L’assignation pour dénigrement délivrée à la société The Morandini Family par un concurrent, a été frappée de nullité, cette dernière aurait dû être délivrée sur le fondement de la diffamation. L’éditeur avait suggéré, de manière péremptoire et à de nombreuses reprises, que la société concurrente et sa gérante avaient obtenu et détourné, pour le moins fait un mauvais usage, des fonds publics qui leur étaient accordés et d’avoir annoncé qu’un audit des comptes avait été requis s’agissant de la production d’une émission en particulier.
Sommaire
Informations dénigrantes sur des produits ou services
La liberté d’expression est un droit dont l’exercice, sauf dénigrement de produits ou services, ne peut être contesté sur le fondement de l’article 1240 du code civil. Dès lors, une publication de presse, même si elle porte sur un sujet économique et vise une société commerciale, ne peut faire l’objet d’une action judiciaire fondée sur la responsabilité civile de droit commun, sauf en cas d’informations dénigrantes sur des produits ou services.
Pouvoir de requalification du juge
Il appartient au juge qui, en vertu de l’article 12 du code de procédure civile, doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée, de s’attacher aux tenues de l’acte introductif d’instance qui seul fixe les prétentions en demande, sans toutefois n’en faire qu’une lecture littérale, ce afin d’identifier le but poursuivi.
Périmètre de la loi du 29 juillet 1881
Si les propos relèvent de la loi du 29 juillet 1881, l’article 53 de cette loi s’applique à l’assignation devant un juge civil et si cette assignation comporte des indications susceptibles de créer une ambiguïté quant à la nature et l’étendue de la poursuite, elle doit être entièrement annulée.
Le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée. Lorsque le dommage invoqué trouve sa cause dans l’une des infractions définies par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, le demandeur ne peut, notamment pour échapper aux contraintes procédurales de cette loi, se prévaloir pour les mêmes faits de qualifications juridiques distinctes restreignant la liberté protégée par cette loi dans des conditions qu’elle ne prévoit pas.
Frictions entre diffamation et dénigrement
S’agissant du dénigrement, l’article 1240 du code civil, dispose que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; les appréciations, même excessives, touchant les produits, les services ou les prestations d’une entreprise n’entrent pas dans les prévisions de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, dès lors qu’elles ne concernent pas la personne physique ou morale, et peuvent donner lieu, le cas échéant, à réparation, en application de l’article 1240 du code civil, pour dénigrement fautif.
En application des règles régissant la responsabilité délictuelle de droit commun, il appartient au demandeur de prouver l’existence d’une faute commise par l’auteur des propos, un préjudice personnel et direct subi par lui et un lien de causalité entre cette faute et le préjudice.
Concernant la diffamation, l’article 29 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 définit la diffamation comme toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé ; il doit s’agir d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat contradictoire sur la preuve de sa vérité, ce qui distingue ainsi la diffamation, d’une part, de l’injure – caractérisée, selon le deuxième alinéa de l’article 29, par toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait – et, d’autre part, de l’expression subjective d’une opinion ou d’un jugement de valeur, dont la pertinence peut être librement discutée dans le cadre d’un débat d’idées mais dont la vérité ne saurait être prouvée.
L’honneur et la considération de la personne ne doivent pas s’apprécier selon les conceptions personnelles et subjectives de celle-ci, mais en fonction de critères objectifs et de la réprobation générale provoquée par l’allégation litigieuse, que le fait imputé soit pénalement répréhensible ou manifestement contraire aux règles morales communément admises.
La diffamation, qui peut se présenter sous forme d’allusion ou d’insinuation, doit être appréciée en tenant compte des éléments intrinsèques et extrinsèques au support en cause, à savoir tant du contenu même des propos que du contexte dans lequel ils s’inscrivent.