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20 juin 2023
Cour d’appel de Toulouse
RG n°
22/04509
20/06/2023
ARRÊT N° 402/2023
N° RG 22/04509 – N° Portalis DBVI-V-B7G-PFOC
CBB/CD
Décision déférée du 15 Décembre 2022 – Conseiller de la mise en état de TOULOUSE – 22/01588
Mme MARTIN DE LA MOUTTE
[Adresse 8]
C/
S.E.L.A.R.L. [O] ET ASSOCIES
S.A.S. EMV22
[I] [L]
INFIRMATION
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
3ème chambre
***
ARRÊT DU VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS
***
DEMANDERESSE A LA REQUETE EN DEFERE
SCCV [Adresse 8]
Société Civile de Construction
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Jérôme CARLES de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et Me François BORIE de la SCP DORIA AVOCATS, avocat plaidant au barreau de MONTPELLIER
DEFENDEURS A LA REQUETE EN DEFERE
S.E.L.A.R.L. [O] ET ASSOCIES MANDATAIRES JUDICIAIRES, société d’exercice libéral à responsabilité limité (SELARL), immatriculée au RCS de TOULOUSE sous le numéro 809 908 858, dont le siège social est situé [Adresse 2], prise en la personne de Maître [F] [O], mandataire judiciaire, lui-même pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société EM22, fonction à laquelle il a été désigné par jugement du Tribunal de commerce de TOULOUSE du 29 juin 2021,
Mandataire Judiciaire
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Frédéric BENOIT-PALAYSI de la SCP ACTEIS, avocat au barreau de TOULOUSE
S.A.S. EM22 RCS de [Localité 4]
sous le numéro 828 992 636
[Adresse 3]
[Localité 5]
Sans avocat constitué
Monsieur [I] [L]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Sans avocat constitué
COMPOSITION DE LA COUR
Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 19 Avril 2023 en audience publique, devant la Cour composée de :
C. BENEIX-BACHER, président
O. STIENNE, conseiller
A. MAFFRE, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : M. BUTEL
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par C. BENEIX-BACHER, président, et par M. BUTEL, greffier de chambre.
FAITS
Selon acte du 17 juin 2020, la SCCV [Adresse 8] a confié à la SAS EM22 la réalisation du lot gros-‘uvre d’une opération de construction d’une résidence de 30 logements en R+3, dénommée « Villa O Centre » à [Localité 7] au prix global et forfaitaire de 1.040.684,66 € HT.
Estimant que la société EM22 avait abandonné le chantier, la SCCV [Adresse 8] l’a mise en demeure par courrier du 21 juin 2021 d’avoir à reprendre sans délai les travaux entrepris.
Par jugement du 29 juin 2021, le tribunal de commerce de Toulouse a prononcé la liquidation judiciaire de la SAS EM22 et désigné la Selarl [O] en qualité de liquidateur.
PROCEDURE
Par ordonnance du 21 avril 2022, le juge commissaire a relevé de forclusion la SCCV [Adresse 8] pour sa déclaration de créance.
Par déclaration du 25 avril 2022, la Selarl [O] es-qualités a relevé appel de cette décision en n’intimant que la SCCV [Adresse 8].
Par assignations du 16 juin 2022, la Selarl [O] es-qualités a relevé appel provoqué contre la SAS EM22 et son dirigeant M. [L].
Par conclusions d’incident notifiées le 13 septembre 2022, la SCCV [Adresse 8] a saisi le conseiller de la mise en état de l’irrecevabilité de l’appel principal et de l’appel provoqué formés par la Selarl [O] es-qualités.
Par ordonnance en date du 15 décembre 2022, le magistrat chargé de la mise en état a’:
– déclaré l’appel recevable ;
– ordonné la communication du dossier au ministère public ;
– fixé le présent dossier à l’audience de plaidoiries du 3 avril 2023 à 09h30, la clôture de l’instruction du dossier devant intervenir le 27 mars 2023.
– dit que les dépens de l’incident seront joints au fond.
Par requête en date du 28 décembre 2022, la SCCV [Adresse 8] a déféré la décision devant la cour.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
La SCCV[Adresse 8]x, dans ses dernières écritures en date du 14 avril 2023, demande à la cour au visa des articles 125, 549, 550, 553, 914 et 916 du code de procédure civile, R.621-21 et R.641-11 du code de commerce, de’:
– déclarer recevable et bien fondé le déféré,
– infirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance du conseiller de la mise en état du 15 décembre 2022,
et, statuant à nouveau,
– déclarer irrecevables l’appel principal et l’appel provoqué formés par la Selarl [O] et Associés ‘ mandataires judiciaires,
en conséquence,
– constater l’extinction de l’instance,
– condamner la SELARL [O] et Associés ‘ mandataires judiciaires à payer la somme de 3.500 € à la requérante au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– la condamner aux entiers dépens de la procédure d’appel.
Elle soutient que’:
– elle a été relevée de forclusion pour déclarer sa créance par le juge commissaire suivant ordonnance du 21 avril 2022 dont appel,
– l’appel principal de la Selarl [O] es-qualités est irrecevable en ce qu’elle n’a pas intimé dans sa déclaration d’appel du 25 avril 2022, l’ensemble des protagonistes (la SAS EM22 et son gérant) alors qu’en matière de déclaration de créances et de vérification du passif, il existe un lien d’indivisibilité entre le créancier, le débiteur et le mandataire judiciaire,
– pour régulariser la procédure elle ne pouvait que faire une seconde DA dans le délai pour conclure mais pas une assignation en appel provoqué ; si l’appel provoqué est délivré après l’expiration du délai d’appel sa recevabilité est subordonnée à celle de l’appel principal ; et au surplus, l’appel provoqué ne peut émaner de l’appelant principal que lorsqu’il découle de l’appel incident formé par l’intimé et, ce, à peine d’irrecevabilité de l’appel provoqué,
– ainsi, l’appel provoqué est également irrecevable puisque l’appel principal est irrecevable,
– et si la cour devait considérer que l’appel provoqué régularisait l’appel principal irrecevable, elle devrait sanctionner l’ordonnance du conseiller de la mise en état qui n’a pas relevé d’office l’irrecevabilité de l’appel principal formé contre une ordonnance du juge commissaire présenté directement devant la cour alors que le recours ne peut être formé que devant le tribunal de commerce (R 621-21 code de commerce),
– il s’agit d’une fin de non recevoir d’ordre public qu’il appartenait au conseiller de la mise en état de relever d’office.
La Selarl [O] et Associes es qualités de mandataire judiciaire liquidateur, dans ses dernières écritures en date du 7 avril 2023, demande à la cour au visa des articles 548, 550, 552 et 916 du code de procédure civile, et R 661-6, 1° du code de commerce, de’:
– déclarer irrecevable la requête en déféré déposée par la SCCV [Adresse 8] en ce qu’elle ne répond pas aux conditions d’ordre public fixées à l’article 916 du code de procédure civile,
– confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance du conseiller de la mise en état du 15 décembre 2022,
– débouter la SCCV [Adresse 8] de toutes ses demandes, fins et prétentions.
En conséquence,
– condamner la SCCV [Adresse 8] à payer la somme de
3.500 € à la SELARL [O] & Associés, ès qualité de mandataire judiciaire de la société EM 22, au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– condamner la SCCV [Adresse 8] aux entiers dépens de la présente instance.
Elle soutient que’:
– en vertu de l’article 916 seules les ordonnances mettant fin au litige peuvent être déférées à la cour ce qui n’est pas le cas en l’espèce, de sorte qu’aucun recours n’était ouvert,
– l’appel principal n’est pas irrecevable’: lorsque la matière est indivisible, l’appel interjeté en temps utile contre l’une des parties conserve le droit de l’appelant vis-à-vis des autres et couvre l’irrégularité ou la tardiveté d’intimation’; tous les intéressés doivent avoir été mis en cause devant la juridiction d’appel,
– la cour saisie en déféré ne peut connaître de prétentions qui n’ont pas été soumises au conseiller de la mise en état, de sorte que la SCCV [Adresse 8] n’est pas recevable à soutenir l’irrecevabilité de l’appel formée devant la cour contre une ordonnance du juge commissaire au lieu d’avoir été présentée devant le tribunal de commerce,
– en assignant en appel provoqué le débiteur en la personne de la SAS EM22 et de son dirigeant M. [L], la Selarl [O] es-qualités a régularisé la procédure, par application du principe d’indivisibilité inhérent aux procédures collectives,
– elle s’oppose au relevé de forclusion en ce que la SAS EM22 n’est pas débitrice de la SCCV [Adresse 8] de sorte qu’elle n’avait pas à la porter sur la liste des créanciers mais, au contraire c’est elle qui est sa créancière à hauteur de 139 786,32€ TTC,
– dès le mois de juin 2021 la SCCV [Adresse 8] était en mesure de chiffrer elle-même sa créance et donc la déclarer pendant le délai légal de 2 mois,
MOTIVATION
En application de l’article 916 alinéa 2 du code de procédure civile, les ordonnances du conseiller de la mise en état peuvent être déférées à la cour dans les quinze jours de leur date lorsqu’elles statuent sur une exception de procédure, un incident qui met fin à l’instance, sur une fin de non-recevoir ou sur la caducité de l’appel.
En l’espèce, le conseiller de la mise en état a été saisi par la Selarl [O] d’une demande d’irrecevabilité de l’appel de l’ordonnance du juge commissaire du 25 avril 2022 qui a relevé de forclusion la SCCV [Adresse 8].
L’irrecevabilité de l’appel est une fin de non recevoir. Dès lors, la requête du 30 décembre 2022 de la SCCV [Adresse 8] du 30 décembre 2022 qui défère à la cour l’ordonnance du conseiller de la mise en état du 15 décembre 2022 qui a statué sur une fin de non recevoir, est recevable.
La requête en déféré est un acte de procédure qui s’inscrit dans le déroulement de la procédure devant le conseiller de la mise en état et ne peut être assimilée à un recours à un deuxième degré de juridiction au sens de 543 du code de procédure civile. Il s’ensuit que, saisie sur déféré, la cour d’appel ne peut statuer que sur les questions qui ont été soumises à ce magistrat et ne peut connaître de prétentions ou d’incidents qui ne lui ont pas été soumis.
Par ailleurs, en application de l’article 914 du code de procédure civile, celui qui soulève devant le conseiller de la mise en état l’irrecevabilité de l’appel doit alors présenter l’ensemble des moyens de nature à fonder celle-ci.
En l’espèce, devant le conseiller de la mise en état, la SCCV [Adresse 8] fondait sa demande d’irrecevabilité de l’appel sur l’absence au débat de la SAS EM22 et de M. [L] dans un litige indivisible, non régularisé par les assignations «’d’appel provoqué’» du 16 juin 2022.
En cause d’appel, elle maintient ce moyen mais ajoute celui tiré de l’article R 621-21 du code de commerce aux termes duquel le recours contre l’ordonnance du juge-commissaire statuant sur une requête en relevé de forclusion, qui n’est soumis à aucun régime dérogatoire, est exercé devant le tribunal ayant ouvert la procédure collective, le jugement rendu sur ce recours étant seul susceptible d’appel. De sorte que la cour d’appel n’a pas le pouvoir de statuer en la matière. La SCCV [Adresse 8] soutient qu’il s’agit d’une fin de non recevoir d’ordre public.
Toutefois, s’agissant d’un moyen nouveau à l’appui de la demande d’irrecevabilité de l’appel pour absence d’ouverture du droit d’appel, la cour saisie sur déféré ne peut en connaître.
Demeure donc le premier moyen d’irrecevabilité soulevé devant le conseiller de la mise en état et contesté devant la cour.
Il est constant que les litiges relatifs à la procédure collective sont indivisibles.
Or, il résulte des articles 552 et 553 du code de procédure civile qu’en cas d’indivisibilité à l’égard de plusieurs parties, l’appel dirigé contre l’une des parties réserve à l’appelant la faculté d’appeler les autres à l’instance mais l’appel formé contre l’une n’est recevable que si toutes sont appelées à l’instance. Par conséquent, l’appel étant en application de l’article 901 formé en procédure ordinaire par déclaration d’appel, les parties que l’appelant a omis d’intimer sont appelées à l’instance par voie de déclaration d’appel.
Dans ces conditions, l’appel principal est irrecevable pour avoir omis des parties dans une instance indivisible qui n’a pas été régularisé par la délivrance «’d’assignation d’appel provoqué’». D’autant que l’appel provoqué qui permet d’élargir la dévolution notamment quant aux parties intimées en application de l’article 549, ne peut émaner de l’appelant principal que lorsqu’il est provoqué par l’appel incident de l’intimé ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
En conséquence la décision sera infirmée.
PAR CES MOTIFS
La cour
– Déclare recevable la requête en déféré.
– Infirme l’ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 15 décembre 2022.
Statuant à nouveau :
– Déclare irrecevable l’appel de la Selarl [O] es-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS EM22 formé suivant déclaration du 25 avril 2022.
– Vu l’article 700 du code de procédure civile, déboute la SCCV [Adresse 8] de sa demande.
– Condamne la Selarl [O] es-qualités aux dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. BUTEL C. BENEIX-BACHER