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16 juin 2023
Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion
RG n°
20/00984
ARRÊT N°23/
PC
R.G : N° RG 20/00984 – N° Portalis DBWB-V-B7E-FME6
[P]
C/
S.A.R.L. UNPERSONNELLE ENTREPRISE REUNION SECOND OEUVRE (ER SO)
RG 1ERE INSTANCE : 19/04272
COUR D’APPEL DE SAINT – DENIS
ARRÊT DU 16 JUIN 2023
Chambre civile TGI
Appel d’une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT DENIS en date du 19 MAI 2020 RG n° 19/04272 suivant déclaration d’appel en date du 06 JUILLET 2020
APPELANT :
Monsieur [U] [P]
[Adresse 1]’
[Localité 4]
Représentant : Me Alain ANTOINE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
INTIMEE :
S.A.R.L. UNPERSONNELLE ENTREPRISE REUNION SECOND OEUVRE (ER SO)
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Mickaël NATIVEL de la SELAS SOCIETE D’AVOCATS MICKAEL NATIVEL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
CLOTURE LE : 13/10/2022
DÉBATS : en application des dispositions de l’article 778 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile avant le 07 Avril 2023.
L’affaire a été mise en délibérée devant la chambre civile de la cour composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Monsieur Eric FOURNIE, Conseiller
Qui en ont délibéré
et l’arrêt serait rendu par sa mise à disposition des parties le 02 juin 2023 prorogé par avis au 16 juin 2023.
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 16 Juin 2023.
* * *
LA COUR
EXPOSE DU LITIGE
Un marché de travaux de construction tous corps d’état d’une villa a été conclu le 18 décembre 2017 entre Monsieur [U] [P] et la Sarl ERSO pour un montant de 142.178,27 euros TTC. Le délai de réalisation a été fixé à 5 mois avec des pénalités de retard de 300 euros par jour ouvré de retard.
La date règlementaire d’ouverture de chantier a été fixée au 29 janvier 2018.
Le 25 avril 2018, la situation n° 1 présentée le 20 mars 2018 par l’entrepreneur a été payée par un virement d’un montant de 3.677, 66 euros.
Le 15 juillet 2018, Monsieur [P] a mis en demeure la société ERSO d’achever les travaux au 15 septembre 2018.
Le 6 août 2018, la société ERSO a adressé à son tour un courrier recommandé au maître d’ouvrage dont copie partielle a été communiquée rappelant les différentes modifications apportées au projet par Monsieur [P] s’agissant de l’entreprise en charge de la fourniture et pose aluminium et du carrelage.
Le 13 aout 2019, la société ERSO a mis le maître d’ouvrage en demeure de payer la situation de travaux n° 2 faute de quoi, elle cesserait toute intervention.
Le 16 août 2018, le maître de l’ouvrage a fait délivrer à la Sarl ERSO une sommation d’avoir à assister à un procès-verbal de constat.
Le 21 août 2021, un constat d’huissier était dressé sur le chantier.
Le 21 aout 2018, les parties ont échangé des mails concernant le paiement de la situation n° 2.
La situation n° 2 datée du 13 juillet 2018 a été payée par virement en date du 29 août 2018.
Le 03 septembre 2018, la société ERSO a adressé un courrier recommandé au maître d’ouvrage.
Le 10 janvier 2019, l’attestation de conformité des travaux d’électricité a été délivrée.
Le 14 février 2019, l’entreprise en charge de la fourniture et pose aluminium a informé la société ERSO et le maître d’ouvrage de la pose du volet roulant dans la cuisine, de la réalisation des finitions et de la programmation de la prochaine intervention le 22 février 2019 pour la pose des deux volets battants porte.
La déclaration d’achèvement des travaux a été établie le 22 mars 2019.
Le 27 mars 2019, la situation n° 3 d’un montant 68.894,09 euros TTC et une facture de travaux supplémentaires d’un montant de 10.493,04 euros TTC (rampe d’accès) a été présentée par l’entreprise ERSO au maître d’ouvrage.
Le 29 mars 2019, un avenant a été signé entre les parties s’agissant de la validation des plus ou moins-value des matériaux concernant la prestation aluminium et garde-corps.
Le 17 avril 2019, le conseil de Monsieur [P] a informé la société ERSO de l’application à son encontre de pénalités de retard à hauteur de 57.000 euros au titre des 190 jours ouvrés de retard.
Saisi par la société ERSO le juge des référés du tribunal de grande instance de Saint Denis de la Réunion disait n’y avoir lieu à référé et a rejeté l’intégralité des demandes formulées par la société ERSO ainsi que la demande reconventionnelle de Monsieur [P]
Le 19 novembre 2019, la Sarl ERSO a assigné Monsieur [P] devant le tribunal judiciaire de Saint Denis aux fins de voir:
-DIRE ET JUGER que la Sarl ERSO a exécuté sa prestation en livrant une villa conforme à Monsieur [P];
-DIRE ET JUGER que les retards dont se prévaut Monsieur [U] [P] pour se soustraire au paiement du solde du marché, lui sont personnellement imputables;
Par conséquent :
-CONDAMNER Monsieur [U] [P] à payer à la Sarl ERSO la somme de 76.945,88 euros avec intérêts au taux légal à courir à compter de l’assignation introductive d’instance en date du 19 novembre 2019;
-CONDAMNER Monsieur [U] [P] à payer à la Sarl ERSO la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens;
-DEBOUTER Monsieur [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions;
-ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir.
Par jugement réputé contradictoire en date du 19 mai 2020, le tribunal judicaire de Saint Denis a:
-condamné Monsieur [P] à payer à la société ERSO la somme de 76.945,88 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2019;
-rejeté le surplus des demandes;
-condamné Monsieur [P] à régler la somme de 1.300 euros à la Sarl ERSO sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
-condamné Monsieur [P] aux entiers dépens.
Monsieur [P] a, par déclaration au greffe du 6 juillet 2020, relevé appel du jugement.
Monsieur [P] a notifié par RPVA ses premières conclusions le 30 septembre 2020.
La société ERSO a notifié par RPVA ses conclusions d’intimée le 7 décembre 2020.
Lors de l’audience de plaidoiries du 15 octobre 2021, le Conseil de la société ERSO a oralement indiqué que la société fait l’objet d’une procédure de sauvegarde suite à un jugement en date du 22 septembre 2021 du tribunal de commerce mixte de Saint Denis.
Par arrêt avant dire droit en date du 4 mars 2022, la cour a ordonné la réouverture des débats afin de permettre :
– la production du jugement de sauvegarde de justice ;
– l’intervention du mandataire judiciaire à la procédure ;
– la production par l’appelant de sa déclaration de créance et la mise en cause du mandataire judiciaire en application des articles L622-21 et suivants du code de commerce.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 13 octobre 2022.
PRETENTIONS ET MOYENS
Aux termes de ses uniques conclusions notifiées par RPVA le 30 septembre 2020, Monsieur [P] demande à la cour de :
-DECLARER Monsieur [P], recevable et bien fondé en son appel,
-INFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu le 19 mai 2020 par le tribunal judiciaire de SAINT-DENIS de la Réunion et en conséquence,
Statuant à nouveau :
-DEBOUTER la Sarl ERSO de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
A titre reconventionnel,
-CONDAMNER la Sarl ERSO à régler à Monsieur [P] la somme de 57.000 euros due au titre des pénalités de retard stipulées contractuellement entre les parties,
-CONDAMNER la Sarl ERSO à régler à Monsieur [P] la somme de 2.000 euros en réparation de son préjudice moral,
-CONDAMNER la Sarl ERSO à régler à Monsieur [P] la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens de première instance ainsi que les dépens d’appel.
L’appelant indique, au visa de l’article 1219 du code civil, être en droit de suspendre son obligation de payer le solde du marché au vu du disfonctionnement de l’installation électrique réalisée par la société ERSO.
Il conteste en outre la somme réclamée par la société ERSO au motif qu’elle est issue d’une facture relative à des travaux supplémentaires qui n’ont jamais été commandés et acceptés par lui.
Il sollicite la condamnation de l’intimée à la somme de 57.000 euros au titre des pénalités de retard stipulées contractuellement entre les parties au motif que le retard des travaux est imputable à l’intimée laquelle a abandonné et n’a pas géré le chantier. Enfin l’appelant sollicite la somme de 2.000 euros au titre de son préjudice moral au motif que le retard des travaux a été anxiogène et a engendré des coûts supplémentaires pour M. [P] qui a dû financer un hébergement pour lui et sa famille de juillet 2018 à mars 2019.
* * *
Aux termes de ses uniques conclusions notifiées par RPVA le 7 décembre 2020, la société ERSO demande à la cour au visa des articles 1103 du code civil, 700 du code de procédure civile et des pièces versées au débat de:
-CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu le 19 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Saint-Denis et en conséquence;
-DIRE ET JUGER que la Sarl ERSO a exécuté sa prestation en livrant une villa conforme à Monsieur [P];
-DIRE ET JUGER que les retards dont se prévaut Monsieur [U] [P] pour se soustraire au paiement du solde du marché, lui sont personnellement imputables;
Par conséquent :
-CONDAMNER Monsieur [U] [P] à payer à la Sarl ERSO la somme de 76.945,88 euros avec intérêts au taux légal à courir à compter de l’assignation introductive d’instance en date du 19 novembre 2019;
-CONDAMNER Monsieur [U] [P] à payer à la Sarl ERSO la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.
L’intimée soutient, au visa de l’article 1103 du code civil, que le chantier a été achevé et réceptionné le 27 mars 2019 sans contestation ni réserves par Monsieur [P] sur les travaux réalisés. Elle indique que la prestation ayant été réalisée, le prix doit être payé.
Elle fait valoir que le devis et le chiffrage des travaux supplémentaires relatifs à la réalisation d’une rampe d’accès avait été transmis à Monsieur [P] lequel n’avait formulé aucune contestation, de sorte qu’il ne peut remettre en cause le montant du solde restant dû.
La société ERSO conteste la demande de pénalités de retards indiquant qu’elle a été contrainte de cesser ses interventions sur le chantier en raison du retard de paiement de la situation n° 2 par Monsieur [P]. Elle indique en outre, que Monsieur [P] est personnellement à l’origine des retards lequel a opéré de multiples interférences et ingérences sur le chantier conduisant à une livraison différée de celui-ci, notamment la transmission des plans techniques de la cuisine le 21 août 2018 réclamés par la société ERSO depuis le mois de mars 2018 ou encore le changement de fournisseur et de poseur de menuiseries aluminium, lequel changement a contraint l’entreprise ERSO a attendre la fin des travaux de pose d’aluminium pour effectuer les derniers travaux de finition de la construction entre la date du 22 février 2019 et la réception du 27 mars 2019.
* * *
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées, figurant au dossier de la procédure, auxquelles il est expressément référé en application de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
A titre liminaire, la cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.
Sur la demande de production de pièces
Vu les articles L622-1, L622-3, L. 622-24 du code de commerce,
Suite à l’arrêt avant dire droit en date du 4 mars 2022, l’appelant établit avoir produit, par message RPVA du 27 avril 2022 :
Le jugement de sauvegarde de justice,
L’assignation en intervention du mandataire judiciaire à la procédure
La déclaration de créance.
Par conséquent, la procédure est régulière.
Sur le paiement du solde du marché
Par jugement en date du 19 mai 2020, la juridiction de première instance a condamné Monsieur [P] à régler à la société ERSO la somme de 76.945,88€ qui produira intérêts au taux légal à compter de l’assignation.
L’appelant indique, au visa de l’article 1219 du code civil, être en droit de suspendre son obligation de payer le solde du marché au vu du disfonctionnement de l’installation électrique réalisée par la société ERSO.
L’intimée réplique en faisant valoir que le chantier a été achevé et réceptionné le 27 mars 2019 sans contestation ni réserves par Monsieur [P] sur les travaux réalisés.
Ceci étant exposé,
Vu l’article 1103 du code civil,
Vu les articles 1219 et 1220 du code civil,
L’exception d’inexécution est le droit qu’à chaque partie à un contrat synallagmatique de refuser d’exécuter son obligation tant qu’elle n’a pas reçu la prestation qui lui est due.
C’est une voie de justice privée, reposant sur les devoirs de loyauté et de bonne foi dans les rapports synallagmatiques.
La charge de la preuve de l’inexécution du débiteur incombe à « l’excipiens ».
En l’espèce, par acte sous signature privée en date du 18 décembre 2017, Monsieur [U] [P] et la SARL ERSO ont conclu un contrat de construction d’une maison individuelle de type F4, à [Localité 5] ‘ [Adresse 6].
Le chantier a été achevé et réceptionné le 27 mars 2019.
La SARL ERSO réclame le paiement du solde du marché à Monsieur [P].
En réponse à cette demande en paiement, Monsieur [P] oppose l’exception d’inexécution pour dysfonctionnement de l’installation électrique réalisée par la société ERSO.
Toutefois, Monsieur [P] ne rapporte pas la preuve de l’inexécution de la prestation par la société ERSO et ne produit aucune facture ni même d’indication sur l’intervention réalisée par la société AROS suite aux prétendus disfonctionnements.
L’intimée quant à elle produit une attestation de conformité de l’installation électrique en date du 10 janvier 2019 (pièce n° 39 intimée) ainsi qu’une déclaration d’achèvement et de conformité des travaux en date du 22 mars 2019 (pièce n° 24 intimée).
Dès lors qu’il est établi que la société ERSO a exécuté sa prestation, Monsieur [P] est tenu au paiement du prix conformément aux termes contractuels.
Selon l’article 2 dudit contrat, « le prix convenu comporte le coût du bâtiment à construire et toutes les prestations définies au devis n° 73/2017 par l’entrepreneur, Monsieur [L] [D] et de la société ERSO, et dont celui-ci s’engage à effectuer les travaux pour la somme de : 142.128,27€ TTC (CENT QUARANTE DEUX MILLE CENT SOIXANTE DIX HUIT EUROS ET VINGT SEPT CENTIMES). Conformément au devis n° 73/2017 établit le 05/09/2017 paraphé et signé par les parties et annexées au présent contrat. » (Pièce n° 8 intimée).
La société ERSO établit sa créance à la somme de 76.945,88 € décomposée comme suit :
DATE
LIBELLE
DEBIT
CREANCE
SOLDE
20/03/2023
FACTURE
12-2018
31.677,66
31.677,66
25/04/2018
VIRT
31.677,66
13/07/2018
FACTURE
31/2018
28.006,04
28.006,04
29/08/2018
VIRT
28.006,04
01/03/2019
FACTURE
04/2019
59.852,79
59.852,79
25/03/2019
AVOIR
01/2019
59.852,79
27/03/2019
FACTURE
17/2019
66.452,84
66.452,84
27/03/2019
FACTURE
17A/2019
10.493,04
76.945,88
A ce titre, elle produit aux débats :
La situation n° 1 du 20/03/2018 d’un montant de 31.677,66 € (pièce n° 9 intimée), ainsi que la facture 12-2018 correspondante (pièce n° 10 intimée),
La situation n° 2 du 13/07/2018 d’un montant de 28.006,04 € (pièce n° 14 intimée), ainsi que la facture 31-2018 correspondante (pièce n° 15 intimée),
L’avenant n° 1 (pièce n° 25 intimée), la situation n° 3 du 27/03/2019 d’un montant de 68.894,09 € (pièce n° 27 intimée), ainsi que la facture 17-2019 (pièce n° 26 intimée),
La facture 17A-2019 du 27/03/2019 pour les travaux supplémentaires d’un montant de 10.493,04 € (pièce n° 28 intimée)
Monsieur [P] conteste la facture 17A-2019 de 10.493,04 euros relatives aux travaux supplémentaires au motif qu’ils n’ont jamais été commandés et acceptés par lui.
L’intimée fait valoir que le devis et le chiffrage des travaux supplémentaires relatifs à la réalisation d’une rampe d’accès avait été transmis à Monsieur [P] lequel n’avait formulé aucune contestation, de sorte qu’il ne peut remettre en cause le montant du solde restant dû.
Il ressort des éléments du dossier que les travaux réalisés par la société ERSO ont fait l’objet de deux devis :
Le devis n° 73-2017 relatif à la construction d’une villa d’un montant de 142.178,27 € (pièce n° 1 intimée), en annexe du contrat de construction lui-même signé par les deux parties,
Le devis n° 86-2018 relatif aux travaux supplémentaires pour la construction d’une rampe d’accès d’un montant de 10.493,04 € (pièce n° 41 intimée) signé par la seule société ERSO.
Le devis relatif aux travaux supplémentaires n’ayant pas été signé par Monsieur [P], ce dernier n’a pas consenti à ces nouvelles prestations. Dès lors, la somme de 10.493,04 € réclamée par la société ERSO n’est pas due.
Par ailleurs, la société ERSO produit une situation N° 3 du 27 mars 2019 de 68.894,09 € (pièce n° 26 intimée), alors que dans son décompte de créance elle indique un montant de 66.452,84 € à la même date.
Il s’en déduit que la société ERSO ne justife pas du montant de sa créance car, compte tenu du montant du marché initial et de l’avenant N° 1, Monsieur [P] aurait dû payer à l’entreprise ERSO la somme globale de 117.680,88 euros plus 74,00 euros, soit 117.754,88 euros HT.
Pourtant, la situation N° 3 contient une rectification manuscrite du montant total du marché et de l’avenant à hauteur de 117.828,88 euros HT(117.680,88 euros + 74,00 euros).
A cette somme, il convient de déduire le montant des deux situations précédentes pour les sommes respectives de 29.196,00 euros HT (situation N° 1) et de 25.812,02 euros HT (Situation N° 2), figurant dans la situation N° 3 à hauteur de la somme de 55.008,02 HT.
En l’absence de justificatif de la créance réclamée pour la somme de 68.894,09 euros au titre de la situation N° 3, le solde incontestable restant dû par Monsieur [P] à la société ERSO au titre du marché initial, doit être fixé à la somme de 62.820,86 euros HT(117.754,88 – 55.008,02).
Par conséquent, Monsieur [P] n’est tenu qu’au paiement de la somme de 62.820,86 euros HT.
Le jugement entrepris sera réformé de ce chef.
Sur la demande de paiement des pénalités de retard
L’appelant sollicite la somme de 57.000 euros au titre des pénalités de retard stipulés contractuellement entre les parties.
La société ERSO conteste en indiquant que la livraison différée du chantier est imputable à Monsieur [P] lequel d’une part n’a pas respecté les délais de paiement et d’autre part a opéré de multiples interférences et ingérences sur le chantier.
Ceci étant exposé,
Selon l’article 6 du contrat de construction en date du 18 décembre 2017, « les travaux seront réalisés sur un délai de cinq (5) mois à compter de l’ouverture du chantier, soit le 29 janvier 2018 date de démarrage prévu. Un planning des travaux sera fourni au client (voir détail en annexe du présent document) ».
Selon l’article 7 dudit contrat, « en cas de retard dans l’exécution des travaux, il sera appliqué à l’entrepreneur par jour ouvré de retard (Jour travaillés), une pénalité de 300€ par jour de retard. Ces retenues pourront être levées si la fin du délai d’exécution fixé au planning a été respectée ».
En l’espèce, l’ouverture de chantier a eu lieu le 29 janvier 2018 (pièce n° 23 intimée) pour être achevé au plus tard le 29 juin 2018.
Par courrier recommandé en date du 16 juillet 2018, Monsieur [P] a mis en demeure la société ERSO d’exécuter les travaux et de finir le chantier avant le 15 septembre 2018 (pièce n° 16 intimée).
Puis, le 16 août 2018, Monsieur [P] a fait sommation à la société ERSO de se présenter sur le chantier afin d’assister à un procès-verbal de constat (pièce n° 4 appelant).
Le chantier a finalement été achevé et réceptionné le 27 mars 2019.
En date du 17 avril 2019, le conseil de Monsieur [P] a adressé à la société ERSO un courrier recommandé lui opposant des pénalités de retard à hauteur de 57.000 euros pour les 190 jours ouvrés de retard (pièce n° 2 appelant).
La société ERSO fait valoir que le retard est imputable à Monsieur [P] qui n’a pas respecté les délais de paiement l’obligeant à interrompre le chantier. Conformément aux dispositions de l’article 4 du contrat, « le client s’engage à verser à l’entreprise ERSO la somme des travaux effectués, répartie de la manière suivante :
Facturation : situation en fin de mois présentée par l’entreprise au client suivant avancement des travaux
Règlement : par chèque ou virement quinze (15) jour à la date de la facture
Retard : si les sommes sont non payées dans le délai de quinze jours, une mise en demeure sera envoyée au client. Si après mise en demeure, la somme n’est toujours pas versée, le constructeur est en droit d’interrompre les travaux [‘] »
La société ERSO indique :
Avoir transmis en main propre à Monsieur [P] la situation n° 2 pour un montant de 28.006,04 € le 13 juillet 2018 (pièce n° 38 intimée),
Avoir mis en demeure Monsieur [P] d’effectuer le paiement de la situation n° 2 par lettre recommandée en date du 13 août 2018 (pièce n° 35 intimée), et
Avoir cessé ses interventions sur le chantier dans les 8 jours de la mise en demeure.
Toutefois, il ressort des éléments du dossier que la société ERSO rapporte la preuve de la transmission de la situation n° 2 à Monsieur [P] qu’à la date du 21 août 2018 conformément au bordereau de transmission signé par les deux parties (pièce n° 6 appelant).
Dès lors, le règlement de la somme de 28.006,04 € en date du 28 août 2018 intervient dans les délais, de sorte que le moyen de la société ERSO doit être écarté.
L’appelant quant à lui soutient que le retard de livraison est imputable à la société ERSO au motif qu’elle a abandonné le chantier. A ce titre, il produit aux débat le procès-verbal de constat d’huissier en date du 16 août 2018 (pièce n° 3 appelant) lequel a notamment :
Constaté « que ce chantier, libre d’accès, n’est pas sécurisé, alors que le risque de chutes est possible sur les lieux »
Relevé « qu’il n’y a aucune activité sur ce chantier et les ouvriers ne sont pas présents sur les lieux ».
Il fait également le constat de travaux non réalisés tant à l’extérieur qu’à l’intérieur.
Toutefois, force est de constater que Monsieur [P] a :
Fait établir de nouveaux devis pour le carrelage, le parquet ainsi que les menuiseries aluminium de sa villa, et leur pose entre mai et juin 2018 (pièces n° 11, 12 et 13 intimée) les 3 et 8 mai et le 17 juin 2018, au nom de l’intimé et acceptés par la SARL ERSO ;
Souhaité changer de fournisseur et de poseur de menuiseries aluminium selon devis en date du 23 juillet 2018 et dont les travaux ont pris fin le 22 février 2019 (pièce n° 22 intimée)
Annoncé une modification des plans techniques de la cuisine le 21 août 2018 (pièce n° 34 intimée) et produit lesdits plans à cette date malgré la réclamation de la société ERSO depuis mars 2018 et les diverses relances (pièces n° 32 et 33 intimée).
Dès lors, il ressort de l’ensemble de ces éléments qu’il n’est pas établi que le retard de livraison du chantier soit imputable à la société ERSO.
Par conséquent, Monsieur [P] sera débouté de sa demande de condamnation de la société ERSO à lui payer la somme de 57.000 euros au titre des pénalités de retard.
Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral
L’appelant sollicite la condamnation de la société ERSO à la somme de 2.000 au titre de son préjudice moral au motif que le retard des travaux a été anxiogène et a engendré des coûts supplémentaires pour M. [P] qui a dû financer un hébergement pour lui et sa famille de juillet 2018 à mars 2019.
Vu l’article 1231-1 du code civil,
Force est de constater que l’appelant ne rapporte pas la preuve d’une faute imputable à la société ERSO. Dès lors, M. [P] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts.
Sur les demandes au titre des frais irrépétibles et aux dépens :
Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile,
Les parties succombant chacune partiellement supporteront leurs propres dépens et leurs frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, en matière civile, par mise à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;
INFIRME le jugement rendu le 19 mai 2020 par le tribunal judicaire de Saint-Denis de la Réunion en ce qu’il a condamné Monsieur [P] à payer à la société ERSO la somme de 76.945,88 euros ;
LE CONFIRME pour le surplus ;
ET STATUANT A NOUVEAU
CONDAMNE Monsieur [U] [P] à payer à la SARL ERSO la somme de 62.820,86 euros HT au titre du solde du marché de travaux ;
Y AJOUTANT
DEBOUTE Monsieur [U] [P] de sa demande de paiement au titre des pénalités de retard ;
REJETTE les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;
LAISSE les parties supporter leurs propres dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT