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13 septembre 2013
Cour d’appel de Paris
RG n°
12/12204
Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 2
ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2013
(n° 201, 11 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 12/12204.
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mars 2012 – Tribunal de Grande Instance de PARIS 3ème Chambre 4ème Section – RG n° 10/09665.
APPELANTS :
– Monsieur [C] [O]
demeurant [Adresse 2],
– SAS [N] [O]
prise en la personne de son Président,
ayant son siège social [Adresse 1],
– SAS LONGCHAMP
prise en la personne de son Président,
ayant son siège social [Adresse 1],
représentés par Maître Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515,
assistés de Maître Yves COURSIN, avocat au barreau de PARIS, toque : C2186.
INTIMÉS :
– Monsieur [G] [R] exerçant sous l’enseigne GUNTER ANDERSEN
demeurant [Adresse 4] (ALLEMAGNE),
– SARL VIVADIA
prise en la personne de ses représentants légaux,
ayant son siège social [Adresse 3],
représentés par la SCP GALLAND – VIGNES en la personne de Maître Marie-Catherine VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010,
assistés de Maître Simon WARYNSKI substituant Maître Michel MALL de l’AARPI ADARIS, avocat au barreau de STRASBOURG.
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le , en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-Christine AIMAR, présidente,
Madame Véronique RENARD, conseillère,
Madame Patricia GRASSO, conseillère,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Truc Lam NGUYEN.
ARRET :
Contradictoire,
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
– signé par Madame Marie-Christine AIMAR, présidente, et par Monsieur Truc Lam NGUYEN, greffier présent lors du prononcé.
Vu les articles 455 et 954 du code de procédure civile,
Vu le jugement du 29 mars 2012 rendu par le tribunal de grande instance de Paris (3ème chambre 4ème section),
Vu l’appel interjeté le 2 juillet 2012 par monsieur [C] [O], la société [N] [O] et la société Longchamp,
Vu les dernières conclusions de monsieur [C] [O], la société [N] [O] et la société Longchamp, appelants en date du 4 février 2013,
Vu les dernières conclusions de monsieur [G] [R] et de la S.A.R.L. Vivadia , intimés et incidemment en date du 27 mai 2013,
Vu l’ordonnance de clôture en date du 30 mai 2013,
SUR CE, LA COUR,
Il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures des parties,
Il sera simplement rappelé que :
La société [N] [O] a pour activité la création d’articles de maroquinerie, lesquels sont commercialisés sous la marque longchamp par sa filiale la société Longchamp.
La société [N] [O] se présente comme étant titulaire notamment des droits patrimoniaux d’auteurs relatifs à un sac (Le sac Longchamp) créé selon elle par monsieur [C] [O], styliste et représentant légal des sociétés [N] [O] et Longchamp.
Ce sac vendu en plus de 20.500.000 exemplaires est commercialisé dans diverses versions, tailles et coloris.
Reprochant à l’entité [R] Andersen inh [G] Andersen de commercialiser un sac reprenant les caractéristiques esthétiques de son modèle original, en y ajoutant la même fonction pliante, la société [N] [O] a fait établir
* le 3 février 2010 un procès verbal de constat par Maître [W] [V], Huissier de Justice à [Localité 2] la commercialisation litigieuse en version rayée verticale, sur le site www.sac-3000.com exploité par la société Vivadia,
* le 3 février 2010 un procès verbal de constat par Maître [H] [E], Huissier de Justice à [Localité 2] la commercialisation litigieuse en version rayée verticale, sur le site www.maginea.com exploité par la société LDLC.Com dont le nom commercial est Maginea,
* le 3 février 2010 un procès verbal de constat par Maître [U] [E], Huissier de Justice à [Localité 2] la commercialisation litigieuse en version isotherme sur le site [01] exploité par [R] Andersen
* le 2 juin 2010 un procès verbal de constat par Maître [U] [E], Huissier de Justice à [Localité 2] la commercialisation litigieuse en version unie Scorlan et la version rayée Scorlan sur le site [01] exploité par la société [R] Andersen,
et a fait procéder
* en février et mars 2010 à des achats en ligne sur les sites www.maginea.com et www.sac3000.com, constatés par huissiers,
* les 21 mai 2010, 25 et 27 mai 2010 à des saisies-contrefaçon dans les locaux au siège de la société LDL.com à Ecully et au siège de la société Vivadia à [Localité 1] en vertu de deux ordonnances présidentielles respectivement du tribunal de grande instance de Lyon en date du 17 mai 2010 et du tribunal de grande instance de Marseille en date du 18 mai 2010.
Monsieur [C] [O], la SAS [N] [O] et la SAS Longchamp ont par actes d’huissier du 29 juin 2010 fait assigner la société [R] Andersen inh Sven andersen et la société Vivadia en contrefaçon et concurrence déloyale.
En février 2011 les demandeurs et monsieur [C] [O] qui est par ailleurs intervenu volontairement aux débats dans l’instance en cours ont signé une transaction avec la société LDLC.Com.
[G] [R] qui exploite ses activités sous l’enseigne [R] Andersen, est intervenu volontairement à la procédure.
Suivant jugement dont appel, le tribunal a essentiellement :
– déclaré recevables les demandes de [C] [O] au titre de la contrefaçon de droit d’auteur
– déclaré recevables les demandes de la SAS Longchamp et la SAS [N] [O] au titre de la contrefaçon de droit d’auteur,
– dit que la S.A.R.L. Vivadia et la société [R] Andersen n’ont pas commis d’actes de contrefaçon, ni d’actes de concurrence déloyale,
– dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire,
– condamné [C] [O], la SAS Longchamp et la SAS [N] [O] aux entiers dépens,
– condamné in solidum [C] [O], la SAS Longchamp et la société [O] à verser à la S.A.R.L. Vivadia et à Sven [R], chacun, la somme de 8.000 euros au titre des frais irrépétibles.
En cause d’appel les appelants demandent essentiellement dans leurs dernières écritures du 4 février 2013 de :
– confirmer le jugement en ce qu’il a jugé que le sac Longchamp était protégeable au titre du droit d’auteur et que monsieur [C] [O] et la société [N] [O] étaient respectivement recevables à agir au titre de la contrefaçon de droits d’auteur,
– réformer le jugement pour le surplus,
– dire que la société Vivadia a commis des actes de contrefaçon et a commis des actes de concurrence déloyale,
– à titre subsidiaire, dire que la société Vivadia a commis à l’égard de la société [O] des actes de concurrence déloyale et à tout le moins parasitaire,
– en tout état de cause, dire que la société Vivadia a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire vis à vis de la société Longchamp,
– condamner la société Vivadia à payer à :
* [C] [O] la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral,
* la société [N] [O] :
– la somme de 20.000 euros au titre des actes de contrefaçon,
– la somme de 30.000 euros au titre des actes de concurrence déloyale et parasitaire,
– la somme de 50.000 euros au titre des actes de concurrence déloyale et parasitaire,
– prononcer des mesures d’interdiction, destruction et publications dans la presse et sur son site internet,
– condamner in solidum la société Vivadia et monsieur [G] [R], à chacun des appelants la somme de 7.000 euros.
Les appelants font valoir à cet effet que :
– au printemps 1993, [C] [O] a créé un modèle de sac dont l’originalité lui est conférée par la combinaison des caractéristiques qu’ils décrivent,
– l’association de des différents éléments qu’ils listent est en soi une oeuvre originale révélant l’effort de l’auteur,
– de nombreuses décisions de justice ont reconnu l’originalité de ce sac,
– ce sac est commercialisé dans de nombreuses versions qui varient en fonction de la couleur, des matériaux, du caractère pliant ou non,
– ce sac est exploité depuis 20 ans, 200 personnes se consacrent à sa fabrication en France, 20.500.000 sacs ont été déjà vendus à travers le monde,
– ils justifient du caractère notoire de ce sac par les nombreuses publications qui y sont relatives,
– et cette notoriété fait qu’il est le plus copié au monde,
– en sa qualité d’auteur dont il justifie par des attestations, [C] [O] est titulaire en application des articles L 111-1 et L 121-1 du CPI du droit moral sur sa création, et le fait que le nom Andersen soit apposé sur les copies de moins bonne qualité, à des prix inférieurs, porte atteinte à ce droit,
– [C] [O] a cédé ses droits patrimoniaux sur ce sac à la société [C] [O] comme cela est prouvé par son attestation, puis la société [C] [O] les a cédés à la société [N] [O] dans le cadre d’un apport partiel d’actifs du 29 novembre 2000 qui comprenait ‘tous les éléments corporels et incorporels liés à l’activité de bureau de Style de la société [C] [O] dont spécifiquement tous les droits de propriété ou de possession intellectuelle, industrielle ou commerciale, savoir-faire ou autre pouvant appartenir à la société [C] [O]’,
– cette cession est confirmée par [C] [O] en sa qualité de représentant légal de chacune de ces deux sociétés,
– les différentes attestations communiquées aux débats émises par des personnes qui ont nécessairement un lien de proximité avec l’auteur, sont suffisamment probantes,
– le refus de l’enregistrement à titre de marque figurative du dessin du sac par une décision du TPIUE du 21 octobre 2008 est sans incidence sur la validité du droit d’auteur en vertu de son originalité et non de son caractère distinctif, s’agissant de critères juridiques différents applicables à des situations juridiques différentes,
– la société Longchamp fait partie du même groupe industriel que la société [N] [O] et assure de manière exclusive la fabrication en France et la distribution, sous la marque Longchamp, des oeuvres ou des modèles dont la société [N] [O] est propriétaire, et c’est elle qui effectue les investissements publicitaires et commerciaux engagés pour conforter cette commercialisation,
– la preuve des actes de contrefaçon est établie par les actes d’huissiers, la transaction conclue avec la société LDLC.Com qui reconnaît les faits reprochés, et par les engagements pris par [R] Andersen vis à vis de la société Longchamp en Allemagne dans le cadre d’une transaction homologuée par le tribunal de Hambourg le 22 avril 2009 où la protection a été obtenue sur le terrain de la concurrence déloyale,
– la société [R]-Andersen reconnaît d’ailleurs avoir arrêté de fournir les sacs litigieux en France,
– les sacs litigieux quelle qu’en soit la version reproduisent la quasi-intégralité de la combinaison originale des caractéristiques essentielles du sac Longchamp : la même présence d’un petit rabat pressionné situé entre les deux poignées par dessus la fermeture à glissière, la forme du rabat sensiblement arrondie aux coins, et dont le pourtour est souligné par une épaisse couture surpiquée, la double couture surpiquée qui fixe ce rabat au dos du sac, les deux poignées tubulaires fixées de la même façon au corps du sac de chaque côté du rabat, à l’aide de pattes soulignées par une couture surpiquée et au bout légèrement arrondi, la présence de petites languettes arrondies soulignant les coins supérieurs du sac, la forme caractéristique du corps du sac avec le même fond rectangulaire et le même profil sensiblement triangulaire, dans des proportions similaires,
– la contrefaçon s’apprécie par les ressemblances et les seules différences relevées par le tribunal : dimension du rabat, couture du rabat, absence de bouton pression apparent, terminaison des languettes et présence de renfort aux coins du sac, ne suffisent pas à donner à la copie une physionomie propre, ni à écarter le grief de contrefaçon,
– la reprise de la fonction pliante du sac pliage Longchamp qui rencontre le plus de succès, la reprise d’un effet de gamme par les diverses taille et coloris, la commercialisation d’une copie reproduisant de façon significative la majorité des caractéristiques du sac invoqué qui l’identifient aux yeux du public en ce qu’il a d’attractif et qui se trouvent indissociablement liées à lui, génèrent un risque de confusion pour le consommateur d’attention moyenne qui n’a pas en même temps les deux sacs sous les yeux, sont constitutifs de comportements déloyaux fautifs, distincts de la contrefaçon,
– à titre subsidiaire il convient de relever que le sac litigieux reprend les caractéristiques tant esthétiques, que fonctionnelles et commerciales du sac Longchamp qui revêt un caractère parasitaire, et sa demande est recevable en cause d’appel dès lors que les demandes formées à ce titre l’ont été en première instance en complément de l’action en contrefaçon,
– la société Longchamp a le droit en sa qualité de fabricante et distributrice du sac Longchamp d’être protégée contre les agissements déloyaux et parasitaires commis à son encontre,
– le préjudice des société [O] et Longchamp est d’ordre matériel et commercial : atteinte à la notoriété et à leur image commercial, avilissement du sac Longchamp, banalisation du sac, atteinte à sa valeur patrimoniale, dépréciation des investissements, et atteinte au réseau de distribution,
– les copies incriminées ont bénéficié d’une exposition importante sur trois sites internet,
[G] [R] et la S.A.R.L. Vivadia s’opposent aux prétentions des appelants, et pour l’essentiel, demandent de :
– dire que la demande subsidiaire en concurrence déloyale et parasitaire formulée par la société [N] [O] pour la première fois en appel est irrecevable,
– confirmer le jugement en ce qu’il a dit que la S.A.R.L. Vivadia et la société [R] Andersen n’ont pas commis d’acte de concurrence déloyale et de concurrence déloyale et condamné les demandeurs à leur payer la somme de 8000 euros à chacun,
– infirmer le jugement pour le surplus,
– déclarer les demandes de monsieur [C] [O] et de la société [N] [O] irrecevables et mal fondées,
– débouter les appelants de toutes leurs demandes,
– condamner in solidum les appelants à chacun d’eux la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
[G] [R] et la S.A.R.L.Vivadia exposent à cet effet que :
– [G] [R] fabrique de nombreux articles de bagagerie en Allemagne sous l’enseigne [R] andersen qu’il revend en Europe et notamment en France,
– monsieur [C] [O] ne peut se prévaloir d’aucun document revêtu d’une date certaine attestant qu’il est l’auteur du modèle revendiqué et la présomption de titularité prévue à l’article L 113-1 du code de la propriété intellectuelle ne devrait en principe bénéficier qu’à la seule société Longchamp qui a diffusé le modèle,
– la subordination des attestants à celui qui se prétend auteur ôtent tout effet probant à celles-ci et sont insuffisantes à établir la qualité d’auteur revendiquée,
– de plus on relève de nombreuses différences d’ordre esthétique et visuel entre le modèle revendiqué n° 1623 représenté par un seul croquis vu de face avec les sacs Longchamp prétendument contrefaits,
– monsieur [C] [O] est donc irrecevable en ses demandes,
– dès lors que monsieur [C] [O] ne parvient pas à prouver sa paternité sur cette oeuvre la société [O] ne peut prétendre utilement être venue aux droits de la société [C] [O] elle-même venue aux droits de monsieur [C] [O],
– la seule attestation de [C] [O] n’a aucune force probante, et la chaîne complexe de transmission de droits n’est nullement établie au regard du modèle litigieux représenté sous forme de croquis dans les écritures,
– le document portant cession partielle d’actifs est trop imprécis pour constituer la preuve de la transmission des droits, car seuls sont inclus dans cette transmission les modèles créés dans le bureau de style par la société [C] [O],
– aucune facture ni aucun autre élément de preuve n’est propre à établir l’accomplissement par la société [N] [O] d’actes d’exploitation en son nom du modèle prétendument contrefait, et cette dernière ne peut se prévaloir davantage d’actes de concurrence déloyale commis à son détriment puisqu’elle ne détient aucun droit sur ces modèles dont il est dit qu’ils seraient fabriqués et commercialités par la seule société Longchamp,
– le protocole d’accord signé avec la société LDCL.Com ne les lie pas et ne vaut pas reconnaissance de responsabilité, qu’ils contestent, et le retrait provisoire du modèle litigieux en France qui n’a fait l’objet que d’un faible chiffre d’affaires n’est pas plus pertinent,
– le protocole d’accord conclu en Allemagne entre [G] Andersen et la société Longchamp autorise expressément [R] Andersen à commercialiser les sacs Scorlan et son sac isotherme Ipek,
– ils ne contestent pas l’originalité du sac Longchamp 1623 mais soutiennent que compte tenu du caractère banal des éléments constituants la combinaison originale, seule cette combinaison originale peut fait l’objet de la protection au titre des droits d’auteur,
– la chambre des recours de l’OHMI a refusé l’enregistrement de la marque figurative reproduisant le sac au motif que les caractéristique du signe litigieux ne sont pas de nature à conférer un caractère distinctif à la marque demandée,
– ce sont les caractéristiques spécifiques du modèle Longchamp qui s’ajoutent à celles banales du fond commun de la maroquinerie, à savoir la forme spécifique du rabat soulignée par l’épaisse couture surpiquée, le bouton doré, les surpiqûres très apparentes sur toutes les parties en cuir, l’alliance du cuir fauve surpiqué avec d’autres matériaux, des proportions spécifiques,
– ces caractéristiques spécifiques qui confèrent l’originalité du modèle ne se retrouvent pas dans les modèles argués de contrefaçon,
– le principe d’un rabat par dessus la couture du sac revêt en lui-même un caractère fonctionnel dépourvu d’originalité ayant fait notamment l’objet d’un brevet américain ancien datant de 1925,
– la notoriété du sac Longchamp est telle qu’il est reconnaissable et ses moindres détails sont connus du public et plus particulièrement de l’observateur averti,
– les différences de proportion, de formes d’accessoires, de matériaux et de finitions seront en conséquence, immédiatement perçues par la consommatrice qui les distinguera aisément,
– en l’absence de contrefaçon et de risque de confusion les sociétés [O] et Longchamp doivent être déboutées de leur demande formée au titre de la concurrence déloyale, cette demande formée à titre subsidiaire pour la première fois en cause d’appel est irrecevable,
– la fonction de pliage, ancienne et fonctionnelle ne peut être protégée, alors que l’effet de gamme en matière de maroquinerie est habituelle,
– la masse contrefaisante alléguée est quasi inexistante puisqu’ entre 2008 et 2010 345 sacs de quatre modèles différents ont été vendus générant un chiffre d’affaires de 3.899,05 euros et les modèles incriminés restants ont été retirés de la vente.
*****
Sur la titularité du droit d’auteur :
Aux termes de l’article L 113-1 du code de la propriété intellectuelle, la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l”uvre est divulguée.
En application de l’article L 111-2 du dit code l”uvre est réputée créée, indépendamment de toute divulgation publique du seul fait de la réalisation, même inachevée, de la conception de l’auteur.
La preuve de cette création peut se faire par tous moyens.
Monsieur [C] [O] représentant légal des sociétés [N] [O] et Longchamp communique aux débats, outre sa propre attestation indiquant qu’il est l’auteur du sac référencé n° 1623, des attestation de madame [A] [L], secrétaire de direction auprès de monsieur [C] [O] depuis 1982, qui atteste qu’il est l’auteur de ce sac, et de monsieur [D] [Z], directeur de production de la SAS Longchamp, salarié depuis 1988, et de madame [J] [B], salariée depuis 1959 à l’époque responsable de l’atelier des modèles que monsieur [C] [O], qui attestent tous deux que [C] [O] a créé le modèle pliage référencé 1623 qui avait été commercialisé à l’automne 1993, sans modification depuis.
En l’absence de revendication contraire, les attestations de témoins directs puisque dans l’entourage du créateur, sont suffisamment probantes pour établir la qualité d’auteur de monsieur [C] [O].
Il avait donc qualité pour céder ses droits patrimoniaux d’auteur à la société [C] [O], comme il en atteste, qui les a cédés à la société [N] [O] dans le cadre d’un apport partiel d’actifs du 29 novembre 2000 qui comprenaient tous les éléments corporels et incorporels liés à l’activité du bureau de style de la société [C] [O] dont spécifiquement tous les droits de propriété ou de possession intellectuelle, industrielle ou commerciale, savoir-faire ou autre pouvant appartenir à la société [C] [O], cession approuvée par assemblée générale de chacune des sociétés concernées.
Il est par ce document suffisamment démontré la preuve de la cession des droits dont s’agit et le tribunal, par motifs pertinents et circonstanciés que la cour fait siens, a considéré qu’il est démontré que la chaîne des droits d’auteur patrimoniaux sur le sac 1623 est continue entre [C] [O] et la société [O] et que par ailleurs un tiers n’a pas qualité à contester la convention d’apport partiel.
C’est à bon droit que le tribunal a déclaré recevables monsieur [C] [O] et la société [N] [O] à agir au titre du droit d’auteur.
En revanche, c’est à tort qu’il a déclaré la société Longchamp qui ne dispose et n’invoque aucun droit d’auteur, recevable à ce titre, qu’il convient de le réformer à ce titre.
Sur l’originalité du modèle de sac revendiqué :
Les appelants soutiennent que l’originalité du sac Longchamp se caractérisent selon la combinaison des éléments suivants :
* son petit rabat pressionné, situé entre les deux poignées et qui coiffe une partie de la fermeture à glissière ;
* la forme légèrement arrondie de ce petit rabat, soulignée par une épaisse couture surpiquée ;
*la couture surpiquée sur le devant du sac, dans le prolongement du rabat et qui évoque le contour de sa poche interne ;
*la fixation de ce rabat au dos du sac par une double couture surpiquée ;
*ses deux poignées terminées en pointes arrondies fixées, à l’aide de pattes surpiquées, de chaque côté de l’ouverture du sac ;
*ses deux petites languettes arrondies, situées à chaque extrémité de la fermeture à glissière et qui soulignent les coins supérieurs du sac, en rebiquant ;
*la forme trapézoïdale de son corps, vu de face ;
*son fond rectangulaire ;
* son profil triangulaire ;
Cette combinaison de ces différentes caractéristiques qui manifeste l’empreinte de la personnalité de leur auteur lui confère, ce qui n’est pas contesté par les intimés, un caractère original.
Sur la contrefaçon :
L’examen comparatif du sac Longchamp avec le sac Scorlan (intimés) s’il reprend un rabat, celui-ci est plus large en son extrémité qu’à sa base, plus long, sans surpiqûres et sans le bouton de pression en son centre, alors que dans le sac Longchamp il est constitué d’une pièce unique et uniforme, en cuir, comprenant en son centre un bouton de pression doré et sur tout son pourtour une surpiqûre en fil clair.
Le sac Scorlan qui est en matière synthétique comporte une baguette argent rectangulaire venant barrer les bandes parallèles figurant sur le rabat et s’il reprend sur son pourtour et à son attache arrière des surpiqûres celles-ci sont peut visibles, se confondant avec la couleur du rabat alors que celles présentes sur le sac Longchamp d’une couleur différente du reste du rabat sont par contraste, visibles.
Le rabat est positionné différemment au dos des sacs, proche des pattes de fixation des poignées sur le sac Longchamp et plus bas sur le sac Scorlan et la forme générale de ce rabat est différente : forme rectangulaire avec des arêtes vives et des coins arrondis pour le sac Longchamp et en forme de poire pour le sac Scorlan.
Le bouton rond doré visible sur le rabat du sac Longchamp, caractéristique du modèle n’est pas repris dans le sac Scorlan qui ne comporte qu’un bouton pression non visible lorsque le rabat est fermé et les coutures surpiquées sur le devant du sac dans le prolongement du rabat, évoquant la poche interne du sac Longchamp, également un des ses éléments caractéristiques spécifiques, ne sont pas reprises dans le sac Scorlan, la surpiqûre apparente des poignées du sac Longchamp est absente du sac Scorlan.
La reprise des terminaisons des pattes des poignées se diffèrent dans la terminaison, en pointe sur le sac Longchamp et arrondie sur le sac Scorlan.
La reprise des languettes en extrémité de la fermeture à glissière, soulignant les coins supérieurs du sac, sont en cuir et rebiquent sur le sac Longchamp et sont en matière synthétique et quasi alignées avec la partie supérieure du sac Scorlan.
La forme des sacs est également différente trapézoïdale pour le sac Longchamp et quasi rectangulaire avec un effet arrondi sur les côtés pour le sac Scorlan.
Les quelques ressemblances du fait de l’emprunt d’éléments appartenant au fond commun de la maroquinerie ne suffisent pas à caractériser la contrefaçon dès lors que ne sont pas reprises les caractéristiques distinctives de la combinaison du modèle de sac Longchamp : la forme spécifique du rabat soulignée par l’épaisse couture surpiquée, le bouton doré, les surpiqûres très apparentes sur toutes les parties en cuir, l’alliance du cuir fauve surpiqué avec d’autres matériaux et de couleurs, les proportions spécifiques qui sont des éléments dominants de la combinaison qui confèrent l’originalité au modèle.
Les différences importantes relevées sur le sac Scorlan lui confèrent une physionomie propre, un parti pris esthétique particulier qui modifient l’impression visuelle d’ensemble de ce modèle par rapport au sac Longchamp excluant tout risque de confusion et ce, d’autant que le consommateur averti du sac Longchamp notoirement connu, percevra immédiatement ces différences.
Il s’ensuit que c’est à bon droit que le tribunal a rejeté les demandes formées au titre de la contrefaçon.
Sur la concurrence déloyale et parasitaire :
Les appelants reprochent aux intimés à titre principal et à titre subsidiaire, tant pour la concurrence déloyale que pour les faits de parasitisme, la reprise de la fonction pliante de la version pliage du sac Longchamp et la reprise de l’effet de gamme par la commercialisation des sacs litigieux sous diverses tailles et couleurs ainsi que l’existence d’un risque de confusion compte tenu des ressemblances existant entre les sacs.
Les intimés ne sont pas fondées à soutenir que la société [N] [O] forme une demande nouvelle en cause d’appel et partant irrecevable, au motif que la demande en concurrence déloyale et parasitaire était formée à titre principal, en complément de l’action en contrefaçon en première instance, alors qu’elle est faite, en cause d’appel, en sus, à titre subsidiaire, dès lors qu’il s’agit d’une demande qui tend aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges et repose sur le même fondement juridique.
Dans un contexte de liberté du commerce et de l’industrie permettant à un acteur économique d’attirer licitement la clientèle de son concurrent, celui qui ne peut opposer valablement un droit de propriété intellectuelle ne peut trouver dans l’action en concurrence déloyale une action de repli afin de faire sanctionner la simple reproduction ou imitation de l”uvre qu’il commercialise.
A défaut, pour les appelants de démontrer qu’au delà d’une simple ressemblance exclusive de confusion , les intimés ont adopté un comportement contraire aux usages loyaux du commerce de nature à rompre l’équilibre dans les relations concurrentielles, aucune faute caractérisant la concurrence déloyale ne saurait être retenue ;
Or, la recherche d’un effet de gamme, notamment pour les sacs, par la déclinaison du même modèle en différentes couleurs et tailles, est habituelle en maroquinerie alors qu’en l’espèce, les modèles litigieux ne reprennent ni les coloris, ni les matériaux des sacs Longchamp et qu’il a déjà été indiqué qu’aucun risque de confusion n’existe entre les modèles opposés.
La particularité fonctionnelle de pliage qui est ancienne adopté sur les sacs litigieux n’est pas constitutif d’un fait fautif, les appelants ne pouvant prétendre à l’exclusivité de cette fonction.
C’est donc également à bon droit que le tribunal a écarter les demandes formées sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire.
Aucun fait distinct n’établit le bien fondé de la même demande formée à titre subsidiaire qui doit être également rejetée.
Sur les autres demandes :
L’équité commande d’allouer à chacun des intimés la somme de 8.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et de rejeter la demande formée à ce titre par les appelants.
Les dépens resteront à la charge in solidum des appelants qui succombent et qui seront recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.