Votre panier est actuellement vide !
Texte intégral
Le Conseil constitutionnel,
Vu l’article 59 de la Constitution ;
Vu l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu la requête présentée par M. Louis Eyraud, maire de Brioude, demeurant à Brioude (Haute-Loire), ladite requête enregistrée le 16 mars 1972 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à ce qu’il plaise au Conseil statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé le 11 mars 1973 dans la deuxième circonscription de la Haute-Loire pour la désignation d’un député à l’Assemblée nationale ;
Vu les observations en défense présentées par M. Simon, député, lesdites observations enregistrées le 18 avril 1973 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;
Vu les observations en réplique présentées par M. Eyraud, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus le 2 mai 1973 ;
Vu les observations en duplique présentées par M. Simon, député, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus le 11 mai 1973 ;
Vu la requête présentée par M, Jacques Chalaye, maire de Langeac, demeurant à Langeac (Haute-Loire), ladite requête enregistrée le 21 mars 1973 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à ce qu’il plaise au Conseil statuer sur les mêmes opérations électorales ;
Vu les observations en défense présentées par M. Simon, député, lesdites observations. enregistrées le 18 avril 1973 au secrétariat général du Conseil constitutionnel
Vu les observations en réplique présentées par M. Chalaye, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus le 2 mai 1973 ;
Vu les observations en duplique présentées par M. Simon, député, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus le 11 mai 1973 ;
Vu les observations présentées par M. le ministre de l’intérieur, enregistrée, le 22 mai 1973 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;
Vu les observations présentées par M. Eyraud, enregistrées comme ci-dessus le 4 juin 1973 ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Ouï le rapporteur en son rapport ;
1. Considérant que les requêtes susvisées sont relatives aux mêmes opérations électorales ; qu’il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ;
Sur les griefs relatifs à la propagande électorale ;
2. Considérant, d’une part, que la propagande de M. Simon et de ses partisans s’est efforcée de mettre en relief le soutien apporté par le parti communiste, au second tour de scrutin, à la candidature de M. Chazelle, notamment par l’apposition de “papillons” marqués de la faucille et du marteau sur les affiches de l’intéressé, par l’invitation faite aux électeurs sur une affiche réglementaire de M. Simon de “barrer la route au communisme” et par la diffusion d’un tract affirmant qu’ “en votant Chazelle, vous ne votez pas socialiste, mais communiste” ; que, toutefois, compte tenu de la large publicité donnée sur le plan national à l’accord de désistement liant les partis signataires du programme commun de gouvernement de la gauche, et de la notoriété de l’appartenance politique de M. Chazelle, député sortant, ces affirmations, qui n’excédaient pas les limites de la polémique électorale, ne pouvaient avoir pour effet de jeter la confusion dans l’esprit des électeurs sur cette appartenance, alors surtout que l’intéressé se présentait lui-même sur ses affiches comme le candidat de “la gauche unie” ; que, si le tract susmentionné a été diffusé dans la nuit précédant le scrutin, il se bornait à reproduire un communiqué émanant de la fédération départementale du parti communiste français, dont l’authenticité n’est pas contestée, et qui avait déjà été publié dans la presse locale ; qu’ainsi la circonstance que le candidat socialiste n’ait pas été en mesure d’y répondre, ainsi que l’irrégularité de cette diffusion au regard du code électoral n’ont pas été de nature, dans les circonstances de l’affaire, à affecter le résultat du scrutin ,
3. Considérant, d’autre part, que si un constat d’huissier dressé le lendemain du scrutin a relevé l’absence des affiches de M. Chazelle sur les panneaux réglementaires de quatre communes, il n’est établi, ni que ces affiches fussent absentes le jour du scrutin et les jours précédents, ni que leur disparition fût imputable à M. Simon ou à ses partisans, ni enfin que M.Chazelle n’ait pas été en mesure de faire remplacer en temps utile les affiches qui auraient été enlevées ; que l’apposition, sur le mur de la mairie de Saulgues, d’une affichette dénonçant la présence des “sbires de Chazelle” et visant vraisemblablement les assesseurs et délégués de ce candidat, pour regrettable qu’elle soit, n’a pas été davantage de nature à modifier le résultat du scrutin ;
4. Considérant, enfin, que M. Chalaye affirme qu’un conseiller général, partisan de M. Simon, aurait tenté de discréditer M. Chazelle en montrant à de nombreux électeurs une photographie représentant des magistrats inquiétés à la Libération en raison de leur attitude pendant l’Occupation, et en utilisant la ressemblance physique de l’un de ces personnages avec le candidat socialiste, qui appartenait lui-même à la magistrature ; mais qu’en admettant la réalité de cette manoeuvre, qui n’est attestée que par un seul témoignage, il ne ressort pas de l’instruction qu’elle ait revêtu une ampleur quelconque ; que ladite photographie figurait dans une revue d’histoire de la Seconde Guerre mondiale publiée à Paris plusieurs mois avant les élections et dont il n’est pas allégué qu’elle ait fait l’objet d’une diffusion particulière dans la Haute-Loire à l’occasion de celles-ci ; qu’en raison, tant de l’âge apparent du personnage photographié que de la notoriété du passé de résistant de M. Chazelle, la manoeuvre eût été au surplus trop grossière pour induire en erreur un nombre appréciable d’électeurs ;
Sur les griefs tirée de ce que des pressions auraient été exercées sur certains électeurs :
5. Considérant que, si M. Eyraud soutient que des pressions ont été exercées en faveur de M. Simon auprès des pensionnaires de la maison de retraite de Brioude, et si M. Chalaye affirme que la supérieure des religieuses qui desservent l’hôpital rural de Langeac aurait cédé à des pressions semblables et aurait confectionné elle-même les votes par correspondance de certains malades, ces affirmations ne sont assorties d’aucun commencement de preuve, et notamment d’aucun témoignage écrit, alors que les requérants avaient toute possibilité, en leur qualité de maires des communes intéressées, de provoquer une enquête sur les faits et de réunir tous indices et témoignages ; qu’il y a lieu, dès lors, de rejeter lesdits griefs sans ordonner la mesure d’instruction demandée par M. Eyraud.
Décide :
Article premier :
Les requêtes susvisées de MM. Eyraud et Chalaye sont rejetées.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l’Assemblée nationale et publié au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 14 juin 1973, où siégeaient MM. Gaston PALEWSKI, président, Monnet, Rey, Saintery, Goguel, Dubois, Coste-Moret, Chatenet, Luchaire.
ECLI:FR:CC:1973:73.599.AN