LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l’article 1133 du code civil ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X… a souscrit le 10 mai 2007 un contrat de courtage matrimonial, prévoyant des frais d’adhésion de 8 100 euros TTC, auprès de la société Centre national de recherches en relations humaines, exerçant sous l’enseigne Eurochallenges (la société) ; que celle-ci l’a assigné en paiement puis a soulevé la nullité de la convention ;
Attendu que pour annuler le contrat litigieux « aux torts » de M. X… et condamner ce dernier à verser des dommages-intérêts à la société, l’arrêt retient qu’il s’est présenté, lors de la signature de la convention, comme divorcé en cochant dans l’acte la case correspondante, bien qu’il ait été alors toujours engagé dans les liens du mariage puisque le jugement de divorce le concernant n’a été prononcé que le 22 avril 2008, soit près d’une année plus tard, ajoute que s’il avait avisé la société de sa situation, elle n’aurait pas manqué de l’informer de l’impossibilité de rechercher un nouveau conjoint en étant toujours marié, puis énonce que le contrat du 10 mai 2007 doit donc être annulé pour cause illicite comme contraire à l’ordre public de protection de la personne ainsi qu’aux bonnes moeurs, « un homme encore marié ne pouvant légitimement convoler en une nouvelle union » ;
Qu’en statuant ainsi alors que le contrat proposé par un professionnel, relatif à l’offre de rencontres en vue de la réalisation d’un mariage ou d’une union stable, qui ne se confond pas avec une telle réalisation, n’est pas nul, comme ayant une cause contraire à l’ordre public et aux bonnes moeurs, du fait qu’il est conclu par une personne mariée, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 12 novembre 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence ;
Condamne la société Centre national de recherches en relations humaines aux dépens ;
Vu l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Centre national de recherches en relations humaines à payer à la SCP Potier de La Varde et Buck-Lament, avocat de M. X…, la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils pour M. X…
PREMIER MOYEN DE CASSATION
M. X… fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir annulé « à ses torts », pour cause illicite et contraire aux bonnes moeurs, le contrat conclu le 10 mai 2007 avec la société Eurochallenges et de l’avoir condamné à verser à cette dernière la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE M. Belgacem X… s’est présenté comme divorcé, cette mention figurant clairement par l’apposition d’une croix dans la case située en face du terme « divorcé », tant dans la page 1 du contrat d’adhésion portant l’état civil complet, le domicile et le téléphone de l’adhérent contractant que dans la page 3 du questionnaire d’orientation préconjugal à l’énoncé de sa situation de famille ; que lors de la signature de ce contrat M. Belgacem X… était toujours retenu dans les liens du mariage puisque le jugement de divorce d’avec son épouse ne sera prononcé que le 22 avril 2008, soit près d’une année plus tard ; que certes une ordonnance constatant la non-conciliation des époux X… avait été prise le 24 avril 2007, soit tout juste 15 jours avant que le mari ne se présente dans les locaux de la SARL CNRRH EUROCHALLENGES, court délai qui ne permettait pas à M. Belgacem X… d’oublier sa comparution devant le juge aux affaires familiales et de confondre séparation provisoire de deux personnes mariées soumises à un délai de réflexion avant de pouvoir assigner en divorce ; qu’au surplus s’il avait avisé la S.A.R.L CNRRH EUROCNALLENGES de sa situation de séparation, dans les termes existants, cette société n’aurait pas manqué de l’informer de l’impossibilité et de l’interdiction posées à la recherche d’un nouveau conjoint en étant toujours marié ; que le contrat d’adhésion du 10 mai 2007 doit donc être annulé pour cause illicite comme contraire à l’ordre public de protection de la personne ainsi qu’aux bonnes moeurs, un homme encore marié ne pouvant légitimement convoler en une nouvelle union et ce, aux torts de M. Belgacem X…, aucun reproche ne pouvant être fait à la SARL CNRRH EUROCHALLENGES, qui justifie par des pièces probantes avoir rempli son mandat et exécuté la prestation contractuellement convenue alors même que M. X… dont la réalité de sa situation matrimoniale ne lui a été révélée que dans le cadre de la présente instance et en tout état de cause postérieurement à la signature du contrat, ne respectait pas ses engagements personnels ; que si par application de l’article 1133 du code civil, lorsqu’une convention intervenue entre les parties a une cause contraire aux bonnes moeurs celles-ci sont irrecevables à fonder sur elle aucune action, soit pour l’exécution de cette convention, soit pour la restitution des sommes payées ou les avances faites pour son exécution, il n’en demeure pas moins que la nullité du contrat n’exclut pas l’exercice par la victime des manoeuvres dolosives d’une action responsabilité délictuelle pour obtenir de leur auteur réparation du préjudice qu’elle a subi ; qu’il est ainsi démontré que la fausse déclaration de M. X… a conduit la SARL CNRRH EUROCHALLENGES à contracter alors que la cause du contrat était illicite, viciant son consentement, et qu’un tel comportement fautif lui a causé un préjudice matériel dans la mesure où celle-ci a exécuté son engagement contractuel en établissant la fiche de candidature de M. Belgacem X… au mieux de ses intérêts, en contactant les personnes sélectionnées par son contractant et en lui adressant les réponses positives de ces dernières ; qu’il lui sera alloué à ce titre la somme de 4.000 € à titre de dommages et intérêts ;
ALORS QUE n’est pas nul comme ayant une cause contraire aux bonnes moeurs le contrat de courtage matrimonial conclu par une personne mariée ; que la cour d’appel qui, pour annuler le contrat de courtage matrimonial conclu par M. X… avec la société Eurochallenges, a jugé que le premier étant marié au moment de la signature de ce contrat, celui-ci avait une cause illicite comme contraire à l’ordre public et aux bonnes moeurs, a violé l’article 1133 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
M. X… fait grief à l’arrêt attaqué de l’avoir condamné à verser à la société Eurochallenges la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE M. Belgacem X… s’est présenté comme divorcé, cette mention figurant clairement par l’apposition d’une croix dans la case située en face du terme « divorcé », tant dans la page 1 du contrat d’adhésion portant l’état civil complet, le domicile et le téléphone de l’adhérent contractant que dans la page 3 du questionnaire d’orientation préconjugal à l’énoncé de sa situation de famille ; que lors de la signature de ce contrat M. Belgacem X… était toujours retenu dans les liens du mariage puisque le jugement de divorce d’avec son épouse ne sera prononcé que le 22 avril 2008, soit près d’une année plus tard ; que s’il avait avisé la S.A.R.L CNRRH EUROCNALLENGES de sa situation de séparation, dans les termes existants, cette société n’aurait pas manqué de l’informer de l’impossibilité et de l’interdiction posées à la recherche d’un nouveau conjoint en étant toujours marié ; qu’aucun reproche ne peut être fait à la SARL CNRRH EUROCHALLENGES, qui justifie par des pièces probantes avoir rempli son mandat et exécuté la prestation contractuellement convenue alors même que M. X… dont la réalité de sa situation matrimoniale ne lui a été révélée que dans le cadre de la présente instance et en tout état de cause postérieurement à la signature du contrat, ne respectait pas ses engagements personnels ; que si par application de l’article 1133 du code civil, lorsqu’une convention intervenue entre les parties a une cause contraire aux bonnes moeurs celles-ci sont irrecevables à fonder sur elle aucune action, soit pour l’exécution de cette convention, soit pour la restitution des sommes payées ou les avances faites pour son exécution, il n’en demeure pas moins que la nullité du contrat n’exclut pas l’exercice par la victime des manoeuvres dolosives d’une action responsabilité délictuelle pour obtenir de leur auteur réparation du préjudice qu’elle a subi ; qu’il est ainsi démontré que la fausse déclaration de M. X… a conduit la SARL CNRRH EUROCHALLENGES à contracter alors que la cause du contrat était illicite, viciant son consentement, et qu’un tel comportement fautif lui a causé un préjudice matériel dans la mesure où celle-ci a exécuté son engagement contractuel en établissant la fiche de candidature de M. Belgacem X… au mieux de ses intérêts, en contactant les personnes sélectionnées par son contractant et en lui adressant les réponses positives de ces dernières ; qu’il lui sera alloué à ce titre la somme de 4.000 € à titre de dommages et intérêts ;
ALORS QUE le courtier matrimonial a une obligation de s’informer sur la situation matrimoniale de ses clients ; qu’en se bornant à relever, pour condamner M. X… à indemniser la société Eurochallenges, qu’il avait commis une faute en déclarant qu’il était divorcé, sans rechercher, comme elle y était invitée, si nonobstant cette déclaration, le courtier matrimonial n’aurait pas du s’assurer de la situation de son client, en sorte que la seule déclaration erronée de ce dernier n’était pas fautive, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
M. X… fait grief à l’arrêt attaqué de l’avoir débouté de sa demande de résolution de la convention du 10 mai 2007 pour manquement de la société Eurochallenges à son obligation d’information ;
AUX MOTIFS QUE M. X… ne saurait soutenir que l’absence de la mention du délai de rétractation de sept jours lui a causé un tort certain en l’empêchant de revenir sur son accord dans les délais, dès lors que la mention de ce délai de rétractation ne doit pas figurer à peine de nullité dans le contrat d’agence matrimoniale ;
ALORS QUE, tenu d’un devoir d’information et de conseil, le courtier matrimonial doit mentionner sur le contrat la possibilité qu’a son client de revenir sur son engagement dans un délai de sept jours à compter de la signature du contrat ; que la cour d’appel qui, pour débouter M. X… de sa demande de résolution de la convention du 10 mai 2007, s’est fondée sur la circonstance inopérante que la mention du délai de rétractation de sept jours n’était pas prévue à peine de nullité, en sorte que M. X… ne pourrait soutenir que l’absence de cette mention lui a causé un tort, la cour d’appel a violé les articles 1184 du code civil et 6 de la loi n° 89-421 du 23 juin 1989.