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24 octobre 2013
Cour d’appel de Paris
RG n°
10/10544
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 12
ARRÊT DU 24 Octobre 2013
(n° , 4 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : S 10/10544
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Septembre 2010 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de PARIS RG n° 08-00791
APPELANTE
SAS CEFODIS (ancienne dénomination P.C.F.P)
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Me Jean MARTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0584 substitué par Me Guillaume PRIGENT, avocat au barreau de PARIS, toque : M699
INTIMEES
UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE ET D’ALLOCATIONS FAMILIALES DE L’ILE DE FRANCE venant aux droits de l’URSSAF de PARIS – REGION PARISIENNE
dont le siège social est [Adresse 4]
[Localité 4]
représentée par Mme [O], en vertu d’un pouvoir général
A.G.E.S.S.A.
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Mme [W], en vertu d’un pouvoir général
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 1]
[Localité 3]
avisé – non représenté
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 04 Juillet 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président
Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller
Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Madame Marion MELISSON, lors des débats
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Marion MELISSON, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Cour statue sur l’appel régulièrement interjeté par la société Cefodis d’un jugement rendu le 30 septembre 2010 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l’opposant à l’URSSAF d’Ile de France, en présence de l’Agessa ;
Les faits, la procédure, les prétentions des parties :
Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard ;
Il suffit de rappeler qu’à la suite d’un contrôle de l’application de la législation de la sécurité sociale au sein de la société Cefodis, entreprise d’enseignement à distance, l’URSSAF a réintégré dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale dues par cette société les frais d’atelier versés aux professeurs à domicile et le montant des ‘doits d’auteurs’ attribués en contrepartie de la réalisation des supports pédagogiques distribués aux élèves ; qu’il en a résulté un rappel de cotisations de 20 338 €, sur la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ; que la société a été mise en demeure le 25 septembre 2007 de régler cette somme et celle de 2032 € au titre des majorations de retard ; qu’elle a contesté ce redressement devant la commission de recours amiable qui a rejeté sa réclamation ; que parallèlement, une contrainte a été délivrée, le 4 février 2008, à la société Cefodis ; que celle-ci a formé opposition à cette contrainte devant la juridiction des affaires de sécurité sociale déjà saisie de son recours contre la décision de la commission ;
Par jugement du 30 septembre 2012, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris a dit n’y avoir lieu d’annuler le redressement contesté et a validé la contrainte pour son entier montant.
La société Cefodis fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions d’infirmation du jugement et demande à la Cour de dire mal fondée la réintégration des frais d’ateliers et des droits d’auteurs dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale et d’annuler en conséquence la mise en demeure du 25 septembre 2007 ainsi que la contrainte du 4 février 2008 en ce qu’elle porte sur ces deux chefs de redressement pour 10 785 € et 6 958 €. Sur le premier point, elle se prévaut de la convention collective de l’enseignement à distance, étendue par l’arrêté du 9 octobre 2002, qui accorde aux professeurs et correcteurs à domicile des frais d’atelier en évaluant leur montant à 20 % de leur rémunération. Elle estime donc être en droit de déduire de l’assiette des cotisations de sécurité sociale 20 % de la rémunération versée aux correcteurs qui supportent incontestablement des frais d’atelier dans l’exercice de leur activité professionnelle. Elle invoque la force obligatoire de la convention collective et fait observer qu’avant d’étendre les dispositions d’une convention collective, l’autorité réglementaire en contrôle la conformité aux textes législatifs et réglementaires en vigueur. Elle fait aussi état de la présomption d’utilisation conforme des frais d’atelier dès lors que les déductions opérées ne dépassent pas le forfait conventionnellement prévu. Elle ajoute qu’avant l’application de cet abattement de 20 %, elle procédait déjà à une déduction pour couvrir les frais postaux liés à l’envoi par lettre recommandée des copies corrigées qui constituent des dépenses spécifiques inhérentes à l’exercice à domicile de l’activité des correcteurs et n’ont pas le même objet que les frais d’atelier, de sorte que la règle de non-cumul ne peut lui être opposée.
S’agissant des droits d’auteurs, elle fait observer que les cours des professeurs constituent des oeuvres de l’esprit au sens des articles L 382-1 et suivants du code de la sécurité sociale et souligne le fait que ces oeuvres peuvent donner lieu à une exploitation commerciale sans qu’une diffusion publique soit nécessaire.
L’URSSAF d’Ile de France, venant aux droits de l’URSSAF de Paris, fait soutenir oralement par sa représentante des conclusions tendant à la confirmation du jugement attaqué. Elle fait valoir que la preuve de l’utilisation conforme à leur objet des déductions opérées au titre des frais d’atelier versées aux correcteurs à domicile n’est pas rapportée. Elle indique en effet qu’un abattement pour frais d’atelier ne peut être pratiqué que si les conditions fixées par l’arrêté du 29 décembre 1969 sont remplies et précise qu’une telle déduction est subordonnée à l’utilisation effective des allocations forfaitaires de façon conforme à leur objet. Elle ajoute que l’activité de correcteur à domicile ne fait pas partie des professions pour lesquelles un abattement forfaitaire est prévu. Enfin, elle fait observer que la société ne produit aucun document de nature à justifier de l’existence et du montant des frais spécifiques invoqués. Elle maintient également que les sommes versées aux rédacteurs des supports pédagogiques ne peuvent pas bénéficier du régime des auteurs au sens des articles L 382-1 et R 382-1 du code de la sécurité sociale et relève d’ailleurs qu’aucune déclaration n’a été faite à l’Agessa. Elle soutient que la préparation des cours et exercices n’est pas une oeuvre de l’esprit relevant du régime des auteurs et que la rémunération de cette activité présente un caractère salarial. Elle ajoute que les personnes concernées exercent cette activité dans un lien de subordination, dans le prolongement de leur métier d’enseignant.
L’AGESSA fait déposer et soutenir oralement des conclusions tendant à la confirmation du jugement relatif aux droits d’auteurs. Selon elle, les documents réalisés par les professeurs de la société Cefodis ne sont pas des oeuvres de l’esprit dont l’exploitation commerciale justifierait le paiement de droits d’auteurs. Elle indique en effet que la rédaction des cours et exercices exclusivement diffusés auprès des élèves, pour les besoins de la formation, n’est pas une création originale indépendante mais s’inscrit dans le cadre de l’activité d’enseignement exercée par les professeurs sous la subordination de leur employeur.
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d’autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions ;
Sur quoi la Cour :
Sur les allocations forfaitaires pour frais d’atelier :
Considérant qu’aux termes de l’article L 242-1, alinéa 3, du code de la sécurité sociale, il ne peut être opéré sur la rémunération ou le gain des salariés servant au calcul des cotisations de sécurité sociale de déduction au titre des frais d’ateliers que dans les conditions et limites fixées par arrêté ministériel ;
Considérant que l’arrêté du 29 décembre 1969 détermine les conditions auxquelles les sommes allouées par l’employeur au titre des frais d’atelier sont exonérées de cotisations sociales ; que la déduction est autorisée lorsque l’employeur assure le remboursement des dépenses réelles exposées par les salariés à l’occasion de leur travail à domicile ou lorsqu’il leur verse des majorations ou des allocations forfaitaires destinées à couvrir les charges inhérentes à l’emploi ;
Considérant que cependant, dans ce dernier cas, l’exonération est subordonnée à l’utilisation effective des majorations ou allocations forfaitaires conformément à leur objet ;
Considérant que seuls les travailleurs à domicile relevant de certaines industries bénéficient d’une déduction forfaitaire pour frais d’atelier selon un pourcentage fixé à l’avance, dispensant l’employeur de justifier d’une utilisation conforme à leur objet ; que l’activité de correcteurs à domicile ne fait pas partie des professions concernées ;
Considérant qu’il en résulte que la déduction pour frais d’atelier ne peut être accordée dans le secteur de l’enseignement à distance que s’il est démontré que l’abattement forfaitaire pratiqué à ce titre est utilisé conformément à son objet ;
Considérant qu’il appartient donc à la société Cefodis de justifier de la réalité des charges spécifiques inhérentes à l’emploi de ses correcteurs à domicile nécessitant le paiement d’allocations pour frais d’atelier ;
Considérant que le seul fait que la convention collective nationale du secteur de l’enseignement à distance prévoit l’existence de frais d’atelier au bénéfice des professeurs et correcteurs à domicile et en évalue le montant à 20 % de la rémunération totale des intéressés ne dispense pas la société de justifier de leur utilisation conforme à leur objet ; qu’à défaut de relever de la liste des métiers pour lesquels un tel abattement est prévu par l’arrêté du 29 décembre 1969, la société Cefodis ne peut se prévaloir d’aucune présomption d’utilisation conforme ;
Considérant ensuite que la procédure d’extension de la convention collective et la force obligatoire qui s’y attache n’ont aucune incidence sur les conditions d’exonération des cotisations sociales dont les modalités restent fixées par l’arrêté précité du 29 décembre 1969 ;
Considérant enfin que la société fait aussi état de frais spécifiques liés à l’envoi de lettres recommandées contenant les copies corrigés mais ne produit aucun justificatif à ce sujet ;
Considérant qu’elle ne produit d’ailleurs aucun élément établissant la réalité des charges inhérentes à l’emploi des correcteurs à domicile de nature à justifier la déduction à laquelle elle a procédé ;
Considérant que dans ces conditions c’est à juste titre que les premiers juges ont maintenu le redressement de ce chef et validé la contrainte délivrée à l’égard de la société Cefodis ;
Sur les droits d’auteurs versés aux rédacteurs des supports de cours :
Considérant que la société Cefodis exclut de l’assiette des cotisations du régime général les sommes versées aux professeurs en contrepartie de la rédaction des cours et exercices remis aux élèves de l’établissement d’enseignement au motif qu’il s’agirait d’oeuvres de l’esprit soumises au régime des auteurs ;
Considérant cependant que le régime des auteurs ne bénéficie qu’aux personnes ayant crée en toute indépendance une oeuvre originale de l’esprit ;
Considérant que tel n’est pas le cas des professeurs qui rédigent les cours et exercices, selon les directives de la société, qui les utilise exclusivement comme supports de cours dans le cadre de son activité pédagogique ; que cette activité n’est pas distincte de celle d’enseignement à distance proprement dite et est exercée par les salariés dans les mêmes conditions de subordination ;
Considérant qu’il ne s’agit donc pas d’une création originale et indépendante mais de l’exercice même de leur métier d’enseignant pour les besoins exclusifs de la formation des élèves dont ils ont la charge ;
Considérant d’ailleurs qu’il n’est pas établi que la société Cefodis ait déclaré les sommes en cause à l’AGESSA et se soit acquittée des cotisations selon les règles applicables au régime des auteurs ;
Considérant que c’est donc à bon droit que l’URSSAF a décidé que les sommes versées à ce titre présentaient le caractère de salaire et les a réintégrées dans l’assiette de cotisations du régime général ;
Que le jugement attaqué sera confirmé dans toutes ses dispositions ;
PAR CES MOTIFS,
– Déclare la société Cefodis recevable et mal fondée en son appel incident ;
– Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
– Fixe le droit d’appel prévu par l’article R 144-10, alinéa 2, du code de la sécurité sociale à la charge de l’appelante au 10ème du montant mensuel du plafond prévu à l’article L 241-3 et le condamne au paiement de ce droit.
Le Greffier, Le Président,