Texte intégral
La Cour,
Vu la requête enregistrée le 5 février 2015 au greffe de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur par laquelle M. M. X, comptable du syndicat mixte d’études, d’aménagement, d’équipement et de gestion de l’Europôle de l’Arbois (SME Europôle Arbois), a élevé appel du jugement du 3 décembre 2014 qui l’a constitué débiteur du SME de l’Arbois des sommes de 740 532,89 euros (au titre de la charge n° 2), de 9 472,13 euros (au titre de la charge n° 3) et de 12 413,05 euros (au titre de la charge n° 6), ces trois sommes étant augmentées des intérêts de droit à compter du 28 mars 2014 ;
Vu le réquisitoire du Procureur général près la Cour des comptes n° 2015-27 du 7 avril 2015 transmettant à la Cour la requête précitée ;
Vu le réquisitoire du procureur financier près la chambre régionale précitée du 19 mars 2014, ensemble les pièces de la procédure suivie en première instance et produites en appel ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité publique, en vigueur au moment des faits ;
Vu le décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985 modifié relatif à la rémunération des personnels civils et militaires de l’État, des personnels des collectivités territoriales et des personnels des établissements publics d’hospitalisation ;
Vu le décret n° 87-1004 du 16 décembre 1987 relatif aux collaborateurs de cabinet des autorités territoriales ;
Vu le décret n° 88-631 du 6 mai 1988 relatif à l’attribution d’une prime de responsabilité à certains emplois administratifs de direction des collectivités territoriales et des établissements publics locaux assimilés ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié ;
Vu le mémoire complémentaire de M. M. X en date du 25 novembre 2015 ;
Vu le rapport de M. Thibault
Deloye
, auditeur ;
Vu les conclusions n° 794 du 1
er
décembre 2015 du Procureur général ;
Entendu lors de l’audience publique de ce jour, M. Thibault
Deloye
, en son rapport, M. Gilles MILLER, avocat général, en les conclusions du ministère public ;
Après avoir entendu, en délibéré, M
me
Anne FROMENT-MEURICE, présidente de chambre maintenue en activité, en ses observations ;
Sur la charge n° 2
Attendu que, par le jugement entrepris, la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur a constitué M. X débiteur du SME Europôle Arbois de la somme de 740 532,89 euros augmentée des intérêts de droit à compter du 28 mars 2014 au motif qu’il avait manqué en 2011 et 2012 à ses obligations de contrôle de la dépense ; que ces manquements sont constitués d’une part, par l’absence de suspension des paiements alors même que les dates de certification du service fait sur certains mandats étaient antérieures aux fins théoriques des périodes d’exécution de la prestation et d’autre part, par le fait que les paiements en cause ont été effectués en application d’un marché qui n’était plus en vigueur ; que selon le jugement, ces manquements ont causé un préjudice financier au SME Europôle Arbois ;
Attendu que si M. X ne conteste pas formellement l’existence d’un manquement, il discute toutefois les deux motifs sur lesquels la chambre fonde le manquement ; qu’il convient donc d’examiner ce point ;
Sur la réalité du manquement
Attendu que M. X soutient tout d’abord que seuls sept mandats ont été effectivement payés avant la fin de la période d’exécution des prestations ; que, compte-tenu des délais de traitement du poste comptable, les autres l’ont été postérieurement à la fin de la période ; que dès lors les circonstances de l’espèce ne justifiaient pas de son point de vue de remettre en cause la certification de service fait pour une différence de quelques jours, par une suspension formelle des paiements telle que prévue par l’article 37 du décret du 29 décembre 1962 déjà cité ;
Attendu cependant, que pour certains des paiements en cause (mandats n° 154, 155, 369, 370, 653, 654, 932, 933, 1 059, 1 192, 1 333, 1 334, 754, 944, 1 221, 1 503, 491, 492, 1 509 et 1 510 pour l’exercice 2011 et 260 pour l’exercice 2012), la date de la certification du service fait est antérieure à la fin de la période théoriquement couverte par cette certification ; que dans ces conditions, le comptable ne pouvait s’assurer de la réalité du service fait, ni en conséquence de la validité de la créance et qu’il aurait dû, conformément à l’article 37 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, suspendre le paiement ; que M. X n’est donc pas fondé à contester ce point, s’agissant de ces mandats ;
Attendu que M. X conteste en second lieu le fait que la chambre régionale ait, dans le jugement entrepris, considéré qu’il avait payé des prestations exécutées en l’absence d’un marché en cours ; qu’il soutient que l’acceptation par le SME Europôle Arbois de la révision de prix portée sur la facture du mois de janvier 2011 valait avenant ; qu’il demande, si la valeur contractuelle de l’accord du 19 janvier 2011 matérialisé par une facture dûment acceptée par l’ordonnateur n’est pas reconnue, de limiter le montant du débet à celui des révisions de prix payées en 2011 et 2012 ;
Attendu que conformément à son acte d’engagement, le marché passé avec la société « Sécurité Europe Services » a été conclu pour un an à compter du 1
er
janvier 2010 ; que le même acte d’engagement prévoit qu’il ne peut être reconduit que de manière expresse ; qu’aucun avenant de reconduction signé n’a été produit ; qu’une révision de prix sur une facture ne saurait constituer un avenant ; que le comptable n’a pas le pouvoir de substituer aux pièces expressément requises par les nomenclatures d’autres pièces, fussent-elles équivalentes à ses yeux ; qu’ainsi la totalité des mandats en cause a été payée alors même que le marché n’était plus en vigueur ;
Attendu par voie de conséquence que la facture invoquée du 9 janvier 2011, qui ne saurait se substituer à l’existence d’un avenant manquant, ne peut conduire à diminuer le montant du débet ;
Attendu que le grief de M. X tendant à contester le manquement reconnu par la chambre régionale doit donc être écarté ;
Sur l’existence d’un préjudice
Attendu que M. X soutient qu’il n’y a pas eu de préjudice financier dans la mesure où la prestation a bien été exécutée et que la révision de prix a été clairement acceptée ;
Attendu qu’aucun avenant n’a été signé par les parties ; qu’il ne peut donc être valablement allégué qu’il s’agit d’une reconduction expresse ; que la révision de prix figure sur une simple facture ; qu’ainsi aucune pièce n’est venue matérialiser l’accord antérieur des parties, et notamment du SME Europôle Arbois, pour le paiement de ces prestations après expiration du marché initial ; qu’il y a donc lieu de considérer les paiements en cause comme indus et comme constitutifs d’un préjudice financier pour le syndicat mixte ;
Attendu que c’est donc à raison que la chambre régionale a considéré que le manquement de M. X avait occasionné un préjudice financier ; que le grief de M. X sur l’existence d’un préjudice financier doit être rejeté ;
Sur la charge n° 3
Attendu que par le jugement entrepris, la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur a constitué M. X débiteur du SME Europôle Arbois de la somme de 9 472,13 € augmentée des intérêts de droit à compter du 28 mars 2014 pour le paiement de mandats sur un compte bancaire d’une société qui n’était pas celle titulaire du marché ;
Attendu que M. X ne conteste pas le manquement ; qu’il conteste en revanche que celui-ci ait occasionné un préjudice financier pour le syndicat mixte ;
Attendu que la chambre motive l’existence d’un préjudice par le fait que M. X a effectué des paiements à une autre société qu’au titulaire initialement prévu du marché, sans aucun fondement ni justificatif ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier que la société initialement titulaire du marché a été dissoute le 17 avril 2009 et radiée le 29 mai 2009 ; que le Groupe AM a indiqué par un document écrit que dans le cadre d’une réorganisation interne, plusieurs sociétés, dont le titulaire du marché (Ascenseurs du midi) avaient fusionné au sein d’AM et que ce dernier avait récupéré les contrats dont les sociétés qui fusionnaient étaient titulaires à compter du 1
er
mai 2009 ;
Attendu donc qu’au moment des faits, le risque de double paiement était nul ; que les paiements ont été effectués en contrepartie d’un service certifié fait par l’ordonnateur ; que les coordonnées du compte bancaire sur lequel les sommes mandatées ont été payées sont celles du groupe AM, qui a effectué la prestation ; qu’aucun contentieux de nature à générer des frais supplémentaires n’a été engagé par le groupe AM ;
Attendu que pour établir qu’un manquement a causé un préjudice financier, il convient de s’assurer qu’il y a un lien de causalité entre les deux ; qu’au cas d’espèce, le seul manquement retenu, à savoir la non-suspension des paiements au motif d’une contradiction entre les noms et coordonnées bancaires du titulaire du marché et du bénéficiaire des paiements n’a occasionné aucun préjudice financier pour le SME de l’Arbois ;
Attendu que c’est donc à raison que M. X conteste l’admission par la chambre régionale, dans le jugement entrepris, de l’existence d’un préjudice financier ; qu’il convient d’accueillir le moyen présenté par M. X et d’infirmer le jugement entrepris, en ce qu’il a mis à la charge du requérant la somme de 9 472,13 € augmentée des intérêts de droit à compter du 28 mars 2014 ;
Attendu que conformément au paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et au décret du 10 décembre 2012 susvisés, la somme non rémissible maximale pouvant être mise à la charge de M. X est de 1,5 ‰ du montant du cautionnement du poste comptable ; que ce cautionnement était en 2011 de 234 000 euros ; qu’au cas d’espèce la somme non rémissible maximale pouvant être mise à la charge de M. X est de 351 euros ;
Attendu que M. X demande à la Cour de fixer cette somme a minima «
compte-tenu des moyens restreints dont je disposais pour remplir dans les meilleures conditions mes missions »
; que si la motivation de l’appelant pour limiter le montant de la somme non rémissible à mettre à sa charge est peu étayée, il y a lieu de prendre en compte aussi l’absence de gravité de ce manquement formel ;
Attendu qu’il sera dès lors fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en mettant à la charge de M. X, la somme non rémissible de 100 euros ;
Sur la charge n° 6
Attendu que par le jugement entrepris, la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur a constitué M. X débiteur du SME Europôle Arbois de la somme de 12 413,05 € augmentée des intérêts de droit à compter du 28 mars 2014 pour le versement à M
me
Y, collaboratrice de cabinet, d’une part, d’un salaire brut supérieur à celui autorisé et d’autre part, d’une prime de responsabilité, alors que l’emploi qu’elle occupait n’ouvrait pas droit à une telle prime ;
Sur le salaire brut et l’indemnité de résidence versés à Mme Y
Attendu que dans le jugement attaqué, la chambre a considéré que M. X avait versé un salaire brut et une indemnité de résidence à M
me
Y supérieurs aux sommes auxquelles elle pouvait prétendre ; que dans ce même jugement, la chambre a considéré que les versements au-delà des seuils réglementaires étaient indus et dès lors constitutifs d’un préjudice financier pour le syndicat mixte ;
Attendu que M. X conteste l’existence d’un manquement ; qu’il soutient que les versements de ses salaires bruts et des indemnités de résidence au profit de M
me
Y étaient conformes à la réglementation et aux délibérations du SME Europôle Arbois ;
Attendu que le cadre juridique relatif aux collaborateurs de cabinet est défini par le décret du 16 décembre 1987 susvisé, notamment son article 7 qui dispose entre autres que «
le traitement indiciaire ne peut en aucun cas être supérieur à 90 % du traitement correspondant soit à l’indice terminal de l’emploi administratif fonctionnel de direction le plus élevé de la collectivité ou de l’établissement occupé par un fonctionnaire, soit à l’indice terminal du grade administratif le plus élevé détenu par un fonctionnaire en activité dans la collectivité ou l’établissement
» ;
Attendu que les emplois fonctionnels sont listés à l’article 53 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; que ces emplois diffèrent des emplois de direction pouvant être pourvus par la voie du recrutement direct, listés à l’article 47 de la même loi ;
Attendu que le contrat d’engagement de M
me
Y ne mentionnait pas l’emploi de référence à retenir ;
Attendu qu’au moment des faits, l’unique emploi administratif fonctionnel du SME Europôle Arbois était occupé par M. Z, recruté en tant que contractuel ; que dès lors le salaire brut de M
me
Y devait être déterminé en référence à celui de l’indice terminal du grade administratif le plus élevé détenu par un fonctionnaire en activité dans la collectivité ou l’établissement ;
Attendu que dans le jugement entrepris, la chambre régionale a considéré que le fonctionnaire en activité au SME de l’Arbois détenant le grade administratif le plus élevé au moment des faits était M. B ; que ce point est contesté par le requérant ;
Attendu que M. X soutient que c’est M
me
A qui détenait le grade administratif le plus élevé au moment des faits ; que si cette dernière est fonctionnaire, elle a été recrutée par le syndicat mixte en tant que contractuelle ; que le comptable ne pouvait l’ignorer dans la mesure où la mention « Non titulaire – contractuel » était apposée sur les bulletins de paye successifs de M
me
A; que cette dernière était alors en position administrative de disponibilité au sens de l’article 55 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée et non de détachement comme le soutient le requérant ; qu’elle ne peut donc être considérée comme une fonctionnaire en activité, au sens du même article 55 ;
Attendu que le fonctionnaire en activité au SME Europôle Arbois détenant le grade administratif le plus élevé au moment des faits était M. B ; que c’est donc à bon droit que la chambre régionale des comptes a considéré que le salaire brut de M
me
Y devait être déterminé en fonction de celui de l’indice terminal du grade de M. B ; que le requérant ne peut donc valablement contester ce point ;
Attendu que les paiements au-delà des plafonds autorisés n’étaient prévus par aucun texte ; qu’ils sont dès lors indus ; qu’ils sont par conséquent constitutifs d’un préjudice financier pour le SME de l’Arbois ;
Sur la prime de responsabilité versée à M
me
Y
Attendu que dans le jugement entrepris, la chambre régionale a considéré que M
me
Y n’exerçait pas une fonction lui permettant de bénéficier d’une prime de responsabilité ; que selon elle, en versant au profit de M
me
Y cette prime, le comptable a manqué à ses obligations d’autant qu’il disposait de pièces contradictoires et que certaines pièces pourtant requises par la réglementation n’étaient pas jointes aux mandats ; que la même chambre a dès lors considéré que cette prime était indue et que, par conséquent, les versements étaient constitutifs d’un préjudice financier ;
Attendu que M. X conteste l’existence d’un manquement ; qu’il soutient que les versements des primes de responsabilité au profit de M
me
Y étaient conformes à la réglementation et aux délibérations du SME de l’Arbois ;
Attendu que conformément aux termes du décret du 6 mai 1988, le versement d’une prime de responsabilité est réservé aux agents publics dont les fonctions sont limitativement énumérées par ledit décret ; que M
me
Y n’exerçait pas de telles fonctions ;
Attendu que le requérant fait valoir que la délibération du 22 juin 2009 du SME de l’Arbois prévoit le versement d’une prime de responsabilité pour le collaborateur de cabinet et fixe son taux à 11 % du traitement brut ; qu’il soutient également qu’il ne peut se faire juge de la légalité ; que par conséquent en procédant auxdits versements, il n’a pas manqué à ses obligations ;
Attendu que, comme le relève le jugement entrepris, le contrat d’engagement de M
me
Y ne prévoit pas le versement d’une prime de responsabilité ;
Attendu que l’arrêté n° 2011-283 « portant attribution du régime indemnitaire à M
me
Y, collaborateur de cabinet » prévoit le versement à M
me
Y d’une prime de responsabilité à un taux de 9 % ; qu’aucune preuve de transmission au contrôle de légalité n’ayant été fournie par le comptable ou l’ordonnateur, l’arrêté n’a pas été rendu exécutoire ; qu’ainsi le comptable ne disposait pas au moment du paiement de la « décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination fixant le taux applicable à chaque agent », requise par l’annexe I à l’article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales pour le versement des primes ;
Attendu en conséquence qu’ outre le contrat d’engagement de M
me
Y qui ne prévoit pas le versement d’une prime de responsabilité, le requérant disposait au moment du paiement, de l’arrêté n° 2011-283 non exécutoire qui autorise le paiement à M
me
Y d’une prime de responsabilité à un taux de 9 % et de la délibération du 22 juin 2009 qui fixe ce taux à 11 % ; que ces pièces sont contradictoires entre elles ;
Attendu qu’en procédant aux paiements alors qu’il ne disposait pas des pièces requises mais de pièces contradictoires, le comptable a bien manqué à ses obligations de contrôle telles que résultant des articles 12, 13 et 37 du décret du 29 décembre 1962 comme le relève le jugement entrepris ; que M. X n’est donc pas fondé à contester ce manquement ;
Attendu que selon le jugement de la chambre régionale, le manquement de M. X a entraîné un préjudice financier pour l’établissement ; que, dans sa requête, M. X soutient qu’ « il était en présence d’un contrat d’engagement du collaborateur de cabinet exécutoire et d’une délibération elle-même exécutoire précisant le régime indemnitaire et de prime et qu’il n’y avait pas lieu d’exercer de plus amples investigations, sauf à intervenir dans le contrôle de légalité » ;
Attendu que le comptable n’est pas le juge de la légalité des pièces qui lui sont produites ; que le requérant, comme il le fait valoir, n’était donc pas tenu de s’assurer de la conformité d’une délibération exécutoire avec des textes législatifs ou réglementaires, sauf à opérer un contrôle de légalité ;
Attendu que le VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé dispose que «
La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue au I est mise en jeu par (…) le juge des comptes dans les conditions qui suivent.
(…)
Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I n’a pas causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l’espèce. Le montant maximal de cette somme est fixé par décret en Conseil d’Etat en fonction du niveau des garanties mentionnées au II. Lorsque le manquement du comptable aux obligations mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné
(…),
le comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante
. »
Attendu que le taux de la prime de responsabilité versé à M
me
Y est inférieur au taux fixé par la délibération exécutoire du 22 juin 2009, qui exprime la volonté de l’établissement ; qu’il n’a donc pas occasionné de préjudice financier pour le SME Europôle Arbois ; qu’il convient donc, en application de l’article 60-VI de la loi du 23 février 1963 précité, d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a considéré que le manquement de M. X avait causé un préjudice financier pour le syndicat mixte et qu’il a constitué M. X en débet du montant de la prime de responsabilité perçue par M
me
Y en 2011 et 2012 ;
Sur les conséquences de ce qui précède
Attendu que le jugement attaqué a constitué M. X en débet d’une somme globale de 12 413,05 € pour les deux branches de la charge n° 6, portant sur le versement, d’une part, d’un salaire brut supérieur à celui autorisé et, d’autre part, d’une prime de responsabilité indue ;
Attendu qu’en raison de l’effet dévolutif de l’appel, il y a lieu, statuant au fond sur la présomption de charge n° 6 du réquisitoire du procureur financier près la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur, de réviser le montant du débet fixé par les premiers juges, et de mettre à la charge de M. X une somme irrémissible pour le manquement relatif à la prime de responsabilité ;
Sur le montant du débet
Attendu que le salaire mensuel brut maximal pouvant être versé à M
me
Y était, comme le relève le réquisitoire précité du procureur financier près la chambre régionale des comptes du 19 mars 2014 (page 12), de 2 742,06 € ; que ce montant n’est pas celui retenu dans le jugement attaqué, soit 3 046,74 € ; que la chambre régionale a en effet adopté à tort comme base de calcul du salaire brut maximal de M
me
Y non pas 90 % du traitement correspondant à l’indice terminal du grade de M. B, mais 100 % ; que, dans la mesure où l’indemnité de résidence est fixée en fonction du salaire brut, le montant maximal de cette dernière est également erroné dans le jugement ;
Attendu que s’il convient de soustraire du montant du débet prononcé par les premiers juges, le montant de la prime de responsabilité, il y aurait lieu également de revoir le calcul de cette dernière fixé à 9 % du traitement brut de M
me
Y, dans la mesure où les versements de primes effectués à son profit en 2011 et 2012 reposaient sur un indice de salaire maximal erroné ; que toutefois, en l’absence de préjudice financier à ce titre, le manquement de M. X donnera lieu, comme indiqué ci-dessus, à la fixation d’une somme irrémissible, sans révision du montant de prime versé ;
Attendu que le tableau suivant retrace le calcul des sommes indûment versées à M
me
Y, soit 12 802,23 € :
Versements au profit de Mme Y entre janvier 2011 et décembre 2012 (euros)
Versements maximaux autorisés (euros)
Sommes indues
Salaire brut
Indemnité de résidence
Total
Salaire brut
Indemnité de résidence
Total
Par mois pour la période janvier 2011-août 2012
3 264,35
97,93
3 656,07
2 742,06
82,26
3 118,11
537,96
Soit pour 20 mois
65 287
1 958,6
73 121,4
54 841,2
1 645,2
62 362,2
10 759,2
sept-12
3 155,54
97,93
3 534,2
2 742,06
82,26
3 105,05
429,15
Par mois d’octobre à décembre 2012
3 264,35
97,93
3 656,07
2 742,06
82,26
3 118,11
537,96
Soit pour 3 mois
9 793,05
293,79
10 968,21
8 226,18
246,78
9 354,33
1 613,88
Total janvier 2011 – décembre 2012
78 235,59
2 350,32
87 623,81
65 809,44
1 974,24
74 821,58
12 802,23
Attendu que le montant du débet, ainsi recalculé soit 12 802,23 €, pour les sommes indûment versées au titre du salaire brut et de l’indemnité de résidence de M
me
Y, aggraverait, comme le relève aussi le Parquet Général dans ses conclusions, le montant du débet fixé par les premiers juges pour la rémunération indue, principale et accessoire de cette dernière, soit 12 413,05 € ; qu’en l’absence de recours du ministère public, le juge d’appel ne saurait aggraver la situation du comptable appelant ;
Attendu qu’il convient en conséquence de constituer M. X en débet pour la somme de 12 413,05 €, au titre de la rémunération principale indue versée à M
me
Y et corrélativement, au titre des montants erronés d’indemnités de résidence calculés sur la base de ce traitement principal ;
Sur la fixation d’une somme irrémissible
Attendu que conformément au paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 et au décret du 10 décembre 2012 susvisés, la somme irrémissible maximale pouvant être mise à la charge de M. X est de 1,5 ‰ du montant du cautionnement du poste comptable ; que ce cautionnement était en 2011 et 2012 de 234 000 euros ; qu’au cas d’espèce la somme irrémissible maximale pouvant être mise à la charge de M. X est de 351 euros par exercice ;
Attendu que, quel que soit le montant de la somme irrémissible mise à la charge de M. X, il aggraverait sa situation au-delà de ce qui a été jugé en première instance ; qu’il n’y a pas lieu, en conséquence, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de M. X une somme irrémissible ;
Par ces motifs,
DECIDE :
Article 1er
– La requête est rejetée, en ce qui concerne la charge n° 2 ;
Article
2 – Le jugement n° 2014-0109 du 3 décembre 2014 est infirmé en ce qu’il a constitué M. X débiteur du SME Europôle Arbois à hauteur de la somme de 9 472,13 euros augmentée des intérêts de droit à compter du 28 mars 2014 (charge n° 3) ;
Article 3
– Il est mis à la charge de M. X une somme irrémissible de 100 euros au titre de l’exercice 2011 (charge n° 3) ;
Article 4
– Le jugement n° 2014-0109 du 3 décembre 2014 est infirmé en ce qu’il a constitué M. X débiteur du SME de l’Arbois à hauteur de la somme de 12 413,05 euros augmentée des intérêts de droit à compter du 28 mars 2014 (charge n° 6 : versement du traitement principal, de l’indemnité de résidence et de la prime de responsabilité) ;
Article 5
– M. X est constitué débiteur envers le SME Europôle Arbois de la somme de 12 413,05 euros augmentée des intérêts de droit à compter du 28 mars 2014 (charge n° 6, versement du traitement principal et de l’indemnité de résidence).
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Fait et jugé en la Cour des comptes, quatrième chambre, première section. Présents : M. Jean-Philippe VACHIA, président de chambre, président de séance ; M. Yves Rolland, président de section, M
me
Anne FROMENT-MEURICE, présidente de chambre maintenue en activité, MM. Gérard GANSER, Jean-Pierre LAFAURE, Jean-Yves BERTUCCI, conseillers maîtres, M
mes
Laurence ENGEL et Isabelle LATOURNARIE-WILLEMS, conseillères maitres.
En présence de M
me
Annie LE BARON, greffière de séance.
Annie LE BARON
Jean-Philippe VACHIA
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142-16 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au paragraphe I de l’article R. 142-15 du même code.