La société Axa assurances IARD mutuelle, assureur de la société Miroiterie STAB, fait valoir que les garanties souscrites auprès d’elle ne sont mobilisables qu’en cas de responsabilité décennale de son assurée, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, dans la mesure où il n’existe en réalité aucun désordre mais une prétendue non-conformité contractuelle, qu’une telle non-conformité était parfaitement apparente et connue du maître d’ouvrage en cours de chantier, qu’elle a d’ailleurs fait l’objet d’une réserve lors du procès-verbal de réception, qu’elle n’est manifestement à l’origine d’aucune atteinte à la solidité ou à la destination de l’ouvrage.
La société AXA précise par ailleurs que l’appelante ne rapporte aucun début de preuve du montant des travaux de reprise de la verrière, se contentant de faire état d’un montant estimé à 50.000 euros sans le moindre élément justificatif.
Aux termes de l’article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
En l’espèce, s’il résulte des documents contractuels que les travaux consistaient en l’extension de l’Orangerie de l’hôtel,aucun document ne précise que cette extension devait se faire à l’identique de la structure déjà existante.
Aucune réserve n’a d’ailleurs été formulée lors de la réception des travaux le 2 juillet 2018 quant à un problème d’alignement des deux structures ou encore sur l’aspect général et la largeur des éléments de la verrière.
L’appelante est dès lors mal fondée à soutenir qu’elle n’avait pas donné son accord sur ces éléments et que ceux-ci ne correspondent pas au plan d’exécution ne fournissant aucun élément de preuve en ce sens.
Quatre réserves ont été formulées lors de la réception des travaux dont une seule n’a pas été levée à savoir celle résultant d’une ‘problématique hauteur de la porte à régler’.
L’appelante soutient qu’il était convenu que la porte ait une hauteur de 2 mètres et non d’1,80 mètres.
Par message du 11 juillet 2018, la société Miroiterie STAB a contesté cette réserve au motif que la hauteur de la porte avait été déterminée en réunion de chantier en présence du maître de l’ouvrage et que les plans avaient été transmis avant la mise en fabrication sans contestation.
Le devis de la société STAB et son décompte général définitif facturent, concernant la porte, la fourniture d’un ‘bloc porte 2 vantaux. Dimensions : 1980 x2000 ht.’
La société DNS Dupont Nicolay et la MAF font valoir qu’il s’agit de dimensions desquelles il faut déduire les encadrements.
Les documents versés aux débats établissent la réalité d’une discussion sur la modification du plan.
Le message envoyé par la société STAB via we tranfert le 13 décembre 2017 mentionne l’envoi d’une étude concernant la porte d’entrée de la verrière au maître de l’ouvrage et indique que le destinataire a téléchargé le fichier.
Il est communiqué un autre message du 22 janvier 2018 adressé au maître de l’ouvrage et à six autres personnes par lequel la société STAB transmet plusieurs fichiers de plans de la verrière.
Il est versé aux débats un plan sur lequel apparaît l’indication d’un passage libre au niveau de la porte de 1830 cm mais avec une mention de modification en date du 2 juillet 2018.
La société La Chenevière conteste avoir reçu et validé ce plan et indique qu’elle n’ a pas été informée de la modifictaion du plan de l’architecte établi le 26 juin 2017 et transmis dans le cadre du dossier de permis de construire. Il sera relevé que ce plan du 26 juin 2017 n’est pas versé aux débats et qu’il ne s’agit pas du plan d’exécution des travaux.
Les comptes-rendus de chantier font apparaître que les travaux de la verrière ont eu lieu suivant un plan d’exécution établi par la société STAB
Le compte-rendu de chantier du 18 décembre 2017, mentionnant la présence du maître de l’ouvrage, précise qu’est en cours la fourniture du plan d’exécution et que le plan de la verrière est à modifier ‘ suivant relevé et hauteur porte’.
Ce n’est donc pas le plan initial dont se prévaut la société La Chenevière qui a été validé par les parties mais le plan d’exécution modifié par la société STAB après l’ouverture du chantier.
La pièce n°11 de l’appelante est un plan du 15 décembre 2017 dont elle ne conteste pas avoir eu connaissance et dont il ne peut être retenu que la hauteur indiquée de 2 mètres est la hauteur du vantail de la porte.
La comparaison avec la pièce n°24 de la SELARL SBCMJ qui est le plan exécuté fait apparaître que la hauteur de 2 mètres a été augmentée de 40 cm pour augmenter la hauteur de la porte à 1,83 mètres.
Cette modification démontre qu’il y a eu des discussions sur la hauteur de la porte qui ont conduit à la modification du plan du 15 décembre 2017.
Le compte-rendu de chantier du 22 janvier 2018 , mentionnant la présence du maître de l’ouvrage, indique que le plan d’exécution a été validé lors de la réunion de chantier et prévoit la commande des fournitures pour mise en fabrication.
La société La Chenevière ne conteste pas qu’elle était bien présente lors des réunions de chantier et elle ne justifie pas avoir élevé des contestations relatives au plan d’exécution validé.
Il ressort de ces éléments que le plan d’exécution modifié a été validé par le maître de l’ouvrage. Il n’est pas soutenu que les travaux n’ont pas été exécutés selon ce plan d’exécution validé le 22 janvier 2018 qui n’est pas le plan de l’architecte établi pour l’obtention du permis de construire.
La société La Chenevière ne démontre dès lors pas l’exception d’inexécution qu’elle invoque.
La société La Chenevière se prévaut par ailleurs du manquement de l’architecte et de la société STAB à leur devoir de conseil.
La société STAB a exécuté les plans validés par l’architecte et le maître de l’ouvrage.
Il n’est pas justifié qu’elle a manqué aux règles de l’art ou aux normes en vigueur dans l’exécution des travaux.
Le grief qui lui est fait d’un manquement à son obligation de conseil n’est pas établi.
En sa qualité de professionnel du bâtiment, l’architecte est tenu à l’égard du maître de l’ouvrage à une obligation générale de renseignement et de conseil sur l’ensemble des aspects du projet. Ce devoir doit être mis en oeuvre en temps utile, de façon complète et précise, afin de permettre au maître d’ouvrage de mesurer les risques et les aléas du projet. L’architecte doit aller jusqu’à décider de ne pas retenir les choix du maître de l’ouvrage lorsqu’ils aboutiraient à compromettre la faisabilité de l’ouvrage.
Ainsi, l’architecte doit non seulement s’assurer de la faisabilité du projet, mais renseigner et conseiller le maître de l’ouvrage à ce sujet en cas de difficultés.
Il n’est pas contesté que le plan d’architecte initialement communiqué au maître de l’ouvrage et sur lequel a été obtenu l’accord de ce dernier pour les travaux prévoyait une porte d’une hauteur de 2 mètres.
Les devis et factures de la société STAB précisent que le bloc porte est constitué de deux vantaux de dimensions:1980x2000ht.
La mention ‘ht’ ne signifie pas nécessairement ‘hors tout’ et à supposer que cela soit le cas, elle ne justifie pas une hauteur finale de 1,83 mètres qui apparaît une hauteur inhabituelle pour la porte d’entrée d’un bâtiment récent.
Dès lors que le plan d’exécution ne reprenait pas le plan initial de l’architecte, il appartenait à celui-ci d’attirer l’attention du maître de l’ouvrage sur la hauteur effective de la porte qui n’était pas une hauteur standard et pouvait poser difficulté au vu de la derstination de l’ouvrage.
La charge de la preuve du respect de cette obligation repose sur l’architecte.
Le fait que le maître de l’ouvrage, qui n’est pas un professionnel du bâtiment, ait validé le plan d’exécution ne signifie pas que l’obligation de conseil de l’architecte a été respectée.
L’architecte a donc engagé sa responsabilité à ce titre.
– Sur l’indemnisation du préjudice
La société La Chenevière réclame le paiement d’une somme de 50 000 euros pour une reprise totale de l’ouvrage alors que la responsabilité de l’architecte n’est retenue que pour un manquement à son devoir de conseil relativement à la hauteur de la porte d’entrée.
La société La Chenevière ne fournit aucun élément sur l’évaluation du coût de reprise de la porte.
Le décompte général définitif de la société STAB facture la fourniture et la pose de la porte à la somme de 3907 euros HT.
Au vu de ces éléments, de la nature et l’ampleur des travaux de reprise, et sans qu’il y ait lieu à expertise, le préjudice peut justement être évalué à la somme de 10 000 euros, l’architecte ne pouvant être condamné à une obligation de faire les travaux.
La MAF ne soutient pas que la police souscrite par la société DNS Dupont Nicolay ne s’applique pas. Elle précise qu’il y a lieu de dire la franchise opposable pour toute condamnation prononcée sur un fondement autre que décennal.
La société DNS Dupont Nicolay et la MAF seront condamnées in solidum au paiement de la somme de 10 000 euros.
Le jugement est infirmé en ce sens.
Il n’y a pas lieu à garantie.
Il y aura lieu entre ces parties à application de la franchise prévue au contrat le cas échéant.
La demande de paiement des intérêts contractuels liés au retard dans la livraison de l’ouvrage formée par l’appelante n’est pas chiffrée ni motivée quant à son quantum. Elle sera rejetée.
La société MAF étant condamnée à paiement, l’appel en garantie de la société La Chenevière ne peut être jugé abusif. La société MAF sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts formée contre l’appelante.
– Sur la créance de la société STAB
La société La Chenevière étant mal fondée à invoquer une exception d’inexécution contre la société STAB et la créance de celle-ci n’étant pas utilement contestée, il convient de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
– Sur les demandes accessoires
Les dispositions du jugement relatives aux indemnités de procédure allouées à la SELARL Bruno Campon, ès qualités, et à la société Axa sont confirmées sous réserve de la rectification d’erreur matérielle opérée ainsi que les dispositions relatives aux dépens.
Il n’apparaît pas inéquitable que la société DNS Dupont Nicolay et la MAF, qui succombent partiellement, supportent leurs frais irrépétibles. Elles seront déboutées de leur demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’équité commande de les condamner in solidum à payer à la société La Chenevière la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’équité commande en outre de condamner la société La Chenevière à payer à la SELARL Bruno Cambon, ès qualités, et à la société Axa France Iard mutuelle la somme de 2000 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
La société La Chenevière d’une part et la société DNS Dupont Nicolay et la MAFd’autre part seront condamnées chacune pour moitié aux dépens d’appel avec droit de recouvrement direct au profit des avocats constitués sur la cause conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe ;
Rejette la demande de jonction ;
Rectifie le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la SARL exploitation chateau de la Chenevière à payer à la SA Axa France Iard mutuelle la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et dit que la SARL exploitation chateau de la Chenevière est condamnée à payer à la SA Axa assurances Iard mutuelle la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la société DNS Dupont Nicolay et la Mutuelle des architectes français de leur exception d’irrecevabilité ;
Confirme le jugement déféré, dans les limites de l’appel, sauf en ce qu’il a débouté la SARL Société d’exploitation La Chenevière de ses demandes à l’encontre de la société DNS Dupont Nicolay et la Mutuelle des architectes français et en ce qu’il a condamné la SARL Société d’exploitation La Chenevière à payer à la Mutuelle des architectes français la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées et y ajoutant ;
Condamne la société DNS Dupont Nicolay et la Mutuelle des architectes français in solidum à payer à la SARL Société d’exploitation La Chenevière la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Dit qu’iI y aura lieu entre la société DNS Dupont Nicolay et la Mutuelle des architectes français à application de la franchise prévue au contrat d’assurance le cas échéant ;
Condamne la société DNS Dupont Nicolay et la Mutuelle des architectes français in solidum à payer à la SARL Société d’exploitation La Chenevière la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SARL Société d’exploitation La Chenevière à payer à la SELARL Bruno Cambon, ès qualités, et à la société Axa France Iard mutuelle la somme de 2000 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
Dit que les dépens d’appel seront supportés par moitié par la SARL Société d’exploitation La Chenevière d’une part et par la société DNS Dupont Nicolay et la Mutuelle des architectes français d’autre part avec droit de recouvrement direct au profit des avocats constitués sur la cause conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. COLLET F. EMILY