Déclaration de créances : 20 juin 2023 Cour d’appel de Riom RG n° 22/01374

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Déclaration de créances : 20 juin 2023 Cour d’appel de Riom RG n° 22/01374
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20 juin 2023
Cour d’appel de Riom
RG n°
22/01374

COUR D’APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Du 20 juin 2023

N° RG 22/01374 – N° Portalis DBVU-V-B7G-F24J

-LB- Arrêt n°

[H] [V], [T] [S] / S.A.R.L. NCB, S.A.R.L. IDEELEC, S.A.R.L. GAUTHIER, S.A.S. MAGNE ROBERT, S.A.S. SADOURNY & FILS, S.A.R.L. LA MAISON DU CHAUFFAGE AU BOIS, S.A.R.L. AXIOME ARCHITECTURE, S.A.M.C.V. MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS

Ordonnance au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 07 Juin 2022, enregistrée sous le n° 20/01935

Arrêt rendu le MARDI VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller

En présence de :

Mme Céline DHOME, greffier lors de l’appel des causes et du prononcé

ENTRE :

M. [H] [V]

et Mme [T] [S]

[Adresse 14]

[Localité 9]

Représentés par Maître Charles FRIBOURG de la SELARL POLE AVOCATS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Timbre fiscal acquitté

APPELANTS

ET :

S.A.R.L. NCB

[Adresse 1]

[Localité 11]

et

S.A.R.L. IDEELEC

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentées par Maître Camille GARNIER, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND

Timbre fiscal acquitté

S.A.R.L. GAUTHIER

[Adresse 19]

[Adresse 19]

[Localité 7]

Représentée par Maître Marius LOIACONO de la SCP LOIACONO-MOREL, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Timbre fiscal acquitté

S.A.S. MAGNE ROBERT

[Adresse 18]

[Localité 8]

et

S.A.S. SADOURNY & FILS

[Adresse 2]

[Localité 10]

Représentées par Maître Hervé MILITON, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND

Timbre fiscal acquitté

S.A.R.L. LA MAISON DU CHAUFFAGE AU BOIS

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Maître Francis ROBIN de la SCP HERMAN ROBIN & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Timbre fiscal acquitté

S.A.R.L. AXIOME ARCHITECTURE

[Adresse 12]

[Localité 9]

et

S.A.M.C.V. MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS

[Adresse 3]

[Localité 13]

Représentées par Maître Olivier TOURNAIRE de la SELARL TOURNAIRE – MEUNIER, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Timbre fiscal acquitté

INTIMEES

DÉBATS : A l’audience publique du 27 février 2023

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 20 juin 2023, après prorogé du délibéré initiallement prévu le 2 mai 2023 mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. VALLEIX, président et par Mme DHOME, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES :

M. [H] [V] et Mme [T] [S], propriétaires d’une parcelle de terrain située [Adresse 17] à [Localité 15] (63) ont entrepris courant 2015 la construction d’une maison d’habitation.

Ils ont conclu le 10 juin 2015 un contrat de maîtrise d”uvre avec la société Axiome Architecture, qui a établi les différents marchés de travaux avec les locateurs d’ouvrage. Le permis de construire a été délivré par arrêté du 20 juillet 2015.

Les travaux ont été achevés courant septembre 2016 et ont fait l’objet d’une réception tacite par la prise de possession des lieux en août 2016 alors que les situations de travaux établies par l’ensemble des locateurs d’ouvrage ont été réglées en septembre 2016.

Considérant que la construction était affectée de malfaçons et de non-conformités concernant notamment le non-respect des obligations de la réglementation thermique 2012 (RT 2012), les règles d’urbanisme relatives à l’implantation de la maison et l’absence de ventilation du vide sanitaire, M. [V] et Mme [S] ont obtenu, par ordonnance de référé du 30 mai 2017 rendue au contradictoire de la société Axiome Architecture et de son assureur, la Mutuelle des Architectes Français (MAF), l’organisation d’une mesure d’expertise qui a été confiée à M.[F].

Par ordonnance de référé du 5 décembre 2017, les opérations d’expertise ont été étendues aux sociétés NCB, Sadourny et Fils, Gauthier, Magne Robert, Ideelec, Basset et Associés.

Par ordonnance de référé en date du 23 octobre 2018, les opérations d’expertise ont été déclarées communes et opposables à la société Maisons du Chauffage au bois et ont été étendues à de nouveaux désordres constatés dans le pré-rapport d’expertise établi par M. [F].

L’expert judiciaire a déposé son rapport définitif le 19 avril 2019.

Par jugement du 13 février 2020, le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société NCB et désigné la SELARL Mandatum, représentée par maître [Y] [O], ès qualités de mandataire judiciaire.

Par actes d’huissier délivrés les 2, 3 et 4 juin 2020, M. [V] et Mme [S] ont fait assigner le maître d”uvre et les différents locateurs d’ouvrage devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand pour obtenir leur condamnation in solidum au paiement des sommes de 9300 euros à titre de provision à valoir sur le coût des travaux de reprise et le préjudice de jouissance pendant la seule durée des travaux, 5000 euros à titre de provision à valoir sur les préjudices de désagrément subis depuis la fin des travaux, 2000 euros à titre de provision à valoir sur leur préjudice économique résultant du financement de la procédure et 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre la condamnation de certaines entreprises à procéder aux travaux de reprise préconisés par l’expert judiciaire. M. [V] et Mme [S] ont également sollicité l’organisation d’une mesure de consultation destinée à décrire les travaux nécessaires afin de remédier au non-respect de la norme RT 2012, en évaluer le coût et la durée et à obtenir un avis sur leur trouble de jouissance et les préjudices annexes matériels ou immatériels.

Par jugement du 8 juillet 2021, le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a arrêté à l’égard de la société NCB un plan de redressement sur dix ans organisant la continuation de l’entreprise et l’apurement du passif.

Par acte authentique en date du 26 mars 2021, reçu par maître [K] [X], notaire à [Localité 16], M. [V] et Mme [S] ont vendu leur maison à Mme [D] [E].

Par conclusions d’incident, la SARL Axiome Architecture a saisi le juge de la mise en état d’une fin de non-recevoir dirigée à l’encontre de M. [V] et Mme [S] au motif que ceux-ci n’étaient plus propriétaires de la maison d’habitation depuis le 31 mars 2021.

Par ordonnance du 7 juin 2022, le juge de la mise en état a statué en ces termes :

-Déclarons irrecevables pour défaut de qualité et intérêt à agir M. [H] [V] et Mme [T] [S] et en conséquence les déboutons de toutes leurs demandes ;

-Constatons l’incompétence du juge de la mise en état pour l’examen des demandes reconventionnelles en paiement ;

-Condamnons solidairement M. [H] [V] et Mme [T] [S] à payer les sommes de :

-500 euros à la SARL Axiome Architecture et la MAF ;

-500 euros à la société Gauthier ;

-500 euros à la SAS Magne Robert,

En application de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamnons in solidum M. [H] [V] et Mme [T] [S] aux entiers dépens.

M. [H] [V] et Mme [T] [S] ont relevé appel de cette décision à l’égard de toutes les parties citées en première instance, par déclaration électronique du 4 juillet 2022.

Par ordonnance du 15 décembre 2022, le président de la première chambre civile de la cour d’appel a déclaré irrecevables les demandes formées par la SARL Axiome Architecture, la MAF, la SARL Gauthier et la SAS Magne Robert aux fins de radiation de l’affaire pour défaut d’exécution de la décision de première instance assortie de l’exécution provisoire.

Par conclusions du 17 février 2023, M. [H] [V] et Mme [T] [S] demandent à la cour de :

-Infirmer l’ordonnance déférée ;

Statuant à nouveau,

-Juger qu’ils justifient de l’existence d’un intérêt et d’une qualité à agir dans le cadre de la présente procédure à l’encontre de l’ensemble des défendeurs ;

-Juger que leur demande au titre d’un préjudice de perte de chance demeure recevable en ce que le droit d’agir sur ce fondement juridique n’est pas transmis à l’acquéreur en tant qu’accessoire du bien immobilier ;

-Juger par conséquent recevables l’ensemble de leurs demandes ;

-Débouter les parties intimées de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à leur encontre ;

-Juger irrecevable la demande en paiement présentée par la société Gauthier à leur encontre ;

-Juger irrecevables les conclusions régularisées par la société NCB pour défaut de qualité à agir au vu de l’absence d’intervention de la SELARL Mandatum désignée en qualité de mandataire judiciaire suivant jugement rendu le 13 février 2020 par le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand ;

-Statuer ce que de droit sur leurs demandes à l’encontre de la société NCB au regard des dispositions de l’article L. 621-40 du code du commerce ;

-Condamner tout succombant à leur payer la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles supportés en première instance et au visa de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance ;

-Renvoyer l’affaire devant le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand ;

En tout état de cause,

-Condamner tout succombant à leur payer la somme de 3000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance d’appel.

Vu les conclusions en date du 18 février 2022 aux termes desquelles la SARL La Maison du chauffage au bois demande à la cour de :

-Confirmer l’ordonnance rendue le 7 juin 2022 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand ;

Y ajoutant,

-Condamner in solidum M. [V] et Mme [S] à lui payer la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner les consorts [V]-[S] aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Herman -Robin et Associés en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Vu les conclusions en date du 28 juillet 2022 aux termes desquelles la SARL Gauthier demande à la cour de :

-Confirmer purement et simplement l’ordonnance querellée en ce qu’elle a déclaré irrecevables les consorts [V]-[S] et les a condamnés sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Juger que M. [H] [V] et Mme [T] [S] sont irrecevables en leur action, n’ayant plus qualité à agir ;

-Jugé fondé et recevable son appel incident concernant le rejet de sa demande de paiement de son solde de marché ;

En conséquence, réformer l’ordonnance entreprise et statuant à nouveau,

-Condamner M. [H] [V] et Mme [T] [S] à lui payer la somme de 664 euros, correspondant au solde du marché impayé ;

-Confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a condamné les consorts [V]-[S] à lui payer la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Y ajoutant en cause d’appel,

-Condamner M. [H] [V] et Mme [T] [S] à lui payer la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner M. [H] [V] et Mme [T] [S] aux entiers dépens, comprenant les dépens de la procédure de référé, les frais d’expertise, les dépens de la procédure devant le premier juge et les dépens en cause d’appel, dont distraction au profit de la SCP Loïcono-Morel.

Vu les conclusions en date du 24 février 2023 aux termes desquelles la société NCB demande à la cour de :

-Soulever d’office la fin de non-recevoir tirée de l’arrêt des poursuites individuelles pour défaut de déclaration de créance et de mise en cause du mandataire ;

-Déclarer irrecevables M. [V] et Mme [S] à son encontre ;

À titre subsidiaire,

-Confirmer l’ordonnance du 7 juin 2022 en ce qu’elle a déclaré les consorts [V]-[S] irrecevables pour défaut de qualité et intérêt à agir ;

En tout état de cause,

-Condamner M. [V] et Mme [S] in solidum à lui payer la somme de 1500 euros au titre de la procédure abusive ;

-Débouter M. [V] et Mme [S] de leurs demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;

-Condamner M. [V] et Mme [S] in solidum à lui payer la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens d’appel.

Vu les conclusions en date du 24 février 2023 aux termes desquelles la société Ideelec demande à la cour de :

-Confirmer l’ordonnance du 7 juin 2022 en ce qu’elle a déclaré les consorts [V]-[S] irrecevables pour défaut de qualité et intérêt à agir ;

À titre plus subsidiaire,

-Recevoir la fin de non-recevoir tirée de la forclusion ;

-Déclarer irrecevables comme prescrites les demandes des consorts [V]-[S] ;

En tout état de cause,

-Condamner M. [V] et Mme [S] in solidum à lui payer la somme de 1500 euros au titre de la procédure abusive ;

-Débouter M. [V] et Mme [S] de leurs demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;

-Condamner M. [V] et Mme [S] in solidum à lui payer la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens d’appel.

Vu les conclusions en date du 22 février 2023 aux termes desquelles la SARL Axiome Architecture et la MAF demandent à la cour de :

-Confirmer l’ordonnance rendue le 7 juin 2022 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand ;

-Juger que la demande d’interprétation de la clause de l’acte notarié est une demande nouvelle irrecevable en cause d’appel ;

-Condamner in solidum Mme [T] [S] et M. [H] [V] à lui payer la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner les mêmes aux entiers dépens dont distraction profit de la SELARL Tournaire- Meunier sur son affirmation de droit.

Vu les conclusions en date du 12 août 2022 aux termes desquelles la SAS Sadourny et Fils demande à la cour de :

-Confirmer purement et simplement l’ordonnance dont appel en date du 7 juin 2022 ;

Y ajoutant,

-Condamner M. [H] [V] et Mme [T] [S] à lui payer la somme de 1200 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner les mêmes aux entiers dépens de l’instance d’appel et de première instance.

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées pour l’exposé complet des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Il sera rappelé en premier lieu qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et qu’elle n’a pas à se prononcer sur les demandes de « constater que… » ou de « dire et juger que…» lorsque celles-ci ne correspondent pas à des prétentions au sens des articles 4, 31 et 954 du code de procédure civile, mais en réalité à des moyens ou arguments invoqués au soutien des véritables prétentions.

-Sur la portée de l’appel :

Il n’est pas relevé appel du chef de l’ordonnance ayant débouté la SARL Axiome Architecture et la MAF de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

-Sur l’irrecevabilité des conclusions régularisées par la SARL NCB :

M. [V] et Mme [S] soulèvent l’irrecevabilité des conclusions régularisées par la société NCB considérant que compte tenu de son placement en redressement judiciaire par jugement du 13 février 2020 , elle n’avait pas qualité à conclure alors que le mandataire judiciaire n’était pas dans la cause.

Il ressort toutefois du jugement du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand du 13 février 2020 que l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société NCB n’a pas donné lieu à la désignation d’un administrateur judiciaire de sorte que cette décision n’a pas emporté assistance ou dessaisissement de la société, qui pouvait ainsi valablement conclure dans le cadre de la présente instance.

-Sur l’irrecevabilité des demandes présentées par M. [V] et Mme [S] à l’encontre de la SARL NCB :

Par jugement du 13 février 2020, le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la SARL NCB et désigné la SELARL Mandatum, représentée par maître [Y] [O], ès qualités de mandataire judiciaire.

Par jugement du 8 juillet 2021, le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a arrêté un plan de redressement sur dix ans organisant la continuation de l’entreprise et l’apurement du passif.

Selon les dispositions de L. 622-21 du code de commerce, le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L. 622-17 et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent.

Il est constant que lorsqu’aucune instance en paiement d’une somme d’argent n’est en cours au jour de l’ouverture de la procédure collective du débiteur, le créancier ne peut faire constater le principe de sa créance et en faire fixer le montant autrement qu’en la déclarant et en se soumettant à la procédure normale de vérification du passif. Cette interdiction constitue une fin de non-recevoir d’ordre public qui peut être proposée en tout état de cause.

En l’espèce, la société NCB soulève à juste titre l’irrecevabilité des demandes présentées par M. [V] et Mme [S] à son encontre alors que l’assignation au fond a été signifiée par acte d’huissier délivré le 3 juin 2020, soit postérieurement au jugement ayant prononcé l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire à son égard.

Les demandes présentées par M. [V] et Mme [S] à l’encontre de la société NCB seront en conséquence déclarées irrecevables.

– Sur la recevabilité de l’action engagée par M. [V] et Mme [S] :

Il est constant qu’en cas de vente de l’immeuble, les actions en garantie décennale et en responsabilité contractuelle contre les constructeurs, actions attachées à la chose vendue en tant qu’accessoires de l’immeuble, sont transférées à l’acquéreur.

Les parties peuvent toutefois déroger au principe de la transmission des actions au profit de l’acheteur et prévoir que le vendeur conservera le bénéfice des actions concernant les vices survenus antérieurement à la vente. Par ailleurs, il est admis que si les actions attachées à l’immeuble vendu sont transmises aux acquéreurs avec la propriété de l’immeuble, le maître d’ouvrage ne perd pas la faculté de les exercer dès lors qu’il justifie d’un préjudice personnel lui conférant un intérêt direct et certain à agir après la vente .

En l’occurrence, M. [V] et Mme [S], qui ont engagé une action à l’encontre des constructeurs de la maison par assignations délivrées les 2,3 et 4 juin 2020, après avoir obtenu en référé l’organisation d’une mesure d’expertise qui a donné lieu au dépôt d’un rapport définitif le 19 avril 2019, ont vendu leur bien par acte authentique en date du 26 mars 2021.

Les parties intimées soutiennent que M.[V] et Mme [S] sont dans ces conditions irrecevables à agir, ce qu’a retenu le premier juge.

L’acte de vente prévoyait la clause suivante :

« L’acquéreur reconnaît être parfaitement informé par le vendeur de la procédure en cours, du non-respect de la réglementation thermique 2012 ainsi que de tous les autres désordres en découlant.

L’acquéreur déclare que le prix de vente a été fixé compte tenu des faits énoncés et relatés ci-dessus.

L’acquéreur s’engage à ne pas réaliser de modification sur le bien immobilier tant que la procédure en cours n’est pas clôturée.

Si à l’issue de la procédure, le juge ordonne la réalisation de travaux sur le bien immobilier, l’acquéreur déclare que les artisans pourront intervenir pour réparer les désordres.

Le vendeur déclare vouloir se réserver le droit d’agir et de poursuivre l’architecte sur son obligation de résultat afin d’obtenir des dommages et intérêts. »

M. [V] et Mme [S] soutiennent qu’en vertu de cette clause, ils se sont réservés le droit d’agir à l’encontre des constructeurs, ce à quoi les parties intimées opposent le fait que la clause vise uniquement l’architecte et non les intervenants à l’acte de construction.

Il convient d’observer que la clause litigieuse s’inscrit dans l’acte de vente après plusieurs pages consacrées en premier lieu au détail des travaux réalisés et à la désignation des entreprises intervenues puis au rappel intégral des termes de l’assignation et des défendeurs à l’action, soit la société Axiome Architecture et tous les intervenants à l’acte de construire, toutes les demandes formulées à l’encontre de ces derniers étant également énoncées.

Il est surprenant dans ce contexte que l’acquéreur ait entendu limiter, à son égard, les effets de l’action déjà engagée à la seule société d’architectes et il apparaît ainsi qu’il existe au moins sur ce point une ambiguïté dans l’articulation des dispositions contractuelles, nécessitant leur interprétation dans les conditions prévues par l’article 1188 du code civil.

La société Axiome Architecture et la MAF estiment que l’invocation par les appelants des dispositions de l’article 1188 du code civil constitue une demande nouvelle, irrecevable en cause d’appel en application de l’article 564 du code de procédure civile. Cet argument est cependant inopérant alors que les règles énoncées par l’article 1188 du code civil ne relèvent pas d’une demande présentée au juge mais confèrent à ce dernier un pouvoir qui participe de son office .

Un premier indice de la commune intention des parties réside dans le fait qu’il est précisé dans l’acte que l’acquéreur « déclare que le prix de vente a été fixé compte tenu des faits énoncés relatés ci-dessus », les faits étant ainsi visés sans distinction quant au rôle des parties intervenantes à l’acte de construire ni aux désordres concernés par le litige, rappelés en détail sur la base du rapport d’expertise dont les constatations et conclusions sont également reproduites dans l’acte.

Par ailleurs, M. [V] et Mme [S] produisent devant la cour une attestation circonstanciée de l’acquéreur, Mme [D] [E], qui confirme en ces termes l’absence de transfert à son profit des actions engagées contre les constructeurs :

« J’ai fait l’acquisition le 26 mars 2021 d’un bien immobilier appartenant à M. [H] [V] et Mme [T] [S]. Lors de la signature de l’acte authentique, ces derniers m’ont informée d’une part des désordres affectant l’ouvrage et d’autre part de leur intention d’engager une action judiciaire à l’encontre des constructeurs et de l’architecte à ce titre. Ayant en ce qui me concerne renoncé à engager la responsabilité décennale ou contractuelle de ces derniers, j’ai donc laissé à M. [V] et Mme [S] le bénéfice de l’ensemble des droits relatifs à cette action judiciaire ainsi que des indemnités et dommages et intérêts qui en résulteraient dans la mesure où le prix de vente a été minoré pour tenir compte de l’existence des désordres ».

Il apparaît ainsi que, nonobstant les termes de la clause insérée dans l’acte notarié, les parties ont bien entendu déroger au principe de la transmission des actions au profit de l’acheteur en prévoyant que le vendeur conserverait le bénéfice des actions concernant les vices survenus antérieurement à la vente.

En outre, ainsi que le font valoir M. [V] et Mme [S], ces derniers justifient d’un intérêt à poursuivre eux-mêmes l’action engagée alors qu’il résulte clairement de l’acte que le prix de vente a été minoré en considération des désordres et non-conformités affectant l’immeuble, de sorte qu’ils sont fondés à se prévaloir d’un préjudice propre, peu important qu’ils aient réalisé une plus-value lors de la vente au regard du montant des travaux de construction engagés, ce qui au demeurant n’est pas démontré, dès lors qu’il est établi qu’ils subissent une moins-value sur le prix de vente par rapport à celui qu’ils auraient pu obtenir en l’absence des désordres et non-conformités considérés.

L’ordonnance doit en conséquence être infirmée en ce qu’elle a déclaré M. [V] et Mme [S] irrecevables en leur action pour défaut de qualité et d’intérêt à agir.

-Sur la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l’action dirigée à l’encontre de la société Ideelec :

La société Ideelec soulève devant la cour, à titre subsidiaire en cas de rejet de la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et d’intérêt de M. [V] et Mme [S] à agir, une fin de non-recevoir fondée sur la forclusion de l’action dirigée à son encontre.

Faisant valoir que la réception pour ce qui concerne ses travaux est intervenue le 20 juillet 2016 par le règlement total de sa facture, elle soutient que dans la mesure où la garantie de parfait achèvement expirait le 20 juillet 2017 et où M. [V] et Mme [S] n’ont pas agi à son encontre dans le délai d’un an à compter de la réception, leur action se trouve forclose.

Il est constant cependant que la garantie de parfait achèvement due par l’entrepreneur n’exclut pas l’application de la responsabilité contractuelle pour faute prouvée ce que d’ailleurs ne conteste pas la société Ideelec. Celle-ci invoque au soutien de son moyen d’irrecevabilité des éléments de fonds quant à l’absence de démonstration d’une faute de sa part d’une part étrangers à la question de la recevabilité de la demande formulée à son encontre, d’autre part échappant à la compétence du juge de la mise en état.

La fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l’action sera rejetée.

-Sur la demande reconventionnelle en paiement présentée par la société Gauthier :

C’est à juste titre que le premier juge a rejeté la demande de la société Gauthier tendant à la condamnation de M. [V] et Mme [S] au paiement de la somme de 664 euros au titre du solde du marché en retenant qu’en application de l’article 789 du code de procédure civile, le juge de la mise en état n’était pas compétent pour statuer sur une demande en paiement.

L’ordonnance sera confirmée sur ce point, et il n’y a pas lieu en conséquence à statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription opposée par M. [V] et Mme [S] à la demande en paiement, qui devient sans objet.

-Sur la demande indemnitaire présentée par la société NCB pour procédure abusive à l’encontre de M. [V] et Mme [S] :

L’exercice d’une action en justice constitue, en principe, un droit, et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à réparation qu’en cas de faute qui n’est pas caractérisée en l’espèce alors qu’il n’est pas établi que M. [V] et Mme [S] aient été informés de l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société NCB avant la procédure devant la cour, ni même avant l’introduction de la demande au fond, étant rappelé que la société NCB n’a pas constitué avocat en première instance.

La demande de dommages et intérêts sera en conséquence rejetée.

-Sur la demande indemnitaire présentée par la société Ideelec pour procédure abusive à l’encontre de M. [V] et Mme [S] :

Les demandes de M. [V] et Mme [S] étant accueillies s’agissant de la recevabilité de leur action, la demande de dommages et intérêts présentée par la société Ideelec pour procédure abusive sera rejetée.

– Sur les dépens et les frais irrépétibles :

L’ordonnance sera réformée sur la charge des dépens et l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La SARL Axiome Architecture et la MAF, à l’origine de l’incident devant le juge de la mise en état, supporteront les dépens de première instance et d’appel et seront condamnées à payer à M. [H] [V] et Mme [T] [S], pris ensemble, la somme de 3000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés tant en première qu’en cause d’appel.

Il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en faveur des autres parties.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, dans les limites de l’appel,

Confirme l’ordonnance en ce que le juge de la mise en état s’est déclaré incompétent pour statuer sur la demande reconventionnelle en paiement présentée par la SARL Gauthier ;

Infirme l’ordonnance pour le surplus et, statuant à nouveau,

-Rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et d’intérêt à agir dirigée contre M. [H] [V] et Mme [T] [S] ;

-Condamne la SARL Axiome Architecture aux dépens de première instance ;

-Rejette les demandes formées par la SARL Axiome Architecture et la MAF, la SARL Gauthier, la SAS Magne Robert sur le fondement l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance ;

Ajoutant à l’ordonnance,

-Déclare recevables les conclusions présentées par la SARL CNB devant la cour d’appel ;

-Déclare irrecevables les demandes présentées devant le tribunal judiciaire par M. [H] [V] et Mme [T] [S] à l’encontre de la SARL CNB ;

– Rejette la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l’action présentée par la SARL Ideelec ;

– Déclare sans objet la fin de non-recevoir soulevée par M. [V] et Mme [S] à l’égard de la société Gauthier ;

– Déboute la SARL NCB de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

-Déboute la SARL Ideelec de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

-Condamne la SARL Axiome Architecture et la Mutuelle des Architectes Français aux dépens de première instance et d’appel et dit que cette condamnation sera assortie du droit pour la SCP Herman -Robin et Associés et la SCP Loïcono-Morel de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elles ont fait l’avance sans avoir reçu provision ;

-Condamne la SARL Axiome Architecture et la Mutuelle des Architectes Français à payer à M. [H] [V] et Mme [T] [S] la somme de 3000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés pour les besoins de la procédure devant la cour d’appel.

Le greffier Le président

 


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