Déclaration de créances : 22 juin 2023 Cour d’appel de Dijon RG n° 21/00506

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Déclaration de créances : 22 juin 2023 Cour d’appel de Dijon RG n° 21/00506
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22 juin 2023
Cour d’appel de Dijon
RG n°
21/00506

VCF/LL

SAS BEAUNE BRIOCHE

C/

SAS BRING FRIGOSCANDIA

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D’APPEL DE DIJON

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 22 JUIN 2023

N° RG 21/00506 – N° Portalis DBVF-V-B7F-FVR6

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 18 mars 2021,

rendue par le tribunal de commerce de Dijon – RG : 2020/1985

APPELANTE :

SAS BEAUNE BRIOCHE, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège :

[Adresse 5]

[Adresse 6]

[Localité 1]

représentée par Me Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 126

assistée de Me MAFFARD, substituant Me Benoît GICQUEL, membre de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

SAS BRING FRIGOSCANDIA, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège :

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Florent SOULARD, membre de la SCP SOULARD- RAIMBAULT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 127

assistée de Me Jean-Marc BESSON, avocat au barreau de BOULOGNE SUR MER

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 27 avril 2023 en audience publique devant la cour composée de :

Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de Chambre, Président, ayant fait le rapport,

Sophie DUMURGIER, Conseiller,

Leslie CHARBONNIER, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG,

DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 22 Juin 2023,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

La société Beaune Brioche, dont le siège est à [Localité 3], a pour activité la fabrication industrielle de pain, viennoiserie, brioche et pâtisserie. Elle exerce sous le nom commercial « La boulangère ».

Elle est l’une des associés de la SNC La boulangère & Co, dont le siège est en Vendée, société support de services pour le groupe « La boulangère »

La SNC « Boulangère Services » a, par contrat du 28 octobre 2015, confié le transport des produits fabriqués notamment par la société Beaune Brioche à la société STT Froid.

A la demande de la société STT Froid, la société Bring Frigoscandia a été commissionnée pour effectuer plusieurs livraisons au cours de l’année 2019, avec comme lieu d’enlèvement la société Beaune Brioche et comme lieu de livraison, une société anglaise située à Rugby.

Certaines des prestations de transport effectuées par la société Bring Frigoscandia n’ont pas été réglées par la société STT Froid, qui a été mise en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Rennes du 2 octobre 2019.

Par lettre recommandée du 15 octobre 2019, la société Bring Frigoscandia a déclaré au mandataire judiciaire une créance de 51 660 euros, au titre de 26 prestations effectuées « pour le compte de l’expéditeur La Boulangère ».

Par lettre recommandée du 5 décembre 2019, la société Bring Frigoscandia a vainement mis en demeure la société Beaune Brioche de lui régler la somme de 32 280 euros au titre de 16 prestations effectuées entre le 14 août et le 5 octobre 2019.

Par acte du 6 avril 2020, visant notamment l’article L. 132-8 du code de commerce, la société Bring Frigoscandia a assigné la société Beaune Brioche en paiement d’une somme initiale de 32 280 euros réduite à 24 480 euros au titre de 12 prestations, la différence correspondant :

d’une part à hauteur de 3 960 euros à deux factures relatives à des transports effectués postérieurement à l’ouverture du redressement judiciaire qui ont été réglées par l’administrateur judiciaire en application de l’article L. 621-32 du code de commerce

d’autre part à hauteur de 3 840 euros à deux factures relatives à des transports effectués au départ des Herbiers (44) au siège de la société Ouest Boulangère également associée de la SNC « Boulangère Services ».

En défense, la société Beaune Brioche a soutenu :

à titre principal, que l’article L. 132-8 du code de commerce est inapplicable,

à titre subsidiaire, que la société Bring Frigoscandia ne rapporte ni la preuve de sa qualité d’expéditeur, ni la preuve de la certitude de sa créance.

A titre reconventionnel, elle a demandé la condamnation de la société Bring Frigoscandia à lui payer la somme de 24 480 euros de dommages et intérêt pour négligence fautive.

Par jugement du 18 mars 2021, le tribunal de commerce de Dijon a :

– condamné la SAS Beaune Brioche à régler à la SAS Bring Frigoscandia la somme de 24 480 euros TTC au titre de factures impayées suite à des prestations de transport effectuées,

– débouté la SAS Beaune Brioche de l’ensemble de ses contestations, fins et prétentions, et notamment de sa demande de voir condamner la SAS Bring Frigoscandia pour négligence fautive,

– condamné la SAS Beaune Brioche à payer à la SAS Bring Frigoscandia la somme de 3 000 euros au titre des indemnités prévues à l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SAS Beaune Brioche en tous les dépens de l’instance, en ce compris les frais de greffe liquidés à la somme de 61,02 euros HT, TVA 12,20 euros, soit 73,22 euros TTC,

– dit qu’il y a lieu à l’exécution provisoire du présent jugement.

La SAS Beaune Brioche a relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe le 13 avril 2021.

Au terme du dispositif de ses conclusions notifiées le 30 juin 2022, la SAS Beaune Brioche demande à la cour d’infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel et statuant à nouveau, de :

– dire et juger que la société Bring Frigoscandia ne rapporte pas la preuve de sa qualité d’expéditeur,

– dire et juger que la société Bring Frigoscandia ne rapporte pas la preuve de la certitude de sa créance,

– juger irrecevables et subsidiairement infondées les demandes de la société Bring Frigoscandia,

A titre reconventionnel,

– condamner la société Bring Frigoscandia à lui payer la somme de 24 480 euros de dommages et intérêts pour négligence fautive,

– condamner la société Bring Frigoscandia à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Au terme du dispositif de ses conclusions notifiées le 5 octobre 2021, la SAS Bring Frigoscandia demande à la cour de :

– confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

– condamner la société Beaune Brioche à lui verser la somme de 3 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de Me Soulard, avocat.

La clôture est intervenue le 4 avril 2023.

SUR CE

– Sur l’action en paiement de la société Bring Frigoscandia

La société Bring Frigoscandia fonde son action en paiement sur les dispositions de l’article L. 132-8 du code de commerce qui sont les suivantes : La lettre de voiture forme un contrat entre l’expéditeur, le voiturier et le destinataire ou entre l’expéditeur, le destinataire, le commissionnaire et le voiturier. Le voiturier a ainsi une action directe en paiement de ses prestations à l’encontre de l’expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport. Toute clause contraire est réputée non écrite.

Devant la cour, l’application de ce texte de droit interne à la présente espèce n’est plus discutée.

La société Beaune Brioche conteste avoir la qualité d’expéditeur et avoir qualité à défendre et oppose donc une fin de non-recevoir à la demande en paiement de la société Bring Frigoscandia.

Tant les mentions manuscrites qui figurent sur les lettres de voiture que l’emplacement de son tampon, comportant tout à la fois sa raison sociale (Beaune Brioche) et son nom commercial (La boulangère), la désignent comme expéditeur. Elle est donc présumée être l’expéditeur mais cette présomption n’est pas irréfragable. Il lui appartient de la renverser.

Elle fait état du contrat passé entre la SNC Boulangère Services et la société STT Froid et de la facture émise par cette société en exécution de ce contrat pour la majeure partie des prestations de transport litigieuses effectuées par la société Bring Frigoscandia (pièce 4 de son dossier).

Elle se réfère à la déclaration de créance de cette société désignant comme expéditeur la société La Boulangère et soutient que sous cette mention, ce n’est pas elle (Beaune Brioche) qui était désignée mais bien la SNC Boulangère Services.

Pour sa part, l’intimée fait observer qu’elle n’avait pas connaissance du contrat liant la SNC à STT Froid et que selon les mentions de la page 5 de ce contrat, la société Beaune Brioche peut être considérée comme expéditeur.

La cour observe que dans sa déclaration de créance entre les mains du mandataire judiciaire désigné dans la procédure de redressement judiciaire de STT Froid (pièce 19 de son dossier), l’intimée a listé 26 “transports effectués pour le compte de l’expéditeur La Boulangère et à destination de Rugby (GB)”. Certaines de ces 26 prestations ne concernaient pas des transports effectués au départ de la société Beaune Brioche ; elles étaient notamment relatives à des transports réalisés à partir d’autres sociétés associées de la SNC et membres du même groupe telles la société Ouest Boulangère ou la SAS Viennoiserie Ligérienne ou la SASU Pain Concept.

Ainsi, bien qu’elle affirme ne pas avoir eu connaissance du contrat liant la SNC à STT, la société Bring Frigoscandia n’ignorait pas que le coconctractant de cette dernière n’était pas chacune des sociétés du groupe, correspondant à des sites de production et à des lieux d’enlèvement des produits transportés, mais était la SNC Boulangère Services. La stipulation à laquelle l’intimée se réfère en page 5 du contrat est relative aux ordres de transport émis par la SNC pour chacune des prestations à effectuer, le lieu des expéditions à prendre en charge figurant dans ces ordres de transport sous la mention des “nom et coordonnées complètes des expéditeurs”, cette simple clause ne pouvant suffire à qualifier chacun des lieux d’enlèvement des marchandises d’expéditeur au sens de l’article L. 132-8 du code de commerce, les ordres de transport n’émanant d’ailleurs pas des sites de production tels la société Beaune Brioche, mais bien de la SNC.

En conséquence, il résulte des éléments de l’espèce que malgré la présomption attachée aux lettres de voiture, la société Beaune Brioche ne peut être qualifiée d’expéditeur et la société Bring Frigoscandia est irrecevable à agir en paiement à son encontre.

Le jugement déféré doit donc être infirmé en ce qu’il a condamné l’appelante à payer la somme de 24 480 euros.

– Sur la demande indemnitaire de la société Beaune Brioche

Bien que présentée à titre reconventionnel dans le dispositif des conclusions de l’appelante, cette demande est subsidiaire.

Il suffit pour s’en convaincre de relire le corps des conclusions ainsi rédigées : “Si par extraordinaire la cour devait considérer recevable et bien-fondée l’action directe exercée à l’encontre de Beaune Brioche, il ne pourra que constater que Bring Frigoscandia a commis une négligence fautive en poursuivant ses prestations de transport alors même qu’elle avait parfaitement connaissance des difficultés financières de STT Froid.”

Interrogé lors de l’audience, le conseil de l’appelante a d’ailleurs confirmé le caractère subsidiaire de cette demande, qu’il n’y a donc pas lieu d’examiner.

– Sur les frais de procès

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, les dépens de première instance et d’appel doivent être supportés par la société Bring Frigoscandia.

Les conditions d’application de l’article 700 du code de procédure civile ne sont réunies qu’en faveur de la société Beaune Brioche, à laquelle la cour alloue la somme de 2 000 euros au titre de l’ensemble des frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

Statuant à nouveau et ajoutant,

Déclare la société Bring Frigoscandia irrecevable en sa demande en paiement à l’encontre de la société Beaune Brioche,

Condamne la société Bring Frigoscandia aux dépens de première instance et d’appel,

Condamne la société Bring Frigoscandia à payer à la société Beaune Brioche la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,

 


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