Déclaration de créances : 20 juin 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/02128

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Déclaration de créances : 20 juin 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/02128
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20 juin 2023
Cour d’appel de Pau
RG n°
21/02128

CF/CD

Numéro 23/02113

COUR D’APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 20/06/2023

Dossier : N° RG 21/02128 – N° Portalis DBVV-V-B7F-H5CF

Nature affaire :

Recours et actions exercés contre les décisions d’autres personnes publiques

Affaire :

[F] [J]

C/

[O] [D],

Société MMA IARD,

SA MMA IARD,

AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 20 Juin 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 25 Avril 2023, devant :

Madame FAURE, Présidente, magistrate chargée du rapport conformément à l’article 785 du code de procédure civile

Madame ROSA-SCHALL, Conseillère

Monsieur SERNY, Magistrat honoraire

assistés de Madame HAUGUEL, Greffière, présente à l’appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

Le dossier a été communiqué au Ministère Public le 17 décembre 2021

dans l’affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [F] [J]

né le 31 août 1951 à [Localité 9]

de nationalité Néerlandaise

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté et assisté de Maître DABADIE (AARPI AXAVOAT), avocat au barreau de PAU

INTIMES :

Maître [O] [D]

mandataire judiciaire

[Adresse 4]

[Localité 3]

Société MMA IARD Assurances Mutuelles, société d’assurances mutuelles à cotisations fixes, prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 6]

SA MMA IARD

prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentées par Maître MARIOL de la SCP LONGIN/MARIOL, avocat au barreau de PAU

Assistées de Maître LE CORFF, membre de l’Association FABRE GUEUGNOT ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représenté et assisté de Maître GARMENDIA de la SCP GARMENDIA MOUTON (AARPI KALIS), avocat au barreau de BAYONNE

sur appel de la décision

en date du 27 AVRIL 2021

rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PAU

RG numéro : 18/01183

EXPOSE DU LITIGE

Par acte notarié en date du 4 novembre 1981, Monsieur [F] [J], a acquis un ensemble immobilier, dénommé Château du Haget pour une somme de 1 050 000 Francs financé partiellement par un prêt relais souscrit auprès de la BNP à hauteur de 900 000 Francs, assorti d’un taux d’intérêt de 1,429 % par mois.

Par acte extrajudiciaire en date du 29 juin 1988, Monsieur [J] a été assigné en redressement judiciaire devant le tribunal de commerce d’Auch par l’URSSAF du Gers en excipant une créance de 76 156,49 Francs.

Le 22 juillet 1988, le tribunal de commerce d’Auch a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de Monsieur [J], absent à l’audience.

Le 24 février 1989, le tribunal de commerce d’Auch a converti la procédure en liquidation judiciaire.

Par arrêt en date du 26 avril 1990, se fondant sur une évolution du litige par la mise en vente de l’exploitation pour un montant de 5.130.000 francs, la Cour d’appel d’Agen a réformé le jugement du tribunal de commerce et a ouvert une nouvelle période d’observation de trois mois.

Par jugement réputé contradictoire du 14 septembre 1990, le tribunal de commerce d’Auch a prononcé la liquidation judiciaire de Monsieur [J], lequel a relevé appel de la décision mais la cour d’appel d’Agen a ordonné la radiation de l’appel le 15 mai 1991.

Par ordonnance du 28 octobre 1994, le juge-commissaire a rendu une ordonnance fixant les modalités de la vente aux enchères du bien immobilier et du fonds de commerce d’exploitation du camping sur des mises à prix de 800 000 francs et 50 000 francs avec faculté de réunion des deux lots.

Par jugement du 20 janvier 1995, sur opposition de Monsieur [J], le tribunal a confirmé cette ordonnance.

Par jugement en date du 26 avril 1995, le juge des criées a constaté la vente du bien immobilier pour la somme de 810 000 Frs et du fonds de commerce pour 51 000 Frs, puis à la demande de l’avocat de Maître [N], a procédé à la mise en vente des deux lots réunis lesquels ont été remis en vente pour une adjudication à hauteur de 1 860 000 Frs pour deux sociétés en formation la SARL et la SCI Le Haget.

Le 9 mai 1995, une déclaration de surenchère a été régularisée par Monsieur [U] [H] agissant en qualité de gérant de la SCI CIEL BLEU, société déjà immatriculée.

Cette surenchère a été contestée par les sociétés du HAGET, mais validée par le juge des criées par une décision du 7 juin 1995.

Enfin, par jugement en date du 5 juillet 1995, la SCI CIEL BLEU a été déclarée adjudicataire pour la somme de 2 200 000 Frs de l’ensemble des biens mobiliers et immobiliers.

Préalablement à cette procédure, sur un dire de Monsieur [J] à l’encontre du mandataire liquidateur Me [N], la procédure de saisie immobilière avait fait l’objet d’une décision de déchéance de la procédure de saisie immobilière.

Une créance de la BNP a été admise pour une somme de 2 762 137,13 Frs par une ordonnance du 19 janvier 1996 et à la suite de laquelle le conseiller de la mise en état de la cour d’appel d’Agen a déclaré irrecevable l’appel de Monsieur [J] par ordonnance en date du 26 octobre 1999 de Madame le conseiller de la mise en etat près la cour d’appel d’Agen.

Le 14 septembre 2007, la liquidation judiciaire de Monsieur [J] a été clôturée pour insuffisance d’actif.

Par arrêt du 18 mai 2011, la cour d’appel de Pau, saisie d’un appel contre une ordonnance de référé du tribunal de grande instance de Tarbes du 5 janvier 2010, a ordonné à Maître [D], ès qualités, désigné en remplacement de Maître [N], la production de la déclaration de créance de la BNP.

Par jugement du juge de l’exécution du 13 mai 2013, le juge de l’exécution a rejeté la demande de liquidation d’astreinte ordonnée par le juge de l’exécution le 17 février 2012 pour la production de pièces ordonnées par l’arrêt précité du 18 mai 2011, confirmée par arrêt de la cour d’appel de Pau du 19 septembre 2014.

Par arrêt du 13 janvier 2022, la cour d’appel de Pau a rejeté la demande en rectification d’erreur matérielle de l’arrêt de la cour d’appel de Pau du 18 mai 2011.

Par acte d’huissier des 29 mai et 4 juin 2018, Monsieur [J] a assigné Me [O] [D], la société MMA IARD Assurances Mutuelles, la SA MMA IARD et l’Agent judiciaire de l’Etat devant le tribunal judiciaire de Pau pour voir rechercher leur responsabilité.

Le tribunal judiciaire de Pau, par jugement contradictoire du 27 avril 2021, a :

‘ déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de M. [F] [J] à l’encontre de Me [D], de la société MMA IARD Assurances Mutuelles, de la SA MMA IARD, ainsi qu’à l’encontre de l’Agent judiciaire de l’État,

‘ débouté Me [D], la société MMA IARD Assurances Mutuelles et la SA MMA IARD de leurs demandes de dommages-intérêts,

‘ débouté les parties de toute autre demande,

‘ condamné Monsieur [J] à payer à Me [D], la société MMA IARD Assurances Mutuelles, la SA MMA IARD, et l’Agent judiciaire de l’État chacun la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ condamné Monsieur [J] aux dépens, dont distraction au profit de Me [T] [X] pour ce qui concerne les dépens de Me [D] et des sociétés MMA,

‘ ordonné l’exécution provisoire.

Le tribunal judiciaire a considéré que Monsieur [J] disposait par conséquent d’un délai de dix ans à compter du 14 septembre 2007, date de la clôture pour insuffisance d’actif pour intenter son action en responsabilité ; son action ayant expiré le 14 septembre 2017, et Me [D] ayant été assignée le 4 juin 2018, il a déclaré irrecevables les demandes.

À l’égard de l’agent judiciaire de l’Etat, en application des dispositions de l’article 1er de la loi du 31 décembre 1968 et de l’article 122 du code de procédure civile, le tribunal a considéré que Monsieur [J] disposait d’un délai de quatre ans à compter du 1er janvier 2008 pour intenter son action en responsabilité contre l’Etat.

Par déclaration du 24 juin 2021, Monsieur [F] [J] a interjeté appel de ce jugement pour le voir annuler ou réformer en ce qu’il a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de M. [F] [J] à l’encontre de Me [D], de la société MMA IARD Assurances Mutuelles, de la SA MMA IARD, ainsi qu’à l’encontre de l’Agent judiciaire de l’État et l’a condamné au paiement à chacun de la somme de 1 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Les conclusions de Monsieur [F] [J] du 3 janvier 2023 tendent à :

In limine litis, annuler la décision entreprise,

Réformer la décision entreprise en ce qu’elle a déclaré prescrite l’action de Monsieur [J],

Déclarer irrecevable et mal fondés les défendeurs en leur moyen de prescription,

Les débouter de leurs demandes et moyens divers,

Retenir la responsabilité de l’Etat dans la procédure de Monsieur [J],

Retenir la responsabilité de Maître [N] et de Maître [D] et plus généralement des mandataires liquidateurs au titre de la responsabilité personnelle de l’organe de la procédure,

A tout le moins, déclarer recevable l’action directe contre les assureurs de Maître [N] et de Maître [D],

Constater l’existence d’un délai anormal dans la procédure collective et ses suites intéressant Monsieur [J],

Condamner Monsieur l’Agent judiciaire de l’Etat à indemniser l’entier préjudice de Monsieur [J],

Condamner solidairement Maître [O] [D] et les MMA, assureurs de Maîtres [N] et [D], à indemniser l’entier préjudice de Monsieur [J],

A tout le moins, condamner in solidum, Monsieur l’Agent judiciaire de l’Etat, Maître [O] [D] et les MMA, assureurs de Maîtres [N] et [D], à indemniser l’entier préjudice de Monsieur [J],

Condamner Monsieur l’Agent judiciaire de l’Etat à payer à Monsieur [J] la somme de 13 360 700,10 € en réparation de son préjudice économique, patrimonial et financier,

Condamner solidairement Maître [O] [D] et les MMA, assureurs de Maîtres [N] et [D], à payer à Monsieur [J] la somme de 13 360 700,10 € en réparation de son préjudice économique, patrimonial et financier,

A tout le moins, condamner in solidum, Monsieur l’Agent judiciaire de l’Etat et Maître [O] [D] et les MMA, assureurs de Maître [N], à payer à Monsieur [J] la somme de 13 360 700,10 € en réparation de son préjudice économique, patrimonial et financier,

Condamner Monsieur l’Agent judiciaire de l’Etat à payer à Monsieur [J] la somme de 100 000 € en réparation de son préjudice moral,

Condamner solidairement Maître [O] [D] et les MMA, assureurs de Maîtres [N] et [D], à payer à Monsieur [J] la somme de 100 000 € en réparation de son préjudice moral,

A tout le moins, condamner in solidum, Monsieur l’Agent judiciaire de l’Etat et Maître [O] [D] et les MMA, assureurs de Maîtres [N] et [D], à payer à Monsieur [J] la somme de 100 000 € en réparation de son préjudice moral,

Condamner Monsieur l’Agent judiciaire de l’Etat à payer à Monsieur [J] la somme de 6 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamner solidairement Maître [O] [D] et les MMA, assureurs de Maîtres [N] et [D], à payer à Monsieur [J] la somme de 6 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

A tout le moins, condamner in solidum, Monsieur l’Agent judiciaire de l’Etat, Maître [O] [D] et les MMA, assureurs de Maîtres [N] et [D], à payer à Monsieur [J] la somme de 6 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamner Monsieur l’Agent Judiciaire de l’Etat aux entiers dépens,

Condamner solidairement Maître [O] [D] et les MMA, assureurs de Maîtres [N] et [D], aux entiers dépens,

A tout le moins, condamner in solidum Monsieur l’Agent judiciaire de l’Etat, Maître [O] [D] et les MMA, assureurs de Maîtres [N] et [D], aux entiers dépens.

Les moyens de Monsieur [J] sont les suivants :

– le jugement doit être annulé en ce qu’il a méconnu les dispositions de l’article 455 du code de procédure civile en ce qu’il n’a pas répondu sur le moyen de la prescription sur l’exemple de l’action imprescriptible du droit de propriété ;

– l’ensemble de la problématique découle d’une déclaration de créance fantôme et des conséquences qui en ont découlé et le point de départ de la prescription n’est pas le jour de la clôture de la liquidation judiciaire mais les décisions postérieures qui ont été rendues notamment le jugement du 13 mai 2013, l’arrêt de la cour d’appel de Pau du 19 septembre 2014 et l’arrêt du 18 mai 2011 qui sont des actes interruptifs de prescription ;

– il a été évoqué l’atteinte à un droit de propriété et en vertu de l’article 2227 du code civil, cette action est imprescriptible ;

– Me [N] est décédé le 30 mai 2001, en cours de liquidation judiciaire et Monsieur [J] alors dessaisi, ne pouvait alors intenter aucune action ;

– il est reproché de graves négligences à l’organe de la procédure dans la vérification des créances et la conservation des pièces, et Me [D] a reconnu ne pas pouvoir produire la déclaration de créances de la BNP ce qui découle de la décision du juge de l’exécution du 13 mai 2013 et des conclusions du mandataire judiciaire et de ses assureurs du 17 septembre 2020 ;

– il rappelle qu’en vertu de l’article 2240 du code civil, celui qui reconnaît sa faute ou sa dette ne peut invoquer la prescription qui a été interrompue ;

– le préjudice de Monsieur [J] ne peut s’apprécier qu’au jour de la clôture de la procédure collective, voire de la reddition des comptes ;

– l’action est indemnitaire au profit de Monsieur [J] et ne concerne pas la protection ou la reconstitution du gage des créanciers ;

– la responsabilité de l’Etat est engagée sur le fondement de l’article L 141-1 du code de l’organisation judiciaire pour fonctionnement défectueux de la justice en raison d’un ensemble de décisions rendues, démonstratrices d’un excès de pouvoir couvert par d’autres, et il a été donc violé l’obligation de protection qui doit être garantie par le service public de la justice à tout justiciable, d’autant que Monsieur [J] était une personne vulnérable du fait de sa liquidation judiciaire ;

– la responsabilité de l’Etat peut aussi être engagée du fait des fautes commises par le mandataire judiciaire en concours avec leur responsabilité professionnelle ;

– l’assignation en redressement judiciaire était contestable du fait de la nationalité néerlandaise de Monsieur [J] et le tribunal de commerce ne s’est pas inquiété si l’acte avait remis dans une langue qu’il comprend ;

– le passif n’était pas vérifié et Monsieur [J] a été quand même placé en liquidation judiciaire ; la décision a été réformée mais le mal était fait ;

– la procédure de vérification des créances n’a pas eu lieu et la liste des créances ne comportait pas la signature du juge-commissaire et la cour d’appel d’Agen n’a statué qu’au vu d’une attestation du greffe du tribunal de commerce et l’article 73 dernier alinéa du 27 décembre 1985 n’est pas applicable sur la notification des admissions puisque Monsieur [J] n’était pas créancier ;

– l’appareil judiciaire a ‘trituré’ des écrits pour débouter Monsieur [J] ;

– les plaintes de Monsieur [J] vont être classées faute pour lui de pouvoir consigner alors qu’il est en liquidation judiciaire (ordonnance du 17/02/2000) ;

– l’arrêt de la cour d’appel de Pau du 22 juin 2012 a estimé que son action se heurtait à l’autorité de la chose jugée de l’ordonnance du 19 janvier 1996 alors qu’il s’agit d’une ordonnance virtuelle et qu’une déclaration rectificative de la BNP avait été adressée ;

– il existe une atteinte disproportionnée au droit de propriété ;

– la procédure de Monsieur [J] a duré plus de vingt ans et révèle une parfaite désorganisation du service public de la justice, la procédure collective a fait l’objet d’un délai déraisonnable engageant la responsabilité de l’Etat ;

– la perte des actifs du fait de leur qualité est énorme et aucun inventaire n’a été réalisé, alors que le bien immobilier a été vendu ;

– des interventions ont eu lieu dans son dossier qu’il a relatées dans ses auditions des 30 et 31 mai 2001 ;

– le dépaysement du dossier pour suspicion légitime constitue un aveu pour l’agent judiciaire de l’Etat d’un dysfonctionnement ;

– il existe une contradiction dans les arrêts des cours d’appel ;

– Me [N] a commis une faute en ne procédant pas à la vérification du passif conformément à la loi, ce qui justifie la mise en cause des assureurs ;

– il est reproché à Me [D] de graves négligences dans la vérification des créances et la conservation des pièces, alors qu’il y a eu deux déclarations de créances dont une rectificative, et en acceptant de régulariser la reddition des comptes que proposaient les administrateurs de l’étude de Me [N], elle a de facto accepté de rendre des comptes à Monsieur [J] sur les conséquences des errements de son prédécesseur ;

– sa responsabilité est engagée car soit la déclaration de créance a été perdue, soit elle n’a jamais existé et il faut attendre la décision du juge de l’exécution du 13 mai 2013 pour constater que la fameuse déclaration de créance ne peut être produite en justice ;

– aucune reddition des comptes de Me [D] n’a été communiquée à Monsieur [J].

Les conclusions de Maître [O] [D], la société MMA IARD Assurances Mutuelles et la SA MMA IARD du 17 décembre 2021 tendent à :

Vu les articles 122 du code de procédure civile, 1351 ancien, 1355, 2277-1 ancien, 2222, 2225, 2243, 1240 et 1241 (anciennement 1382 et 1383) du code civil, 696, 699 et 700 du code de procédure civile,

Statuant le cas échéant par adjonction ou substitution de motifs,

– Confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de Monsieur [F] [J] à l’encontre de [O] Maître [D], de la société MMA IARD Assurances Mutuelles et de la SA MMA IARD ;

Y ajoutant en tant que de besoin, les déclarer également irrecevables pour défaut de qualité et d’intérêt de Monsieur [J] et comme se heurtant à l’autorité de la chose jugée ;

– Subsidiairement, débouter de toutes ses demandes Monsieur [F] [J] infondé, comme ne faisant la démonstration d’aucun préjudice en lien causal avec une faute de Feu Maître [W] [N] ou de Maître [O] [D], lesquels n’en ont commis aucune ;

– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné Monsieur [F] [J] au titre des frais irrépétibles et dépens envers les concluants ;

– Y ajoutant de ces chefs, condamner Monsieur [F] [J] à payer à Maître [O] Maître [D], à la société MMA IARD Assurances Mutuelles et à la société MMA IARD SA, chacune, une indemnité procédurale de 3 000 € au titre des frais irrépétibles exposés à hauteur de Cour, ainsi qu’aux entiers dépens d’appel, dont distraction au profit de Maître Olivia MARIOL, membre de la SCP LONGIN & MARIOL, avocat.

– Rejeter comme irrecevables ou infondés tous moyens et demandes contraires.

Les moyens de Me [D] et des sociétés d’assurances MMA sont les suivants :

– aucune annulation n’est encourue du fait de la présence d’une motivation du tribunal et alors que l’action se fonde sur la responsabilité délictuelle des mandataires judiciaires et non sur une prétendue atteinte au droit de propriété dont le texte de l’article 2227 du code civil n’était pas visé ;

– en raison de l’application combinée des articles 2277-1 ancien du code civil, 2225 et 2222 du code civil issu de la loi du 17 juin 2008, Monsieur [J] disposait d’un délai préfix expirant le 19 juin 2013 pour assigner Me [D] et ses assureurs ;

– le jugement a retenu à raison la prescription, mais a inexactement computé le délai, retenant inexactement un délai de dix ans ayant commencé à courir le 14 septembre 2007 pour expirer le 14 septembre 2017 alors que le délai applicable est de cinq ans et expirait le 19 juin 2013 ;

– s’agissant des précédentes procédures initiées par Monsieur [J], elles n’ont pas interrompu la prescription puisqu’elles ont abouti au rejet des demandes en vertu de l’article 2243 du code civil, spécialement l’arrêt du 19 septembre 2014 ;

– Me [D] qui ne succède pas personnellement à Me [N] ne répond pas des actes accomplis par celui-ci ès qualités, ou de ce qu’il n’aurait prétendument pas fait ;

– la remise de pièces a déjà fait l’objet de précédentes procédures et l’arrêt du 19 septembre 2014 de la cour d’appel de Pau confirmatif qui a constaté que le mandataire judiciaire avait satisfait à la demande édictée par l’arrêt de la cour d’appel du 18 mai 2011, a autorité de chose jugée ;

– la liquidation judiciaire ayant été clôturée pour insuffisance d’actif, le préjudice allégué par Monsieur [J] ne serait pas le sien mais celui des créanciers non désintéressés qu’il ne représente pas et il serait de plus fort irrecevable, faute de qualité et d’intérêt en ses actions et demandes ;

– par ordonnance du 19 janvier 1996, le juge-commissaire a admis la créance de la BNP pour un montant de 2.762.137,13 francs et selon arrêt du 26 octobre 1999, l’appel de Monsieur [J] a été déclaré irrecevable.

Subsidiairement au fond :

– il n’est pas exact qu’aucun inventaire n’a été établi par Me [N], et le passif a été vérifié sans contestation ce qui a été constaté et jugé par des décisions définitives ; il ne peut être prétendu que la déclaration de créance aurait été égarée par Me [N], ni que Me [D] n’aurait pas communiqué certaines pièces ;

– aucun délai déraisonnable ne peut être retenu pour la clôture de la liquidation judiciaire dès lors que Monsieur [J] a ralenti la procédure par des instances qui empêchaient la clôture de la procédure ;

– très subsidiairement, aucun préjudice propre ne peut être allégué par Monsieur [J] ;

– la perte de l’entreprise n’est que la conséquence de la gestion du demandeur et de l’ouverture justifiée du redressement judiciaire et de la liquidation judiciaire et aucun lien de causalité n’est démontré par Monsieur [J] ;

– l’action de Monsieur [J] est abusive et justifie des dommages-intérêts pour réparer le préjudice professionnel et moral de Me [D], d’autant que la procédure est communiquée au Parquet.

Les conclusions de l’Agent judiciaire de l’Etat du 19 octobre 2021 tendent à :

Vu l’article 122 du code de procédure civile

Vu la Loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968

Vu l’article 814-4 alinéa 2 du code de commerce

Vu les articles 141-1 et 141-3 du code de l’organisation judiciaire

Vu l’article L. 643-9 alinéa 3 du code de commerce

Vu le jugement n° RG 18/01183 du 27 avril 2021

A titre principal,

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal Judiciaire de Pau le 27 avril 2021 ;

Dire et juger que l’action en responsabilité de l’État est irrecevable car prescrite.

A titre subsidiaire,

Débouter Monsieur [J] de l’intégralité de ses demandes au motif que la responsabilité personnelle d’un mandataire judiciaire n’est pas de nature à engager la responsabilité de l’État.

A titre très subsidiaire,

Débouter Monsieur [J] de l’intégralité de ses demandes à l’encontre de l’Etat pour défaut de démonstration d’une faute lourde ou d’un déni de justice de nature à engager la responsabilité de l’État.

A titre extrêmement subsidiaire,

Réduire les demandes de l’appelant à une plus juste mesure.

Dans tous les cas,

Condamner Monsieur [J] à verser à l’Agent Judiciaire de l’Etat la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamner Monsieur [J] aux dépens.

Les moyens de l’Agent judiciaire de l’Etat sont les suivants :

– le point de départ de la prescription est celui du fait générateur du dommage allégué en vertu de l’arrêt de la cour de cassation assemblée plénière du 6 juillet 2001pour la prescription quadriennale ;

– la procédure ayant été clôturée le 14 septembre 2007, le délai a commencé à courir le 1er janvier 2008 pour expirer le 31 décembre 2011.

Subsidiairement sur le fond :

– la responsabilité de l’Etat ne peut pas être engagée du fait d’une éventuelle faute commise par un mandataire judiciaire ;

– aucune faute lourde ne peut être retenue du fait des décisions de justice et la mise en cause de la responsabilité de l’Etat ne peut constituer une voie de recours visant à pallier le mécontentement du justiciable ; Monsieur [J] ne démontre pas avoir épuisé les voies de recours qui lui étaient ouvertes, et n’était pas toujours présent aux audiences ;

– aucun déni de justice du fait d’une procédure longue ne peut être ici retenu.

Par conclusions du 7 juin 2022, le procureur général près la cour d’appel de Pau a sollicité la confirmation du jugement.

Vu l’ordonnance de clôture du 11 janvier 2023.

MOTIFS

Après demande de la cour d’appel à l’audience et à la suite de son autorisation, il a été produit une note en délibéré par le conseil de Monsieur [J] avec la production de l’assignation initiale, la pièce 22 en intégralité qui est l’ordonnance d’irrecevabilité du 17 février 2000 du juge d’instruction, et la pièce 31 comportant la reddition entre les administrateurs de l’étude de Me [N] et Me [D] qui était absente du dossier remis à l’audience.

L’assignation initiale a été diligentée à l’égard de Me [D] et non Madame [D]. Cet intitulé sera donc repris tout au long de l’arrêt.

Sur l’annulation du jugement :

L’article 455 du code de procédure civile dispose notamment que le jugement doit être motivé.

Monsieur [J] reproche au jugement de ne pas avoir répondu au moyen de défense de la fin de non-recevoir de la prescription, relatif à l’action imprescriptible du droit de propriété.

Monsieur [J] ne produit pas les conclusions de première instance selon lesquelles il aurait fait état de ce moyen de défense et il n’est donc pas démontré que l’application des dispositions de l’article 2227 du code civil étaient dans le débat. En tout état de cause, le tribunal a répondu à la fin de non-recevoir soulevée par les défendeurs au titre de la prescription de l’action dirigée contre le mandataire judiciaire et les assureurs en y faisant droit par une motivation suffisante.

Aucun grief susceptible de nullité ne peut être retenu en l’espèce et la demande d’annulation du jugement sera rejetée.

Sur la prescription :

Il est constant que Me [N], désigné comme liquidateur judiciaire de Monsieur [J] est décédé le 7 décembre 2001, que des administrateurs ont été en charge de son étude jusqu’à la désignation de Me [D] pour lui succéder.

La liquidation judiciaire de Monsieur [J] a fait l’objet d’un jugement de clôture pour insuffisance d’actif le 14 septembre 2007.

Monsieur [J] recherche la responsabilité personnelle des liquidateurs judiciaires, celle de Me [N] par l’intermédiaire de son assureur la MMA IARD Assurances Mutuelles et la SA MMA IARD.

Il s’agit donc d’une action en responsabilité personnelle.

Le fait d’invoquer une atteinte à un droit de propriété ne caractérise pas pour autant une action en propriété immobilière laquelle serait imprescriptible, dès lors que cette atteinte à la propriété n’est qu’une conséquence invoquée du comportement qualifié de fautif des liquidateurs judiciaires et de l’Etat. Aussi, le tribunal puis la présente cour n’ont été saisis que d’une action en responsabilité personnelle des liquidateurs judiciaires et de l’Etat en vertu de l’article 1382 du code civil devenu 1240 du code civil. La fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par l’ensemble des intimés ne sera donc examinée que sous l’angle de la prescription d’une action en responsabilité délictuelle.

L’ancien article 2277-1 ancien du code civil applicable avant l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 disposait que l’action dirigée contre les personnes légalement habilitées à représenter ou à assister les parties en justice à raison de la responsabilité qu’elles encourent de ce fait, se prescrit par dix ans à compter de la fin de leur mission.

Ainsi le point de départ est non la réalisation du dommage mais la fin de mission du liquidateur, dès lors que c’est le débiteur qui diligente l’action et non un tiers.

Cet article 2277-1 du code civil a été abrogé par la loi du 17 juin 2008 et remplacé par l’article 2225 du code civil qui prévoit une prescription quinquennale.

Toutefois, il a été prévu des dispositions transitoires et l’article 2222 du code civil prévoit qu’en cas de réduction de la durée du délai de prescription, ce nouveau délai court à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Aussi, en l’espèce, la prescription décennale a commencé à courir le 14 septembre 2007, date de la clôture de la liquidation judiciaire, à laquelle est venue se substituer la prescription quinquennale à compter du 19 juin 2008 laquelle a expiré le 19 juin 2013, sans que la période du 14 septembre 2007 au 19 juin 2013 n’excède la durée de dix ans qui était applicable initialement.

Le tribunal a considéré à tort que la prescription expirait au 14 septembre 2017 sans appliquer la loi du 17 juin 2008.

Il ne peut être prétendu comme le fait Monsieur [J] que des actes interruptifs de prescription sont intervenus dès lors que les procédures engagées par celui-ci étaient relatives à la fixation de la créance de la BNP Paribas et non à la recherche de la responsabilité des liquidateurs judiciaires qui se sont succédé.

En outre, il convient de rappeler que ce n’est pas le fait générateur du dommage ou sa réalisation qui sert de point de départ à l’action en responsabilité délictuelle mais la fin de la mission.

Ainsi, à la date de l’assignation des 29 mai et 4 juin 2018, l’action de Monsieur [J] était prescrite.

Aussi, le tribunal qui a déclaré irrecevable comme prescrite l’action de Monsieur [J] à l’égard de Me [D] et la MMA IARD Assurances Mutuelles et la SA MMA IARD sera confirmé, sauf à préciser que la prescription était acquise au 19 juin 2013.

Sur la prescription à l’égard de l’Agent judiciaire de l’Etat, le premier juge a fait une juste analyse des faits de la cause et appliqué à l’espèce les règles de droit qui s’imposaient en appliquant l’article 1er de la loi du 31 décembre 1968 qui prévoit un délai de quatre ans de prescription à compter du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis combiné à l’article 122 du code de procédure civile et en retenant comme point de départ le 1er janvier 2008, étant le premier jour de l’année suivant la date du 14 septembre 2007 précitée.

Le jugement sera également confirmé sur ce point.

Les demandes accessoires du jugement seront également confirmées.

En cause d’appel, il sera alloué à Me [D] et les société MMA et à l’Agent judiciaire de l’Etat une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

Rejette la demande d’annulation du jugement,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions soumises à la cour, sauf à préciser que la prescription est acquise à l’égard de Me [D] et de la MMA IARD Assurances Mutuelles et la SA MMA IARD au 19 juin 2013,

y ajoutant :

Condamne Monsieur [F] [J] à payer à Me [O] [D] et la MMA IARD Assurances Mutuelles et la SA MMA IARD la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [F] [J] à payer à l’Agent judiciaire de l’Etat la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [F] [J] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Mme FAURE, Présidente, et par Mme DEBON, faisant fonction de Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

Carole DEBON Caroline FAURE

 


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