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Texte intégral
Le Conseil constitutionnel,
Vu l’article 59 de la Constitution ;
Vu l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu la requête présentée par M. Frédéric Jalton, demeurant à Abymes-Bourg (Guadeloupe), ladite requête enregistrée le 29 mars 1978 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à ce qu’il plaise au Conseil statuer. sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé .les 12 et 19 mars 1978 dans la deuxième circonscription de la Guadeloupe pour la désignation d’un député à l’Assemblée nationale ;
Vu les observations en défense présentées pour M. Mariani Maximin, député, enregistrées le 12 avril 1978 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;
Vu les observations en réplique présentées pour M. Jalton ;
enregistrées comme ci-dessus les 2 et 12 mai 1978 ;
Vu les observations en duplique présentées pour M. Maximin, député, enregistrées comme ci-dessus le 24 mai 1978 ;
Vu les observations présentées par le secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’intérieur (Départements et territoires d’outre-mer), enregistrées le 5 juin 1978 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;
Vu les observations présentées pour M. Jalton, enregistrées comme ci-dessus le 21 juin 1978 ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Ouï le rapporteur en son rapport ;
Sur les griefs relatifs à la propagande électorale :
1. Considérant que le requérant allègue que M.Maximin a fait apposer, en dehors des emplacements réglementaires, des affiches comportant une combinaison des trois couleurs bleu, blanc, rouge ; que cette infraction aux dispositions du code électoral, qui n’a pas eu pour effet de conférer à la candidature de M. Maximin un caractère officiel, n’a été constatée que sur une partie de la commune de Sainte-Pose et n’a donc pu exercer une influence appréciable sur le résultat du scrutin ;
2. Considérant que le quotidien France-Antilles a publié dans ses numéros datés des 17 et 18 mars 1978 des articles reprochant à M. Jalton d’être favorable aux thèses autonomistes ; que, ce faisant, il n’a fait qu’user de la liberté reconnue à la presse d’exprimer une opinion politique et de préciser son désaccord avec l’un des candidats en présence ; que, d’ailleurs, le requérant ayant eu la possibilité de répondre à ces arguments et d’exposer notamment dans sa circulaire diffusée en vue du deuxième tour, sa position au sujet du maintien de la Guadeloupe dans la République française, ces articles n’ont pu induire les électeurs en erreur ;
Sur les griefs tirés de ce que des pressions auraient été exercées sur les électeurs :
3. Considérant que si le préfet est intervenu par téléphone auprès de deux élus de la circonscription, l’un, le suppléant du requérant et le second appartenant au même parti politique que M. Jalton, aux fins, selon le préfet, de mettre au point l’organisation des opérations électorales et, selon ses interlocuteurs, de les inviter à modérer leur action de soutien au requérant, ces conversations qui, d’après les propres déclarations des personnalités dont il s’agit, n’ont pas abouti à modifier leur position, n’ont pu exercer une influence sur les résultats du scrutin ;
4. Considérant que, si le requérant soutient qu’une publication de caractère politique aurait été envoyée par les services de la préfecture à tous les fonctionnaires du département, il n’apporte pas la preuve de cette affirmation ;
5. Considérant enfin que, si le requérant fait état d’actes de corruption, sous la forme, notamment, de distributions d’argent et d’objets de toute nature, il n’apporte à l’appui de ses allégations aucun commencement de preuve ;
Sur les griefs relatifs aux opérations électorales :
6. Considérant que, si le requérant indique que le maire de Baie-Mahault ne lui avait pas délivré le 17 mars 1975 le récépissé de déclaration du nom de ses assesseurs et délégués, il n’allègue pas que ce document n’ait pas été délivré par la suite avant l’ouverture du scrutin ; que dès lors, aucune irrégularité n’est établie à cet égard ;
7. Considérant que, si le requérant a fait constater par un huissier que le président du deuxième bureau de Baie-Mahault avait complété son bureau avec deux délégués de M. Maximin, cette constatation ne suffit pas pour établir que la composition de ce bureau qui, d’après le procès-verbal, comprenait cinq personnes, ait été irrégulière ;
8. Considérant que, s’il résulte de l’instruction que dans plusieurs bureaux de vote de la commune de Sainte-Rose des électeurs ont voté sans passer par l’isoloir, cette irrégularité, dont il n’est pas allégué qu’elle aurait résulté d’une pression ou d’une contrainte, n’a pas porté atteinte à la sincérité du scrutin ;
9. Considérant que, si le requérant soutient que l’on n’aurait pas procédé au contrôle de l’identité des électeurs dans les bureaux de la commune de Sainte-Rose, la mention d’une telle irrégularité n’apparaît sur aucun des procès-verbaux et qu’il n’est pas allégué que des électeurs non inscrits, sur la liste électorale auraient pris part au vote ;
10. Considérant que, s’il est établi que des personnes portant des maillots aux couleurs bleu, blanc et rouge, avec l’inscription “Votez Mariani Maximin ” se tenaient, au moment du vote, à l’intérieur des 1er et 2ème bureaux de la commune de Baie-Mahault, cette circonstance n’a pas, en l’espèce, exercé une influence appréciable sur les résultats du scrutin ;
11. Considérant, par contre, qu’il est établi que, au 5e bureau, de la commune de Sainte-Rose, des personnes revêtues de maillots semblables, stationnant à l’intérieur du bureau de vote lors du deuxième tour de scrutin, distribuaient aux électeurs entrant dans la salle des bulletins au nom du député proclamé élu ; que le président du bureau n’a pu, malgré sa demande, obtenir d’un policier municipal l’expulsion de ces perturbateurs ; qu’on ne saurait tenir pour librement exprimés les votes .recueillis dans de telles conditions en faveur de M. Maximin ; qu’il y a donc lieu d’annuler les votes en faveur de ce candidat dans ce bureau et de diminuer en conséquence de 369 tant le nombre des suffrages exprimés que celui des voix de M. Maximin ; que, compte tenu de cette rectification M. Maximin recueille 15 679 voix et conserve une majorité de 641 voix sur M. Jalton qui a obtenu 15 038 suffrages ;
12. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. Japon ne saurait être accueillie,
Décide :
Article premier :
La requête de M. Frédéric Jalton est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l’Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 12 juillet 1978, où siégeaient MM. Roger FREY, président, MONNERVILLE, JOXE, GRES, GOGUEL, BROUILLET, SEGALAT, COSTE-FLORET, PÉRETTI.
ECLI:FR:CC:1978:78.860.AN