Critère de l’originalité : 24 octobre 2013 Cour d’appel de Paris RG n° 12/05649

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Critère de l’originalité : 24 octobre 2013 Cour d’appel de Paris RG n° 12/05649
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24 octobre 2013
Cour d’appel de Paris
RG n°
12/05649

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 12

ARRÊT DU 24 Octobre 2013

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 12/05649 – 12/05927

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Février 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de PARIS section RG n° 10/01568

APPELANTE

URSSAF PARIS – REGION PARISIENNE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 4]

représentée par Mme [Z], en vertu d’un pouvoir général

INTIMEES

SAS LIGNES ET FORMATIONS

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par Me Jean MARTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0584 substitué par Me Guillaume PRIGENT, avocat au barreau de PARIS, toque : M699

A.G.E.S.S.A

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Mme [B], en vertu d’un pouvoir général

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 1]

[Localité 2]

avisé – non représenté

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 04 Juillet 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président

Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller

Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Marion MELISSON, lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Marion MELISSON, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue sur les appels régulièrement interjetés par l’URSSAF de Paris et la société Lignes et Formations d’un jugement rendu le 29 février 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige les opposant, en présence de l’Agessa ;

Les faits, la procédure, les prétentions des parties :

Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard ;

Il suffit de rappeler qu’à la suite d’un contrôle de l’application de la législation de la sécurité sociale par la société Lignes et Formations, entreprise d’enseignement à distance, l’URSSAF a réintégré dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale dues par cette société l’abattement de 20 % appliqué, au titre des frais d’atelier, sur les rémunérations versées aux correcteurs à domicile et le montant des ‘doits d’auteurs’ attribués aux professeurs en contrepartie de la réalisation des supports pédagogiques distribués aux élèves ; qu’il en a résulté un rappel de cotisations de 16 479 €, sur la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007 ; que la société a été mise en demeure, le 8 juin 2009, de régler cette somme et celle de 2 369 € au titre des majorations de retard ; qu’elle a contesté ce redressement devant la commission de recours amiable qui a rejeté son recours ; que la juridiction des affaires de sécurité sociale a ensuite été saisie ;

Par jugement du 29 février 2012, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris a rejeté la demande d’annulation du chef de redressement relatif aux rémunérations versées, sous la forme de droits d’auteurs, aux rédacteurs des cours et exercices mais a annulé le redressement portant sur les frais d’atelier.

L’URSSAF d’Ile de France, venant aux droits de l’URSSAF de Paris, fait déposer et soutenir oralement par sa représentante des conclusions tendant à l’infirmation du jugement en ce qu’il annule le redressement opéré au titre des frais d’atelier. Elle conclut ensuite à la confirmation du dispositif du jugement relatif aux rémunérations qualifiées à tort de droits d’auteur. Elle demande la condamnation de la société Lignes et Formations au paiement de la somme de 13 203 € en cotisations et 2 359 € en majorations de retard au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007.

Au soutien de son appel, elle fait valoir que la preuve de l’utilisation conforme à leur objet des déductions opérées au titre des frais d’atelier versées aux correcteurs à domicile n’est pas rapportée. Elle indique en effet qu’un abattement pour frais d’atelier ne peut être pratiqué que si les conditions fixées par l’arrêté du 29 décembre 1969 sont remplies et précise qu’une telle déduction est subordonnée à l’utilisation effective des allocations forfaitaires de façon conforme à leur objet. Elle ajoute que l’activité de correcteur à domicile ne fait pas partie des professions pour lesquelles un abattement forfaitaire est prévu. Elle maintient également que les sommes versées aux rédacteurs des supports pédagogiques ne peuvent pas bénéficier du régime des auteurs au sens des articles L 382-1 et R 382-1 du code de la sécurité sociale et relève d’ailleurs qu’aucune déclaration n’a été faite à l’Agessa. Elle soutient que la préparation des cours et exercices n’est pas une oeuvre de l’esprit relevant du régime des auteurs et que la rémunération de cette activité présente un caractère salarial. Elle ajoute que les personnes concernées exercent cette activité dans un lien de subordination, dans le prolongement de leur métier d’enseignant.

La société Lignes et Formations fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions de confirmation du jugement en ce qu’il annule le redressement au titre des frais d’atelier et d’infirmation du même jugement en ce qu’il rejette sa demande d’annulation du redressement relatif aux droits d’auteurs versés aux professeurs chargés de la conception des cours et exercices. Sur le premier point, elle se prévaut de la convention collective de l’enseignement à distance, étendue par l’arrêté du 9 octobre 2002, qui accorde aux professeurs et correcteurs à domicile des frais d’atelier en évaluant leur montant à 20 % de leur rémunération. Elle estime donc être en droit de déduire de l’assiette des cotisations de sécurité sociale 20 % de la rémunération versée aux correcteurs qui supportent incontestablement des frais d’atelier dans l’exercice de leur activité professionnelle. Elle invoque la force obligatoire de la convention collective et fait observer qu’avant d’étendre les dispositions d’une convention collective, l’autorité réglementaire en contrôle la conformité aux textes législatifs et réglementaires en vigueur. Elle fait aussi état de la présomption d’utilisation conforme des frais d’atelier dès lors que les indemnités versées ne dépassent pas le forfait conventionnellement prévu.

S’agissant des droits d’auteurs, elle fait observer que les cours des professeurs constituent des oeuvres de l’esprit au sens des articles L 382-1 et suivants du code de la sécurité sociale et souligne le fait que ces oeuvres peuvent donner lieu à une exploitation commerciale sans qu’une diffusion publique soit nécessaire.

L’AGESSA fait déposer et soutenir oralement des conclusions tendant à la confirmation du jugement relatif aux droits d’auteurs. Selon elle, les documents réalisés par les professeurs de la société Lignes et Formations ne sont pas des oeuvres de l’esprit dont l’exploitation commerciale justifierait le paiement de droits d’auteurs. Elle indique en effet que la rédaction des cours et exercices exclusivement diffusés auprès des élèves, pour les besoins de la formation, n’est pas une création originale indépendante mais s’inscrit dans le cadre de l’activité d’enseignement exercée par les professeurs sous la subordination de leur employeur.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d’autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions ;

Sur quoi, la Cour :

Considérant qu’en raison de leur connexité, il convient de joindre les instances suivies sous les numéros 12/05649 et 12/05927 du répertoire général ;

Sur les allocations forfaitaires pour frais d’atelier :

Considérant qu’aux termes de l’article L 242-1, alinéa 3, du code de la sécurité sociale, il ne peut être opéré sur la rémunération ou le gain des salariés servant au calcul des cotisations de sécurité sociale de déduction au titre des frais d’ateliers que dans les conditions et limites fixées par arrêté ministériel ;

Considérant que l’arrêté du 29 décembre 1969 détermine les conditions auxquelles les sommes allouées par l’employeur au titre des frais d’atelier sont exonérées de cotisations sociales ; que la déduction est autorisée lorsque l’employeur assure le remboursement des dépenses réelles exposées par les salariés à l’occasion de leur travail à domicile ou lorsqu’il leur verse des majorations ou des allocations forfaitaires destinées à couvrir les charges inhérentes à l’emploi ;

Considérant que cependant, dans ce dernier cas, l’exonération est subordonnée à l’utilisation effective des majorations ou allocations forfaitaires conformément à leur objet ;

Considérant que seuls les travailleurs à domicile relevant de certaines industries bénéficient d’une déduction forfaitaire pour frais d’atelier selon un pourcentage fixé à l’avance, dispensant l’employeur de justifier d’une utilisation conforme à leur objet ; que l’activité de correcteurs à domicile ne fait pas partie des professions concernées ;

Considérant qu’il en résulte que la déduction pour frais d’atelier ne peut être accordée dans le secteur de l’enseignement à distance que s’il est démontré que l’abattement forfaitaire pratiqué à ce titre est utilisé conformément à son objet ;

Considérant qu’il appartient donc à la société Lignes et Fabrication de justifier de la réalité des charges spécifiques inhérentes à l’emploi de ses correcteurs à domicile nécessitant le paiement d’allocations pour frais d’atelier ;

Considérant que le seul fait que la convention collective nationale du secteur de l’enseignement à distance prévoit l’existence de frais d’atelier au bénéfice des professeurs et correcteurs à domicile et en évalue le montant à 20% de la rémunération totale des intéressés ne dispense pas la société de justifier de leur utilisation conforme à leur objet ; qu’à défaut de relever de la liste des métiers pour lesquels un tel abattement est prévu par l’arrêté du 29 décembre 1969, la société Lignes et Fabrications ne peut se prévaloir d’aucune présomption d’utilisation conforme ;

Considérant ensuite que la procédure d’extension de la convention collective et la force obligatoire qui s’y attache n’ont aucune incidence sur les conditions d’exonération des cotisations sociales dont les modalités restent fixées par l’arrêté précité du 29 décembre 1969 ;

Considérant qu’en l’espèce, la société ne produit aucun justificatif des charges inhérentes à l’emploi des correcteurs à domicile de nature à autoriser la déduction à laquelle elle a procédé ;

Considérant que dans ces conditions c’est à tort que les premiers juges ont annulé le redressement de ce chef et la société Lignes et Formations sera tenue de s’acquitter du rappel de cotisations figurant dans la mise en demeure ;

Sur les droits d’auteurs versés aux rédacteurs des supports de cours :

Considérant que la société Lignes et Formations exclut de l’assiette des cotisations du régime général les sommes versées aux professeurs en contrepartie de la rédaction des cours et exercices remis aux élèves de l’établissement d’enseignement au motif qu’il s’agirait d’oeuvres de l’esprit soumises au régime des auteurs ;

Considérant cependant que le régime des auteurs ne bénéficie qu’aux personnes ayant crée en toute indépendance une oeuvre originale de l’esprit ;

Considérant que tel n’est pas le cas des professeurs qui rédigent les cours et exercices, selon les directives de la société, qui les utilise exclusivement comme supports de cours dans le cadre de son activité pédagogique ; que cette activité n’est pas distincte de celle d’enseignement à distance proprement dite et est exercée par les salariés dans les mêmes conditions de subordination ;

Considérant qu’il ne s’agit donc pas d’une création originale et indépendante mais de l’exercice même de leur métier d’enseignant pour les besoins exclusifs de la formation des élèves dont ils ont la charge ;

Considérant d’ailleurs qu’il n’est pas justifié que la société Lignes et Formations ait déclaré les sommes en cause à l’AGESSA et se soit acquittée des cotisations selon les règles applicables au régime des auteurs

Considérant que l’URSSAF a donc décidé à bon droit de qualifier les sommes versées à ce titre comme salaire et de les réintégrer dans l’assiette de cotisations du régime général ;

Considérant que, dans ces conditions, la société Lignes et Formations sera condamnée à payer à l’URSSAF d’Ile France la somme de 13 023 € en cotisations et celle de 2 359 € en majorations de retard au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007 ;

Par ces motifs :

– Ordonne la jonction des instances suivies sous les numéros 12/05649 et 12/05927 ;

– Déclare l’URSSAF d’Ile de France recevable et bien fondée en son appel ;

– Déclare la société Lignes et Formations recevable et mal fondée en son appel incident ;

– Confirme le jugement entrepris en ce qu’il rejette la demande d’annulation du chef de redressement relatif aux prétendus droits d’auteurs ;

– L’infirme du chef du dispositif annulant le redressement relatif aux frais d’atelier ;

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant :

– Valide le redressement opéré au titre des frais d’atelier ;

– Condamne la société Lignes et Formations à verser à l’URSSAF d’Ile de France la somme de 13 203 € en cotisations et celle de 2 359 € en majorations de retard au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007 ;

– Fixe le droit d’appel prévu par l’article R 144-10, alinéa 2, du code de la sécurité sociale à la charge de la société au 10ème du montant mensuel du plafond prévu à l’article L 241-3 et la condamne au paiement de ce droit.

Le Greffier, Le Président,

 


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