N° Z 17-82.637 FS-D
N° 401
CG10
27 MARS 2018
REJET
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
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M. X… Y… ,
contre l’arrêt de la cour d’appel de PARIS, chambre 2-7, en date du 1er mars 2017, qui, pour contestation de crime contre l’humanité, l’a condamné à 30 000 euros d’amende, a ordonné une mesure de publication et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 6 février 2018 où étaient présents : M. Soulard, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, MM. Straehli, Cathala, Ricard, Parlos, Bonnal, Mme Ménotti, conseillers de la chambre, MM. Barbier, Talabardon, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Lemoine ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de Mme le conseiller DURIN-KARSENTY, les observations de la société civile professionnelle LE GRIEL, et Me GOLDMAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général LEMOINE ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du jugement qu’il confirme et des pièces de la procédure, que M. X… Y… a été cité, à la requête du procureur de la République, devant le tribunal correctionnel, du chef de contestation de l’existence de crime contre l’humanité, faits prévus par l’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881, dans sa version antérieure à la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017, en raison des propos suivants, tenus au cours d’une interview dans l’émission » Bourdin Direct » diffusée sur BFM TV : » Ce que j’ai dit correspondait à ma pensée que les chambres à gaz étaient un détail de l’histoire de la guerre, à moins d’admettre que ça soit la guerre qui soit un détail des chambres à gaz » (…), » « C’est pas un million de morts, c’est les chambres à gaz » (…), « Je ne sais pas, moi je parle de choses précises, je n’ai pas parlé de nombre de morts, j’ai parlé d’un système, j’ai dit que c’était un détail de l’histoire de la guerre » ; que, dans un courrier adressé au procureur de la République le 20 juillet 2015, M. Y… a opposé son immunité parlementaire, en qualité de député au Parlement européen ; que le 21 septembre 2015, M. Y… a réitéré les termes de son précédent courrier auquel le ministère public a répondu le 21 octobre 2015, estimant son argumentation infondée ; que le prévenu a adressé une lettre au président du tribunal correctionnel, invoquant à nouveau son immunité parlementaire et indiquant qu’il ne participerait pas aux actes de procédure concernant cette affaire, en l’absence de levée de son immunité parlementaire et l’informant que son avocat se présenterait à l’audience avec pour seul mandat de soutenir cette exception ; qu’il résulte du jugement en date du 6 avril 2016, que M. Y… n’a pas comparu en personne, que son avocat s’est présenté muni d’un pouvoir en vue de ne plaider que sur l’immunité parlementaire, puis, l’incident ayant été joint au fond, s’est retiré, les débats se poursuivant ; que le tribunal est entré en voie de condamnation et que le prévenu a relevé appel ainsi que plusieurs parties civiles sur l’action civile ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 385, 512 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale,
« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré irrecevable l’exception de nullité de la citation soulevée par M. Y… ;
« aux motifs que « M. Y… , représenté devant le tribunal, n’a soulevé que le moyen tiré de l’immunité parlementaire et n’a pas soulevé d’autres exceptions » ; que « les exceptions de nullité doivent être présentées avant toute défense au fond » ; que « M. X… Y… , représenté par son avocat, qui a fait le choix, le tribunal ayant joint l’incident au fond, de ne pas être présent aux débats, n’est pas recevable à soulever devant la cour d’autres exceptions tirées de la nullité de la procédure » ;
« alors que, devant le tribunal correctionnel, M. Y… s’était borné, par la voix de son avocat, à invoquer l’irrecevabilité de l’action publique tirée de son immunité parlementaire, laquelle interdisait toute poursuite, et ne s’était pas défendu au fond et que, dès lors, contrairement à ce qu’a jugé la cour d’appel, M. Y… était recevable à invoquer, pour la première fois en cause d’appel, une exception de nullité de la citation » ;
Attendu que, devant la cour d’appel, M. Y… a soulevé la nullité de la citation, en soutenant qu’elle ne répondait pas aux exigences des articles 50 et 53 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable cette exception présentée pour la première fois en cause d’appel, l’arrêt énonce que M. Y… , représenté devant le tribunal, n’a soulevé que le moyen tiré de l’immunité parlementaire et n’a pas soulevé d’autres exceptions ;
Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a fait l’exacte application de l’article 385 du code de procédure pénale, dès lors que le prévenu était représenté par son conseil, présent au début de l’audience des débats du tribunal correctionnel, muni d’un mandat de représentation, peu important que l’avocat se soit borné, en alléguant les termes dudit mandat, à présenter une exception tirée de l’immunité parlementaire de l’intéressé avant de prendre l’initiative de quitter l’audience, après que l’incident eut été joint au fond ;
Que, dès lors, le moyen ne peut qu’être rejeté ;